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Cet Yvelinois avait été le premier soldat à refuser de se battre lors de la guerre d’Algérie
Cet Yvelinois avait été le premier soldat
à refuser de se battre lors de la guerre
d’Algérie
Habitant de Trappes (Yvelines), Alban Liechti est décédé à l’âge de 89 ans. Il restera dans l’Histoire comme le premier appelé à avoir dit « non » à la guerre d’Algérie en 1956.
Mercredi 4 septembre, plus de 200 personnes sont venues au cimetière parc de Trappes (Yvelines) rendre un dernier hommage à Alban Liechti. ©Alexandre MARQUÉ
Famille, amis, élus, militants communistes, de la CGT ou du Mouvement de la paix… Ce mercredi 4 septembre, au cimetière parc de Trappes (Yvelines), plus de 200 personnes sont venues rendre un dernier hommage à Alban Liechti, décédé le 29 août 2024 à l’âge de 89 ans.
Il passera quatre ans de prison
Ce Trappiste restera dans l’Histoire comme le premier soldat français à avoir dit « non » à la guerre d’Algérie (1954-1962). C’était en 1956. Appelé sous les drapeaux à l’âge de 21 ans et affecté au 5e régiment du génie au camp de Satory à Versailles, ce jeune militant communiste refuse de prendre les armes contre le peuple algérien. Le 2 juillet 1956, il s’en explique dans une lettre au président de la République de l’époque, René Coty.
« Je ne peux pas prendre les armes contre le peuple algérien en lutte pour son indépendance. En me refusant à participer à cette guerre injuste, j’entends contribuer à préserver la possibilité de rapports librement consentis, basés sur les intérêts réciproques et le respect des droits de nos deux peuples, et rapprocher le moment où la guerre fera enfin place à la négociation. »
Alban Liechti dans sa lettre au président de la République
Alban Liechti paiera le prix de son combat. S’ensuivront quatre années d’emprisonnement à l’isolement en Algérie puis aux Baumettes à Marseille et à Carcassonne durant lesquelles il subit humiliations et brimades. Pendant cette longue période, sa femme, Yolande, elle aussi militante communiste, peut compter sur le soutien du Secours populaire.
« Un symbole de la lutte contre la guerre d’Algérie »
« Un symbole de la lutte contre la guerre d’Algérie », souligne Guillaume Roubaud-Quashie, directeur de la Maison Elsa Triolet-Aragon à Saint-Arnoult-en-Yvelines et membre du comité exécutif national du Parti communiste français (PCF), lors de ses obsèques.
Libéré en mars 1961, Alban Liechti n’en a pas encore fini avec la guerre. Aussitôt sorti de prison, il est renvoyé en Algérie. Il accepte cette fois-ci de porter un fusil mais refuse de le charger. En représailles, il est mis systématiquement en première ligne lors des combats.
« Imaginez le courage immense dont il fallait faire preuve », rappelle le maire de Trappes, Ali Rabeh, également présent pour lui rendre hommage.
Finalement, quelques jours avant les accords d’Evian (le 18 mars 1962) mettant fin à la guerre d’Algérie, le « soldat du refus » est libéré de ses obligations militaires.
Jardinier à la mairie de Trappes
Après la guerre, de retour à Trappes, Alban Liechti poursuit son engagement communiste, pacifiste et anticolonialiste. Jardinier à la mairie de Trappes puis responsable des espaces verts de la Ville jusqu’à sa retraite, il présidera pendant plus de 40 ans le comité local du Mouvement de la paix avec lequel il organisait des voyages mémoriels à Verdun ou Oradour-sur-Glane et des animations dans les écoles de la ville.
Le maire de Trappes (Yvelines) Ali Rabeh (à gauche) a salué en Alban Liechti « une des plus belles figures » de la ville. ©Alexandre MARQUÉ
« Une des plus belles figures » de Trappes
En 1986, il fait également partie des fondateurs de l’Association des combattants de la cause anticoloniale, qui devient ensuite Agir contre le colonialisme aujourd’hui (ACCA).
En 2012, Alban Liechti avait raconté son expérience dans le livre « Le Refus ».
Après l’ancien maire Bernard Hugo en 2021, son successeur, Ali Rabeh, salue sa mémoire : « La ville de Trappes enterre une de ses plus belles figures. Alban Liechti a marqué les esprits par son engagement indéfectible pour la paix. »
Cimetière : reportage du Mouvement de la Paix
Commentaire du Mouvement de la Paix, dont Alban Liechti a été pendant 40 ans membre du Conseil National et Président du Comité de Trappes : le Mouvement de la Paix a dit au revoir à une grande figure pacifiste, Alban LIECHTI, premier soldat du Refus pendant la guerre d'Algérie, qui toute sa vie a oeuvré pour la Paix.
Les drapeaux bleus et multicolores étaient venus nombreux lui rendre un dernier hommage.
Plusieurs intervenants ont lu des textes très émouvants et ont retracé la vie de cet humaniste qui a su vivre ses convictions jusqu'à son dernier souffle.
"Il restera de toi ce que tu as donné." écrivait Simone Veil. Je reste convaincu que tous ceux qui t'ont connu garderont beaucoup de toi, Alban, car tu as beaucoup donné pendant toute te vie.
Repose tranquille ! Ton souvenir est à jamais gravé dans la mémoire de beaucoup.
Les photos de la cérémonie
250 personnes environ ont accompagné Alban à sa dernière demeure. Drapeaux PCF, Mouvement de la Paix, ARAC
Intervention d'Ali Rabeh maire de Trappes.
Guillaume Roubaud-Quashie représentant la direction nationale du PCF, pour qui les maîtres mots d'Alban étaient Conscience Liberté et Communisme.
Daniel Clayessen, secrétaire national du Mouvement de la Paix a évoqué les manifestations auxquelles Alban a participé : base nucléaire de l'île Longue, manifestation et délégation mondiale pour le désarmement devant L'ONU...
Catherine Girardon, présidente du Comité de Trappes du Mouvement de la Paix a témoigné du travail de sensibilisation à la Paix accompli par Alban auprès des associations, avec les enfants des écoles, les voyages mémoriels populaires qu'il a initiés.
Avec frère et sœur j'interprète a capella ma chanson Refus d'obéissance que j'avais composée et écrite dès 1983 en hommage au choix de courage qu'il avait fait face à la guerre d'Algérie.
Merci à toutes celles et ceux qui m'ont témoigné leur sympathie ou l'ont témoignée à mes frère et soeur et mes enfants à l'occasion du décès d'Alban Liechti, notre père et grand-père, qui a rejoint Yolande pour l'éternité. En attendant sans doute des images de la belle cérémonie qu'il méritait (autour de 250 personnes présentes), voici la chanson que j'ai chanté a capella en fin de cérémonie, ici interprétée il y a quelques années avec mes musicien.ne.s d'alors... et les paroles :
Monsieur le président
Je vous fais une lettre
Qui vous fera peut-être
Un peu grincer les dents
Je viens de recevoir
Un chargeur à ball's réelles
Pour nettoyer les douars
Pour débusquer les fells
Monsieur le président
je vous rends mon fusil
Et mon chargeur aussi
Avec les ball's dedans
On veur qu' j'aill' pacifier
mais on m' donne un' pétoire
J' trouv' ça contradictoire
Et j' préfèr' pas m'y fier
Monsieur le président
J' suis pas un déserteur
S'il faut verser mon sang
C'est pas ça qui m'fait peur
Si demain ma patrie
Risquait d'être asservie
Je r'prendrais un fusil
J'irais donner ma vie
Monsieur le président
Je suis un bon soldat
J'suis un bon élément
Les chefs sont contents d'moi
j' veux bien fair' l'armée mais
C' pays-là n'est pas l' mien
Je tirerai jamais
Sur mon frère algérien
C' lui qui m'a inspiré
Cette fière chanson
C'est un soldat français
Qu'a choisi la prison
C'était y' a bien longtemps
Dans une guerr' perdue
Il avait défendu
L'honneur des pauvres gens
Aujourd'hui quand je vois
Le calvair’ quotidien
Du peupl’ palestinien
Je r'pense à ce soldat
Que beaucoup trouv'nt sympa
Que moi j' connais si bien
Mêm' que c'est mon copain
Mêm' que c'est mon papa
« C’est mon point de vue : la nomination du Premier ministre Michel Barnier… C’est aussi la nomination du Premier censurableL'extrême-droite plus que jamais au cœur de l'échiquier politique national »
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