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Hier à Avignon la dangereuse comédienne raciste Le Pen a tenu un discours de gauche ? (ATTENTION DANGER)
Hier à Avignon la dangereuse comédienne
raciste Le Pen
a tenu un discours de gauche ?
(ATTENTION DANGER)
Elle ne fera jamais ce qu'elle raconte
Au terme du premier tour de la présidentielle 2022, les citoyens d'Avignon ont placé en tête Jean-Luc Mélenchon, le même candidat qu'ils avaient choisi cinq ans plus tôt. Dimanche 10 avril, l'ancien ministre du gouvernement Jospin a réuni 37% des suffrages dans cette commune de PACA. Il y a surclassé Emmanuel Macron et Marine Le Pen qui complètent la fin du podium avec respectivement 20% des votes et 19% des suffrages.
Objectif : rassembler tous azimuts. Marine Le Pen a livré son premier meeting d’entre-deux-tours, ce jeudi 14 avril à Avignon, dans le Vaucluse. Contrainte de gommer les aspérités de son programme pour attirer, dans son sillage, un maximum de Français hostiles à Emmanuel Macron, la candidate d’extrême droite a joué le service minimum.
Un discours bref, de moins de trois quarts d’heure, relativement consensuel ou expurgé de thèmes les plus polémiques. La cheffe de file du Rassemblement national, vêtue de rouge, a voulu s’adresser aux abstentionnistes et aux “patriotes de droite” comme “de gauche”, à l’heure où les électeurs de Jean-Luc Mélenchon sont très convoités.
Une façon de brasser large pour essayer de détourner le “front républicain”- traditionnellement érigé pour empêcher l’accession de l’extrême droite au pouvoir - contre son rival.
Si les Français ont à faire barrage, c'est au retour d'Emmanuel Macron" a dit cette dangereuse comédienne.
Dès les toutes premières minutes de son discours, Marine Le Pen a appelé les Français à “faire barrage” à la réélection du chef de l’État en se présentant comme la candidate du “peuple face à l’oligarchie”. Du “bloc populaire” contre le “bloc élitaire”. Ou des “défenseurs de la sécurité sociale contre le pouvoir de l’argent”. Un mélange de références populaires dans son camp, et de mots habituellement entendus dans la bouche de responsables plus à gauche.
“Le 24 avril, si les Français ont à faire barrage, c’est au retour d’Emmanuel Macron”, a-t-elle notamment lancé devant une salle de quelque 4000 militants selon les organisateurs, avant de filer l’anaphore, comme vous pouvez le voir ci-dessous.
“Faire barrage à l’effondrement du pouvoir d’achat des Français. Faire barrage au matraquage fiscal. Faire barrage à la retraite à 64 ou 65 ans on ne sait plus. Faire barrage à une immigration qui met en péril l’équilibre de nos systèmes sociaux. Faire barrage à un nouveau quinquennat de désolation sociale. Faire barrage à cette caste qui nous gouverne avec arrogance, ce pouvoir de quelques-uns. Ce pouvoir de l’entre-soi.”
Marine Le Pen a concentré l’essentiel de son propos à fustiger le bilan ou le programme d’Emmanuel Macron, du “mépris” présidentiel à son projet de réforme du RSA, avant de dérouler son programme. Un pan seulement, sur le pouvoir d’achat par exemple ou la “démétropolisation” en faveur des campagnes.
Service minimum
La candidate du Rassemblement national a notamment cité l’exonération d’impôt qu’elle promet aux moins de 30 ans, la réintégration des 15.000 soignants “expulsés comme des malpropres”, la baisse de la TVA sur l’énergie ou l’instauration du RIC, le référendum d’initiative citoyenne porté par les gilets jaunes en leur temps. “Je rendrai leur argent aux Français, je remettrai à l’honneur la valeur travail et pour cela, nous nous attacherons à ce que le travail paie”, a-t-elle ainsi promis sous les applaudissements de ses partisans.
Exit les propositions sulfureuses sur lesquelles le camp Macron insiste, comme l’interdiction du port du voile dans la rue, ou celles, comme la “préférence nationale” qui aboutiraient à un “coup d’État constitutionnel”, selon de nombreux spécialistes; la cheffe de file du RN a tout fait pour lisser son image et son propos.
Pas sûr que cela suffise pour autant. Une heure avant que la candidate prenne la parole, quelque 200 à 300 personnes avaient défilé à travers Avignon pour exprimer leur rejet de l’extrême droite. “À bas le Front national, F comme fascistes, N comme nazis”, criaient les manifestants qui tenaient des drapeaux des syndicats Sud ou Solidaire, de l’Action antifasciste et même de l’Ukraine.
5 éléments pour comprendre l’extrême-droite française :
du FN au RN
La candidate du Rassemblement National, Marine Le Pen, fera face à Emmanuel Macron dimanche 24 avril pour prendre la tête de l’Etat. Nous essayons de comprendre sa politique en retraçant l’histoire de son parti, une histoire constitutive de l’extrême droite française. C’est la deuxième partie de notre dossier sur l’extrême droite en France.
Qu’est-ce que l’extrême droite ? L’extrême droite se définit avant tout par un nationalisme exacerbé, valorisant le “nous” contre les “autres”, donc les Français contre les autres nationalités, religions ou cultures qui ne seraient pas originaires de France. En France, elle naît avec l’Affaire Dreyfus, à la fin du XIXème siècle, sur bases de nationalisme et d’antisémitisme (voir la partie 1 de notre dossier sur l’extrême droite : 5 éléments pour comprendre … l’extrême droite française : l’Action Française et Charles Maurras). Après la prise de pouvoir du Maréchal Pétain, qui met en place une véritable politique d’extrême droite pour la première fois en France, l’extrême droite se reconstitue lentement après la guerre. Guerres de décolonisations, poujadismes, crises mènent à la création du Front national. Celui-ci devient le Rassemblement National en 2018. Retour sur ces filiations.
Les racines de l’extrême droite d’aujourd’hui : le poujadisme et la guerre d’Algérie
A la Libération, l’extrême droite est très marginale sur la scène politique. Des organisations, rappelant le modèle des ligues, reprennent vie à la fin de la guerre d’Algérie : OAS, Ordre nouveau, GUD. L’OAS (organisation de l’armée secrète) est une organisation terroriste qui se bat pour conserver une Algérie française. Le GUD (groupe union de défense) et l’Ordre nouveau sont des groupes militants, à la base étudiants, avec des idées néofascistes et racistes.
A côté de ces organisations, un mouvement politique et syndical naît dans les années 1950 : le poujadisme. En 1953, Pierre Poujade, prend la tête d’un groupe de commerçants du Lot qui s’opposent à un contrôle fiscal. Cette révolte donne naissance à un mouvement politique et syndical dans les classes moyennes qui se sentent menacés par un monde de plus en plus libéral.
Bon orateur, Poujade prend la voix pour les “petits” et dénonce “l’Etat-vampire” qui les vole pour donner aux “grands” et aux “apatrides qui occupent la maison France“, le “racket fiscal“, et les “métèques parasites qui campent sur notre sol“. Le mouvement condamne l’inefficacité du parlementarise de la IVème République et l’hypocrise des intellectuelles et politiques. Ils réclament réclame la défense des commerçants et artisans, qu’ils estiment en danger par le développement des grandes surfaces, de l’industrialisation et par le traité de Rome. Des thèmes qui sont toujours d’actualité dans les programmes de l’extrême droite.
Victor Weisz, “Poujadolf,” Daily Mirror, Jan. 6, 1956. Hitler souffle à Poujade “Bravo petit ! Ils se moquaient de moi aussi à mes débuts…”
1956 : un jeune député nommé Le Pen
C’est lors des législatives de 1956 que le Poujadisme connaît son plus grand succès, en faisant 11,6% des voix. 52 députés font leur entrée à l’Assemblée Nationale. Parmi eux Jean-Marie Le Pen. C’est avec le poujadisme que la figure française de l’extrême droite fait son entrée en politique en devenant député de la Seine. De retour d’Indochine et déjà proche de l’Action Française, dont il vendait les journaux à la criée pendant ses études, il sait convaincre Poujade de le prendre sous son aile. Mais les deux hommes tombent en désaccord rapidement et Le Pen siège parmi les non-inscrits jusqu’à la fin de la législature. Il part se battre 6 mois en Algérie puis milite pour l’Algérie française, notamment en créant Le Front National pour l’Algérie française.
Comme Poujade, il s’élève contre Pierre-Mendès France, homme politique juif, avec des propos antisémites : « Monsieur Mendès France, vous cristallisez sur votre personnage un certain nombre de répulsions patriotiques, presque physiques ». Il se crée une place de plus en plus importante dans le paysage politique en France, gagnant en popularité. Ainsi, en 1958 il gagne la troisième circonscription de la Seine avec 45,2% des voix. À l’Assemblée Nationale, Jean-Marie Le Pen s’apparente au groupe parlementaire du CNIP, les Indépendants et paysans d’action sociale (IPAS), dont il représente l’aile droite.
5 octobre 1972 : naissance du Front National, l’extrême droite s’organise
C’est l’Ordre Nouveau (voir plus haut) qui a contacté Jean-Marie Le Pen pour créer un parti qui reprenne leurs idées. Le but : rassembler les forces d’extrême droite du pays (anciens poujadistes, pétainistes, néo-nazis, nostalgiques de l’Algérie française) et passer de l’activisme à un mode d’action légaliste en se constituant une vitrine électorale. Le 5 octobre 1972, le Front National est créé. Le logo : la flamme tricolore créée en 1946 par le MSI proche de Mussolini. Le Pen déclare lorsqu’on lui reproche sa proximité avec le groupe fasciste : « Je n’ai aucun contact avec le MSI italien. Encore que je ne vois pas leur action avec antipathie ».
A ses débuts, le parti ne pèse guère. Une première scission à lieu avec l’Ordre Nouveau, ce qui l’endette et le coupe d’une parti de sa base militante. Avec le FN, Jean-Marie Le Pen se présente à la Présidentielle de 1974 et ne récolte que O,75% des voix. Mais il trouve les résultats du nouveau parti encourageants. Mais le parti commence à réellement prendre de l’ampleur dans les années 1980. La défaite de la droite républicaine en 1981 et le début de la crise favorisent son ascension. Dérapage en 1987 : JMLP affirme que les chambres à gaz sont un “point de détail de l’histoire“. Cela ne l’empêche pas de réunir 14, 38% des voix à l’élection présidentielle.
21 avril 2002 : le Front national au second tour des élections présidentielles
Le 21 avril 2002, le Front National réalise son plus haut score à l’époque et accède pour la première fois au second tour de la présidentielle. En effet, les années 1990 sont marquées par une forte augmentation du chômage en France, ce qui permet au FN de réunir plus de mécontents. En plus des traditionnels discours identitaires, une nouvelle rhétorique est mise en avant : la dénonciation de la corruption des grands partis républicains. Le FN gagne plusieurs municipalités à la fin des années 90 (comme Toulon ou Orange) et fait des scores toujours supérieurs à 10%, à part aux Européennes.
En 1998, le FN connait une crise interne : JMLP entre en désaccord avec Bruno Mégret, qui souhaite nouer des alliances avec la droite. Ce dernier organise un nouveau parti d’extrême droite : le Mouvement National Républicain (MNR). Tous les médias estiment que le FN est fini. Cependant, les présidentielles de 2002 sont un coup de théâtre : le FN dépasse le PS et passe au second tour avec 16,86% des suffrages. Néanmoins, en 2007, la candidature du Nicolas Sarkozy change la donne pour le FN. Nombreux sont ses électeurs qui sont séduits par le discours de droite dure du futur président. Le FN commence alors une lente régression.
2018 : le Rassemblement National
En 2003, une des filles de Jean-Marie Le Pen, Marine Le Pen, devient vice-présidente du Front National. En 2011, elle prend la tête du parti. C’est un renouveau pour l’extrême droite. Sa stratégie : normaliser et dédiaboliser le parti. Et cela paye : lors de sa première course à l’Elysée en 2012, elle réunit 17,9 % des voix. La crise des subprimes de 2008 a certes joué en sa faveur mais elle consolide son électorat. A nouveau, des députés du FN entrent à l’Assemblée Nationale (dont sa nièce, Marion Maréchal-Le Pen).
Elle pousse la dédiabolisation à son paroxysme en excluant son père, et le père du parti, en 2015. L’image de son père est trop négative : ses discours homophobes, racistes et antisémites entachent le parti qu’elle tente de rebâtir. En 2017, Marine Le Pen perd au second tour des élections présidentielles avec 33,90% des voix.
Dans la continuité de ses velléités de renouveau du parti, Marine Le Pen rebaptise le Front National en Rassemblement National en 2018. Jean-Marie Le Pen avait dénoncé cette “trahison” : « C’est une longue et courageuse histoire militante que l’on renie ». Sur le plan politique Marine Le Pen soutient toujours les idées de l’extrême droite, valorisant l’amour de la France et le rejet de l’étranger, avec des mesures anti-européennes et racistes. Cependant, sur le plan économique ses programmes sont de moins en moins libéraux, ce qui lui permet de servir un discours populiste au nom des “plus démunis”. Un programme qu’elle ne respecterait pas mais nous vivons là une tragique et dangereuse comédie.
Quelques articles anciens de mon blog
Torture : les propos de Marine Le Pen, dans la lignée de son père
Pour Marine Le Pen, la torture est un mal nécessaire. C'est ce que la présidente du Front national a affirmé en substance, mercredi 10 décembre. Interrogée par BFM-TV et RMC sur le rapport américain détaillant des sévices infligés par la CIA à des personnes suspectées de terrorisme, l'eurodéputée a déclaré : « Moi, je ne condamne pas (...). Sur ces sujets-là, il est assez facile de venir sur un plateau de télévision pour dire : “Ouh la la ! C'est mal”. »Interrogée sur le point de savoir si l'on pouvait utiliser la torture, Mme Le Pen a répondu :
« Oui, oui, bien sûr, cela a été utilisé dans l'Histoire. Je crois que les gens qui s'occupent de terroristes et accessoirement de leur tirer des informations qui permettent de sauver des vies civiles sont des gens qui sont responsables ».
Pour Mme Le Pen, nécessité fait loi. Et dans les cas où une « bombe – tic-tac tic-tac tic-tac – doit exploser dans une heure ou deux et accessoirement peut faire 200 ou 300 victimes civiles », « il est utile de faire parler la personne ».
Des propos validés par Gilbert Collard, député Rassemblement bleu Marine (RBM) du Gard, le même jour sur i-Télé :
« C'est vrai que la torture doit être le recours ultime quand il faut sauver des vies, la torture pour la torture c'est ignoble, mais cette espèce de lâcheté qui consiste à dire 'Tant pis que les innocents meurent pourvu que j'aie les mains propres'...» Si pour sauver vingt, ou dix, ou deux ou une vie, je dois malmener un tortionnaire, je le fais, je le fais avec dégoût, mais ces choix sont absolument courageux ».
TRADITION LEPÉNISTEAvec ces propos, Marine Le Pen s'inscrit dans la tradition lepéniste. Jean-Marie Le Pen a, en effet, répété à plusieurs reprises que la torture pouvait être utilisée dans certains cas. Ainsi, en juin 2002, en réponse à des accusations de tortures qu'il aurait pratiquées lorsqu'il était parachutiste en Algérie, il a affirmé lors d'une conférence de presse :
« C'est un terme très vague la torture. Ça commence où ? Ça finit où ? Les procédés d'interrogatoires musclés se trouvaient justifiés par le secret, qui était l'arme principale des terroristes. »
Quelques mois plus tôt, M. Le Pen avait donné une interview retentissante au quotidien israélien de gauche Haaretz. Son argumentation de l'époque entre étrangement en résonance avec les propos de sa fille aujourd'hui.
M. Le Pen évoque encore une fois les tortures lors de la guerre d'Algérie :
« C'est très facile d'être critique quand on est assis dans son fauteuil. (…) Nous n'avons pas écrasé les terroristes en étant gentils avec eux. La guerre contre le terrorisme est une chose brutale ».
Il disait préférer l'expression « interrogatoires poussés » plutôt que « tortures » car ce mot ferait « le jeu des terroristes ».
Enfin, en 1987, Jean-Marie Le Pen affirmait au Monde :
« S'il faut torturer un homme pour en sauver cent, user de violences pour découvrir un nid de bombes, la torture est inévitable. »
SOUVENONS-NOUS
La guerre d'Algérie ou le spectre de la torture
Réélu député en 1958, Jean-Marie Le Pen devient rapporteur du budget de la Guerre à l’Assemblée nationale. Un poste stratégique alors que la guerre d’Algérie continue. Le jeune élu en profite pour marquer son indépendance vis-à-vis du gaullisme et défend l’Algérie française. Geste fort, il quitte, au cours de son mandat, les bancs de l’Hémicycle pour se porter volontaire en Algérie. Ayant été officier de renseignement, il a avoué, le 9 novembre 1962 dans la revue Combat, "avoir torturé parce qu'il fallait le faire". Au lendemain de cette déclaration fracassante, il est revenu sur ses propos, évoquant des "méthodes de contraintes" plutôt que de tortures. Malgré cela, Jean-Marie Le Pen est décoré de la Croix de la valeur militaire. Dans les années 80-90, plusieurs personnalités –Michel Rocard, Pierre Vidal-Naquet ou le général Aussaresses– l’accuseront d’avoir pratiqué la torture en Algérie. Dans un livre, Torturés par Le Pen (2000), l’historien Hamid Bousselham émet des accusations particulièrement détaillées et précises.
REUTERS
Marine Le Pen a tué le père, mais elle a gardé le pire. Après Morano, Marine Le Pen dérape sur de Gaulle et l'Algérie française.
Marine Le Pen a tué le père, mais elle a gardé
le pire
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Après Morano, Marine Le Pen dérape sur de Gaulle
et l'Algérie française.
Sur Europe 1, Marine Le Pen a pris ses distances avec Nadine Morano, mais aussi avec le général de Gaulle, coupable d'avoir renoncé à l'Algérie française. Un dérapage politique qui montre que le gaullisme du FN est un trompe l'oeil.
Le gaullisme de Marine Le Pen est un gaullisme d’opérette. Vertu collatérale de la sortie de Nadine Morano sur la France, "pays de race blanche", Marine Le Pen a dérapé au micro d’Europe 1, jeudi 1er octobre. Pour le moment, la machine médiatique ne retient que la formule "Morano s’est pris les pieds dans le buzz", passant à côté de l’essentiel politique : l’aveu par Marine Le Pen qu’en dépit de ses efforts, sa conversion aux valeurs du gaullisme est un trompe-l’œil.
Interrogée sur la polémique Morano, Marine Le Pen a pris une double distance. Avec la députée européenne perdue dans sa tourmente, mais aussi et surtout avec le général de Gaulle, dont elle se réclame depuis peu.
"Ce sont les propos du général de Gaulle, avec lesquels je suis en désaccord, puisqu’il les a tenus précisément pour justifier son refus de l’Algérie française" a déclaré Marine Le Pen, ajoutant : "Or nous, nous étions pour l’Algérie française car nous considérions qu’au-delà des races et des religions, l’on pouvait être Français pour peu, encore une fois, que l’on se sente Français, que l’on adopte l’histoire, que l’on adopte la culture, que l’on ait le souhait de participer à un avenir commun, que l’on adopte le mode de vie".
L'héritage des fascistes français
Sortie passionnante, en ce qu’elle démasque le gaullisme d’opérette de Marine Le Pen, inspiré par Florian Philippot. Il est difficile de se défaire d’un habitus hérité du maréchalisme. D’un coup, dans la bouche de Marine Le Pen, le "nous" marque l’appartenance à l’histoire de son camp, de l’extrême droite française qui, de l’affaire Dreyfus en passant par le 6 février 34, Vichy et l’OAS mène à la création du Front national de 1972, celui de Jean-Marie Le Pen. Marine Le Pen est l’héritière de ces fascistes français (car ici nous pensons comme Raymond Aron, qu’il y a eu des fascistes français, mais qu’il n’y a jamais eu de fascisme français) qui se sont toujours trompés, ont toujours échoué, et ont toujours été nuisibles à la France.
Le propos mérite d’autant plus d’être relevé qu’il démontre que Marine Le Pen n’a rien compris à ce que de Gaulle avait confié à Alain Peyrefitte, et que ce dernier a rapporté dans son "C’était de Gaulle". Pas plus que Nadine Morano (qui ne cite même pas bien de Gaulle, qui parle d’un "peuple européen de race blanche" et non d’un "pays de race blanche") la présidente du FN ne comprend ce que signifie de Gaulle, à ce moment précis de l’histoire, quand il sait que l’indépendance de l’Algérie est inéluctable. A savoir que l’intégration du peuple algérien est impossible dans un espace de citoyenneté française, compte tenu du poids de l’histoire, des cultures, mais aussi des impératifs sociaux et économiques de l’époque, est une lubie insensée, porteuse d’une contradiction qui mènerait à l’implosion de la France.
Il n’y a pas de lecture racialiste chez de Gaulle, confronté à une situation de crise exceptionnelle et qui s’exprime en un temps où l’immigration venue d’Afrique du nord vers la France n’a même pas débuté. Bien au contraire. En 1959, le général, qui a déjà compris que le concept "d’Algérie française" est un oxymore politique, s’apprête à en tirer les conséquences, au nom de l’intérêt des deux peuples, français et algérien. Il agit en Homme d'Etat, position que Marine Le Pen, cinquante ans plus tard, est encore incapable d’appréhender. Il est sidérant de contempler l’expression d’une vision de l’histoire, aussi datée et obsolète, étayée par des références qui pointent une faiblesse politique peu digne d’une personnalité qui postule à la présidence de la République.
Mieux encore, Marine Le Pen avoue implicitement qu’elle porte en elle une vision post-coloniale de l’histoire et des rapports entre les peuples. Elle conçoit la France comme un modèle supérieur de civilisation, dont la bienveillance s’exprime par la coercition politique. C’est absurde. Certes, il est évident que Marine Le Pen évoque sa nostalgie française et réfute de Gaulle pour mieux stigmatiser, de manière sournoise, ceux qui sont aujourd’hui présents en France et ne seraient pas des Français selon les vues qui sont les siennes, mais cette évocation dit aussi le danger que représente la présidente du FN, qui estime qu’être Français, c’est adopter l’histoire et la culture du pays.
Gaullienne? gaulliste? Ni l'un ni l'autre
Et pourtant, on peut être Français et refuser d’adopter des pans entiers de l’histoire de France, ou ne pas se sentir lié par des éléments de culture. On peut être Français et vibrer au souvenir du sacre de Reims et lire avec émotion le récit de la Fête de la fédération et rejeter le Bonapartisme impérial, le Maréchalisme et Vichy, l’OAS et l’Algérie française… On peut même être Français, et ne pas être gaulliste, tout en refusant d’être anti-gaulliste, comme l’écrivait François Mitterrand dans "La Paille et le grain", au nom même de ce que représente le général, porteur des valeurs du Conseil national de la Résistance…
A cela, Marine Le Pen objectera sans doute qu'elle se prétend gaullienne, plus que gaulliste. Mais le distingo ne trompera personne. Marine Le Pen n'est ni gaulliste, ni gaullienne, tout simplement parce qu'un nostalgique de "l'Algérie française" ne peut pas l'être, c'est ontologique.
Sur Europe 1, Marine Le Pen a renoué, elle, avec l’anti-gaullisme traditionnel de d’extrême droite ; celui qui a toujours préféré la Révolution nationale au programme du Conseil national de la Résistance ; celui qui n’a jamais pardonné au général le procès de Pétain, l’exclusion de Maurras de l’Académie, l’exécution de Brasillach, la fin de l’utopie Algérie française et le châtiment de Bastien-Thiry [à l'origine de l'attentat du Petit-Clamart contre de Gaulle en 1962]…
Car c’est bien à cette conscience politique de l’extrême droite traditionnelle, façonnée par un siècle et demi de feu et de sang, de violences et de tumultes, de haine de la République et de la Nation que renvoie le "Nous, nous étions pour l’Algérie française" de Marine Le Pen.
Le vol de l'héritage des Républicains
Que faire de cet aveu de renonciation au Gaullisme, à ses pompes et à ses œuvres? La question vaut pour ceux qui sont, en principe, les dépositaires du legs politique du Général, "Les Républicains". De ce point de vue, leur manque d’empressement à défendre ce qui leur revient de droit et de tradition ne lasse pas d’étonner.
Depuis que le FN a entamé son opération de triangulation du gaullisme, Nicolas Sarkozy, François Fillon, Alain Juppé et les autres laissent faire. Ni révolte, ni combat contre le vol d’un héritage qu’ils devraient défendre bec et ongle. Combien de temps encore supporteront-ils le dépôt de la gerbe Philippot sur la tombe du Grand homme enterré à Colombey-les-deux-églises, chaque 10 novembre, date anniversaire de sa disparition? L’affaire n’est pas anecdotique, elle est politique. Qui de la nouvelle génération, Bruno Le Maire ou un autre, aura un jour le courage de signifier à Philippot, sur la tombe du général et devant les caméras, en novembre prochain, qu’il n’est pas légitime à s’en réclamer?
Le FN ne prospère pas seulement sur les peurs sociales, économiques et culturelles, il est aussi passé maître dans l’art de préempter un univers mental politique et historique qui n’est pas le sien, parce que les autres, inconscients et émollients, laissent faire.
La présidente du FN fait ainsi coup triple, qui assume et revendique l’héritage politique de son père, se proclame gaulliste tout en niant, sans que personne ne relève ses contradictions, la vertu même du gaullisme. En dépit de ses proclamations, inspirées par Florian Philippot, à la gloire du général de Gaulle, elle montre que dans les tréfonds de sa conscience, elle est la dépositaire d’une histoire politique, d’une tradition, qui la relie, sans contestation possible, aux heures les plus sombres de l’histoire contemporaine de ce pays.
Marine Le Pen a tué le père, mais elle a gardé le pire.
Une mise au point de l’historien Alain Ruscio Marine Le Pen et l’affaire Audin : quand la haine le dispute à l’ignorance crasse
Maintenant Racaille Nationale
Une mise au point de l’historien
Alain Ruscio
Marine Le Pen et l’affaire Audin :
quand la haine le dispute
à l’ignorance crasse
Quand a été rendue publique, le 13 septembre 2018, la déclaration du président Macron sur l’assassinat par des militaires français en 1957 de Maurice Audin, une personnalité politique d’extrême droite s’est distinguée par son déni de réalité et ses contre-vérités. La dirigeante du Rassemblement national, Marine Le Pen, a cru bon de dire que « Maurice Audin a caché des terroristes du FLN qui ont commis des attentats ». L’historien Alain Ruscio fait un sort à cette inexactitude et précise l’engagement politique de Maurice Audin.
Marine Le Pen et l’affaire Audin : quand la haine
le dispute à l’ignorance crasse
Par Alain Ruscio, historien
Dans les heures qui ont suivi la déclaration du président Macron, reconnaissant — enfin ! — la responsabilité des plus hautes autorités de l’État dans l’assassinat de Maurice Audin, les prises de position sont arrivées en avalanche, la plupart plutôt favorables à cet acte de courage.
D’autres, venant le plus souvent de la nébuleuse d’extrême droite, l’ont condamnée. Sans grande importance. Il en est une, cependant, qu’il est catégoriquement hors de question de laisser passer. Mme Le Pen, dirigeante du Rassemblement national, a laissé tomber cette phrase : « Maurice Audin a caché des terroristes du FLN qui ont commis des attentats ».
Sans revenir sur toute l’affaire, il est nécessaire de rappeler qui était Maurice Audin, quel était son rôle au sein du Parti communiste algérien.
Membre du Parti communiste algérien depuis 1950 — il avait alors 18 ans —, mathématicien brillant, assistant à la Faculté d’Alger, il s’apprêtait à soutenir une Thèse et à devenir ainsi un des plus jeunes Docteurs ès Sciences de France. Son directeur, René de Postel, témoigna de la qualité exceptionnelle des travaux de celui qui était un des espoirs de la recherche française (1).
En novembre 1954, la guerre d’indépendance éclate. Le PC Algérien, sans comprendre immédiatement la portée historique du pas qui vient d’être franchi, dénonce la répression et les actes de guerre qui commencent. Il est dissous en septembre 1955. La direction du PCA répartit alors ses militants en deux catégories : ceux qui plongent dans la clandestinité, voire qui rejoignent les maquis, et ceux qui, non chargés de responsabilités importantes, et donc considérés comme peu surveillés, restent dans la vie active, effectuant un travail discret. Rien là que de très classique : tous les mouvements politiques frappés d’interdit procèdent de la sorte.
Quelles furent, entre la dissolution de septembre 1955 et l’arrestation de juin 1957, les activités politiques de Maurice Audin ? Son appartement servit de « planque » à des militants politiques recherchés, lui-même stocka et transporta de la documentation, du matériel de propagande, etc. Il participa également à des activités dangereuses, comme par exemple l’exfiltration vers les pays socialistes du Secrétaire général Larbi Bouhali (septembre 1956) : ce fut en quelque sorte une affaire de famille, Maurice Audin ayant assuré la logistique avec sa sœur Charlie et son beau-frère Christian Buono.
L’engrenage se mit en place le 9 juin 1957. Le Dr Hadjadj, membre du PCA, fut arrêté. Torturé, il résista durant trois jours, mais craqua devant la menace de voir sa propre femme torturée. Il finit, le 11 dans la soirée, par dire qu’il avait soigné Paul Caballero, un dirigeant communiste de premier plan, au domicile de la famille Audin. Les paras s’y précipitèrent. C’est là, à 23 heures, en présence de sa femme Josette et de ses enfants, que Maurice Audin fut arrêté. Son épouse protesta, sa fille aînée Michèle — trois ans — donna même des coups de pieds aux paras (2). Le prisonnier fut transporté à El Biar, dans un immeuble réservé, où, déjà, Ali Boumendjel avait été assassiné, puis immédiatement torturé.
La triste suite est connue.
Aucun terroriste poseur de bombes hébergé. Aucun lien avec un quelconque attentat. La pure figure de Maurice Audin ne méritait pas cette ignominie supplémentaire. Le père « travaillait » dans les caves durant la bataille d’Alger. La fille vient d’y ajouter l’ignorance crasse. Faut-il en rire ou en pleurer ? Non : il faut crier sa honte, sa répulsion.
(1) « Mon assistant, Maurice Audin », Les Lettres françaises, 19 décembre 1957.
(2) Michèle Audin, Une vie brève, Paris, L’Arbalète / Gallimard, 2013.
« Le journaliste algérien qui avait reçu Emmanuel Macron en 2017 commente l’élection présidentielle 2022 Pour barrer la route à l’extrême-droite, je vote Macron en désapprouvant sa politique »
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Commentaires
Cette personne est une honte pour la France et plus honteux encore, le danger d'une élection possible!!! Ne noue trompons pas, ce n'est pas ça, la France!!!!