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Du Moyen Âge à l’Islande en passant par 1830 et l’OAS : d’où viennent les concerts de casseroles ?
Du Moyen Âge à l’Islande
en passant par 1830 et l’OAS : d’où viennent
les concerts de casseroles ?
Dans "Apolline Matin" ce vendredi sur RMC et RMC Story, Nicolas Poincaré se penche sur l’historique des concerts de casseroles, qui se multiplient en marge des déplacements d’Emmanuel Macron et de ses ministres.
Des milliers de personnes manifestent en France après l'allocution d'Emmanuel Macron, accompagnées par leurs casseroles.© Damien MEYER / AFP
Après l'Alsace mercredi, Emmanuel Macron a de nouveau été accueilli par des concerts de casseroles ce jeudi dans l'Hérault. Et les gendarmes en ont confisqué autour du collège que visitait le président de la République à Ganges. Aux manifestants qui demandaient des explications, les forces de l’ordre brandissaient un arrêté préfectoral interdisant tous les dispositifs sonores portatifs.
Un dispositif sonore portatif, c’est le nom que l’administration a trouvé pour désigner les casseroles. Et c’est bien vu, parce que le but des concerts de casseroles, c’est de faire le plus de bruit possible.
C’est une tradition qui vient du Moyen Âge. On appelait cela un “charivari” et cela visait en particulier les mariages mal assortis. Lorsqu’un homme riche, vieux ou moche, épousait une fille trop jeune, les villageois organisaient un concert de casseroles devant chez lui pour perturber sa nuit de noce. C'était donc l’idée d’une colère populaire qui s’exprimait contre un puissant.
Puis le concert de casseroles est devenu un acte politique. Au 19e siècle, après l'échec de la révolution de 1830 et le retour de la monarchie de Juillet, le concert de casseroles est devenu un mode de contestation politique.
Des foules de manifestants venaient au domicile des députés jugés corrompus ou trop proches de Louis Philippe. On a compté des centaines de ces casserolades qui parfois pouvaient durer plusieurs jours.
L’historien Emmanuel Fureix explique dans le Figaro que c'était bien le signe d’une revanche du peuple sur les hommes d'État. Les personnes ciblées sont humiliées à leur domicile, dans leur sphère privée. C’est le peuple qui envahit la rue et force le personnage public à s'enfermer chez lui…
Ni de droite ni de gauche
C’est donc un mode de protestation “de gauche”, au départ. Mais plus tard, dans les années 1950, les poujadistes ont repris le concept. C’était un mouvement populiste dont Jean-Marie Le Pen faisait partie.
A la même époque, les casseroles sont aussi devenues le moyen d’expression des partisans de l’OAS, en Algérie, qui tapait cinq fois sur leurs casseroles. Ce qui signifiait “Algérie française”.
La casserole est donc devenue ni de droite ni de gauche. En 2016, contre les lois travail de François Hollande, Jean-Luc Mélenchon avait tenté de lancer des concerts de casseroles la nuit avec ce slogan: “Ils nous empêchent de dormir, on va les empêcher de rêver”.
Pendant la campagne électorale de 2017, François Fillon a souvent été accompagné par des concerts de casseroles. Parce que la casserole est aussi le symbole des “affaires”. On dit “traîner des casseroles” ou bien moins poliment “avoir des casseroles au cul”. Ce qui veut dire être compromis, être mêlé à un scandale…
Il y a donc tout cela derrière les concerts de casseroles qui ont perturbé deux visites présidentielles ces derniers jours mais aussi plusieurs visites de ministres en régions. L’association Attac, qui est la première à avoir appelé à ce mode de protestation la semaine dernière, propose d’organiser des comités de “non accueil” à chaque déplacement de ministre.
A l’étranger, au Chili ou en Argentine par exemple, les concerts de casseroles ont souvent été utilisés pour contester des pouvoirs de droite ou de gauche. En Islande, en 2008, les manifestants défilaient en tapant sur des casseroles tous les samedis matin pour dénoncer la corruption de la classe politique après la faillite du système bancaire. Le gouvernement était finalement tombé. Le mouvement s’appelait: "Búsá halda byl tin gin". Ce qui veut dire tout simplement : la révolution des casseroles.
Casseroles OAS
Selon une coutume aux origines très anciennes, une procession armée de casseroles faisait du bruit pour chasser les mauvais esprits. On la retrouve chez les anciens Celtes …
Le 23 septembre 1961, l'opération casseroles permit aux pieds-noirs de se défouler sans danger en menant pendant des heures un charivari comme jamais la ville n'en avait entendu jusque-là. Tapant sur des instruments de cuisine, sur les volets en fer, sur des feuilles de tôle ils firent retentir les trois brèves et deux longues d' « Algérie française » pendant plus de cinq heures.
« Ces casseroles, ces sifflets, ces klaxons Al-gé-rie française, ont quelque chose d'émouvant. Cela a duré deux heures sans une seconde d'interruption. Ce n'est plus de l'hystérie, mais un cri désespéré, interminable, qui remue les plus endurcis. Voilà comment on est balancé continuellement entre deux mondes qui s'entretuent, pleurent, souffrent, appellent au secours : cri dérisoire des casseroles, quête pathétique d'un impossible miracle. » Mouloud Feraoun in Journal 1955-1962 1962
« L'an 1961 finissait dans le bruit et le sang. On ferait semblant. [...] Minuit sonna à tous les clochers de la ville(Oran). Quelqu'un dit : "Les casseroles !" Une immense clameur s'élevait de la ville : derrière les volets des balcons, dans les cours, depuis les terrasses sombres, jaillirent des concerts improvisés de casseroles, sous un ciel serein, lui. En un rien de temps, chacun s'était débrouillé, sa casserole et sa cuillère à la main, tapait avec l'énergie du désespoir "Algérie française" [...] Après ce concert de casseroles, réconfortant et éprouvant à la fois, l'ambiance aux petites heures du jour se fit mélancolique. » Helyett Ben Amara in Il était une fois … là-bas 2000
Geneviève nous rapporte l’anecdote suivante : sa tante avait donné une louche et une marmite à la grand-mère pour taper : AL-GE-RIE-FRAN-CAI-SE en rythme, et mémé avait tapé si fort que le fond de la marmite n'a pas résisté à l'assaut de la louche …
On retrouve de semblables concerts de casseroles au Chili en 1971, en Argentine en 2001 (plus de 150 familles pieds-noirs ont choisi l’Argentine en 1962), en Islande en 2009, au Québec en 2012, en Egypte et en Turquie en 2013 …
SOURCE : casseroles - Manifestation PN Harkis 2012 (canalblog.com)
A relever que, dans le cas algérien, les pilons et les youyous des Algériennes avaient largement précédé les casseroles de l'OAS.
Les deux camps utilisaient les mêmes sonorités, en inversant : ti ti ti ta ta (3 courtes deux longues pour les OAS : al gé rie fran çaise), et ta ta ti ti ti (deux longues trois courtes pour les Algériens: ta hia Dja za ir)
« Lettre ouverte à Michel Sabourdy rédacteur en chef de L’Ancien d’Algérie suite à son article paru dans L'Ancien d'AlgérieAlgérie – France : un nouvel appel téléphonique entre les deux présidents programmé »
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Commentaires
1Jean-PhilippeSamedi 22 Avril 2023 à 11:20après l'aubade, la casserolade. Les habitants de Wuhan et de Téhéran tapaient-ils sur des casseroles lors de leurs manifestations nocturnes contre la dureté du confinement pour les premiers et la brutalité de la répression pour les seconds?
Jean-Philippe Ould Aoudia
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Je vous propose de lire sur mon blog l'article consacré à l'utilisation des casseroles par Le Pèque. Lien http://cessenon.centerblog.net/6575887-le-peque-soupconne-de-terrorisme