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« La Palestine sera toujours debout »
Vincent Liechti a rédigé
cet article que je vous propose
de consulter
Toute mon empathie au professeur de français poète anticolonialiste et pacifiste gazaoui Ziad Medoukh qui vient de perdre dans un seul bombardement israélien 7 personnes de sa famille et son propre appartement. Cessez-le-feu ! Fin du blocus ! Libération des otages israéliens et de tous les prisonniers politiques palestiniens ! Reconnaissance de l'état de Palestine sur tout le territoire occupé depuis 1967, c'est ça le chemin de la paix !
La Palestine sera toujours debout
Pour conclure cette histoire tragique, mais la Palestine sera toujours debout, Vincent Liechti interprète pour son papa et sa maman (décédés aujourd'hui) sans oublier ses nombreux amis dont je suis fier de faire partie " Refus d'obéissance " Car le colonialisme en Palestine ressemble au colonialisme que nous avons connu en Algérie.
Michel Dandelot
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A Gaza, une société «sans espoir»
et «où la loi du plus fort l’emporte» :
le message poignant "d’une" médecin
"française"
«On a heureusement des chirurgiens compétents, un radiologue virtuose, et l’équipe dans son ensemble a acquis une expérience dont peu peuvent se prévaloir», écrit Aurélie Godard.
Depuis le 7 octobre 2023 et l’attaque terroriste du Hamas contre Israël, Aurélie Godard s’est rendue dans la bande de Gaza à trois reprises : en janvier 2024, en avril, et plus récemment en octobre. Ce dernier voyage, au cœur de l’enclave palestinienne, à Deir el-Balah, a été particulièrement éprouvant pour la médecin anesthésiste et réanimatrice. Les Palestiniens «ont perdu tout espoir que la guerre s’arrête bientôt», raconte cette humanitaire de 43 ans, qui partage son temps entre Médecins sans frontières et l’hôpital d’Annecy, en Haute-Savoie. Le 11 novembre, elle a adressé à ses amis et collègues un long message décrivant la lente dégradation de la situation dans la bande de Gaza. Elle a accepté que Libération publie ses mots.
Aurélie Godard nous écrit :
«Bonjour à tous,
«Il m’a fallu encore près de six semaines pour prendre le temps d’écrire ces quelques lignes (qui, sans doute, comme les fois précédentes, deviendront un long pavé…).
«Je suis donc (toujours) à Gaza. A Deir el-Balah pour être précise, dans la zone centrale de Gaza. Là où la majorité des Palestiniens s’accumulent : l’ONU dit qu’ici, la surface par habitant est en moyenne de 1,5 m². Les enfants grouillent de partout (50 % de la population a moins de 18 ans, à 60 ans vous êtes très vieux ici). Ces enfants prennent certes moins de place, mais 1,5 m², ça ne fait quand même pas beaucoup pour vivre. Les champs de tentes s’étalent à perte de vue…
«L’hiver n’a pas encore commencé, le froid et la pluie ne sont donc pas encore de rigueur. Néanmoins, on imagine mal que les tentes déchiquetées par un an d’utilisation et moult déplacements fassent barrage aux intempéries. Ni que les organismes fatigués par les conditions de vie, la nourriture en boîte et la fatigue psychologique sauront trouver les ressources pour affronter l’hiver. La bronchiolite (ou son équivalent) a déjà commencé chez les bébés et se propage vite…
«Dans la longue litanie des misères qui sévissent ici, on range ensuite la santé mentale (la question n’étant pas qui est traumatisé, mais à quel point ils le sont), les violences (sexuelles, inter ou intra familiales, de groupes armés pillant les camions d’aide pour les revendre au marché noir…), les maladies chroniques décompensées et les blessés de guerre.
«Encore beaucoup de ces derniers et que (ou presque) de l’explosif. Donc des blessures multiples (une jambe arrachée, des éclats dans le poumon et l’abdomen, un peu de brûlures…) : vous vous retrouvez vite avec un patient muni de plusieurs tuyaux en plastique qui drainent l’abdomen ou le thorax, un peu d’oxygène et des pansements partout… On a heureusement des chirurgiens compétents, un radiologue virtuose, et l’équipe dans son ensemble a acquis une expérience dont peu peuvent se prévaloir !
«A chacun de ces malades ou presque, des membres de la famille sont morts dans l’explosion. Pas un patient qui n’a pas une histoire tragique dans cet hôpital sous tente prenant en charge des blessés.
«Pour autant, les enfants jouent (je me suis donc surprise à avoir un niveau de football tout à fait correct ! Facile, quand on joue avec un gosse amputé du bras, un en fauteuil roulant, et deux en béquilles avec fixateur externe ou plâtre. Pour autant, les femmes accouchent (ici, on reste six heures après accouchement voie basse, vingt-quatre si c’est une césarienne). Ces bébés qui naissent ont tous été conçus pendant la guerre, à des moments où sans doute l’accès à de la santé primaire (et donc la contraception – pas culturellement très répandue) était limité. Et à un moment où il restait un peu d’espoir. Je suis curieuse de savoir ce que la courbe de natalité dira dans deux ou trois mois.
«Pour moi qui ai eu la chance de côtoyer les Palestiniens en janvier, février puis en avril et mai, et maintenant en octobre et novembre, la différence est flagrante : ils ont perdu l’espoir que la guerre s’arrête bientôt. L’hiver dernier, tous étaient encore dans la phase de sidération du début du massacre. Au printemps, toutes les discussions tournaient autour des négociations interminables et infructueuses pour un cessez-le-feu. Mais depuis quelques mois maintenant, il n’y a même plus l’espoir… L’élection de Trump les a laissés indifférents, tant ils savent que l’un ou l’autre des candidats aurait autorisé la poursuite du bain de sang. Beaucoup n’attendent qu’une chose : quitter Gaza dès que la frontière ouvre. Pour beaucoup, faire un enfant maintenant relève de la folie…
«Alors que dire de ce qu’il se passe ici ? Le Nord (qui n’est pas sur la Lune hein, c’est à 20 km d’ici…) est un enfer, et il semble assez clair que les Israéliens ne laisseront pas les Palestiniens retourner sur leurs terres. Dans le Nord donc, les attaques sur les hôpitaux n’ont jamais cessé. Les médias ont-ils fait mention des tanks tirant sur un hôpital rempli de malades ? Pas vraiment. Combien d’entre vous savent en revanche que des supporteurs de foot israéliens ont été pris à partie à Amsterdam ? Sans doute beaucoup plus…
«Rien ne rentre depuis des semaines : au Nord comme au Sud, que ce soit de l’alimentation ou du médical, tout passe au compte-goutte. Dix-sept jours fériés en Israël en octobre m’a-t-on dit (et moi qui pensais que notre mois de mai était le meilleur !). En tout cas, des limitations très importantes de tout ce qui traverse la frontière, et pour le peu qui passe, des pillages en règle du côté palestinien. En plus des violences de la guerre, il y a en effet une société palestinienne sans garde-fou (plus de police, pas de gouvernement) et où la loi du plus fort l’emporte… Tout est donc sous tension, au point que ça va devenir très compliqué de maintenir notre niveau d’activité. Il y a un marché noir de la nourriture, où la farine vaut de l’or. Grâce à nos réserves, nous parvenons encore à nourrir les malades et nous-mêmes, mais pour une énorme partie de la population, c’est très très très compliqué et le spectre de la famine devient très concret.
«Néanmoins, malgré le désastre environnant, la vie semble avoir retrouvé un cours “normal” : la vie dans les tentes et avec les bombardements est devenue la nouvelle norme pour la population. Nous, on habite dans un endroit assez éloigné de la ligne de front (tout est relatif vu la taille de la bande de Gaza), donc les bombardements sont un peu moins sonores (pluriquotidiens toutefois, réveils nocturnes multiples, mais le pire est au nord, et ces bombes-là, elles ne secouent pas nos murs). Et puis dans les tentes, définitivement, eh bien ça ne vibre pas du tout quand il y a des gros boums. Il faut voir le bon côté des choses.
«Bon, vous aurez compris, je reste choquée, enragée, frustrée, émue, mobilisée… Tour à tour par ce conflit. Je crois quand même qu’après cette troisième rotation (et donc ces moins de cinq mois à Gaza en 2024), j’aurai un peu plus le sentiment d’avoir fait ma part. Ou du moins de les avoir accompagnés jusqu’où je pouvais. Il reste maintenant à faire ouvrir la frontière pour qu’ils puissent fuir ce champ de ruines qu’est devenu Gaza et reconstruire leur vie ailleurs, même si je doute que nos sociétés occidentales se précipitent pour les accueillir.
«Je vous embrasse bien fort,
Aurélie»
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Les soldats français qui ont désobéi
aux ordres en Algérie
Stanislas Hutin avec une photo de Said Boutout, un jeune de 14 ans torturé en Algérie par l'armée française.
Des vétérans de la guerre de 1954-62 brisent les tabous pour sensibiliser aux atrocités commises par leur armée en Afrique du Nord
Par Chahrazade Douah
Chahrazade Douah est une écrivaine franco-algérienne basée au Caire.En 1954, Stanislas Hutin, un jeune homme de 24 ans, suivait des études religieuses comme jésuite à Madagascar lorsqu’il fut appelé sous les drapeaux pour combattre en Algérie. Ayant été témoin des injustices coloniales, il refusa de partir. Bien qu’il ait obtenu l’autorisation de quitter l’armée, il fut placé sur un bateau militaire prêt à partir le lendemain, sans destination connue. Les 500 autres conscrits à bord hésitaient entre l’Algérie et le Maroc. Comme lui, ils ne voulaient pas se battre dans une guerre qu’ils ne comprenaient pas.
« Alors, nous nous sommes rebellés. Nous avons refusé d’y aller. Nous avons écrit sur le bateau : ‘Le Maroc aux Marocains, la Tunisie aux Tunisiens et l’Algérie aux Algériens’ », se souvient Hutin. Peu après, le bateau accosta à Alger.
Entre 1954 et 1962, la France a mobilisé plus de 1,2 million de soldats pour réprimer la lutte de l’Algérie pour son indépendance, ciblant une population de seulement 8 millions d’habitants. Les atrocités commises par l’armée française restent encore rarement reconnues publiquement en France aujourd’hui. Encore moins évoqués sont ceux, au sein même de l’armée, qui, confrontés à ces horreurs, ont défié les ordres, refusé de participer ou soutenu les Algériens. Ces hommes se sont dressés contre une hiérarchie militaire obsédée par la préservation de la colonie la plus précieuse de la France, au mépris de l’humanité du peuple algérien.
Ces récits contrastent fortement avec ceux que j’ai entendus toute ma vie, et lorsque j’en ai pris connaissance, j’ai voulu rencontrer ces personnes pour comprendre ce qui les avait encouragées à défier un appareil colonial qui réduisait au silence toute dissidence. J’ai contacté le vétéran Hutin, aujourd’hui âgé de 94 ans. Malgré son âge avancé, il consacre encore une grande partie de son temps à militer contre la guerre. Lors de notre conversation, il se souvenait avec une grande précision des horreurs qu’il avait vues.
Son éducation jésuite l’avait doté de sensibilités pacifistes, et il désapprouvait la guerre en cours. Cependant, un incident particulier le marqua profondément, le transformant en dissident déclaré. « J’ai entendu des cris de douleur terribles au milieu de la nuit. Le lendemain, j’ai découvert qu’il s’agissait d’un garçon. Il avait tout au plus 14 ans », raconte Hutin. Le garçon avait apparemment été torturé avec un appareil appelé «magnétophone», un générateur provoquant de douloureuses décharges électriques.
Révolté par ce qu’il avait vu, Hutin s’opposa à ses supérieurs. Ceux-ci, des militaires aguerris, étaient encore amers de la défaite française en Indochine, qui avait conduit à l’indépendance du Vietnam, du Laos et du Cambodge en 1954 — la même année où débuta la rébellion algérienne. Hutin prit également des photos du jeune garçon pour alerter le monde sur l’utilisation systématique de la torture contre les civils, ressentant la nécessité de documenter ce qu’il avait vu.
Des années plus tard, en 2013, Hutin retrouva le jeune homme dont le calvaire avait déclenché sa rébellion. Les deux hommes s’embrassèrent. Said Boutout ressemblait encore beaucoup à sa photo et se souvenait en détail de la nuit de torture qu’il avait vécue enfant. La photo fut largement diffusée, contribuant à briser l’omerta et devenant un symbole des abus coloniaux français.
Les conséquences de la dissidence de Hutin furent immédiates. Il fut marginalisé et menacé par son régiment : un autre conscrit lui confia que l’on parlait de s’assurer qu’une balle perdue l’atteindrait lors de la prochaine mission hors du camp. Il continua à désobéir, nourrissant les prisonniers la nuit et refusant de participer à tout combat. Il trouvait peu de soutien autour de lui. « Les autres conscrits reconnaissaient l’inhumanité de cette guerre et que les Algériens devraient lutter pour leur liberté. Mais la peur les transformait en sauvages », explique-t-il.
La désobéissance était rare, d’autant plus lorsqu’elle était motivée par des convictions morales. L’armée n’a enregistré que 420 objecteurs de conscience — des soldats qui refusaient de porter l’uniforme ou de prendre les armes par principe. Ce concept n’était pas légalement reconnu et la désobéissance morale était traitée comme une infraction pénale, passible de deux ans de prison.
L’historien Tramor Quemeneur estime qu’environ 15 000 soldats — un peu plus de 1 % des déployés — ont désobéi sous une forme ou une autre. La plupart étaient des conscrits qui ne se sont pas présentés à leur poste, et le deuxième groupe le plus important était celui des déserteurs. Leurs motivations restent inconnues : certains étaient peut-être profondément anticoloniaux, d’autres terrifiés par la guerre, ou simplement en quête d’une autre vie. L’histoire retient quelques noms exceptionnels, comme Noël Favrelière, qui a traversé le Sahara pendant sept jours avec un prisonnier recherché avant de rejoindre les rangs algériens. Un autre est Henri Maillot : lors de son audacieuse évasion, il a volé un camion rempli de munitions qu’il a livré aux communistes algériens.
« Le nombre de dissidents est très faible, mais il est beaucoup plus élevé que ce que nous pensions auparavant», explique Quemeneur. « Cela montre que la société française a participé à la guerre et l’a soutenue, mais moins qu’on ne le croyait. » Si la dissidence semble avoir eu peu d’impact sur la trajectoire de la guerre au niveau structurel, Quemeneur soutient que la véritable dissidence se trouve dans des récits personnels comme celui de Hutin. Ces actes quotidiens de désobéissance étaient bien plus répandus, bien qu’ils soient difficiles à quantifier.
Certains soldats n’ont pas désobéi, mais le regrettent encore aujourd’hui, comme Rémi Serre, qui, à 20 ans, a quitté sa campagne dans le Tarn, au sud de la France, pour son service militaire. Comme pour la plupart des conscrits, cela représentait un rite de passage dans une institution où ses ancêtres avaient servi. Il a aujourd’hui 86 ans et se souvient clairement du décalage entre ce qu’on leur disait et la réalité sur le terrain.
« À notre époque, aller en Algérie, c’était comme aller sur la lune », dit-il. «On nous disait qu’il fallait rétablir l’ordre et que ce serait rapide. Mais on a vite compris que ce n’était pas vrai du tout. On nous envoyait à la chasse à l’homme contre des gens qui voulaient simplement que leur humanité soit reconnue au même niveau que les Européens. Chaque jour, on se demandait ce qu’on faisait là. »
Bien qu’il y ait pensé, la désertion n’était pas une option. Elle risquait une condamnation à mort par les tribunaux français et aurait déshonoré sa famille. Dans une France qui respectait encore énormément ses institutions militaires, le mot « déserteur » signifiait le déshonneur.
À son retour, le jeune agriculteur milita contre la guerre dans une société qui avait adopté un silence total sur les souvenirs de l’Algérie. « Ce que nous avons vu nous a hantés pour toujours. Certains sont devenus fous, d’autres sont morts et d’autres encore tentent de vivre avec ces souvenirs », dit-il. « Mais la plupart d’entre nous sont restés silencieux, car ce que nous avions à dire était trop difficile à entendre. »
Des années plus tard, il réfléchissait encore à des moyens de contribuer au développement d’un pays qu’il avait auparavant blessé. À l’époque, il a commencé à recevoir une pension d’ancien combattant pour son temps en Algérie. « Je n’avais pas la maturité politique pour dire non à la guerre à l’époque », dit-il. « Mais en 2004, je savais que je ne voulais pas d’un centime de cet argent, il est taché de sang. »
Poussé par un profond remords et un sens aigu de l’honneur, Serre et ses premiers compagnons, des agriculteurs comme lui, dont les modestes revenus couvraient à peine leurs besoins essentiels, ont mis en commun leurs pensions pour créer un fonds destiné à l’Algérie. Ils ont fondé l’Association des Anciens Appelés en Algérie et de leurs Amis Contre la Guerre, connue sous l’acronyme « 4ACG », en 2004. Aujourd’hui, l’association compte plus de 400 membres, dont Hutin. Ils ont en moyenne 85 ans et font don des 826 euros qu’ils reçoivent chaque année en pensions de vétéran à 24 organisations non gouvernementales à travers l’Algérie, la Palestine et le Maroc, qui soutiennent des familles, des agriculteurs et des artistes dans le besoin.
Leurs premiers efforts pour plaider en faveur d’une plus grande transparence sur les horreurs de la guerre ont suscité peu d’intérêt, voire une hostilité ouverte du côté français, notamment de la part des membres de la génération concernée. D’anciens soldats et des « pieds-noirs » — Européens ayant vécu en Algérie pendant la période coloniale — perturbaient les réunions publiques de l’association, criant leur désaccord. Certains membres éminents de l’association, dont Hutin, continuent de recevoir régulièrement des menaces par courriel ou par téléphone. Ces attitudes extrêmes sont typiques d’un certain segment de la société française connu pour sa nostalgie assumée de l’Algérie coloniale.
Après des décennies de tabou, beaucoup d’autres en France critiquent désormais plus ouvertement l’héritage colonial du pays en Algérie, en particulier en ce qui concerne l’utilisation de la torture pendant la guerre.
La réponse en Algérie a été radicalement différente. Les membres de la 4ACG ont été chaleureusement accueillis. Ils racontent une population qui ne les considérait jamais comme des ennemis : pour eux, l’ennemi était l’État français, pas les conscrits individuels. Ces hommes sont vus comme les premiers pas vers des réparations, bien que l’État français n’ait pas encore pleinement reconnu l’étendue de ses crimes.
Les vétérans de la 4ACG ont forgé des liens profonds non seulement avec les communautés autour des ONG qu’ils soutiennent, mais aussi avec d’anciens fellagas, combattants algériens de la guérilla, qui, dans certains cas, étaient les mêmes hommes qu’ils avaient affrontés sur le champ de bataille. Serre n’en croyait pas ses yeux lorsqu’au cours d’un de ses voyages en Algérie, il croisa un visage familier qu’il reconnut instantanément après 50 ans. Joudia Toumi, un ancien fellaga, avait combattu contre lui. Il l’invita chez lui, marquant le début d’une profonde amitié jusqu’à la mort de Toumi l’année dernière.
Alors que la brutalité de la violence coloniale est de nouveau diffusée en direct, cette fois depuis Gaza et le Liban, revisiter les récits de désobéissance rappelle puissamment ceci : même à une époque où de telles horreurs pouvaient être dissimulées, beaucoup parmi les rangs des occupants reconnaissaient la barbarie dont ils étaient complices, et certains l’ont refusée, quelles qu’en soient les conséquences.
La France a utilisé le napalm de manière intensive en Algérie, brûlant sans distinction des villages entiers et des cultures, et déplaçant 2 millions d’Algériens — environ un quart de la population — dans des camps d’internement où régnaient la faim et la misère. Les disparitions forcées, les exécutions sommaires et le placement de mines antipersonnel à travers le territoire étaient monnaie courante. Sans doute, si les Algériens avaient eu les moyens d’enregistrer comment leur appel à l’autodétermination a été réprimé, ils auraient produit des images semblables à celles que nous voyons aujourd’hui.
SOURCE : Les soldats français qui ont désobéi aux ordres en Algérie - Maghreb Online
Il y a bien longtemps que j’ai parlé sur mon blog de Stanislas Hutin (re) voyez cet article qui date du 25 décembre 2011 :
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Motion de censure : la seule adoptée
sous la Ve République n’avait pas eu l’effet
recherché
En 1962, la motion de censure qui doit faire tomber Georges Pompidou et fragiliser Charles de Gaulle n’a pas eu l’effet escompté par ceux qui l’ont votée.
Il avait survécu à la première, en octobre. Les chances de Michel Barnier de ne pas tomber après la seconde motion de censure sont désormais infimes. Le Rassemblement national a en effet indiqué ce lundi 2 novembre qu’il votera celle consécutive au 49-3 activé par le Premier ministre lors du débat sur le budget de la Sécurité sociale. Le vote qui devrait intervenir ce mercredi s’annonce donc historique. Mais pas inédit.
Car comme le rappelle la vidéo en fin d’article, le cas de figure s’est déjà produit à une reprise débouchant sur un coup de théâtre gaullien. C’était en 1962, une année qui marque un tournant pour le président Charles de Gaulle et pour la toute jeune Ve République. Le 22 août, l’attentat du Petit Clamart est commis à l’encontre du chef de l’État et de son épouse par un commando de 12 hommes dont des membres de l’OAS, le bras armé des partisans de l’Algérie française.
Les terroristes manquent leur cible, mais le choc émotionnel est immense pour les Français et pour le général de Gaulle aussi. Il réfléchit à sa succession et décide alors de lancer un chantier qui lui est cher : le changement de mode d’élection du président de la République.
Le suffrage universel au cœur de la crise politique
« Quand sera terminé mon propre septennat ou si la mort ou la maladie l’interrompait avant le terme, le président de la république sera dorénavant élu au suffrage universel », propose-t-il aux Français dans une allocution télévisée le 20 septembre 1962.
À l’époque, la Constitution prévoit l’élection du président par des grands électeurs, c’est-à-dire des députés, des sénateurs et des élus locaux. Alors l’annonce plonge les parlementaires dans une colère noire, d’autant que de Gaulle ne souhaite pas passer par eux, députés et sénateurs, mais par référendum, et donc directement par le peuple.
Le 4 octobre 1962, tous les partis représentés à l’Assemblée, sauf les gaullistes bien sûr, déposent une motion de censure contre le gouvernement de Georges Pompidou. Elle est adoptée par 280 voix sur 480, soit plus que la majorité absolue. Le Premier ministre présente alors sa démission, refusée par de Gaulle, qui dissout immédiatement l’Assemblée nationale. Et là, rien ne va se passer comme prévu.
Le oui l’emporte, les gaullistes renforcés
Aux élections législatives des 18 et 25 novembre, les Français décident de conforter le parti gaulliste qui empoche 40 % des voix. Par ailleurs, entre-temps, le 28 octobre, les Français ont répondu à la question : « Approuvez-vous le projet de loi soumis au peuple français par le président de la République et relatif à l’élection du président de la République au suffrage universel ? » Et c’est le oui qui l’emporte à 62,2 % des voix.
Censurés, Georges Pompidou et son gouvernement sont donc, finalement, confortés. Mais c’est surtout, de Gaulle, et à travers lui, la fonction de président de la République, qui en ressortent plus puissants que jamais.
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Ce fut l’un des premiers articles de mon blog
en 2010
Cliquez sur ce lien pour voir cet article :
Aujourd’hui un internaute m’a demandé
si cette chanson existait en DVD
Voici donc la réponse :
Manu BLANCHET - "Algérie pays de soleil"
Extrait du Nouveau DVD "Manu Blanchet sur scène à Chamberet VOLUME 3", disponible dans la boutique melodirama : https://www.melodirama.fr/manu-blanch...
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Histoire : la dernière guillotine
de France a été construite
dans cette ville de l'Eure
Par Arielle Bossuyt Publié le 1er décembre 2024.
Découvrez l'histoire de la dernière guillotine de France, construite à Vernon (Eure) durant la Guerre d'Algérie.
En pleine guerre d’Algérie, on construit dans la caserne de Fieschi à Vernon (Eure) ce qui s’avérera être la dernière guillotine française pour exécuter les condamnés en Algérie. ©DR
1957. L’Algérie est engagée depuis trois ans dans une guerre pour son indépendance. Tandis que le Front de libération national algérien multiplie les actes terroristes, l’armée française use de tous les moyens pour rétablir l’ordre et cela passe notamment par des exécutions sommaires.
Pour cela, elle ritualise ces mises à mort en employant la guillotine. Une façon de les rendre visibles au grand public afin d’éteindre tout désir de rébellion. Une façon aussi d’établir un cadre autour de ces exécutions car « il est dangereux de donner des habitudes meurtrières à des jeunes qui, revenus à la vie civile, risquent d’avoir perdu le sens des réalités et le respect de la vie humaine », écrit Roger Delaporte dans son livre Les Grandes affaires criminelles de l’Eure.
Fin de la guillotine en 1977
Pour rappel, la guillotine est née avec la Révolution française. Au fil du temps, elle été de moins en moins utilisée. En France, la dernière décapitation a eu lieu le 10 septembre 1977. Toutefois, durant la guerre d’Algérie, son utilisation a augmenté « pour châtier les indépendantistes algériens ».
200 condamnés exécutés
Afin de réaliser cette funeste besogne, Fernand Meyssonnier, bourreau officiel, est envoyé en Algérie. Lui-même fils d’exécuteur, il devient auxiliaire de son père à Alger à l’âge de 16 ans. En quatre ans, Fernand Meyssonnier exécute 200 condamnés à Alger. Les mises à mort s’enchaînent.
Pour tenir le rythme, il faut donc fabriquer une nouvelle guillotine qu’on surnommera, de mauvaise augure, La Dernière veuve.
L’Établissement de réserve générale du matériel, basé à Vernon (Eure), est missionné pour construire cet outil. On se base sur les plans de la guillotine de la prison de la santé, à Paris, construite par Alphonse Berger en 1872. Ainsi, ce qui s’avérera la dernière guillotine française voit le jour à Vernon dans la caserne Fieschi.
Toutefois, les essais ne se révèlent pas concluants et aujourd’hui, nous ne savons pas ce qu’est devenue la guillotine fabriquée à Vernon.
« Dans les sous-sols du musée national des Prisons à Fontainebleau (Seine-et-Marne), il existe encore deux guillotines revenues de la Réunion et de la Guadeloupe mais on a perdu la trace de la dernière veuve, secret militaire oblige. »
Roger Delaporte dans son livre
Un des derniers exécuteurs français
Quant à Fernand Meyssonnier, il fut l’un des derniers exécuteurs français. En 2007, il a témoigné devant les caméras de France 2 en évoquant son passé de « bourreau », un terme qu’il exècre.
« Si l’État nous a acceptés, c’est qu’on était justes et sans haine envers le condamné. C’est au procureur, au juge, aux jurés, au président de la République, de ressentir éventuellement de la culpabilité. Moi, j’étais le dernier échelon. Et j’en suis fier, même aujourd’hui ! »
Fernand Meyssonnier, dans un reportage
Une mission qui laisse toutefois des marques puisqu’il se souvient encore de sa première exécution : « J’ai vu le condamné sortir, les quelques marches. La lame est tombée. Je me suis senti tellement oppressé. »
En 1961, Fernand Meyssonnier quitte l’Algérie pour vivre sous les tropiques, en Polynésie française, loin de ces souvenirs. Signe que cette fonction l’a marqué : il a conservé jusqu’à sa mort, en 2008, tous ces objets qui l’ont accompagné dans son quotidien d’exécuteur : des lames, des registres, des notes de frais…
Sources Les Grandes affaires criminelles de l’Eure de Roger Delaporte et l’article de l’INA, Les souvenirs de l’un des derniers bourreaux français.
Cliquez sur ce lien pour voir et écouter
Fernand Meyssonnier
SOURCE : Histoire : la dernière guillotine de France a été construite dans cette ville de l'Eure
De Guy Mollet à Robert Badinter
"Du sale temps de la guillotine
à l'abolition de la peine de mort"
Ci-dessus les bourreaux de la République dans la France coloniale
ILS ÉTAIENT
DEUX CENT VINGT-DEUX DÉCAPITÉS
PAR LA GUILLOTINE
Dans leur opération de répression de la lutte pour l’indépendance, les autorités coloniales usèrent d’une arme sauvage : la guillotine.
Une machine de guerre infernale. De 1956 à 1958, il y a eu 16 exécutions doubles, 15 multiples, 8 quadruples, une quintuple. Pour la seule année 1957, 82 condamnés à mort ont été exécutés : 41 à Alger, 7 à Oran et 34 à Constantine.Premier à monter sur l’échafaud : Ahmed Zabana
Ahmed Zabana a été décapité par la guillotine le 19 juin 1956, à 4 heures du matin, dans la cour de la prison de Serkadji.
Le Conseil supérieur français de la magistrature avait scellé son sort lors de sa réunion du 5 juin 1956. Il avait suivi la directive du chef du gouvernement, Guy Mollet – « la sanction doit immédiatement suivre l’arrêt » – donnée en Conseil des ministres quatre mois auparavant, le 15 février.De son côté, le Secrétaire d’Etat à la guerre, Max Lejeune, socialiste de la SFIO, partisan convaincu de l’Algérie française, appuyait l’appel des Français d’Algérie : « Les sentences doivent être exécutées ». A la date du 15 février 1956, 253 condamnations à mort avaient été prononcées dont 163 par contumace. 90 détenus se trouvaient donc dans les couloirs de la mort des prisons.
La condamnation à mort le 30 mai 1956 d’Ahmed Zabana figurait parmi les 55 sentences confirmées par la Cour de Cassation.
Le 19 juin 1956, le bourreau en titre s’appelait André Berger, « Monsieur Alger » ; Maurice Meissonnier, aidé de son fils Fernand, était son adjoint.Histoire Algérie : les bourreaux Maurice et Fernand Meyssonnier ont guillotiné 222 militants du FLN
UN BOURREAU FRANÇAIS – Attention, les propos tenus dans cette vidéo peuvent choquer. Au lendemain de la date anniversaire de l’abolition de la peine de mort, nous avons choisi de vous montrer ce témoignage rare, celui d’un des derniers bourreaux à avoir exercé. Pour lui, la peine de mort, ce n’est pas qu’un débat de société. La peine de mort, il l’a sentie. Ressentie même, entre ses mains, alors qu’il tenait la tête de condamnés au moment où la lame réalisait son funeste objet. Fernand Meyssonnier a exécuté 200 personnes dont des femmes et au moins un innocent. Il le sait, et pourtant, vous allez l’entendre, il n’a aucun problème de conscience. Fascinant. Poignant. Et terrible.
Le 11 décembre 2012 anniversaire des manifestations contre l'horreur coloniale du 11 au 18 décembre 1961 est une triste occasion pour parler des bourreaux français Fernand Meyssonnier et son père Maurice Meyssonnier ont guillotiné 222 militants du FLN avant sa retraite tranquille dans le Vaucluse, même des français qui soutenait l'indépendance de l'Algérie tel Fernand Yveton, militant communiste, ont été guillotinés. Après avoir refusé l'entrevue avec un prêtre, Yveton avait été conduit à l'échafaud guillotiné à l'aube du 11 février 1957, à Alger et est mort courageusement pour défier la lâcheté de la colonisation française. il s'appelait Fernand comme son bourreau !!!
Ces sinistres bourreaux ont battu le record de Sanson le bourreau de Louis XVI. Fernand Meyssonnier est devenu par la suite un disciple de Jean-Marie Le Pen, président du Front national et connu pour la torture durant la guerre d'Algérie. Le père Meyssonnier était le roi de la farce. Il se moquait des Juifs et des Arabes.
La bonté divine a fait que le Maurice soit emporté en enfer par un cancer de la gorge, en 1963, à Nice et son rejeton par un cancer du foie.Meyssonnier, bourreau à Alger
De 1947 à 1961, il a participé à l'exécution de quelque
200 personnes
Fernand Meyssonnier, qui a décapité 200 condamnés, ne supporte pas qu'on l'appelle «bourreau», mot vil à ses yeux et impropre à ses hautes fonctions : «J'étais exécuteur des sentences criminelles», dit-il avec fierté dans son livre (1). Issu d'une lignée de guillotineurs d'Alger son parrain et son père le furent , ce pied-noir de 75 ans a érigé sous sa maison à Fontaine-de-Vaucluse ses «bois de justice» avec le couperet tranchant. Cet engin de mort était le clou de son musée de la Justice et des Châtiments, qu'il avait fondé en 1992 et fermé en 1998, avec hache et corde d'exécution, entraves de bagnards, instruments de torture et tête coupée dans du formol. Il l'avait monté soi-disant au nom de l'Histoire. Il regrette, sous le même prétexte, de ne pas avoir filmé les exécutions en Algérie. Sollicité par Libération, Fernand Meyssonnier a fini par refuser l'interview, son entourage redoutant que notre journal «opposé à la peine de mort» le traite de «boucher».
Curé ou danseur. Aide bénévole de son père à partir de 1947, Fernand Meyssonnier ne devient son premier adjoint que dix ans plus tard. Car les places dans l'équipe du bourreau sont très prisées en raison des avantages sociaux qu'elles confèrent en ces temps d'Algérie française. Payés par l'Etat un salaire d'ouvrier, les exécuteurs tiennent tous un restaurant ou un bistrot à Alger. La table du café Laperlier des Meyssonnier reçoit tout ce qu'Alger compte de coloniaux, de députés et de commissaires. A 14 ans, le fils avait abandonné ses rêves d'enfant de choeur : devenir curé ou danseur d'opéra. Apprenti mécano aux ateliers de la Poste, il avait fabriqué une maquette de guillotine (modèle Berger 1868) pour l'anniversaire de son père. C'est à l'âge de 16 ans qu'il assiste, «impressionné», à sa première exécution. A Batna, dans le Constantinois, un «indigène qui avait assassiné un gardien de prison» bascule en priant «Allah Akbar» : «Au milieu d'un Allah Ak..., dans un bruit sourd, la lame tchak... lui coupe la parole. deux jets de sang pfffiou... giclent à trois ou quatre mètres. Ahhh... j'étais tellement oppressé, un petit cri comme ça ahhh... quand même ça m'a impressionné [...]. D'un coup, il n'a plus de tête, il vit plus.» (1)
Avec l'habitude, Fernand Meyssonnier se blinde et se concentre sur la technique. Coopté dans l'équipe de cinq, il remplit les fonctions de «photographe», celui qui «voit arriver la tête du condamné à travers l'oeil de la lunette» et le cramponne derrière les oreilles : «Tenir une tête qui vous reste entre les mains après la chute de la lame, c'est quelque chose de très impressionnant qu'on ne peut pas vraiment expliquer», écrit-il. Après, il la jette dans la «corbeille». Une photo du livre légendée «repas froid à trois heures du matin» le montre avec l'équipe en déplacement en train de prendre le casse-croûte sur la corbeille à cadavres décapités. Il y avait des rituels pour les bourreaux comme le coup de rhum, la chemise blanche et la cravate noire avant d'officier, «rapide», mais «sans haine». Après, lui se lavait. Pas à cause du sang et de la mort, mais «c'est le fait de toucher un homme malhonnête, moralement pourri». Il était tellement persuadé qu'ils étaient «tous d'affreux criminels» qu'il n'a jamais cauchemardé. «Après l'exécution, on rentrait chez nous comme un entrepreneur après son travail ou un chirurgien qui vient de faire une opération, ni plus ni moins.»
«A la chaîne». Il y avait des «coutumes» pour les condamnés à mort. Les «parricides», comme Mohamed Hamasi à Blida en 1947, étaient amenés devant la guillotine «avec un bandeau noir sur les yeux et un drap blanc sur les épaules». En cas d'exécution multiple, «le plus coupable» passait en dernier, comme le chef de bande des poseurs de bombes des stades d'El-Biar et d'Hussein-Dey en 1956 (17 morts) qui avait revendiqué le «carnage». Pendant les «événements» en Algérie, les exécuteurs ont été réquisitionnés pour tuer les indépendantistes du FLN, mais ont rechigné, car «normalement, les politiques auraient dû être fusillés» par les militaires : «Nous, on ne faisait que les droits communs [...]. Même Sanson, qui a fait le roi [le bourreau de Louis XVI, ndlr] et tout, il est passé à travers la Révolution.» Mais les exécuteurs d'Alger ont obéi aux ordres et décroché une «prime de risque», ainsi qu'une «prime de tête», sans compter les frais de montage de la guillotine, qui a servi comme jamais. «Oui, pendant le FLN, c'était à la chaîne», se vante Meyssonnier, «de juin 56 à août 58, cent quarante et un terroristes» tranchés. Et, si de Gaulle n'avait pas fait la «paix des braves» et «gracié neuf cents condamnés à mort, j'aurais dépassé à coup sûr Sanson». En 1961, il a pris la tangente pour Tahiti, où il a vécu de divers boulots, comme organisateur en 1976 de balades en corbillard pour touristes américains.
(1) Paroles de bourreau, Ed. Imago, 2002. Recueilli par l'anthropologue Jean-Michel Bessette, auteur d'Il était une fois la guillotine (Alternatives) et Sociologie du crime (PUF).
TOURANCHEAU Patricia
SOURCE : http://www.liberation.fr/evenement/2006/10/09/meyssonnier-bourreau-a-alger_53778
Robert Badinter est né
le 30 mars 1928 à Paris
Il restera l'homme qui a fait
abolir en France
la peine de mort
Avocat, homme politique, ex ministre de la Justice
Dans l'hémicycle, l'atmosphère est solennelle. Ils sont venus nombreux, pour le soutenir ou le huer. Robert Badinter garde des Sceaux, monte à la tribune, son texte tant de fois réécrit à la main. La France a les yeux rivés sur le petit écran de télévision. L'émotion est à son comble. Lorsqu'il prend la parole, c'est un discours mémorable, une plaidoirie, la dernière de ce combat acharné qui fut celui de sa vie. "J'ai l'honneur, au nom du gouvernement de la République, de demander à l'Assemblée nationale d'abolir la peine de mort en France". Nous sommes le 30 septembre 1981, l'abolition de la peine de mort est votée.
Une belle victoire qui vient conclure un douloureux engagement. Lui qui a subi sans faillir à sa cause, des années durant, les insultes à la sortie du Palais de Justice, les magistrats qui se détournaient, les menaces de mort, les lettres par centaines qui le conspuaient. S'il est difficile de l'imaginer aujourd'hui, le monde se partageait alors entre ceux qui voyaient en la peine de mort un juste châtiment, et les autres, un acte barbare.
A l'origine, une blessure profonde qui l'a longtemps taraudé. Le 24 novembre 1972, à l'aube, à la prison de la Santé à Paris, on guillotine deux hommes : Claude Buffet et Roger Bontems. Robert Badinter est l'avocat de Bontems contre qui la cour n'avait retenu que la complicité, reconnaissant qu'il "n'avait pas donné la mort" à une infirmière et d'un gardien de la centrale de Clairvaux. Une injustice qu'il n'oubliera jamais : guillotiner quelqu'un qui n'avait jamais tué personne.
"... après le verdict, lorsque l'accusé avait sauvé sa tête, il fallait s'en aller bien souvent par un escalier dérobé pour éviter la colère de la foule"
Ce tragique évènement marque le début de son combat contre la peine de mort. En 1977, il accepte de défendre Patrick Henry, kidnappeur et meurtrier d'un petit garçon de sept ans en 1976. Contre toute attente, la cour d'assise de l'Aube condamne ce dernier à la réclusion criminelle à perpétuité. La plaidoirie de Robert Badinter avait réussi à retourner les jurés de Troyes. Il avait fait témoigner des experts chargés d'expliquer le fonctionnement de la guillotine. "Choisirez-vous de couper un homme en deux ?" leur demande-t-il enfin. Les jurés répondront par la négative. C'est sa première grande victoire contre la "veuve noire".
Dans L'Abolition (Fayard), le livre qui retrace son parcours, il écrit : "De ces moments, à Troyes, dans la salle de la cour d'assises où je plaidais pour Patrick Henry, demeure vivante en moi cette impression singulière que je ne défendais pas seulement la vie de Patrick Henry, mais à nouveau celle de Bontems. Tout ce que je n'avais pas su dire pour lui jaillissait à présent pour cet autre assis derrière moi. 'Le mort saisit le vif' dit un vieux brocard juridique. Ce jour-là, dans ce box derrière moi, l'un était devenu l'autre".
A la fin des années 70, il enchaîne six procès consécutifs et sauve la tête de nombreux condamnés qui devaient être rejugés. La Cour de cassation cassait les arrêts. Il symbolise désormais le combat contre la peine capitale. "On entrait au palais de justice par la grande porte, et après le verdict, lorsque l'accusé avait sauvé sa tête, il fallait s'en aller bien souvent par un escalier dérobé pour éviter la colère de la foule", se souvient-il dans un entretien en 2001 avec l'AFP.
L'homme est tout entier dévoué à sa cause. Il est comme habité. On vient écouter ses plaidoiries qu'il n'écrit pas. "L'écriture c'est la mort de l'éloquence en justice", confie-t-il en 2006 au Journal du Dimanche. "C'est après le procès Buffet-Bontems et leur exécution que j'ai vraiment compris ce que la peine de mort signifiait... Injustifiable. Inacceptable. S'y ajoutait autre chose qui était en moi latent... Un rapport à la mort. C'est ce qui a fait que l'homme introverti que je suis devenait dans ces occasions-là, pour ces plaidoiries où il s'agissait d'arracher un homme à la mort, quelqu'un « d'autre». Ce n'était pas le métier d'avocat."
"Dès que je plaide, je sens mon père là, debout à côté de moi"
Non, il y avait certainement une affaire personnelle, un rapport particulier à la mort, peut-être le souvenir de son père arrêté par la Gestapo sous ses yeux, à Lyon en 1943, qui ne reviendra jamais du camp de Sobibor où il fut interné. L'avocat confiera au JDD en 2006 : "Dès que je plaide, je sens mon père là, debout à côté de moi".
Robert Badinter est né à Paris le 30 mars 1928. Ses parents étaient juifs immigrés venus de Bessarabie, naturalisés français. Il grandit dans un milieu modeste. Après la guerre, il commence des études de Lettres et de Droit, décroche la licence dans les deux disciplines. Boursier, il part ensuite étudier aux Etats-Unis et obtient en 1949 le diplôme de Master of Arts à l'université de Columbia.
Revenu en France, il s'inscrit au Barreau de Paris en 1951 et commence sa carrière d'avocat comme collaborateur d'Henry Torrès. Il obtient son doctorat en droit en 1952 et l'agrégation en 1965. Il est nommé Professeur des Facultés de Droit en 1966. Parallèlement à sa carrière universitaire, il fonde en 1965 avec Jean-Denis Bredin un cabinet d'avocats. Il participe à la défense du Baron Edouard-Jean Empain après l'enlèvement de celui-ci, est l'avocat de grands cinéastes comme Charlie Chaplin, exerce aussi bien comme avocat d'affaires (Boussac, talc Morhange, l'Agha Khan etc.) que de droit commun. Son dernier procès avant de devenir ministre de la Justice est celui contre le négationniste Robert Faurisson, qu'il fait condamner en 1981, et cela avant la loi Gayssot de 1990.
Ami fidèle de François Mitterrand, il entreprend de convertir ses victoires judiciaires en réforme politique. L'abolition fait partie du programme de la gauche aux élections. François Mitterrand est élu président de la République et nomme Robert Badinter ministre de la Justice (du 23 juin 1981 au 18 février 1986). La marche politique vers l'abolition débute, avec le point d'orgue que l'on sait, un bel après midi de septembre dans une Assemblée nationale pleine à craquer :"Lorsque j'ai pris la parole à la tribune de l'Assemblée, j'ai eu un moment d'émotion très intense. Je n'aurais jamais pensé, lorsque j'allais plaider dans ces cours d'assises, que ce serait un jour moi qui, devant le Parlement, prononcerais ces paroles magiques." (dans L'Abolition).
A la Chancellerie, il a présenté et défendu les textes de lois devant le Parlement, en faveur de la suppression de la Cour de sûreté de l'Etat (1981) et des tribunaux militaires (1982), ainsi que des lois accordant de nouveaux droits aux victimes. Il a également présidé la commission chargée de rédiger le nouveau Code pénal, adopté en 1992, en remplacement du Code napoléonien. Il a pris de nombreuses mesures pour humaniser les prisons. Des réformes qui lui valent d'être violemment stigmatisé, tout en renforçant sa stature d'homme de conviction.
"Aucune démocratie n'a le droit de disposer de la vie d'un citoyen. Là s'arrête le pouvoir d'un Etat"
En 1996, François Mitterrand le nomme président du Conseil constitutionnel. Il réussit en neuf ans et quatre alternances politiques à l'ériger en institution incontournable de la République. Sénateur des Hauts-de-Seine depuis 1995 , il est réélu en 2004. "Une manière intellectuellement intéressante de continuer à participer au processus législatif", reconnait dans une interview au Point en 1999, cet infatigable défenseur des droits de l'homme, de la souveraineté du peuple et de la République.
Travailleur acharné, il a aussi participé aux travaux de la Convention de Bruxelles pour l'élaboration de la Constitution européenne. En novembre 2003, il a été désigné par le Secrétaire général des Nations Unies Kofi Annan pour siéger dans le Comité de seize personnalités internationales chargé de proposer une réforme de l'ONU.
Hors normes. Robert Badinter s'est forgé avec une exigence d'airain un personnage qui force aujourd'hui le respect. Il est devenu une icône, un "mythe". La route qu'il a défrichée, à coups de convictions et de courage, pourfendant les esprits étriqués, s'il n'en a jamais dévié, c'est parce qu'il n'a jamais bradé son idéal. Son combat pour l'abolition de la peine de mort, il l'a poursuivi à l'étranger. Il y a tellement de pays encore à convaincre.
"Le jour viendra où il n'y aura plus, sur la surface de cette Terre, de condamné mis à mort au nom de la justice. Je ne verrai pas ce jour-là... Aucune démocratie n'a le droit de disposer de la vie d'un citoyen. Là s'arrête le pouvoir d'un Etat", écrit-il dans Contre la peine de mort (Fayard). L'affaire de sa vie.
17 septembre 1981
Débat parlementaire sur la peine de mort - extraits du discours de Robert Badinter : "Je demande l'abolition de la peine de mort en France... Je dis simplement en rappelant la trace de Jaurès : La peine de mort est contraire à ce que l'homme a depuis 2000 ans rêvé de plus noble, contraire à l'esprit du christianisme et de la révolution... il n'a jamais été établi de corrélation quelconque entre l'existence de la peine de mort et la courbe de criminalité... la mort et la souffrance des victimes appelle en contre partie le sacrifice expiatoire. Conviction d'une justice sûre de son infaillibilité.
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Aux funérailles
de Madeleine Riffaud, des chants
et de l'émotion
Cérémonie à la mémoire de Madeleine Riffaud, cimetière du Montparnasse. Paris, le 20 novembre 2024.
Le mercredi 20 novembre 2024 au cimetière du Montparnasse, se tenaient les funérailles de Madeleine Riffaud, décédée le 6 novembre dernier à l’âge de 100 ans. Dans un texte émouvant, Babeth Aubrac, fille des résistants Lucie et Raymond Aubrac, a rendu hommage à la poétesse, journaliste, écrivaine et résistante, qui a vécu « un siècle d’audace, d’engagements, de passions, guidés par une volonté hors norme. »
Ils étaient environ 300, rassemblés ce mercredi de novembre, dans l’allée de la 29ème division du cimetière du Montparnasse à Paris (14e) pour dire un dernier au revoir à Madeleine Riffaud, disparue le 6 novembre 2024. Parmi eux, la famille et les amis, mais également des élus et personnalités politiques, comme Fabien Roussel, des syndicalistes telle que Sophie Binet, des militants anti-fascistes, des membres des communautés franco-algérienne et franco-vietnamienne et une foule d’anonymes. « Il en a fallu du coeur pour s’engager pendant un siècle sur les routes qu’elle a choisies », a lu Babeth Aubrac, fille des illustres résistants, ajoutant qu’ « il n’y a pas assez de mots pour exprimer toute l’originalité de cette femme d’exception ». Et de rappeler les engagements qui furent ceux de Madeleine Riffaud : la Résistance, la lutte anti-coloniale, la proximité avec le Parti communiste, « la bagarre contre les injustices de toutes espèces. » À ceux-là s’ajoute son engagement syndical au sein du SNJ-CGT, dont plusieurs membres étaient présents pour lui rendre un dernier hommage.
Hors norme : le qualificatif n’est pas exagéré pour décrire la vie de Madeleine Riffaud. Sous l’occupation, elle rejoint la lutte armée en intégrant les FTP (Francs-tireurs et partisans) alors qu’elle n’a que seize ans. Son pseudo : Rainer, en hommage au poète allemand Rainer Maria Rilke car ce n’est pas les allemands qu’elle combat mais les nazis. Emprisonnée, torturée, plusieurs fois condamnée à mort, jamais elle ne livrera ses compagnons d’armes. Après avoir participé aux combats pour libérer la capitale, elle devient poétesse et journaliste, au quotidien communiste Ce Soir, dirigé par Louis Aragon, puis à la Vie ouvrière, avant de rejoindre l’Humanité. Pour le quotidien fondé par Jaurès, elle couvre la guerre d’Algérie, au cours de laquelle elle échappe de peu à un attentat de l’OAS, puis la lutte pour l’indépendance en Indochine. Au Viet-Nam, elle noue une relation avec le poète et militant anti-colonial vietnamien Nguyen Dinh Thi. De retour à Paris dans les années 1970, elle se fait embaucher incognito dans un hôpital à Paris et signe une enquête puis un livre sur les conditions de travail des aides-soignantes, des infirmières et des agents d’entretien. Entre mille autres choses.
« Maintenant il nous reste une tâche bien difficile, celle de transmettre. Transmettre le message que Madeleine a si bien su relayer sans baisser la garde. C’est-à-dire, servir l’Humanité avec pugnacité, optimisme, constance et enthousiasme », a conclu Babeth Aubrac. Alors que la Marseillaise s’achève (Madeleine Riffaud était croix de guerre avec palme de bronze, citation à l’ordre de l’armée), le Chant des partisans s’élève doucement de la foule. Joli moment de grâce pour dire un dernier au revoir à la camarade.
SOURCE : Aux funérailles de Madeleine Riffaud, des chants et de l'émotion – La Vie Ouvrière
Danièle Ponsot nous informe
« Je viens de recevoir, en tant que Présidente de l'ANACR Nord/Jura, le texte du discours qu'Elisabeth Aubrac a prononcé lors des obsèques de Madeleine Riffaud, Résistante et opposée à toute forme de colonialisme ».
Mercredi 20 novembre 2024
Pour Madeleine Riffaud,
« Les amis de Madeleine Riffaud m’ont demandé de prendre la parole aujourd'hui, probablement parce qu'il y a là du sens et du symbole dans mon nom de Babette Aubrac.
Il y a du sens parce que les engagements de Madeleine furent aussi ceux de mes parents Raymond et Lucie Aubrac : la Résistance, la Décolonisation, la proximité avec le Parti Communiste, la bagarre contre les injustices de toutes espèces.
Il y a du symbole parce qu'ils sont tous des exemples de courage et d’honnêteté civique, toutes ces femmes et ces hommes qui partaient pour de vrai, physiquement et intellectuellement, à l'assaut des assassins de la Liberté.
Ce sont ces idéaux qui ont conduit Madeleine tout au long de sa vie, ils passent par les voies des amitiés solides.
Raymond Aubrac, mon père, lui était incontestablement très cher.
Voilà… Madeleine s'en est allée…
En vérité nous sommes tous venus ici pour, ensemble, évoquer celle qui fut notre amie : cette femme, ce personnage, cette résistante, ce poète, cette journaliste, cet écrivain, que nous avons aimé.
Madeleine est une Femme de Cœur en Majesté.
Il en a fallu du cœur pour s'engager pendant un siècle sur les routes qu'elle a choisies.
Il n'y a pas assez de mots pour exprimer toute l'originalité de cette femme d'exception. Madeleine a orchestré sa vie avec une fantastique lucidité et un optimisme aussi conquérant que celui qui habitait ses compagnons.
Un siècle d'audaces, d'engagements, de passions, guidés par une volonté hors norme.
Dans l’un de ses poèmes, Traquenard, Madeleine scande sa peur :
Peur des bottes
Peur des clefs
Peur des portes
Peur des pièges
Oh ! elle a évidemment eu d'autres peurs, en bien des occasions, et sous bien des cieux, mais tout prouve qu'elle l'a domestiquée cette Peur !
N'est-ce pas là aussi les qualités du cœur ?
Tant d'années de vigilance pour combattre les ignominies du fascisme et du nazisme en France, puis du colonialisme en Indochine, en Algérie, au Vietnam, pour pourfendre les injustices qui ne connaissent ni les frontières, ni les métiers, ni les âges, ni les sexes, pour être l'avocate des opprimés et des sans grades…
Amis Vietnamiens et amis Algériens qui êtes ici, aujourd'hui, vous savez avec quelle fougue Madeleine a rejoint les partisans qui ont libéré vos pays.
Vous l'avez honorée de votre reconnaissance, mieux, vous lui avez offert votre amitié et votre fidélité.
Amis du musée de la Résistance de Champigny, amis des associations de Résistants, amis du Secours Populaire, amis de l’Association France-Vietnam, amis syndicalistes, amis politiques, amis des droits des femmes, amis créateurs de sa bande dessinée, vous aussi êtes ici pour témoigner des exigeantes convictions altruistes de Madeleine.
N'est-ce pas encore ici la générosité du cœur ?
Lutter contre les violences de la maladie, l'insupportable cécité qui annihile la liberté d'écrire et de lire à son gré, mépriser la vieillerie qui ratatine le corps et flétrit la beauté, entretenir jusqu'au dernier jour la force de se redresser pour approuver ou réfuter une idée ou un souvenir.
Rester coquette malgré tout ce cortège d'exaspérations de la déchéance, et donc réfréner du mieux possible, pas toujours, les colères, les impatiences…
Et si le cœur de Madeleine a pu battre aussi longtemps avec acharnement, c'est parce qu'elle a été entourée par une garde rapprochée tellement précieuse, tellement efficace.
Cette garde s'est depuis des années constituée en rempart contre les foultitudes de tracas ménagers, d'impératifs de santé, de complications journalières.
Des femmes et des hommes, avec une merveilleuse ponctualité, et des conditions quelquefois bien compliquées, ont œuvré pour que Madeleine vive, tout simplement vive…
Tous ici nous leur en sommes tellement reconnaissants !
Là encore, n’est-ce pas le cœur de Madeleine qui a eu l'immense pouvoir de surseoir à la disgrâce de la vieillesse ?
Des décennies de fantaisies, de curiosités, d'amours, de rires, de fêtes, de créations, tant poétiques que littéraires.
Des cigares précieux, des chocolats choisis, des whiskys ambrés, des fleurs de la rue de Turenne, des amis, et des amis, et des amis…
Ils étaient ceux qui comme elle, se sont dévoués à la Liberté et à la Fraternité.
Quand nous allions la voir dans son nid, ses nids, de la rue Villehardouin, nous commencions par grimper les étages. Ils sont raides ces escaliers !
Ils donnent le temps d'anticiper le beau sourire qui accueillera notre visite.
Nous savons déjà la brillance des yeux, malgré les lunettes noires.
Là-haut c’est un festival d'histoires, servies par une verve pleine d'humour. Un flot de noms qu'on est prié de connaître ou pour le moins d'identifier.
Commencent alors des échanges enrichis, fleuris, de souvenirs fantastiques…
D'autres visites se passent par téléphone.
Chacun ici se souvient de ces échanges téléphoniques sans fin…
Madeleine avait si fort à cœur de garder les liens de la voix, donc de la vie.
Témoigner et raconter, pour que la vie n'ait pas été vaine. Pour que se transmettent les élans du cœur, ces élans qui ont permis que son destin s'inscrive dans quelque chose de grand.
C'était tellement ça aussi le cœur de Madeleine.
Maintenant, il nous reste une tâche bien difficile. Nous nous y attelons déjà et nous souhaitons faire des émules.
Cette tâche difficile, c’est celle de transmettre. Transmettre le message que Madeleine a si bien su relayer, sans baisser la garde. C’est-à-dire, servir l'Humanité avec pugnacité, optimisme, constance, et enthousiasme.
Le voilà le cœur de Madeleine qui battait pour nous tous.
Je vous remercie de m’avoir fait confiance pour parler aujourd’hui de Madeleine devant vous »
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Dominique Sopo sera ce dimanche au camp
militaire de Thiaroy au Sénégal
« Ce dimanche, je serai au camp militaire de Thiaroye au Sénégal, pour la cérémonie officielle présidée par le président Bassirou Diomaye Faye en hommage aux Tirailleurs sénégalais, victimes d'un massacre colonial par l'armée française le 1er décembre 1944.
Depuis quelques jours, entre 1200 et 1600 tirailleurs étaient réunis dans ce camp où l'armée française les avait envoyés depuis la France où des arriérés de solde ne leur avaient pas été versés. La France promit à ces hommes qui avaient été prisonniers des Allemands que leurs soldes leur seraient versées au Sénégal, habile et malhonnête moyen pour éviter que leurs revendications ne se déroulent sur le sol national.
Exigeant leur dû, les Tirailleurs - venus du Sénégal mais aussi de nombreux autres territoires colonisés de l'Afrique subsaharienne - ne se laissèrent pas impressionner par le général Dagnan qui en éprouva une fureur toute coloniale. Car, dans le monde colonial, les "nègres" ne pouvaient tenir tête au pouvoir colonial. Leur sort était de courber encore et toujours l'échine. Cette fureur du général Dagnan, confronté à la détermination des Tirailleurs sénégalais, n'était donc pas qu'une disposition personnelle. Elle découlait de la trame même du pouvoir colonial.
D'ailleurs, le massacre du 1er décembre fut la conséquence directe d'une répression demandée par le général Dagnan à son supérieur et validée par ce dernier.
Et ce 1er décembre, le sang coula. De nombreux morts, de nombreux blessés. Et en guise de justice, l'arrestation, le procès et les peines pour des Tirailleurs sénégalais pourtant victimes de faits criminels.
Cette violence coloniale est souvent euphémisée, quand elle n'est pas niée. Ses conséquences sont souvent incomprises. Pourtant, ne pas comprendre que ce qui nous lie à des pays anciennement colonisés, c'est aussi le souvenir - dans les esprits, dans les chairs, dans les imaginaires - de cette violence passée, c'est ne rien comprendre à l'Histoire pas plus qu'à ses effets. Ses effets dans les pays où se déploya cette violence. Ses effets chez celles et ceux qui sont issus des peuples meurtris par le colonialisme et qui, pour une part d'entre eux, vivent aujourd'hui en France.
Cette Histoire de la violence doit être contée si on veut pouvoir en soigner les plaies encore béantes. Non pas contée en un éternel ressassement ou ruminement. Mais contée pour que la vérité soit dite et que nous puissions, ensemble, en France, au Sénégal et ailleurs, nous projeter ensemble et avec sérénité vers un avenir lourd de défis et riche de potentialités. »
Dossier : il y a 80 ans
le massacre de Thiaroye
Dossier : que s'est-il passé à Thiaroye le 1er décembre 1944 ? Pourquoi la France doit-elle reconnaître toute la vérité sur ce massacre ? Quelles commémorations au Sénégal et en France ?
Photo extraite de « Camp de Thiaroye », le film d’Ousmane Sembène qui a commencé à sortir de l’oubli cette tragédie. Photo : (C) Prod.
Le train des commémorations de 2024 liées aux différentes cérémonies autour du 80ème anniversaire de la Libération de la France et au 11 novembre qui marque la fin la Première Guerre mondiale nous rappelle la place centrale occupée par des soldats venus de l’empire colonial français dans les guerres du XXème siècle.
Dans l’Hexagone tout comme au Sénégal, l’année 2024 se clôt sur le souvenir d’un épisode emblématique des pires aspects du sort fait aux soldats coloniaux lors des deux guerres mondiales. Alors que la Libération de la France et la défaite du pouvoir nazi semblaient ouvrir de nouvelles voies vers l’émancipation des peuples colonisés, alors que le pouvoir colonial était de plus en plus contesté dans le monde, est survenu le massacre des Tirailleurs au camp de Thiaroye, dans la périphérie de Dakar, le 1er décembre 1944. Ce drame de Thiaroye a inauguré une sombre période de l’histoire de la France marquée par des guerres visant au maintien de l’Empire colonial durant lesquelles une série de crimes coloniaux ont été commis, au Vietnam, à Madagascar, en Côte d’Ivoire, en Algérie, au Cameroun et ailleurs.
Le 1er décembre 2024, on commémorera au Sénégal et en France le massacre de centaines de « tirailleurs sénégalais », originaires de toute l’Afrique Occidentale Française, qui réclamaient à Thiaroye, près de Dakar, le 1er décembre 1944, leur dû, c’est-à-dire leurs soldes pour leurs années de captivité qu’ils avaient passées en France depuis 1940. Leur violente répression fut un crime de l’armée française longtemps nié par une version officielle mensongère qui inventa une « mutinerie » et minimisa fortement le bilan de la tuerie. Il s’agit d’un crime de masse qui n’est toujours pas reconnu officiellement comme tel par la France et dont le nombre exact des victimes reste à établir.
Le présent dossier commence par récapituler les articles publiés depuis l’année 2004 sur le site histoirecoloniale.net (qui s’intitulait, jusqu’en 2017, ldh-toulon.net). Il reprend aussi une tribune publiée dans le quotidien Le Monde, accompagnée du lien vers une pétition en faveur de la reconnaissance par la France de ce drame. Ainsi qu’un agenda intitulé « Morlaix-Thiaroye 1944 – 2024 » des diverses initiatives qui ont lieu pour ces 80 ans, tant au Sénégal qu’en France, dont celles du Réseau Mémoires & Partages.
On y trouve aussi un article paru le 11 novembre 2024 sur le Blog de Histoire coloniale et postcoloniale sur Mediapart qui rappelle l’histoire de la sculpture érigée en 1924 à la fois à Reims et à Bamako en hommage aux tirailleurs africains qui ont joué notamment un rôle décisif dans la défense de la ville de Reims. Cet article attire aussi l’attention sur l’absence aujourd’hui dans les listes de noms gravés sur nos monuments aux morts de ceux des soldats nés au loin dans l’empire colonial et morts ici en combattant pour la France. Une absence choquante, injuste, et qui doit être réparée.
Ce dossier contient enfin le programme d’un important colloque scientifique organisé à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar les 2 et 3 décembre 2024 qui témoigne de la volonté du Sénégal de ne pas laisser aux autorités françaises le monopole de la narration de cet épisode. Un épisode tragique qui fait aussi partie de son histoire et doit intégrer la mémoire de ses citoyens.
En voici les différents éléments.
Cheikh Sakho, membre de la rédaction du site histoirecoloniale.net
• Nos publications depuis 2004 sur les tirailleurs et sur Thiaroye
• Tribune : « Il est temps que le massacre de Thiaroye soit officiellement reconnu par la France »
• Programme du colloque de Thiaroye à Dakar – 2 et 3 décembre
• Morlaix-Thiaroye 1944 – 2024, agenda des commémorations du 80e anniversaire
• Les initiatives en 2024 du Réseau Mémoires & Partages
• 11 Novembre : ne pas oublier les fusillés pour l’exemple et les soldats coloniaux
Paris : projection-débat
de « Thiaroye 44 » au Majestic Bastille
SOURCE : Dossier : il y a 80 ans, le massacre de Thiaroye
Massacre de Thiaroye en 1944 :
« C’est un crime de masse prémédité »
Le 1er décembre 1944, des dizaines de soldats africains appelés "tirailleurs" sont exécutés par l'armée française dans le camp de Thiaroye, au Sénégal. Ces hommes, qui ont combattu pour la France lors de la guerre et anciens prisonniers des nazis, réclamaient le paiement de leur solde. Selon la version officielle, la répression fait suite à une mutinerie. Une thèse réfutée par l'historienne Armelle Mabon, maître de conférences à l'Université Bretagne Sud. Elle dénonce un mensonge d'Etat et un crime de masse prémédité. A l'occasion du 73e anniversaire du massacre de Thiaroye, Armelle Mabon revient sur cet épisode sanglant de la colonisation française en Afrique de l'ouest.
La France va devoir fermer
ses bases au Sénégal, dit
le président sénégalais à l'AFP
Le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye a indiqué jeudi que la France allait devoir fermer ses bases militaires au Sénégal, dont la présence est incompatible selon lui avec la souveraineté de son pays.
Lors de la commémoration du 80e anniversaire du massacre des tirailleurs sénégalais par les forces coloniales françaises, le président Bassirou Diomaye Faye a déposé une gerbe de fleurs au cimetière de Thiaroye, proche du camp où se sont produits les faits. La France était représentée par son ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot.
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JACQUES PRADEL, MON ALGERIE A MOI
Avec Samia ARHAB
Itinéraire d’un descendant de colons, qui raconte sa prise de conscience progressive de l’injustice du système colonial. Jacques Pradel est un homme bien déterminé à ce que la parole des pieds-noirs ne soit pas confisquée par l’extrême droite. À chaque date commémorative de la guerre d’Algérie, les médias dominants donnent la parole à des pieds-noirs caricaturaux ou leurs héritiers : tempérament de colon chevillé au corps, des nostalgiques de l’Algérie française dont l’accent truculent rendrait plus digeste une xénophobie crasse. L’exact inverse de Jacques Pradel, et de bien d’autres pieds-noirs emmitouflés dans la sobriété mais pas dans l’inaction, comme le prouve le collectif qu’il a créé en 2008 : l’Association nationale des pieds-noirs progressistes et de leurs amis (ANPNPA)
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