
Cinq anciens combattants algériens ayant pris part à la seconde Guerre mondiale, ont été décorés dimanche soir par le secrétaire d’État français, chargé des Anciens combattants et de la Mémoire.
La cérémonie s’est déroulée à la résidence de l’ambassadeur de France, en présence de quelques parlementaires algériens. Dans son discours, M. Todeschini a mis l’accent sur la symbolique de sa visite en Algérie, à la veille de la célébration des massacres du 8 Mai 1945. Une visite, qui constitue une première française, notamment avec le déplacement du secrétaire d’État français à Sétif et son recueillement devant le mausolée dédié à Sâal Bouzid, première victime tombée le 8 Mai 1945.
Un “geste d’apaisement”, expliquera-t-il, mais point de repentance. Le secrétaire d’État français rappellera que c’est dans “un lieu chargé d’histoire que je vous parle aujourd’hui. Car c’est ici que vivaient, il y a 70 ans, le général de Gaulle et sa famille, lorsque le Comité français de libération nationale siégeait à Alger”. Son déplacement à Sétif constitue “un geste sans précédent pour un membre du gouvernement français. C’est un geste d’apaisement et d’amitié que nous avons voulu accomplir en direction de nos amis algériens”. Mais, en termes de gestes, le secrétaire d’État français n’aura pas été avare, puisqu’il a fait le déplacement à Oran pour visiter les nécropoles de Mers El-Kebir et du Petit-Lac, “où reposent plus de
11 000 de nos soldats ou marins tombés en Algérie au service de la France. La nation leur rend hommage. Cet hommage s’adresse aussi à nos compatriotes victimes des débordements tragiques qui ont eu lieu à Oran le 5 juillet 1962”. M. Todeschini ne dérogera pas au discours officiel français s’agissant de l’histoire douloureuse commune. Il rappellera que “le 8 Mai 1945, la République célébrait la victoire totale contre le nazisme. La France acclamait ses libérateurs en héros et célébrait la paix enfin retrouvée. Au même moment, pourtant, ici en Algérie, la France manquait aux idéaux qui n’avaient cessé de l’animer”. Et de rappeler les propos employés par le président français en décembre 2012 : “À Sétif, le 8 Mai 1945, le jour même où le monde triomphait de la barbarie, la France manquait à ses valeurs universelles.”
Pour le secrétaire d’État français : “Ces pages noires font aussi partie de notre histoire ; elles nous obligent à la lucidité sans laquelle il n’y a pas d’avenir commun possible.”
Mais c’est surtout pour rendre hommage aux soldats algériens qui ont combattu sous le drapeau français durant la Première et la Seconde Guerres mondiales que M. Todeschini a fait le déplacement en Algérie.
175 000 soldats algériens ont pris part à la Première Guerre, parmi eux 26 000 sont morts ou disparus. 150 000 autres soldats algériens ont pris part à la Seconde Guerre mondiale.
La cérémonie de décoration de cinq anciens combattants constitue un hommage à tous les soldats d’Afrique du Nord et des anciennes colonies françaises “venus rendre à la France son honneur et sa fierté, et à l’Europe sa liberté”.
DES VÉTÉRANS ALGÉRIENS DE LA SECONDE GUERRE MONDIALE DÉCORÉS
La France soigne ses combattants
Evoquant sa visite à Sétif pour se recueillir sur la tombe du premier martyr des massacres du 8 mai 1945, M.Todeschini a insisté: «J'ai tenu à ce que ce soit mon premier geste sur cette terre d'Algérie. Un geste sans précédent pour un membre du gouvernement français. C'est un geste d'apaisement et d'amitié que nous avons voulu accomplir en direction de nos amis algériens. Et je suis heureux que ce geste ait été compris.»
Le rapport entre les sacrifices de 26.000 Algériens morts pour la France sur les 175.000 mobilisés pendant la Première Guerre mondiale, les 150.000 recrues qui ont combattu le nazisme de 1939 à 1945, et la terrible tuerie commise à Sétif, Guelma et Kherrata, le jour même où l'Europe se libérait du joug fasciste était difficile à faire. Mais il faut reconnaître que le secrétaire d'Etat français a eu le courage de le mettre en lumière. «Le 8 mai 1945, la République célébrait la victoire totale contre le nazisme. La France acclamait ses libérateurs en héros et célébrait la paix enfin retrouvée. Au même moment, pourtant, ici en Algérie, la France manquait aux idéaux qui n'avaient cessé de l'animer.» Même si les mots n'exprimaient pas toute l'horreur des massacres, ils en suggéraient l'ampleur.
Cela ne suffira sans doute pas à panser toutes les plaies, mais l'on sentait bien dans cette belle villa à l'architecture ottomane, que des liens plus sincères se sont tissés entre Algériens et Français. Des liens que personnifient peut-être Kaddour Sadok, Mohamed Ighilagha, Ziane Zeguir, Mohamed Djemai et Abdallah Amari. Des hommes qui ont contribué à la libération de la France et qui vivent dans leur pays, l'Algérie, avec le sentiment du devoir accompli.
Dans les regards de ces vieux hommes, l'on pouvait lire le sens de l'engagement pour une cause et le sentiment de la fraternité des champs de bataille. Abdellah Amari, né en 1919, a été de toutes les campagnes. Il en garde son sens de l'amitié et de la valeur d'une vie humaine. «Mon premier souci était de sauver mes hommes et tous ceux que je trouvais sur mon chemin».
Cet homme qui a traversé la Seconde Guerre mondiale de bout en bout, jusqu'aux combats de rues dans Paris, ne garde en mémoire ni «la grandeur de la France», ni ses multiples décorations, dont une reçue des mains du général Leclerc. Sa grande fierté, il la résume en une phrase: «J'ai sauvé beaucoup de vies.» En fait, un soldat sert aussi à cela.
SOURCE : http://www.lexpressiondz.com/actualite/214787-la-france-soigne-ses-combattants.html
A. B.