• La Guerre d'Algérie : le long combat vers l’indépendance

     

     

    La Guerre d'Algérie : le long combat

    vers l’indépendance

    La Guerre d'Algérie : le long combat vers l’indépendance

    Colonie française depuis 1830, l’Algérie va mener pendant 8 ans un long combat vers l’indépendance. Conflit complexe qui vit des exactions être commises dans les deux camps, la guerre d’Algérie reste un sujet brûlant. Les explications de Catherine Brun, historienne et professeur des universités.

    Catherine Brun rappelle en préambule que ce conflit n’a pas opposé simplement deux entités, la France et l’Algérie, ou deux peuples, les Français et les Algériens, mais a fait surgir des affrontements franco-français, algéro-algériens, aussi bien que des amitiés et solidarités franco-algériennes.

    Le contexte politique en France et en Algérie

     au déclenchement de la guerre

    En novembre 1954, l’identité française de l’Algérie fait encore la quasi-unanimité des forces politiques, à l’exception de l’extrême gauche. Mais dans les colonies françaises, la révolte gronde. "L'indépendance du Viêt Nam vient d'être arrachée, la défaite de Diên Biên Phu date de mai, et l'indépendance des deux protectorats maghrébins, le Maroc et la Tunisie, est en cours de négociation", explique Catherine Brun. La conférence de Bandoeng, en avril 1955, où vingt-neuf pays africains et asiatiques choisissent le non-alignement, achève de marquer l’entrée des pays du Tiers-Monde sur la scène internationale.

    Un évènement en particulier a-t-il déclenché la guerre d’Algérie ?

    Le 10 octobre 1954, le Front de libération nationale (FLN) naît du Comité révolutionnaire d’Unité et d’Action (CRUA), décidé à déclencher l’insurrection armée. "L’organisation sort de l’anonymat dans la nuit du 31 octobre au 1er novembre 1954 et déclenche l’insurrection par une trentaine d’actions coordonnées", explique l’historienne. Dix personnes sont tuées, parmi lesquelles un instituteur métropolitain. Si ce décès émeut particulièrement, la presse métropolitaine évoque à peine l'événement, et ce qu’on appellera la "Toussaint rouge" a très peu de retentissement dans l’opinion française. "Le 7 novembre, François Mitterrand, ministre de l’Intérieur, annonce toutefois solennellement : “L’Algérie c’est la France et la France ne reconnaîtra pas chez elle d’autre autorité que la sienne", rappelle Catherine Brun.

    Guerre d’Algérie : les revendications du FLN

    Le 10 février 1943, Ferhat Abbas (1899-1985) lance le Manifeste du peuple algérien. Il se réclame de "la tradition […] de liberté du peuple français" pour "revendiquer devant toutes les nations unies son droit à la vie". "La politique d’assimilation est un échec et sont alors exigées “l’abolition de la colonisation”, la reconnaissance du Français et de l’Arabe comme langues officielles, la liberté du culte", détaille Catherine Brun.

    Le FLN, lui, exigera l'indépendance nationale par la restauration de l'Etat algérien souverain, l’ouverture de négociations et la libération des détenus politiques.

    Guerre d’Algérie : les répercussions en France

    Comme le rappelle l’historienne, "les hostilités militaires de cette guerre non déclarée ont eu lieu sur le sol algérien, et le déclenchement de l’insurrection n’a d’abord eu que peu d’échos en métropole". Il faut attendre 1955 et les effets conjugués de l’instauration de l’état d’urgence et de la conférence de Bandoeng pour qu’une mobilisation s’amorce, avec la création, en novembre, d’un Comité des intellectuels contre la poursuite de la guerre en Afrique du Nord.

    "Pendant les années de conflit, les saisies de journaux, de revues ou de livres se multiplient. Il s’agissait d’éviter que le FLN et l’ALN (Armée de libération nationale) apparaissent comme des mouvements crédibles sur le plan militaire ou sur le plan politique", ajoute Catherine Brun. Il est également important de rappeler que les affrontements entre partisans du MNA (parti de Messali Hadj) et militants du FLN, plus militaire, n’épargnent pas la métropole. "Les contacts rompus entre les deux organisations, dès juin 1955, laissent place à un affrontement algéro-algérien terriblement meurtrier. À l’automne de 1957, la direction du MNA est décapitée par l’assassinat de ses principaux dirigeants. Le FLN prend alors le dessus en France, où son rival dominait encore", explique l’historienne.

    A partir de février 1961 et la constitution de l’Organisation armée secrète (OAS), pour l’Algérie française OAS, des attentats visent des personnalités intellectuelles en Métropole. Sont notamment visés André Malraux, Jean-Paul Sartre, les éditions du Seuil, Le Monde, le local des Temps modernes et l’éditeur François Maspero. À la fin de 1961 et au début de 1962, les attentats terroristes se multiplient en métropole et les ultras tentent d’”exporter” la guerre algérienne. Les violences policières en métropole explosent avec la répression sanglante de manifestations pacifiques à Paris le 17 octobre 1961 (lynchages, exécutions sommaires, corps jetés à la Seine…) et le 8 février 1962 au métro Charonne.

    “Surtout, il est essentiel de prendre conscience que ce conflit, long, a affecté la France bien au-delà de ses mobilisés. Appelés, militaires de carrière, insoumis, indépendantistes et leurs soutiens (syndicalistes, militants politiques…), harkis, Européens d’Algérie, défenseurs de l’Algérie française, immigrés d’origine algérienne, et leurs descendants en ont porté et en portent encore les stigmates.”, rappelle Catherine Brun.

    Les épisodes les plus marquants de la guerre d’Algérie

    Le 8 mai 1945, qui voit la répression sanglante de manifestations dans le Constantinois à Sétif, Guelma et Kherrata : un scout musulman arborant un drapeau algérien est abattu par un policier, ce qui déclenche des émeutes et une répression particulièrement meurtrière (environ 20 000 morts). Le cap de l’irréparable semble avoir été franchi.

    Mars 1957 : Une directive du général Allard recommande d’utiliser dans toute l’Algérie "les procédés employés à Alger et qui ont fait preuve de leur efficacité". À partir de la fin de 1957, des centres "de renseignement et d’action" fonctionnent en différents lieux d’Algérie. La "Bataille d’Alger", conduite par le général Massu pour démanteler le "terrorisme" urbain, légitime l’usage de la torture et annonce une grave crise morale. Alors considérée comme un "dérapage", la torture devient un "système".

    Le discours du 4 juin 1958 : après le coup d’État du 13 mai, le général De Gaulle, appelé au gouvernement, se rend à Alger où, depuis le balcon du Gouvernement général, il lance un fulgurant et très ambigu "je vous ai compris" qui donnera lieu à bien des malentendus.

    Automne 1960 : la mobilisation intellectuelle en France est marquée par le procès du réseau Jeanson (réseau de porteurs de valises), la publication de la Déclaration sur le droit à l’insoumission (plus connue sous le nom de "Manifeste des 121"), l’appel à une paix négociée lancé par la FEN et l’UNEF, et un contre-manifeste, favorable au maintien de l’Algérie française.

    Comment s’est terminée la guerre d’Algérie ?

    "Le discours du général De Gaulle du 16 septembre 1959 sur l’autodétermination du peuple algérien, a marqué un tournant. Il supposait la négociation ouverte avec le FLN et accordait à la population musulmane (au 9/10e majoritaire) le soin de trancher le sort de l’Algérie", explique Catherine Brun. Les partisans de l’Algérie française crient alors à la trahison. Dès le 19 septembre, Georges Bidault crée le Rassemblement pour l’Algérie française. Les lignes de partage commencent à bouger. "La droite intellectuelle se sépare en gaullistes et en antigaullistes, eux-mêmes fractionnés en tendances rivales. Dans l’ancienne, la nouvelle gauche et l’extrême gauche, déplacements et repositionnements se produisent aussi", observe l’historienne. Le 18 mars 1962, les accords d’Evian, signés entre le gouvernement français et le gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) débouchent sur l’indépendance de l’Algérie le 5 juillet de la même année.

    Merci à Catherine Brun, historienne et professeur à l’université Sorbonne Nouvelle. Auteur avec Olivier Penot-Lacassagne de “Engagements et déchirements. Les intellectuels et la guerre d'Algérie”, Gallimard/IMEC, 2012.

    SOURCE : https://www.geo.fr/histoire/la-guerre-dalgerie-le-long-combat-vers-lindependance-202242 

    « Racisme dans les médias : une banalisation qui perdureL'ombre du général Massu menace-t-elle toujours ceux qui travaillent sur la guerre d'Algérie ? »

  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :