• Face-à-face direct... mais attention danger…

     

    Face-à-face direct

    Mais attention danger…

    La crise actuelle place les «gilets jaunes» et le pouvoir macronien face-à-face. Sans aucun autre intervenant. Et sans intermédiaires. Ce face-à-face met ainsi en évidence l'absence des partis d'opposition et des confédérations syndicales dans la confrontation qui se déroule sous nos yeux. Alors même que l'article 4 de la Constitution dispose que «les partis et les groupements politiques concourent à l'expression du suffrage», qu'ils «se forment et exercent leur activité librement» et qu'ils «doivent respecter les principes de la souveraineté nationale et de la démocratie», ces mêmes incarnations constitutionnelles des oppositions politiques sont étrangement absentes de la séquence. Pas plus que la majorité, ces partis n'ont vu partir le coup. Ils en sont écartés par les acteurs. Et certains d'entre eux sont désespérément à la remorque.

    Depuis plus de deux décennies, des signaux d'alerte auraient dû être entendus par ceux qui se sont succédés aux manettes du pays.

    Pour comprendre ce qui se passe de part et d'autre de ce face-à-face, il faut remonter dans le temps. Assez loin en ce qui concerne les «gilets jaunes». Plus près de nous pour ce qui est du chef de l'État et de son gouvernement. La crise actuelle n'est pas le fruit d'une génération spontanée. Depuis plus de deux décennies, des signaux d'alerte auraient dû être entendus par ceux qui se sont succédés aux manettes du pays.

    Se souvenir de 1995, 2002, 2005, 2012, 2016...

    Qui se souvient de 1995 ? Jacques Chirac est élu président de la République en mai au terme d'une campagne électorale fratricide à droite: le thème central de son projet inspiré par Philippe Séguin et Henri Guaino est la lutte contre la «fracture sociale». Il ne faut pas attendre six mois pour que cette dernière tombe dans les oubliettes des promesses non tenues. Le Premier ministre, Alain Juppé, donne la priorité à la lutte contre les déficits. Qui se souvient de 2002 ? Lionel Jospin, qui a occupé Matignon pendant cinq ans à la suite d'une dissolution hasardeuse de l'Assemblée réalisée par Chirac, se fait éjecter au premier tour de la présidentielle par Le Pen, père.

    Qui se souvient de 2005 ? Les Français et Françaises repoussent par référendum (54,7%) le traité établissant une constitution européenne : deux ans plus tard, Nicolas Sarkozy, président de la République, signe le traité de Lisbonne... qui s'assoit sur le résultat du référendum français de 2005.

    Tout le monde se souvient de 2012 ! Au cours de sa campagne, François Hollande déclare «mon ennemi, c'est la finance», un slogan qui est censé lui avoir permis de faire le break face à Sarkozy qui brigue un second mandat. Élu, Hollande oublie la formule, ce qui contribuera à donner naissance aux «frondeurs» à l'intérieur du Parti socialiste et du groupe parlementaire de l'Assemblée nationale. Et, finalement, il ne sera pas en mesure de se représenter.

    Qui se souvient de 2016 ? Les prémices des «gilets jaunes» avaient pointé le nez avec le mouvement «Nuit debout». L'absence de résultat des manifestations syndicales contre la loi travail sous Hollande donne naissance à un autre type de contestation sociale : pas de leader, pas de porte-parole, même si quelques agitateurs d'idées ne sont pas tout-à-fait restés inertes dans le déclenchement et l'entretien du mouvement. Pourtant, c'est bien ce qui contribue à populariser ces actions «hors partis» qui resteront sans lendemain, mais qui sont encore un signal.

    En un peu plus de vingt ans, droite et gauche ont donné l'impression aux électeurs et aux électrices, non seulement qu'elles leur racontaient des carabistouilles mais qu'en plus elles se rappelaient, sans honte, à leur bon souvenir tous les cinq ans lors des élections présidentielle et législatives. Pourtant donc, les signaux électoraux de ce mécontentement à l'égard des partis se sont allumés régulièrement. 

    Le couronnement de ce désamour arrivant en 2017 avec l'élection de Macron, candidat sans parti dix-huit mois avant le scrutin et ovni de la politique qui n'avait jamais eu aucun mandat. Elu parce que les Français n’avaient que deux choix au deuxième tour : soit Macron, soit Le Pen fille imitant donc son père qui était arrivé deuxième, lui aussi, en 2002.

    Macron a hérité, en arrivant à l'Élysée, d'une vraie terre brûlée d'où les partis d'opposition étaient devenus impuissants à l'Assemblée. Et le moins qu'on puisse dire est qu'il n'a pas fait grand-chose pour aider au reboisement. On peut rétorquer, à bon droit, que son rôle premier n'était pas précisément de s'occuper de la reconstruction de l'opposition «traditionnelle» mise en pièce.

    Mais l'opposition «nouvelle» était réduite à la portion congrue au palais Bourbon.  Si on ajoute à cela que le président de la République n'a pas une appétence particulière pour les corps intermédiaires comme les syndicats, qui sont eux-mêmes terriblement affaiblis, on aboutit inévitablement à un blocage.

    Un président ne peut pas diriger longtemps un pays démocratique sans heurts, s'il n'a pas face à lui une opposition ou des oppositions démocratiques, dignes de ce nom et prises en considération, dans lesquelles une partie de l'opinion se reconnaît. Et s'il n'a pas d'intermédiaires avec qui parler pour prendre le pouls de la société et évaluer les tensions qui s'y développent. Les oppositions auraient tort de se réjouir de cet état de fait car la crise des «gilets jaunes» montre que, elles aussi, sont sur la touche.

    Le mouvement –incontrôlé– des gilets jaunes se développe de façon anarchique, en dehors d'elles. Les enquêtes d'opinion montrent que seul véritable vainqueur de la séquence est le populisme d'extrême droite… Alors attention danger… si le grand «débat national» qui doit s'ouvrir pour établir les nouveaux cahiers de doléances populaires du XXIe siècle ne débouche sur RIEN !!! 

    « Il y a 50 ans Le 8 janvier 1969 s'ouvrait, à Orléans un procès ultra-médiatique autour d'officiers de réserve non-violentsPendant qu’ailleurs on débaptise… Un article de Jacques CROS »

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