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Jacques Lambour m’écrit : « Ce nom ne doit pas passer à la trappe »
Jacques Lambour m’écrit :
Mauges-sur-Loire, le 15 mars 2024. Jacques Lambour a fait partie de l’armée de l’Air française, en Algérie, de 1959 à 1961. | CO - QUENTIN DUVAL
« Ce nom ne doit pas passer
à la trappe »
J'ai failli écrire "En ce moment même à Trappes Yvelines, un dernier hommage est rendu à Alban Liechti ".
Un dernier hommage, surtout pas, surtout pas pour nous anciens appelés en Algérie qui nous disons "Contre la Guerre". Car pour nous, qui avons participé du côté du bâton, de la carotte, où de l'intendance et à des degrés très divers à cette guerre, pour nous, anciens appelés qui avons "participé" à cette guerre, Alban Lietchi est et restera le symbole de ce que nous aurions dû être.
Pour avoir dit "non" le petit Alban, tout seul comme un grand, le grand Alban n'aura été emprisonné et libéré de ses geôles qu'au bout de quatre longues et éprouvantes années, sans compter son temps militaire avec une arme volontairement non chargée. Car pour faire exemple, l'institution militaire a tenu à ce qu'il paie sa libération tardive au prix fort, très fort.
Mais finalement lui a été libéré de sa guerre contre les Algériens, pas nous... Et combien d'entre nous sont où seront morts sans jamais avoir été libérés...
On l'aura compris ce n'est pas à moi de rendre hommage à Alban, simplement pour certains, j'ai le désir de vous éveiller à lui et pour d'autres de le voir un peu plus, ou encore, se le partager.
A cet effet je vous mets quelques liens vers le site Michel Dandelot, un ami de longue date, qui a en son temps, publié mon témoignage sur le putsch du 21 avril 1961 :
Et trois pièces jointes.
La première "Alban B.Deschamps" c'est pour le connaître ou se le rappeler. Elle m'a été envoyée par Bernard Deschamps un ami de l'Algérie qui à plus de 90 ans continue d'écrire des chroniques d'actualité sur ce pays. Et c'est donc lui qui le premier m'a informé de la mort d'Alban Liechti. A cette lecture je me suis souvenu qu'à l'invitation du Mouvement de la Paix Alban était venu à Angers et je lui avais acheté son livre "Le Refus". Fiévreusement je cherche dans mon fouillis avec l'intention de le feuilleter, je l'ouvre et tombe à la page 236, depuis ce livre est resté ouvert à cette page. Coup de foudre, plus question de feuilleter, de papillonner, de détourner mon regard de cette page aimée.
Ce sera donc la seconde pièce jointe "Alban 236 B.Khalfa". Je ne connaissais pas Boualem Khalfa et j'ai un peu honte d'être passé à côté de lui sans le voir, car ce livre je l'ai lu début des années 2000. Quel bel hommage rendu à Alban, et qui plus est, rendu par un Algérien, frère de la même geôle et de la même foi.
La troisième pièce jointe "Alban Monsieur le Président" ce sont les paroles d'une chanson écrite par Vincent Liechti sur l'air, on l'aura deviné, "Du déserteur" pourtant il n'est pas question de déserter. On retrouve dans la chanson de Vincent des accents du poème de Boualem Khalfa.
Trélazé le 04/09/2024, le jour des obsèques d'Alban Liechti à Trappes.
Jacques Lambour
Alban Liechti, le premier "soldat du refus"
de la guerre d'Algérie, est mort
à l'âge de 89 ans
Il était le premier appelé français à avoir publiquement refusé de prendre les armes pendant la guerre d’indépendance algérienne. Ses obsèques se sont tenues hier mercredi à Trappes.
Des soldats français en Kabylie, lors de la guerre d'Algérie, le 8 août 1959. (KEYSTONE PICTURES USA / MAXPPP)
Il fut le premier à dire "non" à la guerre d'Algérie, en tant qu'appelé français. Alban Liechti, le premier à refuser de tirer sur des Algériens, vient de mourir à l'âge de 89 ans. Ses obsèques ont lieu mercredi 4 septembre à Trappes, dans les Yvelines. Ce militant communiste fut précurseur dans cette guerre, avant de faire des émules : il est le premier "soldat du refus".
Il prend la plume en 1956 durant son service militaire obligatoire, à Versailles. Son régiment s'apprête à être envoyé à Alger alors il écrit son refus de prendre les armes au président René Coty. "La guerre que font nos gouvernants au peuple algérien n'est pas une guerre défensive. Dans cette guerre, ce sont les Algériens qui défendent leurs femmes, leurs familles, la paix et la justice. C'est l'amitié entre Français et Algériens que je veux défendre", avait-il écrit.
Envoyé malgré tout en Algérie, le militant communiste tente de convaincre les autres jeunes appelés. "Je disais tout ce que je pensais de la guerre d'Algérie, qu'on n'avait rien à faire là et qu'on employait des méthodes comme la torture. J'étais contre tout cela. J'étais bien vu de tous les gars, sauf des gradés", se rappelait Alban Liechti en 2021 sur France Culture.
Quatre ans de prison
Alban Liechti ne connaît pas les risques qu'il encourt, puisqu'il est le premier. Ce sera la prison pendant les quatre années suivantes. Incarcéré par l'armée française à Tizi Ouzou, puis à Alger, il est ensuite transféré à nouveau plusieurs fois.
Il tarde à être soutenu par son parti, le PCF mais son action finit par faire des émules raconte l'historien Tramor Quemeneur, spécialiste de l'Algérie : "Environ un an après son refus, une campagne a commencé, portée par le Secours Populaire Français, et qui a conduit à ce qu'une quarantaine de jeunes communistes refusent de participer à la guerre d'Algérie. Cela a amené à ce que la question du refus de la guerre, de la désobéissance dans la guerre d'Algérie se pose publiquement. De ce point de vue-là, son parcours est important".
"À un moment, on est arrivés à ce qu'il y ait une opposition de plus en plus forte au sein de la société française".
Tramor Quemeneur, historien
à franceinfo
Libéré de ses obligations militaires dix jours avant les accords d'Evian, il redeviendra jardinier à Trappes et restera privé de son droit de vote jusqu'en 1966, et la loi d'amnistie. "C'est un héros ! Pendant longtemps, il était plutôt considéré comme un traître", estime son fils, Vincent Liechti. Il évoque également un manque de reconnaissance : "À son décès, on a eu un message du président de la République algérienne mais pas du président français, donc la reconnaissance n'est pas encore tout à fait pleine et entière". Les obsèques d'Alban Liechti se tiennent mercredi après-midi, au cimetière de Trappes.
Retour sur la vie d'Alban Liechti, le premier "soldat du refus" de la guerre d'Algérie, par Agathe Mahuet
Décès d’Alban Liechti : Tebboune rend
hommage au premier soldat français
à avoir dit non à la guerre d’Algérie
Alban Liechti, décédé à l’âge de 89 ans, incarne une figure emblématique de la résistance à la guerre d’Algérie, un conflit qui continue de marquer la mémoire collective des deux rives de la Méditerranée. Alors que la France n’a pas officiellement salué sa mémoire, l’Algérie, à travers son président Abdelmadjid Tebboune, lui a rendu un hommage vibrant, reconnaissant en lui un ami fidèle de la Révolution algérienne et un symbole international de la lutte contre l’injustice coloniale.
L’hommage de l’Algérie à un «grand militant»
Le président de la République algérienne, Abdelmadjid Tebboune, a exprimé sa profonde tristesse dans un message de condoléances adressé à la famille d’Alban Liechti. Tebboune a souligné l’importance de l’engagement de ce dernier en faveur du peuple algérien, refusant de participer à la répression coloniale imposée par l’armée française. Dans son message, le président algérien a déclaré : « C’est avec une profonde tristesse que j’ai appris la nouvelle de la disparition du militant politique français, Alban Liechti, l’un des grands amis de la Révolution algérienne qui a refusé de porter les armes contre le peuple algérien après sa mobilisation par l’armée coloniale française. »
En rappelant l’importance de l’acte de résistance de Liechti, Abdelmadjid Tebboune a mis en lumière le courage dont il a fait preuve à une époque où la répression coloniale était implacable. Son acte de refus, suivi de son emprisonnement pendant quatre ans, a marqué l’histoire et fait de lui un modèle pour les générations qui suivront, aussi bien en France qu’en Algérie. Le président Tebboune a poursuivi son hommage en soulignant que, avec la disparition de Liechti, l’Algérie perd « l’un des amis de la Révolution algérienne, un grand militant parmi les hommes libres du monde ».
Un engagement qui transcende
Alban Liechti, en refusant de participer à la guerre d’Algérie, a ouvert la voie à d’autres personnalités engagées contre cette guerre, comme Hervé Bourges, alors rédacteur en chef de Témoignage Chrétien, qui s’est également illustré dans la dénonciation de la répression coloniale. Leur lutte commune a contribué à nourrir un mouvement croissant d’opposition en France, qui a progressivement fait évoluer les consciences sur l’injustice de cette guerre.
Ce geste, bien que lourd de conséquences personnelles, a fait de Liechti une figure incontournable du mouvement de résistance à la guerre coloniale. Si la France officielle reste silencieuse sur sa disparition, l’Algérie, en revanche, n’a pas manqué de reconnaître la valeur de son engagement. Tebboune a exprimé sa gratitude envers Liechti en des termes empreints de reconnaissance et d’émotion, affirmant : « Avec sa disparition, l’Algérie perd en lui un grand militant parmi les hommes libres du monde ».
Une absence de reconnaissance en France
En dépit de son parcours exceptionnel et de son rôle clé dans le mouvement de résistance à la guerre d’Algérie, la France n’a pas, jusqu’à présent, rendu hommage à Alban Liechti. Ce silence contraste fortement avec l’hommage appuyé de l’Algérie. Le parcours de Liechti a pourtant influencé nombre de réfractaires et de mouvements pacifistes en France, posant les bases d’une remise en question de l’implication française dans la guerre d’Algérie. Mais le contexte mémoriel franco-algérien et l’absence de volonté d’Emmanuel Macron d’avancer sur ces questions, peuvent expliquer en partie ce manque de reconnaissance officielle de la part de l’État français.
En conclusion, Alban Liechti laisse derrière lui un héritage politique et moral inestimable. Son exemple, et l’hommage que lui a rendu l’Algérie, rappellent que la lutte pour la liberté et la justice ne connaît pas de frontières. Ainsi, bien qu’Alban Liechti soit aujourd’hui une figure peu reconnue dans son pays natal, son nom restera gravé dans l’histoire comme celui d’un homme courageux et inébranlable dans sa quête pour l’indépendance et la justice.
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Commentaires
Eh bien merci pour ces hommages renouvelés à Alban Liechti ! Il a été effectivement emblématique du courant anticolonialiste qui s'est opposé à la guerre d'Algérie. Toux n'ont pas eu le courage et la détermination d'Alban mais il est devenu un symbole devant lequel nous nous inclinons.