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EDWY PLENEL Journaliste à Mediapart "Présidentielle 2022 et si nous faisons en sorte que ce soit le meilleur"
EDWY PLENEL
Journaliste à Mediapart
[À L'AIR LIBRE] « 2022, c’est dans moins d’un an. Tout est possible. Et si nous faisions en sorte que ce soit le meilleur ? »
Tout est possible et d’abord le pire : un duel Macron-Le Pen. Ce ne sera pas un choix mais un piège ! À Mediapart nous sommes résolus à l’éviter. Voici pourquoi et comment.
Coordination Contre la Loi "Séparatisme"
La loi « contre le séparatisme » définitivement adoptée :
voici la déclaration de la Coordination
L’heure a sonné.
La loi « Séparatisme » vient d’être votée définitivement, intégrant dans la législation française des dispositions islamophobes, et de ce fait, dérogatoires et liberticides. Elle constitue en effet une dangereuse étape de la mise au pas des musulmans dans leurs expressions religieuses, sociales, culturelles et politiques, tout en leur réduisant l’accès à bon nombre de droits. Elle renforce ainsi l’autoritarisme de l’État qui pourra utiliser légalement l’ensemble de ses moyens administratifs, policiers et judiciaires contre toute forme d’organisation du culte et d’association des musulmans. Et elle créée de facto un groupe soumis à un véritable régime d’exception qui repose sur la suspicion, le contrôle, l’intimidation et la répression. Cette loi mérite amplement le qualificatif de « scélérate ». Déjà parce qu’elle s’inscrit dans une longue lignée de législations françaises racistes, passées ou présentes, de nature coloniale, rromophobe, négrophobe ou antisémite. Et bien entendu islamophobe puisque nous assistons bien à une étape nouvelle et redoutable de l’islamophobie de l’État qui puise très loin ses racines.
Sans naïveté ni illusion, la Coordination contre la loi Séparatisme (CCLS) s’est créée pour combattre cette loi, depuis son annonce présidentielle et tout au long de son parcours parlementaire, marquée entre autres par les affres de ses débats. Cet engagement s’est fait avec le sens des responsabilités historiques aussi bien devant les générations présentes, que passées et même futures. Nulle place n’était envisageable pour la résignation, suivant en cela les préceptes islamiques et le modèle inspirant de toutes les résistances menées par nos aïeux et par tous ceux qui se battent aujourd’hui encore dans le monde pour leur dignité et contre l’injustice.
Si l’heure a sonné, pour autant, cette bataille a constitué indéniablement un nouveau jalon dans l'organisation des musulmans en France. Elle a d'abord réussi à défier le consensus islamophobe, le silence complice ainsi que le climat ambiant empreint de frilosité, d’intimidation et d’adversité. Ce climat a pesé tout particulièrement sur les musulmans et leurs organisations, suite à une campagne lancée, en amont du processus législatif, qui vise la sidération tout en annonçant que l’arbitraire, les perquisitions, les menaces d’expulsion et les dissolutions deviendraient la norme. Cette bataille a aussi grandement favorisé les conditions d’un « Nous » exprimant un point de vue musulman, autonome et responsable, clair et tranchant, à propos de cette nouvelle séquence de l’autoritarisme islamophobe. Un « Nous » construit par-delà, et même, à partir de nos différences de sensibilités politiques, de degrés de piété, d’origines nationales et d’appartenances générationnelles. Un « Nous » qui a su établir des alliances avec les organisations combattant les racismes et les politiques impérialistes. Un « Nous » qui a su tisser des liens avec les communautés musulmanes qui subissent, dans une grande partie du monde, une islamophobie parfois bien plus dévastatrice voire criminelle. En organisant un espace de réflexions et d’actions construit au niveau national, nous avons multiplié les formes de luttes, parmi lesquelles des rassemblements, des prises de position publiques, des émissions de débats, une campagne de lettres adressées aux députés, une analyse juridique très serrée des dispositions de cette loi. Il ne pourra être dit, ni aujourd’hui ni demain, que celle-ci sera passée sans réactions réfléchies et organisées de la part de musulmans vivant en France.
L’heure a sonné et elle va continuer à sonner. Déjà parce que cette loi arbitraire et les interprétations attendues, tout aussi arbitraires, vont très vite générer des situations d’injustice et de peur. Et il nous faudra aussitôt nous placer aux côtés de ses victimes en lien avec d’autres structures d’aides. L’heure va continuer à sonner car la campagne électorale à venir constituera assurément l’occasion de surenchères islamophobes. Et il nous faudra faire entendre notre voix et ne pas nous laisser « être parlés ». Nous ne contenterons pas pour autant du seul espace juridique et associatif, ni nous ne nous laisserons être déroutés par les seuls enjeux électoraux de 2022.
Nous l’avions déjà compris auparavant et davantage lors de cette bataille. Il faut construire et consolider un espace qui garantisse les conditions d’épanouissement et d’expression d’une subjectivité politique musulmane et qui s’assumerait comme telle. C’est la seule condition pour se battre résolument et définitivement aussi bien contre l’islamophobie de l’État et tous ses relais que celle d’autres acteurs de l’espace public qui se voit renforcée. Cette dernière loi en date s’insère dans un dispositif législatif bien plus large comprenant la loi contre les signes religieux à l’école, celle contre la « dissimulation du visage », les lois successives dites de « sécurité » et « d’anti-terrorisme ». Ainsi, lutter, comme nous le ferons, pour l’abrogation de la loi « Séparatisme » signifiera impérativement lutter pour l’abrogation de l’ensemble de ces lois. De plus, l’islamophobie de l’État français se trouve dispersée et éclatée dans quasiment toutes les politiques publiques : la justice, la police, l’école, l’université, la jeunesse, les quartiers les plus pauvres, les foyers, le traitement colonial de Mayotte et de La Réunion, la situation des réfugiés et des « sans-papiers », les liens de domination avec nos pays d’origine, les alliances militaro-politiques et la politique de guerre, l’accès à l’emploi et au logement, la répartition des richesses, les médias, la création culturelle. C’est à ce titre que ces politiques menées à l’intérieur et à l’extérieur des frontières nous regardent et que nous n’avons pas d’autre choix que de formuler un point de vue politique contre leur l’idéologie. Enfin, se battre avec conséquence contre cette islamophobie c’est aussi dévitaliser ce qui constitue son cœur, à savoir le rejet de toute forme d’énonciation d’une subjectivité musulmane à travers ses modes d’expression et de vie relatifs à une foi, infériorisée ou jugée indigne de respect. Les musulmans n’ont donc pas d’autre choix, en vue de saper les fondements idéologiques de l’islamophobie, que de se libérer des carcans imposés pour conquérir leur autonomie totale et inconditionnelle et s’épanouir spirituellement, culturellement, socialement et politiquement.
Nourris de l’enseignement de l’Histoire et conscients des enjeux du moment historique que nous vivons, nous chercherons les voies d’une perspective musulmane au service de la Justice, de la Liberté et de la Dignité pour tout le monde. Que les oppresseurs ne se réjouissent pas trop vite : nous poursuivrons notre combat pour pouvoir enfin proclamer, avec d’autres qui subissent l’injustice, « L’heure de nous-mêmes a sonné ».
« Mon pays, la France pleure, on attaque ses valeurs en semant le malheur. Unissons nos coeurs face à ces horreurs et oublions rancoeursLors du déplacement d'Emmanuel Macron, les Polynésiens attendent des annonces sur la question sensible des essais nucléaires menés par la France dans l'archipel, de 1966 à 1996. »
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