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Pourquoi Boualem Sansal n’a pas sa place en prison
Pourquoi Boualem Sansal n’a pas sa place
en prison
L’écrivain franco-algérien Boualem Sansal, publié chez Gallimard, se trouve à l’heure actuelle détenu par l’État algérien. Il a été arrêté, venant de France, à l’aéroport d’Alger. Pour quel motif ? Pour certains propos que l’auteur aurait tenus dans un média d’extrême droite. L’écrivain Joseph Andras défend, par principe, sa libération.
L'Humanité
Publié le 24 novembre 2024
Il y a, ici-bas, certaines choses sans importance. Comme de savoir qui dit ce qui est dit. Est-ce vrai ou faux, juste ou injuste ? là seul est l’important. Un écrivain est actuellement en prison ; il est algérien et français ; il est un ennemi déclaré de l’égalité. Il a pour nom Boualem Sansal et ce nom brille sur toutes les sales bouches du pouvoir français depuis quelques jours.
C’est sans la moindre importance. Macron peut parler, Le Pen peut parler, Zemmour peut parler : parlons. Ils disent tout leur respect pour les dires de Sansal ; nous disons notre refus définitif de tout contrôle d’État. Quand un État frappe un faiseur de phrases, qu’importent les phrases. Quand un flic se pique de littérature, qu’importe la littérature. Quand un militaire corne les pages d’un livre, qu’importe le livre. Car laisser à l’État le droit de frapper un jour, c’est l’autoriser à frapper un autre jour : ce pourra très bien être nous, partisans de l’égalité.
« Nous opposerons notre monde au sien, phrases contre phrases, sans un flic pour arbitrer. »
Simone Weil, alors œuvrant dans la Résistance, notait dans l’un de ses ouvrages : « La liberté d’expression totale, illimitée, pour toute opinion quelle qu’elle soit, sans aucune restriction ni réserve, est un besoin absolu pour l’intelligence. » Que Sansal puisse formuler ses saletés à l’air libre est un besoin de ce type. Nous opposerons notre monde au sien, phrases contre phrases, sans un flic pour arbitrer, sans un cachot pour asseoir la fureur des États.
Seuls ceux qui se taisent de crainte de « faire le jeu » d’un pouvoir font son plein jeu : ils pensent avec, par et pour lui. Ils se regardent dans le pouvoir en s’imaginant lui résister. Ils tâtent son pouls le jour et ils en rêvent la nuit : un couple plus qu’un combat. Considérer ce que déclare le pouvoir pour savoir quoi avancer, quoi passer sous silence, est pure captivité : une pensée affranchie dit seulement ce qu’elle doit dire – le vrai, le juste.
Le reste (la conjoncture, le bon moment, les plateaux de télévision, les unes de journaux, le chahut des réseaux sociaux, les avis des élus, les rapports de force et les démêlés internationaux) n’est jamais son affaire. Si d’aventure le pouvoir dit le vrai, disons-le dix fois plus : voilà tout.
Que le pouvoir dispose des grands médias pour amplifier sa voix n’y change rien : il ne mobilisera jamais que des bouts de vrai dans sa grosse machine à fabriquer le faux. Le truc est connu. Grossier, avec ça. Nous sourions et faisons ce que nous avons à faire. Des opposants au pouvoir peuvent donc, à l’occasion, parler comme le pouvoir : ça ne sera que la preuve de leur intégrité. Et celle-ci est un bloc irrécupérable, une unité compacte insoucieuse des tirs croisés. Ainsi oui : Sansal n’a pas sa place en prison.
Joseph ANDRAS
SOURCE : POURQUOI BOUALEM SANSAL N’A PAS SA PLACE EN PRISON
« Le Centre culturel algérien organise une rencontre-débat-signatures autour de deux auteursJACQUES PRADEL, MON ALGERIE A MOI »
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Commentaires
2LEONJeudi 28 Novembre à 16:13BRAVO mais était-il nécessaire d'attendre un article de l'Humanité pour enfin vous réveiller ?
Je pense en fait que Boualem Salsan a mis en cause en Algérie les limites historiques sur lesquelles butte la société de ce pays. C'est une situation qui présente des analogies avec la France. Cela ne signifie pas que je condamne la lutte armée engagée par le FLN pour en finir avec le colonialisme et obtenir l'indépendance de l'Algérie. Mais la question est posée là bas comme en France, de ce qu'il en est de la liberté, de la démocratie, du progrès social. Le hirak n'est pas né de l'esprit mal tourné de quelques agités. Son ampleur témoigne de la corruption, de la gabegie et de l'impasse dans laquelle se trouve l'Algérie. C'est à peu près ce qui se passe en France !
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M. CROS la question n'est pas coupable ou innocent mais il faut défendre la liberté d'expression!