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La famille de Maurice Audin indignée par la condamnation du journaliste Khaled Drareni
La famille de Maurice Audin indignée
par la condamnation du journaliste
Khaled Drareni
Nous reprenons ci-dessous le message de Pierre Audin, fils de Josette et Maurice Audin, et membre du comité international de soutien à Khaled Drareni.
Je ne connais pas Khaled Drareni. Je l’ai croisé à Paris, le 17 octobre 2019, alors que la solidarité s’organisait pour les détenus du Hirak. Je ne connais pas Khaled Drareni mais je le connais très bien car c’est grâce à lui, à ses interventions à la télé ou à la radio, à ses posts sur tweeter, que, vendredi après vendredi, mardi après mardi, j’ai pu suivre ce qui se passait en Algérie. Khaled Drareni est un journaliste algérien indépendant, correspondant de RSF et de TV5-monde. Depuis le 22 février, il couvre le Hirak en toute indépendance, en toute liberté. Le pouvoir algérien ne l’a pas supporté, il a enfermé, condamné Khaled Draréni. Avec lui, il a enfermé et condamné cette liberté légitime à laquelle aspire le peuple algérien.
Le Hirak, la révolution du sourire, se réclame des chouada de l’époque de la guerre de libération. A l’époque, le journal Alger Républicain a été interdit, l’Humanité a été censurée de nombreuses fois, pendant que les journaux à la solde du pouvoir prospéraient. Soixante ans après, alors que le ministre de la communication et le chef de l’Etat se vantent de soutenir financièrement la presse, des journalistes sont jetés en prison – d’abord Khaled Drareni, puis Moncef Ait Kaci –, des journaux électroniques sont régulièrement bloqués en Algérie —TSA, Interlignes, Casbah Tribune –, la nouvelle loi sur les « fake news » permet d’arrêter quiconque ose s’exprimer sur les réseaux sociaux, y compris les journaux, comme l’a expérimenté le journal Liberté.
Mes parents s’occupaient d’héberger des camarades du PCA (parti communiste algérien), mais aussi l’imprimerie du journal clandestin du PCA, Liberté. Quand mon père a été arrêté, les paras ont installé une souricière chez nous, ce qui leur a permis d’arrêter aussi Henri Alleg, directeur d’Alger Républicain. Un des slogans du journal avant son interdiction était « Alger Républicain ne peut pas dire toute la vérité mais il ne dit que la vérité ». Maurice Audin a été torturé et assassiné parce qu’il voulait une Algérie indépendante, fraternelle et solidaire. Aujourd’hui, j’ai honte pour ce pouvoir qui oublie son histoire, agresse des manifestants sur la place Audin, arrête Khaled Drareni à proximité de la place Audin, dans la rue même où ma mère garait sa 4CV, une rue en pente, pour pouvoir démarrer sans manivelle ! Moi, mon histoire me colle aux tripes, c’est comme si, encore une fois, on arrêtait quelqu’un chez moi.
Evidemment, il est plus facile de soutenir Khaled Drareni quand on est à Paris, comme moi, que quand on est à Alger, comme vous. Mais ce soutien est indispensable. Khaled Drareni est l’otage du système algérien, parce qu’il fait son métier de journaliste en toute conscience. Ce faisant, nous sommes tous otages de ce système, nous sommes tous en manque d’information sur la révolution du sourire. La fidélité aux idéaux des chouhada aurait dû motiver l’Algérie à être la première dans le classement des pays pour la liberté de la presse. Elle est 146e sur 180. Le Maroc est 133e, la Tunisie 72e. Les trois pays semblent s’être entendus pour faire la chasse aux journalistes indépendants. L’Algérie prétend participer au concert des nations, en signant des traités internationaux qui garantissent les droits et libertés, dont la liberté de la presse. Elle doit se ressaisir et libérer Khaled Drareni. Tout simplement. Et laisser les journalistes faire leur travail, laisser les citoyens s’exprimer. Tout simplement.
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