-
Alençon : Samuel Churin incarne Mouloud Feraoun
SOUVENIR
Samuel Churin comptera 111 représentations du "Contraire de l'Amour" fin mars 2017.
Il y a 6 ans, jour pour jour, le 11 mars 2017, je mettais en ligne cet article qui nous parle d’une pièce de théâtre : "Le Contraire de l'Amour" est adapté du Journal, le recueil de Mouloud Feraoun instituteur kabyle assassiné à Alger, le 15 mars 1962 par l’OAS.
Dans quelques jours viendra le triste anniversaire de cette tuerie… car Mouloud Feraoun a été assassiné avec 5 autres de ses compagnons : Marcel Basset ; Ali Hammoutene ; Max Marchand ; Salah Ould Aoudia ; Robert Eymard. Ces noms et ces visages que nous ne voulons pas, que nous ne pouvons pas oublier… Un hommage leur sera rendu le 15 mars 2023, j’espère que Jean-Philippe Ould Aoudia fils de Salah Ould Aoudia, l’un des assassinés par l’Organisation Armée Secrète me fera parvenir des informations concernant cette cérémonie.
Le président Macron, qui a alterné les actes positifs et les compromissions en matière mémorielle, a reconnu à Paris ce massacre d’hommes de bonne volonté. Il y a eu aussi un hommage en Algérie qui vous pourrez voir dans la première vidéo ci-dessous.
Mais ce n’est qu’un premier pas car il y a eu 2700 victimes des terroristes fascistes de l’OAS. « Nous attendons un geste mémoriel de la part du président en hommage aux victimes de l’OAS, qui sont au nombre de 2700 » avait écrit Jean-François Gavoury président de l’ANPROMEVO.
Michel Dandelot
Alençon :
Samuel Churin incarne
Mouloud Feraoun
"Le Contraire de l'Amour" est adapté du Journal, le recueil de Mouloud Feraoun instituteur kabyle assassiné à Alger, le 15 mars 1962. A voir au théâtre d'Alençon, jeudi 16 mars.
Samuel Churin comptera 111 représentations du "Contraire de l'Amour" fin mars 2017.
Qui était Mouloud Feraoun ?
Samuel Churin : « Un Kabyle né en 1913 qui a grandi en Kabylie. Il a été repéré par les Français car il faisait partie des 5 % de la population algérienne alphabétisée à cette époque. Il a obtenu son bac avec la mention Très Bien mais il a été refusé à la fac. Il s’est alors présenté au concours d’instituteur et a exercé la profession pour le compte de L’Éducation Nationale Française. Son premier roman, Le fils du pauvre, a été un best-seller et l’est encore en Algérie. C’est le « La Fontaine » des élèves d’Algérie qui apprennent à lire avec Feraoun ! Près de chez moi à Paris, il y a des bistrots tenus par des Kabyles. Quand je leur demande s’ils connaissent Feraoun, ils me répondent aussitôt : « Mais oui ! Fouroulou ! » C’est le nom du personnage central du Fils du pauvre. Alors qu’en France, Feraoun est moins connu. Il avait énormément d’amis français : Camus, de Roblès, Germain Tillion. Il a été assassiné par l’OAS le 15 mars 1962, trois jours avant les accords d’Evian, lors d’une inspection d’un centre social à Alger, en même temps que deux autres Algériens et trois Français. »
Samuel Churin a d'abord été informaticien avant d'embrasser la carrière de comédien.
Que dit « Le Contraire de l’Amour » de la Compagnie
« Passeurs de Mémoires » ?
« C’est une adaptation de Journal de Feraoun dans lequel il décrit la guerre d’Algérie entre 1955 et 1962. Avec neutralité. Il est furieux contre les horreurs de la guerre quelles qu’elles soient, d’où qu’elles viennent et par qui elles soient commises. Il dresse un bilan lucide de la colonisation. Il dit non à cette société à deux vitesses avec d’un côté des gens alphabétisés, de l’autre les analphabètes, d’un côté ceux qui ont le droit de vote et de l’autre ceux qui n’y ont pas le droit. Lui cherche aussi son étiquette et écrit : « Qu’on me dise ce que je suis ? » Il n’est pas reconnu par les Français parce qu’il veut que tout le monde ait les mêmes droits. Il dit que dès 1958, les Algériens savent qu’ils ont gagné cette guerre et qu’il a peur que les fellagas l’arrêtent alors qu’il est pleinement avec les siens. Son journal, qu’il cachait à l’école dans des cahiers d’écoliers, a été édité après sa mort. Il a été rapidement épuisé puis réédité en 2011 après le succès de la pièce à Avignon ».
Elle date du 16 mars 2011 et n’a jamais cessé de tourner ?
« Oui, elle a été créée dans la foulée de Folies Coloniales de la même Compagnie Passeurs de Mémoires qui, elles, avaient vu le jour en 2008-2009 en réplique au discours de Sarkozy sur « les aspects positifs de la colonisation ». On a joué Le Contraire de l’Amour à Avignon en juillet 2011 et très vite, les représentations ont été blindées. On a eu de belles critiques de la presse (« Le plus beau spectacle du in et du off » selon Le Masque et la Plume, etc.) et on a enchaîné avec le théâtre de l’Odéon à Paris. On a aussi fait trois grandes tournées en Algérie dont une dans le cadre du festival international d’Alger et une pour l’Institut Français. C’est un monologue d’1 h 20 et je suis accompagné sur scène, par Marc Lauras, au violoncelle. On sera à 111 représentations à la fin du mois de mars 2017 ! »
Samuel Churin est né à Alençon en 1965.
Le thème est très actuel ?
« Oui. Il y a d’abord la façon dont un homme libre regarde la Grande Histoire et puis ce toujours même processus de la colonisation avec deux peuples qui cohabitent à deux vitesses. »
La Guerre d’Algérie : un sujet sensible ?
« Tant qu’on n’aura pas compris qu’on est aussi des enfants de la colonisation on n’avancera pas. C’est comme chez le psy chez qui vous venez travailler un secret de famille. Combien d’années faudra-t-il pour que nous puissions évoquer toutes ces guerres perdues : l’Indochine, l’Algérie ? Il n’est ni question de repentance ni de négation mais discutons-en tout simplement. C’est d’ailleurs ce qui se passe souvent après le spectacle et les soirées sont très apaisées ».
« Le Contraire de l’Amour » par la Compagnie Passeurs de Mémoire, jeudi 16 mars à 20 h 30 au théâtre d’Alençon. Entrée : 10 € (billetterie sur place). Mise en scène : Dominique Lurcel. Jeu : Samuel Churin. Violoncelle : Marc Lauras.
Qui est Samuel Churin ?
Il est né à Alençon en 1965. Il a fréquenté l’école primaire de Damigny, le collège Balzac et le lycée Alain où il a décroché un Bac C (maths-physique) en 1983. Il a poursuivi des études d’informatique à Paris avant de travailler dans ce domaine à Lisieux où il a été repéré par le directeur du théâtre dramatique de Caen lors d’une représentation de théâtre amateur à Lisieux en 1991.
Depuis, il enchaîne les rôles au théâtre et au cinéma. Il joue notamment dans « Raid Dingue » à l’affiche en ce moment et aura un rôle dans « Normandie Nue » de Philippe Le Guay en tournage au printemps au Mêle-sur-Sarthe. Samuel est le frère aîné de Luc et Arnaud, également comédiens.BANDE-ANNONCE
EXTRAIT :
« Gisèle Halimi aurait-elle apprécié qu’on lui rende hommage ce mercredi 8 mars ?« Jean-Marie Le Pen n’a sans doute pas pratiqué la torture en Algérie » : polémique autour d’un podcast de France Inter consacré au fondateur du Front national »
-
Commentaires
Cher Michel Dandelot,
Puisque de compte rendu de cérémonie commémorative du 15 mars 1962 il est question, regrettons que n’ait pu être mise à votre disposition, à l’époque (2017), une image représentant le comédien d’origine alençonnaise Samuel Churin devant la stèle dédiée par la Ville à Alfred Locussol.
Bien cordialement,
J-F. Gavoury
1Jean-PhilippeSamedi 11 Mars 2023 à 09:27Merci à Michel Dandelot de rappeler que le 15 mars 1962 à Alger, un commando de l’OAS a massacré six dirigeants des Centres sociaux éducatifs. Un hommage officiel leur sera rendu le 15 mars prochain dans l’esprit républicain qui a toujours été le sien. La cérémonie se tiendra, comme c’est le cas depuis plus de vingt ans, au siège du ministère de la Transformation et de la Fonction publiques à Paris. Une plaque y a été apposée à la mémoire des six victimes de leur engagement pour les valeurs de la République. Sera associée à cet hommage la mémoire de toutes les autres victimes de l'OAS qui a commis 2546 attentats individuels, 510 attentats collectifs et 13000 explosions de plastic visant en Algérie et en France civils, militaires, élus, magistrats, fonctionnaires, défenseurs eux aussi des institutions et des valeurs de la République.
Jean Philippe Ould Aoudia Président de l'association les Amis de Max Marchand, de Mouloud Feraoun et de leurs Compagnons
Ajouter un commentaire
Eh bien merci, je n'avais pas connaissance de cette transposition au théâtre du livre de Mouloud Ferraoun.
Le consensus sur le travail de mémoire du colonialisme et de la guerre d'Algérie passera aussi par la reconnaissance que les appelés du contingent en ont été victimes. Au mieux il y a eu le gâchis des longs mois de jeunesse perdus dans un conflit, injuste, anachronique et une situation absurde, et pour certains beaucoup plus que cela !