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Par micheldandelot1 le 21 Septembre 2023 à 09:04
PAIX ET DESARMEMENT, NÎMES-SQUARE
(Lettre de Roland Nivet, au Président de la République, au nom du Mouvement de la Paix)
Monsieur Le Président,
Je m’adresse à vous solennellement aujourd’hui, au nom du Mouvement de la Paix, concernant l’accélération de la dégradation de la situation internationale et les dangers que fait courir à l’humanité entière l’absence de véritables initiatives diplomatiques coordonnées pour mettre fin à la guerre en Ukraine et dans l’urgence stopper immédiatement l’utilisation d’armes à sous-munitions dans ce conflit.
Depuis le début de cette guerre le Mouvement de la paix en tant que tel, mais aussi en tant qu’animateur du collectif national des marches pour la paix fort de plus de 200 organisations, a condamné fermement l’agression de la Russie contre l’Ukraine en s’appuyant en particulier sur l’article 2 de la Charte des Nations Unies.
Dans le même temps, nous avons été conscients que l’article 51 de la Charte des Nations Unies donne le droit à un Etat agressé de se défendre. Cependant dès le départ nous avons attiré l’attention sur la deuxième partie de l’article 51 qui fait obligation au conseil de sécurité et à la communauté internationale rassemblée au sein des Nations Unies d’unir ses efforts pour trouver une solution politique par tous les moyens diplomatiques et pacifiques dans le respect de la Charte et en particulier de l’article 33 qui oblige les Etats membres à rechercher des solutions diplomatiques aux conflits.
Force est de constater comme l’ont fait les Mouvements de paix de 50 pays réunis à Vienne en juin 2023 que la communauté internationale a failli à ses obligations pour ce qui concerne sa mobilisation pour une solution politique.
La diplomatie est en panne mais la marche de la guerre s’emballe avec son cortège de victimes, de morts, de destructions en particulier pour le peuple ukrainien.
Le risque d’une extension mondiale du conflit, voire l’utilisation d’armes nucléaires par erreur ou par volonté s’accroît.
Les propos de certains dirigeants russes sont extrêmement inquiétants à cet égard.
Dans ce contexte il y a quelques jours l’opinion publique internationale a appris avec effroi que le président des États-Unis avait décidé d’écouler ses stocks d’armes à sous-munitions en les envoyant en Ukraine au mépris du droit international et de l’accord d’Oslo sur l’interdiction de ces armes, même si les USA, comme la Russie et l’Ukraine ne les ont pas signés.
Nous nous adressons à vous solennellement en tant que Président de la République d’un État qui a signé la convention d’Oslo sur les armes à sous-munitions, ce qui honore notre pays et dont nous nous réjouissons.
Cette signature nous oblige en tant qu’Etat à veiller au respect de ce traité.
C’est pourquoi nous vous demandons 4 types d’actions :
La mise en œuvre d’actes forts de vous-même en tant que Président de la République française mais aussi par tous les moyens à votre disposition à travers nos représentations diplomatiques dans les différents Etats ou via l’action de nos différents ministères mais également en tant que membre permanent du conseil de sécurité et de différentes institutions internationales, pour obtenir l’arrêt immédiat des livraisons d’armes à sous-munitions à l’Ukraine par les USA et l’arrêt de l’utilisation de ces armes par la Russie et l’Ukraine.
Une intervention positive de la France en faveur du désarmement nucléaire à Vienne, dans le cadre du premier Comité préparatoire de la onzième Conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) qui se tient à l’ONU à Vienne du 31 juillet au 11 août 2023 et à laquelle de nombreuses ONG dont le Mouvement de la Paix participent à titre consultatif. Après l’échec de la dixième Conférence d’examen du TNP en août 2022, un nouveau cycle s’enclenche pour la 11ème Conférence d’examen prévue en 2026 à l’ONU à New York. C’est le moment de faire des propositions novatrices comme un appel à un moratoire par les 9 états possédant des armes nucléaires sur les modernisations des armes nucléaires engagées par ces 9 Etats. Ce serait une façon d’avancer dans la mise en œuvre de l’article 6 du TNP qui dispose que tous les Etats signataires du TNP (donc la France) s’engagent « à poursuivre de bonne foi des négociations sur des mesures efficaces relatives à la cessation de la course aux armements nucléaires à une date rapprochée et au désarmement nucléaire, et sur un traité de désarmement général et complet sous un contrôle international strict et efficace. »
L’annonce par la France à tous les Etats du monde que la France cesse de boycotter la conférence des Etats parties au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN) qui se réunira fin novembre 2023 à New York.
Une intervention forte et constructive de la France à la prochaine assemblée générale des Nations Unies qui va se réunir à New York début septembre. A nos yeux cette AG représente le moment privilégié dans la situation internationale actuelle pour des initiatives fortes en faveur d’un cessez-le-feu, pour des raisons humanitaires évidentes, et pour solution diplomatique et la Paix en Ukraine.
Nous vous remercions, Monsieur le Président de la République de l’attention que vous porterez à nos demandes et vous remercions de nous faire part des réponses qu’appellent de votre part nos propositions.
Je vous présente Monsieur le Président République l’expression de mes sentiments respectueux au nom du Mouvement de la Paix.
Roland Nivet
Porte-parole national du Mouvement de la Paix
Membre à titre consultatif de la commission Ecosoc de l’Onu
27 juillet 2023
A 19h., au Cercle de l'Avenir, Nîmes-25 bis, rue Nicot, rencontre avec Yves-Jean GALLAS, du bureau national du Mouvement de la Paix et Vadim KAMENKA, journaliste à l'Humanité.
Roland Nivet et des militants du Mouvement de la Paix, lors d'un rassemblement pour la ratification du traité sur l'interdiction des armes nucléaires, à Rennes le 9 août 2021. • © Roland Nivet
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Par micheldandelot1 le 21 Septembre 2023 à 08:13
La mort de Maurice Audin : encore
une question posée
par un podcast de France inter
Un article de Gilles Manceron
Les efforts pour faire connaître les crimes coloniaux dont ceux de la guerre d'Algérie se multiplient. France inter, France culture y prennent une part qui doit être saluée. Il n'empêche que des podcasts de France inter laissent des questions en suspend, comme sur le rôle de Jean-Marie Le Pen dans la pratique de la torture ou sur les raisons de l'assassinat de Maurice Audin.
Les efforts pour faire connaître la vérité sur les crimes commis par les armées françaises pendant les guerres coloniales et en particulier lors de la guerre d'Algérie se multiplient, en particulier dans les recherches universitaires, l'édition, une partie de la presse et les émissions des radios du service public, notamment France inter et France culture qui proposent des podcasts historiques de qualité. Mais certains podcasts récents de France inter comportent des éléments problématiques ou laissent des questions importantes en suspend.
C'est le cas tout particulièrement de l'un d'eux sur le rôle de Jean-Marie Le Pen dans la pratique de la torture à Alger dans les premiers mois de 1957 et aussi, différemment, d'un autre sur les raisons de l'assassinat de Maurice Audin, probablement le 21 juin, lors de cette grande répression qui a été appelée la « Bataille d’Alger ».
La mise au point de Mediapart sur Le Pen tortionnaire
en Algérie
Comme l'a expliqué Fabrice Riceputi dans Mediapart et comme cet historien le développe dans son livre, Le Pen et la torture. Alger 1957, l'histoire contre l'oubli, à paraître en janvier 2024 et édité par Mediapart/Le passager clandestin, un épisode du podcast utile que France inter a consacré, le 27 février 2023, au parcours du fondateur du Front national, Jean-Marie Le Pen, comporte une erreur sur la question de sa présence à Alger, avec le grade de lieutenant et le statut d'« officier de renseignement », lors du premier trimestre de 1957.
Un faisceau de documents et de témoignages recueillis attestent de sa présence alors à Alger et de sa pratique de la torture de manière particulièrement violente et incontrôlée, au point d'inquiéter les autorités civiles et militaires d'Alger pourtant acquises à la répression et au point probablement d'accélérer son retour en France. Ce podcast ignore ces faits et semble même les écarter comme peu probables. C'est une question importante car l'extrême droite française qui s'enracine fortement dans l'éloge de la colonisation et du rôle des jusqu'au-boutistes de l'Algérie française, tels les chefs des terroristes de l'OAS, se fonde sur un récit tronqué et falsifié de l'histoire, et la déconstruction de son discours est un enjeu majeur dans la France d'aujourd'hui. La mise au point laconique effectuée par la chaîne après la diffusion de ce podcast n'est pas satisfaisante, France inter doit, après enquête, produire un rectificatif clair.
La question de l'assassinat de Maurice Audin
Un autre podcast a été diffusé par France inter le 18 septembre 2023 intitulé « Le cas Maurice Audin et la torture en Algérie » dans le cadre de l'émission de Fabrice Drouelle « Affaires sensibles ». Il restitue avec précision les faits et résume bien les circonstances dans lesquelles ce jeune mathématicien d'origine européenne, membre du parti communiste algérien (PCA), a été arrêté par des parachutistes français le 11 juin 1957 à son domicile d'Alger et n'est pas sorti vivant de sa détention entre leurs mains. Il explique qu'après sa mort, probablement le 21 juin, l'armée a inventé la fable de son « évasion » à laquelle sa jeune épouse, Josette, n'a jamais cru, et il fait état de l'information officieuse diffusée ensuite quand ce mensonge de la pseudo-évasion a volé en éclat, selon laquelle il serait mort, sans intention ni ordre de le tuer, lors d'une séance de torture. Contrairement à Pierre Vidal-Naquet qui l'a accréditée au sein du Comité Audin qu'il avait contribué à créer de 1957 à 1963, Josette Audin est restée sceptique devant ce nouveau récit (1).
Dans les commentaires pertinents apportés dans ce podcast par l'historienne spécialiste de cette période, Sylvie Thénault, directrice de recherches au CNRS, qui a co-dirigé récemment un Dictionnaire de la guerre d'Algérie, une phrase mérite réflexion à propos de la reconnaissance par Emmanuel Macron, lors de sa visite à Josette Audin le 13 septembre 2018, de l'assassinat de son mari par les militaires qui le détenaient. Elle rappelle que le PCA avait été dissous par les autorités en septembre 1955 en raison de sa décision de participer à la guerre d'indépendance algérienne. Et aussi que Maurice Audin n'appartenait pas à son organisation militaire, les Combattants de la Libération (CDL), chargée de fabriquer des bombes et de commettre, dans le cadre de cette guerre, des attentats et des homicides strictement ciblés.
Mais Maurice Audin était membre du PCA, dont la direction l'avait assigné à un travail politique à l'Université d'Alger et auprès des intellectuels français, et il était informé de l'orientation générale du parti qui avait été dissout parce que sa direction avait choisi de rejoindre la guerre d'indépendance lancée par le FLN, y compris en lui fournissant des armes comme lors de l'« Opération Maillot » (2). C'était son parti et il en partageait les choix. En revanche, comme le dit Sylvie Thénault dans ce podcast, il y avait une « ambiguïté à la direction du PCF sur le sort de l'Algérie », c'est-à-dire sur la question de sa guerre d'indépendance lancée le 1er novembre 1954, et les choix du PCF étaient différents – du moins pour ce qui était de sa direction – de ceux du PCA (3).
C'est là qu'il y a dans ce podcast une phrase qui mérite attention à propos du positionnement d'Emmanuel Macron. L'historienne déclare « qu'un président de la République n'aurait jamais pris le risque de reconnaître la responsabilité de l'Etat si jamais quelqu'un avait pu poser une bombe ». Et elle continue sa phrase en ajoutant : « ou participer à un groupe qui en posait ». Or Maurice Audin n'a certes jamais posé de bombe ni participé à une action militaire dans le cadre de cette guerre d'indépendance. Mais il participait à une formation politique qui en posait et qui y participait. Il est considéré en Algérie comme un chahid, comme quelqu'un qui a payé de sa vie son engagement dans le combat pour l'indépendance du pays.
Un meurtre « pour l'exemple » ?
En dépit des déclarations importantes du président Macron en septembre 2018, tout n'a pas été dit sur la mort de Maurice Audin. La question se pose de savoir si l'assassinat de Maurice Audin a été ordonné pour « servir d'exemple » (4) par ceux qui exerçaient le pouvoir à Alger – les généraux Raoul Salan et Jacques Massu et le ministre résidant Robert Lacoste, d'autant qu'en juin 1957, la France, en raison de la chute du ministère Guy Mollet le 10 mai 1957 connaissait une vacance de gouvernement qui a duré jusqu'au milieu du mois de juin – , comme un avertissement à l'égard du PCA pour l'inciter à ne pas continuer son combat, politique et militaire, en faveur de l'indépendance de l'Algérie. La question n'est pas posée dans ce podcast. Or elle reste posée aux historiens et aux citoyens. Emmanuel Macron n'a pas tout dit en septembre 2018. Aucune preuve d'un ordre donné de commettre cet assassinat n'a été retrouvée à ce jour. Seuls des témoignages, pas toujours fiables, ont été livrés (5). Des indices se trouvent peut-être dans les écrits de certains officiers (6). Emmanuel Macron pourrait leur demander de parler afin d'éclairer le pays sur cette question sur laquelle les choses n'ont pas été dites jusqu'au bout par les plus hautes autorités.
La version selon laquelle Maurice Audin serait mort lors d'une séance de torture, sans intention, ni ordre de le tuer, est la seule qui est reprise dans ce podcast. Or la question se pose de savoir si cette version, au moment où la fable de son « évasion » avait perdu toute crédibilité, a été inventée par ceux qui détenaient le pouvoir à Alger pour éviter de reconnaître qu'ils avaient pris l'initiative d'un assassinat « pour l'exemple ».
Derrière cette question historique non résolue gît celle, plus fondamentale, de savoir si on peut et si on doit faire œuvre de vérité et de justice à l'égard de ceux qui ont pris les armes dans cette cette guerre d'indépendance nationale ou qui ont soutenu ceux qui les prenaient, et même leur rendre hommage, à ces femmes et ces hommes qui ont embrassé la cause légitime de l'indépendance algérienne, dont faisaient partie les communistes du PCA. Ou bien si, comme semble le dire le président de la République Emmanuel Macron, il faut, plus de soixante ans après, rejeter dos à dos toutes les parties de ce conflit et chercher une vaste «réconciliation de toutes les mémoires».
Cette petite phrase de ce podcast de France inter met à jour les limites de l'œuvre à laquelle le président de la République Emmanuel Macron, après ses déclarations courageuses en 2017 à la veille de son élection (7), affirme désormais vouloir s'atteler.
Faire la vérité sur le combat de Maurice Audin et lui rendre hommage, demander comme le font, à Perpignan et à Toulouse, des collectifs de citoyens, la nomination de rues, d'écoles ou de parvis « Josette et Maurice Audin » est un enjeu essentiel dans la lutte contre l'extrême droite dans la France d'aujourd'hui.
(1) Charles Silvestre, Gilles Manceron, Pierre Audin, La vérité est en marche, rien ne l'arrêtera, éditions de l'Humanité, 2022, p. 131.
(2) L'Opération Maillot est l’opération de détournement d’armes de l’armée française au profit de l’ALN et des CDL organisée le 4 avril 1956 par la direction du PCA, en particulier Bachir Hadj Ali et Sadek Hadjerès qui en a fait le récit, qui a favorisé l’armement des CDL et permis au PCA d’entamer des discussions pour rejoindre le FLN. Henri Maillot, membre du PCA et appelé affecté à une compagnie du train, a amené le GMC rempli d’armes qu’il était chargé de convoyer à une équipe de militants du PCA/CDL, composé de Jean Farrugia, Joseph Grau, Clément Oculi et trois autres hommes. Le 8 avril, un communiqué du PCA/CDL a annoncé la réussite de l’opération (saisie de 132 mitraillettes, 140 revolvers, 57 fusils, un lot de grenades) et qu’Henri Maillot avait rejoint la résistance armée.
(3) Dans le podcast de France inter intitulé « Fernand Iveton guillotiné pour l'exemple » dans le cadre de l'émission de Fabrice Drouelle « Affaires sensibles » le 18 mai 2023, l'historien Alain Ruscio explique bien cette différence d'orientation entre le PCA et le PCF.
(4) Jean-Luc Einaudi a intitulé son livre consacré à Fernand Iveton, guillotiné le 11 février 1957 alors qu'il n'avait tué personne, Pour l'exemple, l'affaire Fernand Iveton. Enquête, L'Harmattan, 1986. Les mots « pour l'exemple » s'appliquent-ils aussi à l'assassinat de Maurice Audin ?
(5) Le livre, La vérité sur la mort de Maurice Audin, Jean-Charles Deniau, Equateurs, 2014, fait état des confidences du général Aussaresses peu avant sa mort disant qu'un ordre d'assassiner Audin lui avait été donné par le généal Massu. La fiabilité de cette déclaration a été mise en cause. France culture a publié le 8 janvier 2023 un podcast remarquable sur Paul Aussaresses. L'Humanité a publié le 11 septembre 2018 le témoignage d'un militaire confirmant l'existence d'une équipe de tueurs à qui Massu donnait l'ordre de pratiquer des disparitions forcées.
(6) L'ouvrage cité, La vérité est en marche, p. 132., cite cette phrase du général Maurice Schmidt, lieutenant à l'époque dans une unité pratiquant la torture sous les ordres du général Massu, dans son livre Alger-été 1957. Une victoire sur le terrorisme : « Il est clair que Boumendjel, Maurice Audin et Larbi Ben M'hidi auraient dû être traduits devant un tribunal ». Ce qui, comme Boumendjel et Ben M'hidi ont été tués sans jugement, veut peut-être dire que Maurice Audin a aussi été l'objet d'une décision identique. Le président de la République pourrait le lui demander.
(7) François Gèze et Gilles Manceron, « Regardons en face le passé colonial de la France », Le Monde, 18 février 2017.
Série Le Pen en Algérie : lutter contre l’oubli
Jean-Marie Le Pen, fondateur du Front national devenu Rassemblement national, a d’abord revendiqué d’avoir pratiqué la torture avant de faire volte-face. Alors qu’un certain négationnisme se fait jour, Mediapart revient sur les trois mois du lieutenant d’extrême droite à Alger, en 1957, et rassemble des témoignages jusque-là épars.
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Par micheldandelot1 le 20 Septembre 2023 à 21:16
Avec le témoignage d'Henri Pouillot
Henri Pouillot : « Je suis retourné à Alger, "en pélerinage", à la Villa Susini. Cette photo où je retrouve Louisette IGHILAHRIZ, a été prise à cette occasion"
Viols pendant la guerre d'Algérie
un scandale occulté • FRANCE 24
Il y a soixante-et-un ans, l'Algérie prenait son indépendance. Si beaucoup d'ouvrages et de documentaires ont été réalisés sur la guerre d'Algérie, très peu ont abordé la question du viol. Honte des anciens soldats de l'armée française, censure ou auto-censure des femmes en Algérie, Florence Gaillard de France 24 a mené l'enquête sur ce sujet tabou.
Henri Pouillot : "J'avais 20 ans quand on torturait
dans la villa Susini"
L'appelé Henri Pouillot a été affecté dans cette villa pour effectuer la fin de son service militaire, pendant la guerre d'Algérie, de juin 1961 à mars 1962. Il décrit son expérience dans un livre intitulé La Villa Sésini, et dans un autre intitulé Mon combat contre la torture. La villa a été construite par Me Alexandre Sésini, notaire à la rue Bab Azzoun à Alger. En 1926, la ville d'Alger l'a classée comme monument naturel. En 1927, le consulat d'Allemagne s'y installe. Elle abrita après l'indépendance durant un temps le siège du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés. Par arrêté du ministre algérien de la Culture en date du 28 avril 2016, la villa est classée sur la liste des biens culturels protégés.
Né en 1938 en Sologne (Loiret), Henri Pouillot est jeune appelé, pendant la Guerre d’Algérie. Affecté de juin 1961 à mars 1962 à la Villa Susini à Alger., il est témoin de la torture - Auteur de 2 livres témoignages sur cette période. Auteur d’un livre fiction "Hamed, Sale fils de Français", parti d’un fait concret, dramatique. Militant des droits de l’homme, antiraciste et anticolonialiste, il raconte "son Algérie à lui". Entretien réalisé par Samia Arhab.
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Par micheldandelot1 le 20 Septembre 2023 à 08:45
FRANCE-ALGÉRIE, DEUX SIÈCLES
D’HISTOIRE
Illustration : Saint-Eugène (Bologhine), 14 mars 1957. Des parachutistes français du 3e régiment de parachutistes coloniaux du colonel Marcel Bigeard « interrogent » Omar Merouane, dit "Le Mince", membre du groupe de choc de Zghara, porté disparu (Jacques Grévin/AFP).
La disparition forcée, arme de guerre
de l’armée française durant
la « bataille d’Alger »
Le crime de disparition forcée a été massivement employé dans les dictatures latino-américaines dans les années 1970 et 1980. Durant la guerre d’indépendance algérienne, il avait été l’arme privilégiée de la guerre « antisubversive » menée à Alger par l’armée française contre la population algérienne.
Durant la longue guerre menée par le Front de libération nationale (FLN) pour obtenir l’indépendance de l’Algérie (1954-1962), l’administration coloniale française ne cessa jamais de fonctionner. Ainsi, tout au long de l’année 1957, la préfecture d’Alger adressa chaque semaine au général Jacques Massu des liasses de singuliers documents. Un formulaire indiquait les nom, prénom, âge, adresse et profession d’une personne, la date et les circonstances de son « arrestation » par des militaires et enfin le nom d’un membre de sa famille, « à prévenir en cas de découverte ». En une année, 2 039 de ces étranges avis de recherche furent émis par la préfecture, dans l’attente de réponses de l’armée sur le sort de l’intéressé. L’attente fut souvent vaine. Le dénommé Rambaud, responsable du service compétent, le déplorait dans une note interne : dans 70 % des cas, l’armée n’avait pas répondu ou bien ses réponses se révélaient « non valables » ou « insatisfaisantes ». « Il ne m’a pas été possible depuis longtemps de faire simplement connaître à un seul avocat si le client auquel il s’intéresse est mort ou en vie », écrivait-il.
Conservée aux Archives nationales d’outre-mer (ANOM), une partie ce fichier de « détenus-disparus » signalés par leurs familles en 1957 est le point de départ du projet historiographique Mille Autres, mené par Malika Rahal et Fabrice Riceputi. Elle a été mise en ligne sur un site dédié, avec un appel à témoignage en arabe et en français, interrogeant les proches et descendants des personnes enlevées par les militaires, qu’elles aient été ensuite libérées ou qu’elles aient disparu définitivement. Au-delà de cette information, les familles racontent aussi, dans leurs nombreuses réponses, les circonstances d’enlèvement par les militaires, leurs stratégies de résistance à la terreur, leurs démarches de recherche et leur vécu, depuis lors, de la disparition souvent définitive d’un parent.
S’appuyant sur ces témoignages de familles algériennes très peu sollicitées jusqu’ici par les historiens français, ainsi que sur diverses archives coloniales, le projet Mille Autres permet aussi de renouveler l’histoire de la séquence historique baptisée « bataille d’Alger », en rompant avec un point de vue encore largement dominant, y compris dans les livres d’histoire : celui des acteurs militaires de l’époque.
1000autres.org/
ÉRADIQUER LE NATIONALISME À ALGER
Le 7 janvier 1957, carte blanche est donnée par le gouvernement de Guy Mollet au général Massu pour rétablir l’ordre colonial à Alger. Celui-ci y est en effet gravement menacé par une augmentation depuis l’automne 1956 de l’activité dite « rebelle » — des actions de guérilla urbaine et des attentats —, et surtout, à cette date, par la perspective politiquement cauchemardesque pour les autorités françaises d’une grève anticoloniale de huit jours, par laquelle le FLN peut démontrer qu’il dispose d’une implantation de masse.
L’armée dont la mission était jusqu’alors principalement d’affronter les maquisards de l’Armée de libération nationale (ALN) dans les zones rurales doit cette fois « pacifier » Alger, selon les termes de l’époque. C’est-à-dire détecter et détruire l’organisation clandestine à la fois politique et paramilitaire du FLN, immergée parmi les 400 000 Algériens de la ville. Les méthodes employées dans les campagnes ne sauraient être les mêmes en milieu urbain, dans la grande ville de l’Algérie coloniale, peuplée pour moitié d’Européens et sous le feu des projecteurs. Inspirée par la « doctrine de la guerre révolutionnaire » ou contre-insurrectionnelle élaborée après la défaite française en Indochine, une arme de répression politique violente, mais pouvant être menée en secret est privilégiée : l’enlèvement en masse des Algérois suspects de liens avec l’insurrection en cours.
Le lieutenant-colonel Roger Trinquier, l’un des officiers idéologues inspirant l’opération, prescrit au ministre Robert Lacoste « une épuration » de la population « musulmane » d’Alger. Celle-ci doit être selon lui entièrement passée au crible. À la mi-janvier, il estime à 20 000 le nombre de suspects à enfermer dans des camps, soit un nombre bien supérieur à celui, estimé, des membres du FLN à Alger1.
À cette fin, l’armée obtient sans peine du pouvoir politique la mise en place d’un dispositif d’exception, parfois appelé « système arrestation-détention ». Au nom de l’efficacité, elle est dispensée de toute contrainte légale. Elle peut s’introduire dans les domiciles, perquisitionner, arrêter, détenir et interroger comme bon lui semble. Et ceci sans avoir de compte à rendre à quiconque sur ses motifs et sur l’identité et le sort des « suspects » arrêtés. Hormis, une fois le fait accompli et sans que nul ne puisse vérifier ses dires, à une préfecture simplement chargée d’officialiser les détentions. Les militaires disposent d’un temps « d’exploitation » du détenu avant de déclarer son arrestation à la préfecture. C’est ce système qui permet la généralisation de la torture, des viols et des exécutions suivies de la dissimulation ou de la destruction des corps.
L’armée expérimente ainsi à grande échelle une pratique de répression qui ne sera identifiée et qualifiée que bien plus tard, quand elle sera à nouveau employée dans les années 1970 et 1980, principalement en Amérique latine où, on le sait, ces mêmes militaires français allèrent ensuite l’enseigner : la disparition forcée. Depuis 2010, l’ONU définit comme un crime contre l’humanité « l’arrestation, la détention, l’enlèvement ou toute autre forme de privation de liberté par des agents de l’État ou par des personnes ou des groupes de personnes qui agissent avec l’autorisation, l’appui ou l’acquiescement de l’État, suivi du déni de la reconnaissance de la privation de liberté ou de la dissimulation du sort réservé à la personne disparue ou du lieu où elle se trouve, la soustrayant à la protection de la loi ».
DES ENLÈVEMENTS EN MASSE
POUR TERRORISER
En janvier et février 1957, lors de la répression de la grève organisée par le FLN, une première vague d’arrestations — des enlèvements du point de vue des Algériens, ainsi que de celui du droit — se fait sur la base d’un fichier de police des opinions politiques et appartenances aux diverses organisations interdites ou considérées comme subversives : le FLN, le Mouvement national algérien (MNA), le Parti communiste algérien (PCA), l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA), l’Union générale des étudiants musulmans algériens (Ugema) et l’association des oulémas. Malgré la terreur, la grève du FLN est un succès, mais désigne aux militaires, parmi les grévistes, de nouveaux suspects à interroger. Les enlèvements visent bientôt aussi les activités humanitaires comme les centres sociaux créés par l’ethnologue Germaine Tillion. Ils reprennent de plus belle durant l’été et l’automne 1957, lorsqu’il s’avère que le FLN algérois n’est pas mort malgré l’évacuation de la ville par sa direction, puisqu’il a encore la capacité de répliquer par de nouveaux attentats.
Tous les quartiers dits « musulmans », et pas seulement la Casbah, sont frappés par des rafles et des enlèvements ciblés, le plus souvent réalisés nuitamment et avec une brutalité ostentatoire. Les familles qui témoignent aujourd’hui en ont souvent gardé ou transmis le souvenir : portes défoncées, vols, violences envers les proches, propos glaçants sur le sort funeste de celui qu’on embarque dans un camion bâché, où se trouve souvent un indicateur cagoulé (surnommé par les témoins « bou shkara »2). On enlève aussi sur la voie publique ou sur les lieux de travail. Adolescents et vieillards ne sont pas épargnés. Toutes les couches de la population colonisée sont touchées. Le nombre d’enlèvements atteint en une année plusieurs dizaines de milliers. La plupart de ces « suspects », jamais jugés, sont enfermés dans des camps. Certains n’en sortiront qu’en 1962, après avoir été plusieurs fois transférés d’un lieu à un autre du vaste système concentrationnaire, en particulier lorsque la résistance des détenus devait être brisée et ces derniers dispersés.
LE COMBAT DES FAMILLES
Le mode opératoire des militaires atteint toute la population, qu’on veut arracher à l’influence nationaliste. Il ne neutralise pas seulement les « suspects » enlevés, il terrorise aussi leurs familles et, par capillarité, tous les habitants de leurs quartiers. Car l’on sait très vite que ceux qui sont pris risquent la torture et même la mort, dans des dizaines de centres disséminés dans et autour d’Alger où les personnes sont interrogées. Casernes, villas, écoles, fermes coloniales… : partout où des militaires cantonnent, les militaires torturent et, bien que les caves soient privilégiées, les cris des suppliciés sont parfois entendus par le voisinage. Le projet Mille Autres a d’ailleurs entrepris de recenser ces centres et de cartographier la terreur à Alger et dans ses environs.
Bien des récits collectés disent comment des épouses et des mères sillonnèrent alors la ville à la recherche de leur détenu-disparu, et stationnaient parfois des heures durant devant ces lieux, dans l’espoir de l’apercevoir ou d’obtenir une information. Quelquefois, elles y parvenaient, mais il arrivait aussi qu’elles soient chassées ou qu’un militaire leur signifie brutalement qu’il ne fallait plus espérer. Les détenus libérés pouvaient fournir des informations. Parfois, les familles recevaient des lettres de leur proche et pouvaient même lui rendre visite dans un camp durant quelque temps, puis n’avaient soudainement plus aucune nouvelle.
Pour beaucoup de familles, l’espoir d’une réapparition ne se dissipera qu’après le cessez-le-feu du 19 mars 1962, lorsque les camps libéreront leurs milliers de prisonniers, sans qu’elles voient revenir leurs proches.
Les familles, souvent avec l’aide d’un écrivain public, écrivaient beaucoup : à la préfecture, au ministre Lacoste, aux généraux Raoul Salan et Massu, à Suzanne Massu3, à l’archevêque d’Alger, et à toutes les autorités en métropole. Qu’elles implorent ou exigent des nouvelles, leurs lettres — disséminées aujourd’hui dans les archives civiles ou militaires — recevaient rarement une réponse. À partir de mai 1957, la Commission de sauvegarde des droits et libertés individuels créée par Guy Mollet pour enquêter sur « d’éventuelles exactions » à Alger, selon ses termes, reçut nombre de leurs requêtes. Elle se contenta de leur transmettre les réponses qu’elle obtenait de l’armée. Celle-ci affirmait le plus souvent avoir « libéré » l’intéressé4, n’éprouvant pas le besoin, dans leur cas, d’échafauder un scénario mensonger comme il leur fallut le faire en juin 1957 pour « l’évadé » Maurice Audin. Lorsqu’un des membres de cette commission demanda à consulter le fichier « des disparus » dont il avait eu vent de l’existence, cela lui fut refusé par la préfecture.
L’ampleur de la terreur répandue devait rester secrète. Une enquête à partir de ce fichier aurait permis de découvrir que certaines des personnes recherchées avaient disparu corps et âme durant leur détention. À ce jour, sur près de 1 200 cas rendus publics sur le site 1000autres.org où cette enquête longtemps impossible est finalement menée, environ 400 sont identifiés comme des cas de disparition définitive. Encore ne s’agit-il que d’un échantillon, puisqu’une partie seulement des familles concernées s’adressa à la préfecture. La dissimulation fonctionna si bien que nul ne sait le nombre total des « disparus de la bataille d’Alger ». L’estimation célèbre de Paul Teitgen (3 024 disparus) ne représente qu’un ordre de grandeur plausible5.
LA LUTTE ANTITERRORISTE COMME JUSTIFICATION DE LA TERREUR
En 1957, si l’armée garde un silence absolu sur les enlèvements massifs, elle communique abondamment durant l’opération sur les saisies d’armes et de bombes. Les membres du « réseau bombe » arrêtés sont exhibés devant la presse et présentés, quant à eux, devant les juges. L’armée élabore ainsi un narratif selon lequel la bataille d’Alger est un affrontement entre l’armée française et un FLN identifié au « terrorisme », car réduit, ou peu s’en faut, à ses poseurs de bombes. Cette version des faits est diffusée au printemps 1957 lors de la campagne contre la torture née en métropole. Elle est consolidée après la guerre par Massu et ses officiers dans des mémoires à grand succès, en riposte à l’accusation d’exactions6. Selon cette défense, la nécessité de faire cesser les attentats par la recherche impérieuse de renseignements sur les poseurs et poseuses de bombes aurait expliqué et justifié l’emploi de méthodes « exceptionnelles »7. Cette justification de la terreur par une nécessaire lutte antiterroriste a été encore plus ancrée dans l’imaginaire collectif, après 1962, par une surabondante littérature héroïsant les « paras »8, ainsi que par le cinéma. Le film culte de Gillo Pontecorvo La Bataille d’Alger fait la part belle à cet aspect des choses, même si c’est pour le dénoncer.
Selon cette grille de lecture des événements, qui occulte la dimension de terreur politique de l’opération, la mort des derniers membres du « réseau bombe » en octobre 1957 (dont celle d’Ali La Pointe) aurait, fort logiquement, mis fin à l’opération « antiterroriste » commencée en janvier. Ce découpage chronologique de la bataille d’Alger, porteur d’une interprétation des faits, est largement admis encore9. Or, les archives comme les témoignages analysés dans le projet Mille Autres conduisent pour le moins à le remettre en cause. En effet, alors que le réseau bombe est bel et bien détruit en octobre, la répression politique ne se poursuit pas moins à Alger sur le même mode : les signalements de disparitions forcées restent nombreux jusqu’en décembre 1957 et se poursuivent en 1958. Et loin de prendre fin en 1958, cette pratique, validée par le gouvernement français, se généralise ensuite à toute l’Algérie jusqu’à 1961 au moins.
UN CRIME LARGEMENT DISSIMULÉ
Le crime de disparition forcée a été analysé et qualifié juridiquement très tardivement, grâce surtout aux mobilisations des familles victimes, notamment argentines. Son emploi durant la guerre d’indépendance algérienne ne le fut jamais. En métropole, même si l’affaire Maurice Audin permit à Pierre Vidal-Naquet de décrire le système de la disparition à partir de 1958, c’est l’usage de la torture qui émut une partie de l’opinion, beaucoup plus que la disparition forcée.
Avant 1962, en dépit de leurs efforts, les familles algériennes victimes de cette pratique ne purent jamais se faire entendre. Après 1962, leur sort ne fut pas particulièrement distingué dans l’océan des deuils de la guerre de libération : leur disparu reçut, comme tous les autres morts, le statut de martyr. Enfin, l’auto-amnistie décrétée dès la fin de la guerre par la France annula les plaintes déposées et empêcha toute évocation de ces faits et audition de victimes et de témoins devant les tribunaux et l’opinion.
En 2018, la République française a reconnu officiellement sa responsabilité dans l’enlèvement, la torture et l’assassinat de Maurice Audin, universitaire d’origine européenne. En 2020, elle a fait de même pour l’avocat Ali Boumendjel, dont le meurtre déguisé en suicide avait été dénoncé par un célèbre juriste français, gaulliste de gauche, René Capitant. Un « système » permettant ces crimes a été également reconnu. Mais les milliers d’autres Audin et Boumendjel, tous ceux dont la disparition ne fut jamais une « affaire » en métropole restent inconnus des livres d’histoire. Les Algériens et Algériennes rencontrés à l’occasion de l’enquête Mille Autres expriment très souvent leur émotion quand leur histoire restituée est visible du monde entier sur un site internet. Elles n’en vivent pas moins toujours la douleur d’ignorer ce qui est arrivé à leur disparu et de n’avoir pas de sépulture sur laquelle se recueillir.
POUR ALLER PLUS LOIN
➞ Gilbert Meynier, Histoire intérieure du FLN (1954-1962), Fayard, 2002
➞ Malika Rahal, Ali Boumendjel. Une affaire française, une histoire algérienne, La Découverte poche, 2022
➞ Malika Rahal et Fabrice Riceputi, « La disparition forcée durant la guerre d’Indépendance algérienne. Le projet Mille autres, ou les disparus de la “bataille d’Alger” (1957) », Annales Histoire Sciences Sociales, 2022/2
➞ Marie-Monique Robin, Escadrons de la mort, l’école française, La Découverte poche, 2008
➞ Jérémy Rubenstein, Terreur et séduction. Une histoire de la doctrine de la « guerre révolutionnaire », La Découverte, 2022
➞ Pierre Vidal-Naquet, L’affaire Audin, 1958France-Algérie, deux siècles d’histoire
Malika Rahal. Ce passé algérien qui hante
la France
L’historienne et spécialiste de l’Algérie Malika Rahal reçoit le samedi 8 octobre 2022 le Grand prix des Rendez-vous de l’histoire du festival de Blois, pour son ouvrage Algérie 1962. Une histoire populaire (La Découverte, 2022).
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Par micheldandelot1 le 19 Septembre 2023 à 17:33
Italie : Meloni, pas assez facho pour Le Pen,
mais pas trop pour les centristes
Bientôt un an que l’Italie est gouvernée par l’extrême droite et sa principale promesse – mettre un frein au « flux migratoire » – se heurte chaque jour un peu plus à la réalité.
Le 14 septembre, Lampedusa voyait 6000 personnes débarquer en une seule journée – la capacité d’accueil de l’île est de l’ordre de 400 places. En une semaine, ils seront plus de 11 000 à accoster sur ce sol italien. Un « record absolu », écrit Mediapart. Impossible pour Giorgia Meloni, présidente du Conseil des ministres italien depuis le 22 octobre 2022, de gérer seule la situation, alors elle en appelle… à l’Europe. D’autant plus que l’Allemagne a mis en suspens tout accueil de personnes en provenance d’Italie. Pour faire face, la cheffe de l’exécutif italien s’est carrément affichée aux côtés de la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen à Lampedusa. Un affront antifasciste !
En parallèle, dimanche 17 septembre, c’est un autre duo qui parade : Marine Le Pen et Matteo Salvini. Désormais vice-président du Conseil, en charge des Transports, le numéro 1 de la Ligue du Nord joue sur les deux tableaux. D’un côté, il est partie prenante du gouvernement de Meloni – cela dit, il a toujours tenu une ligne beaucoup plus ferme sur cette question que Meloni –, de l’autre, il se targue d’avoir été en 2018-2019 un ministre de l’Intérieur qui ne laissait rien passer. Et il le redit, lui, promis juré, n’accueillerait « pas un seul migrant ».
Sur un an, le « blocus » promis par Meloni affiche un bilan calamiteux (de son point de vue) : plus de 127 000 personnes sont arrivées sur le sol italien, le double par rapport à l’année précédente1. Face à cette déconfiture de la mise en pratique de promesses fascisantes, l’extrême droite française commence donc à prendre ses distances avec son homologue italienne. Plaçant ses pions pour l’horizon 2027, Marine Le Pen ne s’incommode pas de cette mise en concurrence de ses amis transalpins. En meeting dans le Gard la veille, elle a assuré qu’« il est vain d’en appeler à l’Union européenne pour résoudre la crise migratoire comme un enfant appelle maman quand il a un problème ». Prends ça Giorgia !
Car Meloni doit désormais jouer les équilibristes, elle qui est à la tête d’une coalition qui va de la droite à l’extrême droite. Un modèle dont rêvent Le Pen et Salvini à l’échelon européen mais pour lequel la droite européenne « traditionnelle » s’oppose encore assez fermement.
Et c’est tout bonnement la Macronie qui s’entiche de celle qui se veut dans la ligne héritière de Mussolini. « Quand la Première ministre italienne appelle l’Europe à l’aide sur les migrants, il faut répondre », glisse un marcheur influent au journaliste Nils Wilcke.
Prenant à rebours la réaction allemande, Emmanuel Macron se fait le champion de l’Europe en rappelant chaque pays à son « devoir de solidarité ». Là aussi, on manie habilement l’art de la contradiction sans sourciller. Car le 18 septembre, Gérald Darmanin donnait un autre son de cloche sur Europe 1/CNews : « La France ne s’apprête pas à accueillir » une partie des migrants de Lampedusa. Pour rappel, le ministre de l’Intérieur, déjà pas peu fier de trouver Marine Le Pen « trop molle », avait également jugé Meloni « incapable de régler les problèmes migratoires », parce que trop permissive.
Dans cette surenchère à qui sera le plus extrême dans le non-accueil de son prochain, la lutte est acharnée. Une histoire dont ils laisseront tous leurs noms : l’histoire du plus grand cimetière à ciel ouvert au monde.
1. Selon le ministère de l’Intérieur italien, 42 750 migrants sont arrivés entre le 1er janvier et le 15 septembre 2021 ; 66 237 pour la même période de 2022 ; 127 207 pour ce qui concerne 2023. ↩︎
SOURCE : Italie : Meloni, pas assez facho pour Le Pen, mais pas trop pour les centristes - Regards.fr
Migrants : la Méditerranée cimetière depuis 2010
Image du chalutier de migrants avant son nauffrage
le 14 juin 2023.
Le naufrage, mercredi 14 juin, d'une embarcation surchargée de migrants au sud-ouest de la Grèce, qui pourrait avoir fait des centaines de victimes, s'inscrit dans une très longue liste de tragédies similaires en Méditerranée ces dernières années.
L'Organisation internationale pour les migrations (OIM) recense depuis le début de l'année 1166 décès ou disparitions en mer de migrants en Méditerranée. Le bilan s'élève à 26 924 morts et disparus depuis 2014.
Voici les pires naufrages de migrants en Méditerranée depuis 2010 :
Jusqu'à 900 morts dans les eaux de Libye
En avril 2015, entre 800 et 900 migrants périssent au large des côtes libyennes lors du naufrage d'un chalutier de 25 mètres, percuté par un cargo portugais envoyé à son secours. Le bateau de pêche a coulé à pic sous les yeux de l'équipage qui n'a pu sauver que 28 personnes.
Toujours dans les eaux libyennes :
- En mai 2011, des réfugiés arrivés sur l'île italienne de Lampedusa affirment avoir assisté au naufrage d'un autre bateau de migrants dans les eaux libyennes. L'embarcation, qui transportait 600 personnes, est portée disparue.
- En avril 2015, près de 400 migrants meurent dans le naufrage d'une embarcation de fortune à environ 150 kilomètres au large des côtes libyennes.
- En mai 2016, des dizaines de migrants sont portés disparus après le naufrage d'un bateau de pêche surchargé au large de la Libye. Les gardes-côtes italiens évoquent "350 personnes à la mer".
- En février 2015, plus de 300 migrants disparaissent en mer lorsque les bateaux pneumatiques dans lesquels ils avaient pris place chavirent au large de la Libye et 29 autres meurent de froid pendant leur sauvetage dans des conditions extrêmes par les garde-côtes italiens.
Avril 2016 : 500 noyés en Italie
Environ 500 personnes meurent en avril 2016 au large de l'Italie, dans le naufrage d'un grand bateau surchargé, selon des témoignages de rescapés. 41 personnes ont pu être sauvées après avoir dérivé durant trois jours dans un autre bateau.
Egalement dans les eaux italiennes, en octobre 2013, un bateau de pêche parti de Libye et transportant plus de 500 migrants prend feu et fait naufrage en pleine nuit, à 550 mètres des côtes de l'île sicilienne de Lampedusa. 366 personnes, dont beaucoup de femmes et d'enfants, se noient, pris au piège dans les cales, seules 155 personnes survivent.
Septembre 2014 : 500 disparus à Malte
Un bateau parti d'Egypte avec 500 personnes à bord, dont seulement dix survivent, coule au sud-est de Malte en septembre 2014, après avoir été embouti par les passeurs à bord d'une autre embarcation. Le drame survient après que les passagers ont refusé un transfert dans une petite embarcation pour se rendre en Italie.
Juin 2016 : 320 victimes en Grèce
Au moins 320 migrants sont morts ou disparus en juin 2016 dans le naufrage d'un bateau venant d'Afrique et transportant au moins 700 personnes, à 75 milles au sud de la Crète (Grèce). Cinq bateaux marchands qui participaient aux recherches recueillent toutefois 340 rescapés et neuf corps.
La France des fachos n’est pas ma France c’est tout le contraire.
Michel Dandelot
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Par micheldandelot1 le 19 Septembre 2023 à 06:36
Le nouveau Beniaïche : Massacres du 8 mai
1945 La vérité mystifiée
Lundi 18 septembre 2023, par Philippe Chevrette de la 4ACG
Le nouveau livre de Kamel Beniaïche, Massacres du 8 mai 1945 en Algérie, la vérité mystifiée, vient de paraître aux éditions El Watan El Youm.
Le nouveau livre de Kamel Beniaïche, Massacres du 8 mai 1945 en Algérie, la vérité mystifiée, vient de paraître aux éditions El Watan El Youm.
Si l’on devait résumer ce livre en une phrase, ce serait celle-ci : « C’est toujours le vainqueur qui écrit l’histoire, défigure sa victime et fleurit sa tombe de mensonges… ». Il emprunte ces mots à Bertolt Brecht.
Notre auteur, par sa pugnacité, nous livre une réponse à cette phrase. En effet, par sa patience dans ses différentes recherches, il « démonte » au fur et à mesure les mensonges d’État de la période de mai 1945. Si le vainqueur écrit l’histoire, Kamel Beniaiïche éclaire avec rigueur une recherche de vérité qui peu à peu s’éclaire à nos yeux de lecteurs.
On imagine aisément l’énormité du travail, y compris en recevant plusieurs témoignages de témoins présents pendant cette terrible période. Comme un chercheur historien, il recoupe les propos des uns et recense les listes des protagonistes morts ou disparus, Algériens français et Français. Son honnêteté journalistique lui permet de prendre la distance nécessaire avec les faits et rien que les faits. Qu’ils soient des télégrammes secrets de l’administration coloniale ou que ce soit à partir de livres ou de journaux qui apportent un éclairage précis et sans ambages.
Cet auteur, journaliste par son style d’écriture, nous tient en haleine tout au long de ce que j’appellerais une enquête journalistique.
Les mensonges de l’administration
Dans ce « roman » historique, au fur et à mesure que les faits se déroulent, il nous emporte au gré de l’instant vécu et cela de chaque côté des protagonistes. Et, peu à peu, la vérité historique se dessine et elle est effroyable. Cette vérité, il nous l’offre au travers du prisme du regard abasourdi des Algériens en souffrance et de l’administration coloniale froide, inhumaine, et sans états d’âme au nom d’un pouvoir d’État qui va jusqu’à armer des milices européennes gorgées de haine et d’intérêts multiples. Au fur et à mesure des lignes, les mensonges de l’administration se font jour, qu’elles soient issues des institutions municipales d’alors, du Gouvernement Général d’Alger ou bien du Ministère de l’Intérieur. Le pouvoir colonial est tellement hautain d’un pouvoir non partagé qu’il ne doute pas un seul instant et ne voit qu’au travers de l’homme algérien un être inférieur et justifie donc un regard méprisant qui se prolonge par des tueries de milliers de personnes. Par les mensonges de l’administration, ce 8 mai 1945 et les semaines qui ont suivi ont donné lieu à une immense tuerie à huis clos. Kamel Biniaïche s’efforce et s’évertue dans sa quête de vérité. Au travers de cet immense travail d’écriture, il dévoile le gigantesque puzzle du désastre.
Il fait parler Guy de Maupassant envoyé par le quotidien Le Gaulois en 1881. Celui-ci, dans ses colonnes, fustige la politique coloniale en ces mots : « …dès les premiers pas, on est saisi, gêné par la sensation du progrès mal appliqué à ce pays […]. C’est nous qui avons l’air de barbares au milieu de ces barbares, brutes il est vrai, mais qui sont chez eux et à qui les siècles ont appris des coutumes dont nous semblons n’avoir pas compris le sens… ».
L’avidité de ce pouvoir colonial a rendu aveugles celles et ceux qui détenaient les intérêts, enrichis sur une terre étrangère devenue la leur et dont le doute n’avait plus de place. Il rappelle que « le gouvernement de Pétain fut le nouvel âge d’or des colons quand la population européenne se rallia au Maréchal et que le gratin colonial trinquait avec les officiers des commissions allemandes et italiennes installées à Alger ». Et puis, « le 7 octobre 1940, soixante-dix ans après sa promulgation en 1870, le décret Crémieux est aboli ; les Juifs d’Algérie deviennent « Indigènes ». Par une telle mesure, la démagogie vichyste tente d’enjôler les Algériens. En 1941, de sa prison, Messali Hadj dira « …en ôtant leurs droits aux Juifs, vous n’accordez aux musulmans aucun droit nouveau ».
Avec Ferhat Abbas, les Algériens retrouvent la parole
Dès le début du livre, et en quelques pages, le journaliste revient sur l’histoire et révèle peu à peu le visage colonial sans fards.
Le 14 mars 1944, le mouvement Les Amis du Manifeste de la Liberté (l’AML), dont Ferhat Abbas est le fondateur, voit le jour. Ce Manifeste souligne le principe fondamental des peuples à disposer d’eux-mêmes et l’auteur revient sur le texte fondateur. L’article 4 est clair : « Créer un courant d’opinion et rendre familière l’idée d’une nation algérienne et désirable ; la constitution, en Algérie, d’une république autonome fédérée à une république française rénovée, anticolonialiste et anti impérialiste […]. » Tout est dit dans cet article qui dérange en haut lieu le pouvoir colonial.
Le 4 avril 1944, Ferhat Abbas dépose les statuts des AML à la préfecture de Constantine. La fièvre politique, alors, s’empare des Algériens qui retrouvent la parole. On voit bien là toute l’importance d’un moment charnière qui annonce dès lors une réflexion plus intense auprès de la population algérienne. L’administration coloniale est aux abois, en lien avec la police et la gendarmerie et suivie de très près par les agents des services généraux. Des indicateurs seront infiltrés dans les différentes réunions.
Cette réalité va préfigurer la crainte et la férocité des représentants de l’État, plusieurs mois plus tard, dans les villes de Sétif, Guelma et Kherrata et autres municipalités alentour à partir de la journée du 8 mai 1945. De plus, le 24 avril, avec l’accord de de Gaulle, le secrétaire général du Gouvernement Général ordonne le transfert de Messali Hadj à Brazzaville au Congo en évoquant l’atteinte à l’autorité de l’État. On observe une fois encore l’immense crainte de supposés complots, qui ne se justifie pas. Très rapidement, les 4 et 5 mai, l’armée se déploie avec des blindés, l’artillerie et l’aviation. La nervosité du pouvoir colonial est bien présente. La journée du 8 mai et les jours et semaines suivants vont être scrutés avec précision où l’on apprend qu’après les troubles d’une inouïe violence, le territoire est à feu et à sang. Les gendarmes distribuent des armes aux Européens dans plusieurs localités sur fond de tirs de mitrailleuses et d’incendies volontaires
Le rapport de forces est magistralement déséquilibré face à des vieux fusils et des bâtons et une guérilla inorganisée en lien avec une émotion de fureur. Face à cela, il y a la présence de milices rurales et urbaines fortes de 3 000 hommes ! Sans oublier la forte présence de la police, de la gendarmerie et de l’armée, dont la Légion étrangère descendue tout droit de Sidi-bel-Abbès. On comprend, au travers des recherches de l’auteur, comment l’administration coloniale avait envisagé dès les mois précédents de profiter de cette journée de commémoration pour marquer d’une façon la plus ferme les velléités de liberté de ces « va-nu-pieds ».
Arrestations, tortures, assassinats à l’abri des regards
Et puis, il y a l’après carnage, les arrestations, la torture, les morts enterrés à la hâte. Aucun journaliste n’est présent pendant toute cette période, sinon la connaissance de cette tuerie sauvage par les services anglais et américains. Mais insuffisant pour dévoiler une vérité masquée et mensongère par le pouvoir colonial.
La presse nationale et algérienne ne relate pas la stricte réalité. En effet, aucune enquête n’est menée auprès des Algériens sinon, oui, auprès des Européens pour qui il y aura des cérémonies. Même le journal L’Humanité s’y laisse prendre quand il énonce dans ses colonnes du 16 mai 1945 et recommande de « punir comme ils le méritent les tueurs hitlériens ayant participé aux événements de mai 1945 et les chefs pseudo-nationalistes qui ont sciemment engagé de tromper les masses musulmanes". Cette répression féroce va générer la présence de centaines d’enfants orphelins sur les routes et l’errance. De plus, l’administration coloniale menace d’arrêter ou de passer par les armes quiconque accueille adultes ou enfants sans domicile ou sans parents qui, d’ailleurs, ont payé un lourd tribut pendant cette période. L’armée n’hésite pas à tuer sans sommation quiconque serait susceptible de se mettre en travers de son chemin, qu’il soit fauteur de trouble ou non.
La logique, le bon sens et la loi ne sont plus de mise pendant que l’aviation arrose de ses bombes de 50 et 100 kg, que les croiseurs au large de Bougie arrosent les douars et les mechtas, que la Légion étrangère exécute sommairement hommes, femmes et enfants et animaux. Pendant que les milices civiles tuent, appuyées et soutenues par la police et la gendarmerie. Oui, il y a eu des meurtres perpétrés par les « Indigènes » et l’auteur le précise. Mais ces tragiques événements sont le fruit orchestré par une administration civile et militaire qui nourrira longtemps la mémoire d’un peuple soumis au diktat colonial. Au 16 mai 1945, l’ordre est rétabli et l’administration ne manquera pas de cacher les massacres. « Tenues à distance par la censure et la rétention de l’information, les opinions française et internationale ne sauront rien d’un des pogroms les plus abominables survenu aux premières heures de l’armistice ».
Kamel Beniaïche conclue que la meurtrissure de mai 1945 n’a pas livré tous ses secrets. Sans doute, mais, à l’issue de la lecture de ce livre, on peut affirmer que le journaliste algérien nous éclaire d’un jour nouveau sur ce drame encore trop méconnu. Il démystifie, preuves à l’appui, les contrevérités et mensonges de l’administration civile et militaire de cette période et qui perdurent encore dans certains cercles des nostalgiques de l’Algérie française
Philippe Chevrette
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Par micheldandelot1 le 18 Septembre 2023 à 13:26
Paix, un appel d’ICAN France
Un article de Jacques Cros
SOURCE : Paix, un appel d’ICAN France
Publié le 18/09/2023 par cessenon
Rappelons d’abord qu’ICAN est le sigle en anglais de Campagne Internationale pour l’Abolition des armes Nucléaires. Nous avons donc reçu récemment de cette structure dans laquelle le Mouvement de la Paix est impliquée un courriel nous sollicitant pour participer aux initiatives prévues dans le cadre de la journée internationale de la paix.
Ces initiatives sont diverses. Dans l’Aude elle prend la forme d’une fête de la paix qui se tiendra à Peyrac Minervois. Ailleurs ce sont des marches qui sont annoncées. A Béziers nous sommes invités à planter un olivier, arbre symbole de la paix.
Les dates varient. A Peyrac elle a été fixée au dimanche 24 septembre. Les marches peuvent avoir lieu le samedi. A Béziers le point de rendez-vous est donné Place David d’Angers, le jeudi 21 septembre, date de la journée internationale de la paix, à 18 h.
Dans tous les cas la demande est le cessez-le-feu en Ukraine et l’ouverture de négociations sous l’égide de l’ONU. Elle est complétée par l’exigence que la France s’engage pour la ratification du Traité d’Interdiction des Armes Nucléaires. C’est que la guerre en Ukraine, outre les souffrances déjà enregistrées, comporte des risques de généralisation du conflit et des menaces plusieurs fois brandies d’apocalypse nucléaire.
Les tensions internationales doivent être réglées par le dialogue et la coopération, sur la base de la justice et de la culture de paix. La guerre ne résout rien, elle ne fait qu’aggraver les difficultés. Cela vaut pour la Palestine, comme en Afrique où la situation est inquiétante.
C’est le cas au Sahel où il faut en finir avec une politique néo colonialiste qui est similaire à celle que nous pratiquions dans nos anciennes colonies. Une politique qui n’est plus acceptée par les populations de ces pays. L’expérience de l’Algérie nous enseigne que le recours à la force armée n’est pas susceptible d’apporter une solution à un problème politique.
Naturellement il faut mesurer l’impact qu’a la loi de programmation militaire adoptée par la France sur notre économie. Les 413 milliards de dépenses pour des œuvres de mort font défaut pour le progrès social. Elles manquent pour le pouvoir d‘achat, pour la protection sociale, pour l’emploi, les services publics ou pour la question de l’environnement avec celle, préoccupante du dérèglement climatique.
Il y a donc un ensemble de raisons à participer à l’initiative biterroise du 21 septembre.
Jacques Cros
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Par micheldandelot1 le 18 Septembre 2023 à 07:29
"J'ai des problèmes physiques" : pourquoi
Serge Lama met un terme à sa carrière
Le chanteur de 80 ans annonce l'arrêt de sa carrière. Son ultime album, Aimer, est sorti le 7 octobre 2022.
"Il y a un moment où les choses s'arrêtent. Il faut savoir qu'on vieillit."
A 80 ans, Serge Lama confie ne plus avoir la force : "Mon corps me fait beaucoup souffrir. J'ai beaucoup de problèmes inhérents au temps qui passe. Il y a un moment, il faut savoir s'arrêter plutôt que d'être arrêté par les choses. Alors j'ai décidé que c'était fini, que j'ai une très belle vie avec ma compagne Luana."
"Tous les jours, je souffre"
Le chanteur, qui souffre de problèmes de santé depuis quelques années, ne se sent pas de remonter sur scène. "J'ai des problèmes physiques. Ils sont très importants, ils sont devenus incontournables. C'est-à-dire que tous les jours, j'ai mal. Tous les jours, je souffre, je dors mal et c'est incompatible avec une tournée."
Et le chanteur refuse de monter sur scène "dans des conditions qui ne seraient pas optimales" : "J'ai eu la chance de pouvoir chanter cet album déjà, ce qui ne serait pas du tout le cas de tout le monde à près de 80 ans, puisque moi, j'étais quand même un homme de voix. Donc c'est compliqué d'être à la hauteur de ce qu'on a été."
Serge Lama espère malgré tout faire ses adieux à son public à la télévision : "Ce serait chouette. Renaud l'a fait, il n'y a pas longtemps. Il a été très content. Il faut appeler un peu les copains à la rescousse. Et puis chanter des chansons avec des gens. C'est-à-dire faire vibrer le cœur, mais à plusieurs, en groupe, en s'appuyant sur l'épaule."
Aujourd’hui 18 septembre 2023
c’est une confirmation :
Terrible nouvelle : Serge Lama doit mettre
fin à sa carrière, son corps le fait
trop souffrir
Un grand merci Serge, c’est un pincement au cœur d'apprendre la fin de ta carrière, moi qui a participé à la sale guerre d’Algérie comme plus de 1 million 500000 jeunes Français de 20 ans ; nous n’oublierons jamais ta chanson « L’Algérie ». Saches que nous avons tous plus de 80 ans et que pour beaucoup d'entre nous notre corps nous fait souffrir aussi... Cela veut dire que nous sommes arrivés à l'automne de notre vie qui peut être aussi optimiste...
L’automne de la vie » avec optimisme
Michel Dandelot
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Par micheldandelot1 le 17 Septembre 2023 à 11:23
Danielle Mérian, la militante
qui a ému la France
***
La torture que son mari a connu
pendant la guerre d'Algérie
la aussi beaucoup influencé mais pas que...
Danielle Mérian née en 1938 a 85 ans cette année 2023
Révoltée par les crimes commis pendant la guerre d’Algérie, Danielle Mérian a commencé à militer à l’ACAT en 1975. Cette avocate passionnée par le combat pour les droits de l’homme lutte sur tous les fronts : disparus d’Argentine, abolition de la peine de mort, condition des prisonniers en France… Souvenirs d’une éternelle «Acatienne»
Attentats à Paris. Danielle Mérian, la dame qui a ému
le web, se livre
Elle s’appelle Danielle Mérian. Interviewée devant la salle de spectacles après la tuerie du Bataclan, cette ex-avocate a parlé de fraternité pour repousser la peur. Et a réconforté plein de gens.
Souvenez-vous. C’était le lundi après le massacre. Comme des milliers de Parisiens, Danielle Mérian qui habite plus bas, sur le boulevard Richard-Lenoir, était venue déposer une brassée de roses. Un micro s’est tendu. BFM TV. « Madame, pourquoi êtes-vous là ? »
Et les mots ont jailli, magnifiques, de la bouche de cette bourgeoise en apparence collet-monté. Devant le parterre de bougies où flottaient des exemplaires de Paris est une fête, elle a dit : « C’est très important d’apporter des fleurs à nos morts. C’est très important de lire plusieurs fois le livre d’Hemingway qui est une belle réponse à Daech (...) Nous fraterniserons avec les 5 millions de musulmans qui exercent leur religion librement et nous nous battrons contre les 10 000 barbares qui tuent, soi-disant au nom d’Allah. »
Vingt-huit secondes. Ses paroles ont fait le tour du monde, relayées par d’autres télés, les réseaux sociaux. « C’était mon premier micro-trottoir », fait remarquer la dame qui vous reçoit près d’un an après dans son appartement parisien. À 78 ans : un détonnant mélange de rigueur et d’humour au-dessus du rang de perles.
" Mon père doit bien rire"
« Quelle aventure ! », commente-t-elle, au milieu des meubles et tableaux de famille. Depuis plusieurs années, les remerciements, les embrassades, les selfies se sont enchaînés, dans la rue. Émanant « de jeunes, de vieux, de musulmans, de catholiques, de juifs et d’athées… ». Pas de fausse pudeur, Danielle Mérian savoure. Et se dit que « là où il est », son père, le résistant et journaliste Claude Darget, « doit bien rire ». « Il présentait le 20 h du temps où il n’y avait qu’une chaîne de télévision (dans les années 1950-1960). Je détestais me promener avec lui. C'était un don juan et tout le monde le reconnaissait. Je me disais : "Pour vivre heureuse, vivons cachée". »
"Je suis votre soldat"
Des plateaux télé, sa fille en a fait peu en 2016. Elle a notamment refusé de rencontrer Bernard Cazeneuve dans Des Paroles et des actes. « Je trouve la société civile beaucoup plus brillante que nos politiques ! » Mais sous d’autres projecteurs, le comédien Omar Sy lui a dit qu’elle était « kiffante ». En coulisses, il a ajouté : « Je suis votre soldat ». La promesse est allée droit au cœur de cette combattante, qui n’est pas née des dernières tempêtes de l’histoire. Danielle Mérian milite depuis des années au sein de l’Association des chrétiens contre la torture, Parcours d’exil et SOS Africaines en danger. Mère de deux enfants (qui travaillent l’un auprès des réfugiés, l’autre auprès des handicapés), elle a adopté récemment un réfugié politique camerounais. À Noël, « par solidarité », elle a amené toute la famille réveillonner à La Bonne Bière, l’un des bars meurtris par la fusillade de novembre.
« Quand on me donne la parole
je la prends ! »
Sa vie d’engagements, elle la raconte dans un petit livre écrit en collaboration avec l’écrivaine Tania de Montaigne, à la demande des éditions Grasset. On s’étonne de la démarche : elle y livre beaucoup de son intimité. Elle justifie : « Moi, quand on me donne la parole, je la prends ! » Normal, pour une ancienne avocate (spécialisée en droit de la famille). Un titre qu’elle revendique plus fièrement que le surnom de Mamie Danielle dont on l’a familièrement affublée après le Bataclan. « Grand-mère, je le suis avec bonheur, mais c’est ma vie privée ! » Pendant trois mois, Tania de Montaigne est allée l’enregistrer, chez elle, deux heures par semaine. « Une Badoit et en avant ! » L’auteure de Noire est tombée sous le charme de cette femme « libre et surtout curieuse. Curieuse de la vie et intrigante, car jamais là où on l’attend. » « Féministe convaincue », Danielle Mérian sait, pour être issue de l’aristocratie du côté paternel, de la paysannerie par sa mère, « que les femmes en ont bavé dans tous les milieux ».
Ennemie du prêt-à-penser
Au cœur de ses engagements, il y a la découverte, à 7 ans, dans un tiroir secret de son père, des photos des camps de concentration qu’il avait contribué à libérer, avec l’armée canadienne. Et aussi le souvenir de femmes tondues, sur le boulevard, à la Libération. « Voir très tôt ce que l’homme peut faire à l’homme m’a sûrement déterminée à être la voix des sans voix », dit-elle. La guerre d’Algérie a aussi été déterminante. Son défunt mari, l’amour de sa vie, s’y est trouvé impuissant face à la torture. La blessure a marqué tous leurs engagements de couple. « Ennemie du prêt-à-penser », Danielle Mérian ne considère pas son témoignage comme un énième « Engagez-vous » adressé à la jeunesse. Elle aimerait juste qu’il soit « une ombrelle sous laquelle s’abriter quand la terreur frappera à nouveau, quand il paraîtra plus simple de rejeter que d’embrasser. Ensemble, on est plus forts », martèle-t-elle. Et au fait, que pense-t-elle des représentants de la vieillesse, des gens de son âge et un peu plus, qui ont connu la guerre enfants ou adolescents ? La réponse de cette admiratrice de Stéphane Hessel fuse, avec la même véhémence que devant le micro de BFM : « Je ne com-prends-pas que des gens qui ont connu l’exode, qui ont fui devant l’ennemi, qui ont vu brûler leurs maisons, qui avaient faim et soif sur les routes, et qui se faisaient bombarder : je ne com-prends-pas que les mêmes puissent ne pas ouvrir leurs bras aux migrants ! »
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Par micheldandelot1 le 16 Septembre 2023 à 08:51
Pourquoi balbutie-t-on autant
sur la colonisation ?
Jean-Michel Aphatie voulait revenir sur les propos tenus par Bruno Retailleau au sujet de la colonisation.
Je viens de voir cette vidéo sur Facebook, Jean-Michel Aphatie parle de la colonisation de l’Algérie.
Qui est Jean-Michel Aphatie ?
J’ai voulu savoir qu'elle était la tendance politique de Jean-Michel Aphatie. Wikipédia répond :
Engagement politique
De 1982 à 1986, Jean-Michel Aphatie est membre du Parti socialiste. À l'origine, soutien de François Mitterrand, il prend position en faveur du courant social-démocrate mené par Michel Rocard, puis Jacques Delors, étant plus sévère envers Lionel Jospin.
En 1986, lors du mouvement contre le projet de loi Devaquet, alors étudiant en journalisme à Bordeaux, il est membre de la coordination étudiante.
En mars 2008, il indique avoir voté blanc à tous les scrutins depuis 1988, sauf lors du référendum sur le traité de Maastricht, avant d'indiquer en février 2009 : « J'ai été de gauche et je n'ai jamais été de droite ».
Débat avec Jean-Michel Apathie Des
Excuses pour la colonisation de l'Algérie ?
Un éclairage de Jean-Michel Apathie sur la colonisation française de l'Algérie. Un extrait de l'émission C l'Hebdo diffusée sur France 5 le 23 janvier 2021 après la remise du rapport de Benjamin Stora à Emmanuel Macron sur les questions mémorielles portant sur la colonisation et la guerre d'Algérie. À ne pas manquer.
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Par micheldandelot1 le 15 Septembre 2023 à 14:00
Bernard Deschamps, ancien député communiste, 91 ans écrit : « Je serai présent à la marche unitaire du 23 septembre à Nîmes ».
Quel courage, quelle formidable volonté, merci Bernard, tu es un modèle remarquable pour les jeunes… et aussi pour les moins jeunes et les anciens. Tu possèdes les qualités idéales, exemplaires. Tu mérites le plus grand respect.
Michel Dandelot
15 septembre 2023
Je soutiens cet appel et je serai présent, le 23 septembre à 14h., Place de la Maison Carrée à Nîmes.
Bernard DESCHAMPS
APPEL À LA MARCHE UNITAIRE DU 23 SEPTEMBRE " POUR LA FIN DU RACISME SYSTÉMIQUE, DES VIOLENCES POLICIÈRES, POUR LA JUSTICE SOCIALE ET LES LIBERTÉS PUBLIQUES"
Le meurtre de Nahel, tué par un policier à bout portant le 27 juin 2023 à Nanterre, a mis de nouveau la lumière sur ce qui doit cesser : le racisme systémique, les violences policières, et les inégalités sociales que creuse la politique de Macron. Une politique néolibérale imposée par des méthodes autoritaires, des lois sécuritaires et une doctrine du maintien de l’ordre décriée jusque dans les plus grandes instances internationales. Une politique régressive qui fait le lit de l’extrême-droite et piétine toujours plus nos libertés publiques, notre modèle social, notre avenir face à l’effondrement écologique.
En première ligne des victimes de ces choix politiques, les habitant·es, et notamment les jeunes des quartiers populaires et des territoires ultramarins, qui subissent de plein fouet l’aggravation de toutes les inégalités sociales dans un contexte économique d’inflation, de hausse des loyers, des prix de l’énergie et de politiques d'urbanisme brutales. Les réformes de la Macronie accentuent la pauvreté en durcissant notamment l’accès aux prestations sociales. La scandaleuse réforme de l’assurance chômage en est un exemple significatif alors que la précarité au travail augmente.
Les révoltes dans les quartiers populaires ne peuvent s’analyser que dans ce contexte global. Les habitant·es de ces quartiers, et notamment les mères isolées, pallient bien souvent seul·es les carences de services publics dont la destruction s’accélère de jour en jour.
A côté de cela, de nombreuses violences sont perpétrées contre les populations : délocalisation et destruction de l’emploi, évasion et fraude fiscale, mode de vie des ultras riches écocidaire, supers profits des multinationales, modes de production hypers polluants responsables de la crise climatique. Et pour cela, l’Etat laisse faire ! De plus, les populations racisées et/ ou issues des classes sociales défavorisées, des quartiers populaires, des zones rurales et périurbaines appauvries, des territoires ultramarins sont victimes de violences institutionnelles et systémiques, notamment policières.
La politique répressive de l'Etat est encore renforcée par le dernier remaniement ministériel, qui a élargi les compétences du ministère de l’Intérieur à la ville, l'Outre-mer et la citoyenneté. La répression s’étend avec toujours plus d’intensité et de violences policières, d’interdictions de manifester, contre le mouvement social et écologiste, comme lors de la lutte contre la réforme des retraites rejetée par l'immense majorité des travailleur-ses et leurs syndicats et à Sainte-Soline. La liberté associative, directement et indirectement, est de plus en plus mise en cause.
Cette situation est d’autant plus inquiétante que l’institution policière paraît hors de contrôle du pouvoir politique. Des déclarations factieuses de certains syndicats de policiers suite au meurtre de Nahel aux déclarations du Directeur général de la police nationale et à celle du Préfet de police de Paris ainsi que le ministre de l’intérieur, c’est l’institution policière qui aujourd’hui remet en cause l’État de droit, plutôt que de mettre fin à l’impunité des auteurs de violences policières.
Nos organisations syndicales, associations, collectifs, comités de quartiers populaires, de victimes de violences policières et partis politiques se mobilisent ensemble dans la durée pour la convergence des justices antiraciste, sociale et écologique, féministes et pour que cessent les politiques sécuritaires et anti sociales.
La crise démocratique, sociale, politique que nous traversons est très grave.
Nous ne pouvons accepter qu’il y ait encore d’autres morts comme Nahel, ou d'autres blessé.es, victimes des violences policières.
Nous appelons à reprendre la rue samedi 23 septembre, à organiser des manifestations ou d’autres initiatives sur tout le territoire, pour faire front ensemble contre la répression des contestations sociales démocratiques et écologiques, pour la fin du racisme systémique, des violences policières, et pour la justice sociale climatique, féministe et les libertés publiques.
Nous exigeons des réponses immédiates et dans l’urgence :
– abrogation de la loi de 2017 sur l’assouplissement des règles en matière d’usage des armes à feu par les forces de l’ordre ;
– une réforme en profondeur de la police, de ses techniques d’intervention et de son armement
– le remplacement de l’IGPN par un organisme indépendant de la hiérarchie policière et du pouvoir politique ;
– la création d’un service dédié aux discriminations touchant la jeunesse au sein de l’autorité administrative présidée par le Défenseur des droits et le renforcement des moyens de lutte contre le racisme, y compris dans la police ;
- Un plan d’investissement public ambitieux dans les quartiers populaires et sur l’ensemble du territoire pour rétablir les services publics, le financement des associations et des centres sociaux
Marchons toutes et tous ensemble le 23 septembre !
Organisations signataires au 5 septembre :
Collectifs/comités de quartiers populaires, de victimes de violences policières :
Coordination pour la Défense des habitants des Quartiers Populaires, Coordination nationale contre les violences policières, Coordination nationale “Marche 40 ans”, Collectif Vérité et justice pour Adama, Collectif Justice pour Claude Jean-Pierre, Comité Vérité et Justice pour Mahamadou, Comité Justice pour Othmane, Collectif Justice et Vérité pour Yanis, Comité Justice pour Alassane, Collectif Stop Violences Policières à Saint-Denis, Comité vérité et justice pour Safyatou, Salif et Ilan, Mémoire en marche Marseille, le Mouvement des mères isolées, Syndicat des quartiers populaires de Marseille.
Organisations syndicales : CGT, FSU, Union syndicale Solidaires, Syndicat des avocats de France, Syndicat de la magistrature, FSE, FIDL, MNL, UNEF, Union étudiante, la Voix lycéenne.
Associations et autres collectifs : l’ACORT, Alternatiba, ANV-COP21, APEL-Egalité, ATMF, Attac France, Les Amis de la Terre France, Collectif du 5 novembre, Collectif National pour les Droits des Femmes (CNDF), CAD, Coudes à Coudes, Dernière Rénovation, Droit Au Logement (DAL), Les Effrontées, FASTI , Fédération nationale de la LIbre Pensée, Femmes Egalité, Fondation Copernic, Gisti, Greenpeace, Mouvement Utopia, la Relève Féministe, La Révolution est en marche, Marche des Solidarités, MRAP, Memorial 98, Planning familial, Réseau d’Actions contre l’Antisémitisme et tous les Racismes (RAAR),SOS racisme, Association Stop Aux Violences d’État, UJFP, XR Extinction Rebellion France, Alternatiba Paris, Association de veille écologique et citoyenne (Nantes), Association Intergénérationelle de la Rabière (AIR-37), Association Naya (37), Association Nouveaux Souffle pour l'Insertion Sociale et Professionnelle (ANSIP-37), ODED 32, les Marmoulins de Ménil, Pas peu fièr-es, Le GRAIN, Réseau Hospitalité
Organisations politiques : EELV , ENSEMBLE , LFI , FUIQP, GDS, La Gauche Ecosocialiste, Génération.s, NPA, Nouvelle Donne, PCOF, PEPS, PG, Place publique, POI, Rejoignons nous, REV, UCL, Vivre Ensemble Solidaires en Métropole Tourangelle (VESEMT-37)
Le précieux regard
de Bernard Deschamps
sur l’indépendance de l’Algérie
L’ancien député communiste du Gard est un grand spécialiste de l’Algérie. Il évoque les temps forts de 60 ans d’indépendance.
Article écrit le 01/07/2022
L’historien et militant anticolonialiste Bernard Deschamps (à gauche) et Oucine Benchouyeb, président de l’association d’amitié franco-algérienne Al Djazaïr, samedi 25 juin à la Fête effrontée de Lézan dans le Gard lors du débat sur l’Algérie. PHOTO F.V
Alors que dans la région Occitanie, à Perpignan, le maire d’extrême droite Louis Aliot (RN) fait l’apologie des assassins de l’OAS ; qu’au perchoir de l’Assemblée nationale le frontiste José Gonzalez, élu député des Bouches-du-Rhône, évoque avec une nostalgie glaçante l’Algérie française, il est impérieux d’écouter le témoignage de ceux qui furent aux côtés d’un peuple qui ne réclamait que justice, c’est-à-dire l’indépendance : les Algériens.
À Alger, au cœur du Hirak
Bernard Deschamps est de ceux-là. À 90 ans, l’ancien député communiste du Gard, devenu historien*, témoigne sans relâche, comme samedi dernier lors de la fête des communistes du Gard, à Lézan. En 2019, à 87 ans donc, il a manifesté avec les Algériens lors du Hirak, « un mouvement d’une ampleur comme on n’en avait pas connu. Il y a eu un million de personnes à Alger, c’était fabuleux, d’une puissance extraordinaire, jeune et pacifique ». Le Hirak « s’est interrompu à cause de la pandémie » mais Bernard Deschamps a la conviction que « les idées du Hirak, d’un changement dans le progrès, referont surface ». Surtout face à un pouvoir « très affaibli et très minoritaire avec une très forte répression ».
Depuis son indépendance, proclamée le 5 juillet 1962, l’Algérie a profondément évolué en dépit des stigmates profonds laissés par 130 ans de colonialisme. « Durant la période du président Houari Boumediene (1962-1978), plus d’un million d’emplois ont été créés. La consommation des ménages va passer de 315 à 1 114 dollars entre 1963 et 1985. » Mais l’après Boumediene sera terrible avec les privatisations qui vont précipiter dans la misère des centaines de milliers de travailleurs. « Le pouvoir d’achat chute de 40 %. Les islamistes du FIS vont capter ce mécontentement. » L’arrêt du processus électoral en 1992 marque le début de « la décennie noire » : 200 000 Algériens y perdront la vie. La résilience du peuple algérien sera remarquable. L’ère Bouteflika, « un nationaliste acquis à l’économie de marché », décide de créer « une bourgeoisie algérienne. Il arrose à la manière de Guizot sous Napoléon III et sa formule "enrichissez-vous" La corruption va devenir endémique ». Son mandat va se fracasser sur le Hirak et son message universel : les peuples ont soif de liberté, de dignité et de démocratie. Les Algériens continuent d’écrire leur histoire, nous rappelle Bernard Deschamps.
*« Révolution », « Les Gardois contre la guerre d’Algérie », « Le fichier Z », sont ses trois principaux livres..
SOURCE : Le précieux regard de Bernard Deschamps sur l’indépendance de l’Algérie (lamarseillaise.fr)
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Par micheldandelot1 le 15 Septembre 2023 à 08:38
Approche intime des Français
qui ont combattu pendant
la guerre d’Algérie et qui peinent
à témoigner
Les accords d’Evian, qui ont mis fin à la guerre d’Algérie ont plus de soixante ans. En France, ceux qui ont combattu ont peu parlé des «événements» comme on les nommait à l’époque, souvent synonyme de honte. Les lois d’amnistie, la reconnaissance tardive de la guerre n’ont pas contribué à faire émerger la parole. Emmanuel Vigier, réalisateur marseillais, est fils d’appelé. Dans sa ville natale, en Auvergne, il a interrogé son père et ses proches. Un silence toujours pesant.
« Ce qu’ont fait nos pères »
C’est un film que j’ai commencé à écrire il y a quinze ans, après « J’ai un frère », premier chapitre d’une trilogie sur l’après-guerre, que j’ai tourné en Bosnie.
Ce deuxième opus vient interroger la mémoire de la guerre d’Algérie, à travers celle de mon père, ancien appelé.
Un homme qui a longtemps tu les deux années qu’il a passées près de Djelfa, dans un régiment d’artillerie.Seule trace : un album d’images dans lequel la guerre reste hors-champ.
Mémoire de la guerre d’Algérie
NOS PÈRES, DES TORTIONNAIRES ?
Dans son documentaire Ce qu’ont fait nos pères, Emmanuel Vigier confronte son paternel à ses souvenirs d’appelé du contingent pendant la guerre d’Algérie. Enfouis sous des décennies de silence, quelques lambeaux de vérité sortent en grinçant. Pour CQFD, le documentariste a conversé avec l’écrivain et journaliste Bruno Le Dantec, lui aussi fils d’appelé. Dialogue mémoriel.
C’est un film âpre, par moments étouffant, d’un silence qui pèse des tonnes et que le temps qui passe peine toujours à percer. Ce silence, l’historienne Raphaëlle Branche y a consacré une enquête, Papa, qu’as-tu fait en Algérie ?, parue en 2020 à La Découverte. Et c’est cette même question que le documentariste Emmanuel Vigier pose à son père (et à quelques autres anciens appelés de son entourage), caméra au poing.
Le paternel distille ses réponses au compte-goutte. En résumé, il jure qu’à l’armée, il était juste comptable, qu’il n’a pas combattu. Que la torture, il savait, mais qu’il n’a pas participé. S’est-il rebellé ? Il n’avait pas de raisons de le faire, il dit : « J’étais pas révolutionnaire. » Ça, le fils a du mal à l’accepter. Il insiste, se documente par ailleurs. Et finit par exhumer une vérité tue sur les Algériens qui remplissent l’album photo que son père a ramené de la guerre : ces hommes et ces femmes n’ont pas été photographiés dans leur village tranquillement, mais à l’intérieur d’un camp de regroupement forcé1 – pour priver les maquisards indépendantistes d’appui populaire dans les campagnes, l’armée française vidait des vallées entières de leurs habitants.
Un peu plus loin dans le film, soulagement. Et horreur en même temps. Soulagement car le père d’un ami du réalisateur lâche quelque chose, enfin. Horreur parce que ce qu’il raconte c’est qu’un jour, on lui a demandé de participer à une séance de gégène, la torture à l’électricité. Il a refusé. Mais il a vu et n’a rien empêché.
Plus tard encore, c’est une fille d’appelé que le documentariste fait causer. « On est toute une génération à ne pas avoir osé poser les questions, observe-t-elle. On craignait les réponses. » Il y avait de quoi.
Ce qu’ont fait nos pères sera diffusé sur France 3 Paca jeudi 9 juin à 23 h 50, puis disponible quelque temps en replay. Son réalisateur, Emmanuel Vigier, est apparenté à la grande famille de CQFD : plusieurs années durant, il y a tenu la chronique « Hétéro facho », sur l’homophobie et les questions LGBT. Dans les lignes qui suivent, il converse avec un autre compagnon de route du journal que vous tenez entre les mains, Bruno Le Dantec, qui s’est récemment lancé dans un travail de mémoire, écrit, autour de la vie de son père, qui eut également la malchance d’être rappelé sous les drapeaux à l’époque maudite de la guerre d’Algérie (1954-1962), alors même qu’il avait déjà fait son service en métropole.
⁂
CQFD : Est-ce que c’est une question qui vous a toujours travaillés, hantés peut-être, « qu’est-ce qu’a fait papa en Algérie ? » Ou même : « Est-ce que mon père est un salaud, un tortionnaire, est-ce qu’il a tué ? »
Emmanuel Vigier : « Pour moi, très clairement, oui. Il y a une quinzaine d’années, j’ai essayé une première fois de faire ce film, après avoir longtemps travaillé sur l’après-guerre en Bosnie. Mais j’y ai renoncé. J’étais dans une colère qui m’aurait empêché de le faire. En tout cas, tous les copains fils d’appelés à qui j’en ai parlé à cette époque m’ont expliqué que c’était une question centrale dans leur vie, que le silence avait pesé partout. Est-ce que pour autant il faut la poser, cette question ? Dans le film, mon amie d’enfance interroge cette nécessité. Elle précise que ce que nos pères ont vécu leur appartient.
Je l’ai finalement posée à mon père, cette question. Mais je ne suis pas sûr que mon film y réponde complètement. Il y a plein de façons d’être un salaud... Sur la torture par exemple, mon père dit avoir été un témoin auditif, parce qu’il n’était pas loin du bureau où elle était pratiquée. Bon. Quelle est la part de responsabilité du témoin, de celui qui obéit, du bon petit soldat ?
« Quelle est la part de responsabilité du témoin, de celui qui obéit, du bon petit soldat ? »
En tout cas je reconnais à mon père le courage et l’honnêteté de m’avoir répondu comme il a pu sur un sujet embarrassant, pour lui comme pour beaucoup d’autres anciens appelés. Ils ont participé à un épisode de l’histoire sur lequel il y a eu un déni d’État pendant des décennies. La guerre d’Algérie n’a été reconnue en tant que “guerre” par la loi qu’en 1999. »
Bruno Le Dantec : « Moi, cette question ne m’a pas travaillé jusqu’à ce que mon père en parle. Le fait qu’il soit allé en Algérie m’interpellait, mais je n’ai jamais eu ce soupçon. Peut-être parce que j’avais une grande confiance en lui, l’impression qu’il ne pouvait pas faire de mal à une mouche.
Je me rappelle quand même qu’un jour, je lui ai demandé : “Est-ce que tu as participé à des combats ? Est-ce que tu as fait usage de tes armes ?” Il m’a dit que non, et je le crois. Il n’a passé que six mois là-bas, à partir de juin 1956, quand il a été rappelé.
Au début, il montait la garde dans les domaines viticoles de la Mitidja, au sud d’Alger. Puis son régiment a été envoyée en camp disciplinaire à Boghar, une petite ville au sud de Médéa, parce que des Corses de l’unité avaient sifflé un ministre, Max Lejeune, lors d’un passage en revue. À Boghar, mon père et son unité ont passé énormément de temps à patrouiller. Mais il ne m’a jamais parlé, par exemple, de camps de déplacés. »
Emmanuel Vigier : « Sur les camps de regroupement, mon père a mis un long moment à me dire ce qu’il en était vraiment. Et c’est parce que je travaillais avec une historienne, Marie Chominot, pendant le tournage, que mon père est parvenu à raconter la réalité de ces images, la situation des gens qu’il a photographiés. Sans cela, les photos orientalistes de son album seraient restées sans légende.
Cela dit, mon père, à la différence peut-être du tien, c’est un bon petit soldat. C’est quelqu’un qui obéit. »
Bruno Le Dantec : « Mon père, ce n’était pas un rebelle non plus. Mais il était critique. Mes parents ont jeté toutes les lettres qu’ils se sont écrites, presque chaque jour, pendant que mon père était en Algérie. Mais ils ont gardé des photos qu’il avait envoyées à ma mère. Derrière l’une d’elles, il écrit au sujet de son pistolet mitrailleur : “Bel engin de mort que je quitterai volontiers.” Ou encore : “Mon sourire n’a rien de guerrier.”
Sa révolte, il ne me l’a confiée que quelques semaines avant sa mort, les larmes aux yeux. Il m’a raconté la fois où un sous-officier a fait un carton, gratuitement, sur un gamin qui passait à dos d’âne. Il m’a dit qu’il avait crié “Nooon !” et que le sous-officier l’avait regardé en haussant les épaules, en disant : “C’est comme ça qu’on patrouille.” Avant de poursuivre son chemin.
Il m’a aussi raconté la mort de deux copains... tués par d’autres soldats français. La première histoire, c’est un officier qui sépare les soldats en deux groupes sur un terrain qu’ils connaissent mal. Entre chien et loup, les deux groupes tombent l’un sur l’autre. Pris de panique en voyant des ombres venir en face, un gars tire. Il tue un copain de mon père, un Toulousain. On a encore des photos de l’enterrement, avec le drapeau français sur le cercueil… L’autre mort absurde, c’est le dernier jour, des troufions picolent et font un rodéo en jeep pour fêter leur retour chez eux : ils écrasent un mec contre un arbre, lui explosant la rate. Vraiment des morts stupides. Enfin, celles-là, pas la mort du gamin, qui n’est pas stupide mais absolument atroce.
Le reste des récits de mon père, ça ne dépassait pas ce qu’il avait pu raconter sur sa vie militaire en métropole. C’est-à-dire l’ennui, le sentiment d’être à un endroit où tu n’as pas envie d’être, l’allergie à tout ce qui est hiérarchie, discipline, mais c’est tout. Peut-être que j’aurais dû plus le cuisiner, hein. Pour autant, je suis certain que ce qu’il m’a raconté sur la fin, c’est le plus fort de ce qu’il a vécu. Il pleurait quand il m’a dit : “J’ai encore dans la tête le cri de la mère du petit.”
Mais bon peut-être que je suis naïf. Je ne me suis jamais dit : est-ce que mon père est un salaud ? Je ne me suis même pas posé la question. »
Emmanuel Vigier : « Moi je me la suis posée fortement, et j’ai toujours du mal à y répondre aujourd’hui. Parce qu’encore une fois, philosophiquement, quelle est la responsabilité du témoin ou de celui qui obéit ? Quel est le rôle du bon petit soldat dans l’affaire ? Il y a là quelque chose de sombre. Pour autant, je ne veux pas juger mon père, il a fait son possible. Mais nous, les fils, qu’est-ce qu’on en retire de cette histoire ? Qu’est-ce qu’on en fait aujourd’hui ? »
CQFD : Qu’est-ce que tu en fais, toi, aujourd’hui ?
Emmanuel Vigier : « Je pense que ça a constitué beaucoup de colères en moi. La normativité, la normopathie, toutes les formes d’obéissance me taraudent jusque dans mon travail, c’est certain. Est-ce que ça vient de là directement ? En partie sans doute. »
CQFD : Dans le film, on assiste à une discussion entre ton père et toi. Et on a l’impression que tu lui en veux, qu’en tout cas ça te déçoit beaucoup qu’il ait été ce bon petit soldat, qu’il n’ait pas été un rebelle…
Emmanuel Vigier : « Je suis en conflit avec mon père de manière constante depuis longtemps. Au regard de nos rapports, c’est d’ailleurs très surprenant qu’il ait accepté de me parler de sa guerre d’Algérie, de se dévoiler. Après, suis-je déçu de ce que j’ai découvert à cette occasion ? Oui, peut-être, mais c’est compliqué de mettre des mots sur ce malaise. Et puis, est-ce que nous avons à juger nos pères ? Au nom de quoi ? Et d’ailleurs dans le film, il me le renvoie, il me dit : “Et toi, qu’est-ce que tu aurais fait [si tu avais été à ma place] ?” Question délicate.
Il faut se méfier des explications psychologiques, parce que toutes ces histoires individuelles sont prises dans une même histoire collective. Tous ces gars ne sont pas partis en Algérie avec le même bagage culturel : mon père, contrairement à celui de Bruno, n’était pas instit’ ; il venait du fin fond de l’Auvergne, il savait à peine où se situait l’Algérie, sa conscience politique était toute petite. Je ne suis pas en train de l’excuser, je suis en train d’essayer de comprendre. »
Bruno Le Dantec : « Au niveau politique, ma mère dit que “c’est l’Algérie qui nous a fait de gauche”. Elle venait d’une famille très conservatrice, catholique et raciste. Avec mon père, ils ont eu une espèce de prise de conscience à ce moment-là. Ça a été le début d’une réflexion politique, antiraciste, anticoloniale. »
Emmanuel Vigier : « Ton père en a fait quelque chose, de ce qu’il a vu, de ce qu’il a vécu. Le mien a ravalé sa peine et sa colère. Il n’en a rien fait. Ce qu’il dit dans le film, c’est : “Nous avons perdu les plus belles années de notre vie.” Ces hommes, dans l’entourage de mon père, ont été pris au retour dans un silence terrible. Ils n’en ont même pas parlé à leur femme.
« Nous avons perdu les plus belles années de notre vie. »
Et puis il y a la question de la torture, qui n’est pas une petite page de la guerre d’Algérie, c’était une pratique courante. Ce qui fait que pendant le repérage pour le film, je me suis parfois retrouvé face à des gens qui avaient participé à la torture, qui ne s’en sont jamais expliqué. Ça fait du poids, tout ça. Et il n’est même pas question de justice sur cette question-là, puisque les lois d’amnistie se sont succédé. »
CQFD : On a l’impression dans le film que ton père ne va pas au bout de l’histoire, qu’il ne dit pas complètement tout, qu’il en garde un peu par-devers lui…
Emmanuel Vigier : « Moi j’ai l’impression qu’il ne peut pas aller plus loin. Et que dans sa phrase “Nous avons perdu les plus belles années de notre vie”, il y a un mystère, qui ne regarde que lui. »
CQFD : Quel est son parcours durant la guerre d’Algérie ?
Emmanuel Vigier : « C’est deux ans près de Djelfa, à Aïn Maabed. Dans l’armée, il est comptable. Ce qui a été très étrange dans sa manière de se raconter, c’est qu’il l’a fait par bribes. Au début, c’était juste : “J’étais comptable, je n’ai rien vu.” Et puis avec le temps, les conversations, j’ai compris que ce n’était pas si simple, que les rôles n’étaient pas si clairement définis, qu’il y avait quand même des patrouilles, des opérations auxquelles il a participé. Mais je pense que c’est peut-être aussi tout simplement une façon de se raconter, de se mettre à distance, ce “Je suis comptable, j’ai un rôle administratif.” Sauf que le rôle administratif lui aussi pose question… Mais c’est difficile, mon père a plus de 80 ans, au nom de quoi je vais lui mettre dans les mains un bouquin d’Hannah Arendt pour lui parler du concept de banalité du mal ? C’est impossible. »
CQFD : Est-ce que vous avez eu l’occasion de discuter avec des descendants d’indépendantistes algériens ?
Emmanuel Vigier : « Moi oui. Pendant que je préparais le film, j’ai eu besoin de dialoguer avec des enfants ou petits-enfants d’Algériens pour comprendre comment l’histoire leur avait été racontée.
Il y avait des points communs, notamment cette question, universelle : “Qu’est-ce qu’ont fait nos pères ?”. Qu’est-ce qu’ils nous transmettent ou pas ? Ce n’est évidemment pas la même histoire en Algérie. Le silence est pesant, mais il a une autre forme, pris lui aussi dans la politique et l’histoire de l’État algérien. Sur cette question, le livre de la psychanalyste Karima Lazali Le Trauma colonial 2 aide à comprendre les conséquences de l’oppression coloniale. Elle évoque aussi des “blancs de mémoire et de parole” sur les deux rives de la Méditerranée.
Je pense qu’il est essentiel de faire ce que nous sommes en train de faire, moi, Bruno et bien d’autres aujourd’hui, comme les petits-enfants désormais : construire nos récits sans chercher à répondre à l’injonction à la réconciliation. »
CQFD : Qu’est-ce que tu appelles « l’injonction à la réconciliation » ?
Emmanuel Vigier : « Je fais référence à l’ambiance autour du rapport que l’historien Benjamin Stora a remis à Emmanuel Macron en janvier 2021 sur “la mémoire de la colonisation et de la guerre d’Algérie” et à la manière dont il a été médiatisé. Ce que j’en ai compris, c’est qu’il serait aujourd’hui politiquement utile, nécessaire, que les mémoires se réconcilient, s’apaisent... C’est un langage dans lequel je ne me retrouve pas. »
Bruno Le Dantec : « C’est même dangereux, parce que le message que ça sous-tend, c’est : “On tourne la page, et après vous arrêtez de nous faire chier. On reconnaît deux trucs vite fait et maintenant on passe à autre chose, on retourne au business.” C’est l’impression que ça donne en tout cas, et c’est choquant quand on pense aux blessures toujours vives, d’autant plus côté algérien…
Et puis ce n’est pas au pouvoir d’organiser ça. Le pouvoir fait ça, puis l’instant d’après il jette de l’huile sur le feu, notamment avec sa loi contre le “séparatisme”. Pour moi, ce qui est en jeu, c’est que les gens se parlent. Se mélanger, ça ne veut pas dire oublier mais se trouver des complicités, des amitiés, des solidarités en tant qu’habitants d’un même pays. Ou de deux pays intimement liés comme le sont la France et l’Algérie. Un jour, un taxi algérois m’a dit, en passant devant le monument aux héros de l’indépendance : “C’est leur Algérie” – en parlant des généraux, du FLN. Il me disait, à moi Français, qu’aujourd’hui, le principal ennemi du peuple algérien, c’était le pouvoir algérien. À nous d’être aussi clairs vis-à-vis du pouvoir ici, qui manipule lui aussi les mémoires. À nous d’établir un dialogue direct, de peuple à peuple pourrait-on dire. »
Emmanuel Vigier : « À mes yeux, il y a un vrai enjeu du côté de la création, de la fiction, de comment on s’empare de ce silence dans lequel on a vécu. Ce qui est important, c’est qu’aujourd’hui les histoires se racontent. Qu’elles nous réconcilient ou pas, on s’en fout, c’est impossible de toute façon. Mais il y a nécessité de les raconter, ces histoires, de nous les approprier, de lutter contre le silence. Qui est aussi un silence d’État. »
Bruno Le Dantec : « Et un silence qui enfante des monstres... »
1 Écouter à ce sujet « L’Algérie des camps », une série documentaire de Dorothée Myriam Kellou, France Culture (07/10/2020).
Propos recueillis par Clair Rivière
À propos de la série
Née en France, dans une famille franco-algérienne, Dorothée Myriam Kellou s’interroge sur l'histoire de l'Algérie, et découvre alors l’histoire des regroupements de populations pendant la guerre. Dorothée Myriam part avec son père en voyage pour documenter cette mémoire intime encore enfouie.
Dorothée Myriam Kellou part en voyage avec son père à Mansourah, son village natal en Algérie, pour documenter une mémoire intime et douloureuse : les camps de regroupement organisés par l’armée française qui ont rassemblé plus de deux millions de personnes à partir de 1955.
Que faire quand on grandit avec un père silencieux qui ne peut pas parler de son expérience de la colonisation française en Algérie ? Dorothée Myriam Kellou a décidé d'interroger la mémoire de son père, réalisateur algérien exilé en France. Elle est partie en voyage avec lui à Mansourah, son village natal, pour documenter une mémoire intime et encore douloureuse : les camps de regroupement des Algériens organisés par l’armée française qui ont rassemblé plus de deux millions de personnes à partir de 1955.
Ce déracinement en masse de la population rurale algérienne est un épisode méconnu de la guerre d’Algérie. Les conséquences de ces regroupements structurent encore l’Algérie aujourd’hui.
2 Le Trauma colonial – une enquête sur les effets psychiques et politiques contemporains de l’oppression coloniale en Algérie, La Découverte, 2018.
Dorothée Myriam Kellou est une journaliste et réalisatrice installée à Paris. Elle est née d'un père algérien et d'une mère française, c’est autour de la dramatique et honteuse histoire des camps de regroupement de la France coloniale que la cinéaste Dorothée-Myriam Kellou a recueilli auprès de son père, dans son village natal de Mansourah, ses souvenirs de cette transplantation... en réalisant le documentaire " A Mansourah, tu nous as séparé"
Pendant la guerre d’Algérie, 2 350 000 personnes ont été déplacées par l’armée française et regroupées dans des camps. 1 175 000 ont été forcés de quitter leur lieu d’habitation déclaré "zone interdite" pour un espace contraint loin de leurs ressources.
Entre 1954 et 1959, l’armée française a déplacé 2 millions 350000 paysans algériens suspectés de liens avec les indépendantistes vers des camps de fortune. Un sujet traité à la première personne par la journaliste Dorothée Myriam Kellou, aidée par les souvenirs de son père.
Dorothée Myriam Kellou part en voyage avec son père à Mansourah, son village natal en Algérie, pour documenter une mémoire intime et douloureuse : les camps de regroupement organisés par l’armée française qui ont rassemblé plus de deux millions de personnes à partir de 1955.
L'Algérie des camps - enquête à la première personne• Crédits : Radio France
Que faire quand on grandit avec un père silencieux qui ne peut pas parler de son expérience de la colonisation française en Algérie ? Dorothée Myriam Kellou a décidé d'interroger la mémoire de son père, réalisateur algérien exilé en France. Elle est partie en voyage avec lui à Mansourah, son village natal, pour documenter une mémoire intime et encore douloureuse : les camps de regroupement des Algériens organisés par l’armée française qui ont rassemblé plus de deux millions de personnes à partir de 1955.
Ce déracinement en masse de la population rurale algérienne est un épisode méconnu de la guerre d’Algérie. Les conséquences de ces regroupements structurent encore l’Algérie aujourd’hui.
Ce podcast de Dorothée Myriam Kellou et Thomas Dutter inaugure la collection "Enquête à la première personne", lancée par France Culture avec le prix Albert-Londres.
Malek, père de Dorothée-Myriam Kellou, dans le film "À Mansourah, tu nous as séparés"• Crédits : Les Films du Bilboquet
Jean-Marie Robert, sous-préfet de la République à Akbou, en Kabylie, avait dénoncé les camps en pleine guerre d’Algérie. Son fils, Hugues, a récemment ouvert la malle dans laquelle son père avait rangé ses rapports secrets. Il vient à Paris rencontrer Dorothée Myriam et partager avec elle ses découvertes.
Melbou, ancien camp de regroupement • Crédits : Dorothée-Myriam Kellou
Habitante d'un village socialiste algérien, devant sa maison - Février 2020• Crédits : Dorothée-Myriam Kellou
Cérémonie du henné à Mansourah - Février 2020• Crédits : Dorothée-Myriam Kellou