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En soutien au peuple algérien : le rire de Djamila Bouhired
Le 15 août 2013 disparaissait
l'avocat Maître Jacques Vergès
Ami des Algériens
Jacques Vergès, le 30 janvier 2012 à Toulouse. (Crédit: BORDAS/SIPA)
L'hommage de Maître Kiejman
Sur BFMTV, l'avocat et ancien ministre sous François Mitterrand Georges Kiejman, a rendu hommage à sa manière à son «meilleur ennemi» dans les tribunaux : «Jacques Vergès était un homme fascinant et mystérieux. Sa dimension intellectuelle dépassait le cadre judiciaire. Il faisait partie des deux ou trois avocats extraordinaires de ma génération. Pendant la guerre d'Algérie, il a été physiquement très courageux et a risqué sa vie (il militait pour le FLN ndlr), a-t-il confié. C'est sans doute la période la plus glorieuse de sa vie".
"JE SUIS PASSÉ DE L'AUTRE CÔTÉ DU MIROIR"
Le mois d'avril 1957 est un tournant. Me Vergès, qui n'a que dix-huit mois d'expérience lorsqu'il est appelé en Algérie pour défendre une jeune militante du FLN, Djamila Bouhired. "Entre les Algériens et moi, ce fut le coup de foudre", a indiqué l'avocat. Avec Djamila aussi, qu'il épousera quelque temps plus tard.
La jeune poseuse de bombe est condamnée à mort – puis graciée – mais Vergès invente sa fameuse "défense de rupture" : il n'y a rien à attendre de la connivence des avocats avec des magistrats qui ne représentent que l'ordre colonial. Le verdict étant certain, il faut faire du procès une tribune : Vergès crache son mépris pour une justice qu'il récuse, et finalement, accuse ses accusateurs. Son courage et son insolence lui valent un an de suspension du barreau, en 1961, mais pour le FLN, c'est un héros, il est rebaptisé "Mansour" – le victorieux.
La jeune poseuse de bombe, condamnée à mort puis graciée grâce à l'avocat Maître Jacques Vergès qui deviendra son époux, la voici, en 2019 dans une manifestation du HIRAC :
En soutien au peuple algérien: le rire
de Djamila Bouhired
Les manifestations contre le 5e mandat, le vendredi 1er mars 2019, jour férié et jour de prière pour les Musulmans, ont de nouveau rassemblé des foules considérables dans toute l’Algérie. A 17h., les observateurs parlaient de dizaines de milliers de personnes dans le centre d’Alger, parmi lesquelles l’héroïne de la guerre d’Indépendance Djamila Bouhired qui a été chaleureusement applaudie.
Nous sommes en 1957 à Alger et Djamila Bouhired, résistante, membre du FLN, est à la barre des accusés. Après avoir été torturée, elle est ici jugée par le tribunal militaire du régime colonial français pour « terrorisme ». Le juge demande le silence, il va rendre son verdict, la sentence tombe, Djamila Bouhired est condamnée à mort. Contre toute attente, Djamila Bouhired éclate de rire.
Et il ne s'agit pas d'un petit rire nerveux et gêné. Son rire explose littéralement dans la face des magistrats effarés. Alors que l'Empire français, vêtu de sa robe noire la plus solennelle et la plus intimidante, vient de la condamner à mort, cette sale petite indigène ose se fendre la poire.
« Mais l'heure est grave, mademoiselle ! », s'égosille le juge dont la voix est couverte par le rire frondeur. Non l'heure n'est pas grave, semble-t-elle lui rire, tu ne juges rien du tout petit-français, tu ne condamnes rien du tout, tu peux me tuer si ça te chante, tu ne tueras pas la résistance du peuple algérien, ni celle de tous les peuples que tu opprimes. Ta fin est proche petit-français, la libération de l'Algérie, de l'Afrique et de tous les pays que tu as colonisés est inéluctable.
Djamila Bouhired rit au nez des juges français, comme Ali La Pointe crache au visage des colons qui le bousculent avec mépris dans les rues d'Alger. Le nif par le crachat, le nif par le rire. Djamila Bouhired incarne plus que quiconque le nif à l'algérienne. Elle rit malgré la peur, malgré la terreur qui s'empare d'elle à l'idée que demain, après-demain peut-être, on va lui trancher la tête. Elle rit aux éclats. A l'heure où « militer » se résume souvent à être en sueur parce qu'on met une photo d'Angela Davis ou une citation d'Abdelmalek Sayad sur les réseaux sociaux, le militantisme de Djamila Bouhired calme l'orgueil.
Fatima, la fille du Prophète Mohammed (saw), commence par pleurer quand son père, affaibli par la maladie, lui annonce sa mort très prochaine. Mais lorsqu'il ajoute qu'elle le rejoindra bientôt, et qu'elle sera la première à le faire, elle se met à rire.
Comme Fatima, Djamila Bouhired a la foi. Elle croit, en la justice, en la nécessité de lutter pour se libérer de l'oppression. C'est parce qu'elle a la foi qu'elle rit, qu'elle reste debout, malgré les coups pour la faire plier. Après que la sentence du tribunal ait été prononcée, de retour en cellule, elle s'active à rédiger la déclaration qu'elle projette de lire devant la guillotine, juste avant qu'on ne la décapite. Servir la cause et se battre jusqu'au bout. « Que l'Algérie vive libre, inshAllah », prévoit-elle de conclure.
Immensément populaire dans les pays du Tiers-monde, le monde arabe en particulier, Djamila Bouhired est libérée en 1962 grâce à une campagne de soutien internationale orchestrée par son avocat Jacques Vergès.
Le même Jacques Vergès devient quelques années plus tard l'avocat de Georges Ibrahim Abdallah, combattant libanais anti-impérialiste et pour la libération de la Palestine. Lors de son procès en 1987, comme l'avait fait Djamila Bouhired, Georges Ibrahim Abdallah rit de la mascarade qui se joue dans les tribunaux français dès lors qu'il s'agit de combattants arabes jugés pour « terrorisme ». Moquant les juges, il leur lance : « Je suis ici, Messieurs, pour vous demander simplement de bien vouloir laver vos mains maculées de notre sang et du sang de nos mômes, avant de prétendre nous juger ».
Aujourd'hui, Djamila Bouhired ne renie rien, et elle continue le combat. Quant à Georges Ibrahim Abdallah, il est toujours emprisonné en France, parce qu'il ne renie rien, et qu'il continue le combat. Les deux militants travaillent au même destin. D'Alger à Gaza, en passant par Paris. Leurs trajectoires individuelles impressionnantes de cohérence et de constance politique, montrent que l'Histoire de nos luttes a un sens, un socle commun et partagé.
En ce vendredi 1er mars 2019, la grande Djamila Bouhired manifeste avec les siens à Alger contre le 5ème mandat de la honte, contre la mascarade, contre la résignation, contre l’injustice, pour que le peuple algérien retrouve sa souveraineté et surtout des perspectives d’espoir !
Jacques Vergès sur Djamila Bouhired
(Plusieurs vidéos suivent celle concernant Djamila Bouhired, merci de l'arrêter le moment voulu...)
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