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Alger 1957, la ferme des Disparus
Alger 1957, la ferme des Disparus
C’est un petit livre, préfacé par Alain Ruscio, produit par Jean-Philippe Ould Aoudia que je connais personnellement. Je l’avais accueilli à la gare de Béziers le 14 mars 2015 afin de participer au contre rassemblement que nous avions programmé lors du changement de nom de la rue du 19 mars 1962 à qui on a attribué celui d’un officier putschiste.
Le père de Jean-Philippe, Salah Ould Aoudia, faisait partie des six inspecteurs des centres sociaux éducatifs assassinés par l’OAS à Château Royal à Alger le 15 mars 1962 soit trois jours avant la signature des Accords d’Evian. Jean-Philippe préside une association pour la mémoire de ces victimes.
Le livre rend compte de la situation au temps de ce que l’auteur appelle l’écrasement d’Alger en opposition à l’expression « Bataille d’Alger » utilisée habituellement par les historiens. C’est que le combat est en effet disproportionné, quelque 3 000 militants indépendantistes mal équipés contre 20 000 soldats bien pourvus en matériel de l’armée française.
Une armée qui utilise diverses structures telles les forces territoriales, les services de renseignements et qui bénéficie de la légalité de fonction de police que lui confèrent les pouvoirs spéciaux votés le 12 mars 1956. La 10ème Division de Parachutistes, avec à sa tête Massu, a en fait carte blanche.
On trouve dans ceux qui participent aux opérations répressives engagées en représailles de celles tentées par les Algériens en réaction aux attentats qu’ils ont subis des civils européens que Jean-Philippe désigne par contre-terroristes et qui sont des partisans sans concession de l’Algérie française. On les retrouvera plus tard au sein de l’OAS.
Parmi eux on compte Robert Martel un gros colon, 300 hectares de vignes et d’orangers, qui offre l’hospitalité dans plusieurs de ses fermes de la Mitidja, comme Chebli ou La Cigogne pour ses basses besognes à des unités à qui on a confié le soin d’agir. Le décor est planté, on va suivre les arrestations, la torture, les exécutions sommaires et la disparition des corps.
Le phénomène a pris une telle ampleur qu’il y faut de l’organisation. Le commandant Aussaresses a été affecté à ces tâches. Il a été reconnu pour sa compétence en la matière. D’autres gradés de divers rangs sont recensés et il est fait état de leur collaboration aux crimes planifiés.
C’est lourd et complexe. Les lieux d’exécution, les fosses communes dans lesquelles on ensevelit les cadavres ne sont pas tous identifiés. Leur découverte servira à faire éclater la vérité sur cette phase particulièrement horrible du colonialisme et de la guerre menée pour tenter de le perpétuer. En même temps cela permettrait aux familles de pouvoir faire leur deuil.
Divers témoignages sont publiés sur ces disparus dont on n’a plus de trace par des proches qui ont demandé des comptes sur ce qu’ils étaient devenus.
Est également exposé le sort qu’ont connu avec les amnisties prononcées divers officiers qui, quoique félons, ont été réhabilités et leur déroulement de carrière reconstitué.
Un livre qui est une étude précieuse sur un sujet qui fait dresser les cheveux sur la tête tant l’inhumain est présent tout au long de ses pages.
Aux Editions Tirésias – Michel Reynaud, 8 €
Jacques Cros
SOURCE : http://cessenon2.centerblog.net/705-alger-1957-la-ferme-des-disparus
J’ai eu, moi aussi le grand honneur de recevoir le livre dédicacé de mon ami Jean-Philippe Ould Aoudia que j’ai connu « dans la vraie vie » un certain 6 octobre 2011, ce jour-là nous inaugurions la stèle en hommage aux victimes de l’OAS au cimetière du Père Lachaise, à Paris. Je vous conseille d’acquérir ce remarquable ouvrage dont je vous en présente le verso.
Michel Dandelot
« Traverse : Macron, la marche vers le Front nationalMassacres du 8 mai 1945 et Guerre d’Algérie : "la réconciliation ne peut qu'être l'oeuvre d'une volonté politique" »
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