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Stéphane Romalet : L’Algérie et la France entretiennent une relation d’une « exceptionnelle densité »
Paroles, paroles chantait Dalida… Encore des paroles que tu sèmes au vent… Tout va très bien entre la France et l’Algérie M. Stéphane Romalet ? alors êtes-vous au courant que l’Algérie met brusquement fin à l’enseignement des programmes scolaires français dans les écoles privées, cela ne concerne pas les établissements publics où, depuis longtemps, l’enseignement est en arabe ?
Michel Dandelot
Stéphane Romalet : L’Algérie
et la France entretiennent
une relation d’une « exceptionnelle densité »
Le nouvel ambassadeur de France en Algérie, Stéphane Romalet, a indiqué hier mercredi à Alger, que les deux pays entretiennent une relation d’une « exceptionnelle densité », plaidant pour un « dialogue confiant » sur tous les grands défis qui affectent l’environnement dans lequel les deux pays évoluent.
« J’ai fait part au Président Tebboune de l’état d’esprit qui anime la France dans sa relation avec l’Algérie », a déclaré M. Romalet, après avoir remis ses lettres de créances au président de la République, M. Abdelmadjid Tebboune, soulignant qu’il s’agit « d'une relation d’une exceptionnelle densité qui fait que la France et l’Algérie sont ensemble et ceci parce que la géographie et l’Histoire le commandent et que l’avenir nous impose aussi de travailler entre Français et Algériens ».
Mettant en exergue « la densité des relations humaines et l’interdépendance des sociétés des deux pays », il a fait observer que « tant de choses relient les deux pays ».
Dans le même sens, M. Romalet a recommandé « d’engager un dialogue confiant entre les deux pays sur tous les grands défis qui affectent notre environnement dans lequel nous évoluons », soulignant « la nécessité de créer cette relation de proximité entre nos deux pays, bâtir un agenda commun, et profiter de la présence de l’Algérie au Conseil de sécurité (de l’ONU) pour intensifier notre dialogue sur les grandes questions politiques ».
Affirmant avoir remis « un message personnel du Président Emmanuel Macron au Président Tebboune », l’ambassadeur français a indiqué qu’il entame sa mission en Algérie par « un agenda positif », se disant « très enthousiasmé » par sa mission dans un pays « si chaleureux, accueillant et proche de la France ».
L’Algérie met brusquement fin
à l’enseignement des programmes scolaires
français dans les écoles privées
Fin août, peu avant la rentrée, les autorités algériennes ont demandé aux responsables des établissements de ne plus enseigner les matières comme dans l’Hexagone sous peine de sanction.
Dans la cour d’une école d’Alger, le jour de la rentrée, le 19 septembre 2023. AFP
Il y a quelques semaines, juste avant la rentrée scolaire du 19 septembre, un établissement privé algérien a été sommé par les autorités algériennes de ne plus enseigner le programme français aux élèves sous peine de sanctions. « Nous sommes dans le flou », soupire une professeure algérienne d’histoire qui y enseigne et qui, comme d’autres personnes interrogées, a requis l’anonymat. D’autres écoles à travers le pays sont dans le même cas. « Un coup de massue, résume une directrice. On ne sait pas quoi faire. »
Jusqu’à cette rentrée, certaines écoles privées – l’Algérie en compte 586, selon un chiffre avancé par le ministre de l’éducation nationale, Abdelhakim Belabed, en 2021 – pouvaient en effet proposer aux élèves de suivre le programme français en plus du cursus national obligatoire en arabe. Un double programme jamais autorisé par la loi, mais toléré au grand jour « avec la complicité des autorités », affirme un directeur.
Les vingt-deux écoles qui échangeaient avec l’ambassade de France à travers un label délivré par l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) ont été particulièrement visées. Début août, ces établissements ont reçu un premier courrier, parfois transmis par un huissier de justice, informe une source, les « sommant de se retirer de ce label » sous peine de fermeture ou de poursuites pénales.
« On s’est exécutés », relate un directeur qui ne comprend toujours pas comment, ni pourquoi, une telle décision a été prise. D’autant plus qu’en juillet, son groupe scolaire avait reçu la visite « très ordinaire » d’une commission composée d’un représentant du wali (le préfet), de l’éducation nationale et d’un gendarme. Une inspection comme il en existe tant, notamment dans les villas aménagées en écoles devant répondre à certaines normes. « Tout était cordial, assure ce directeur. Il n’y avait pas de climat d’inquisition. On m’a juste demandé si j’avais le label. A la fin de la visite, on n’était pas inquiet. Alors, pourquoi une telle interdiction ? »
« Ça n’a pas plu aux autorités »
En 2021, après les déclarations d’Emmanuel Macron sur le « système politico-militaire » algérien qui ont provoqué une grave crise diplomatique entre Paris et Alger, des inspecteurs de l’éducation nationale avaient déjà multiplié les contrôles inopinés dans les écoles privées pour s’assurer que le cursus national était bien enseigné et les pousser à abandonner le programme français. Certains établissements avaient choisi d’obtempérer, d’autres s’étaient résolus à fermer ou à changer de statut, passant de l’éducation à la formation, avec le risque que des élèves se retrouvent déscolarisés.
Au même moment, l’anglais commence à être imposé au sein d’institutions publiques dans le but de remplacer le français. La langue n’a, toutefois, pas été bannie : dans les écoles publiques et privées, elle continue d’être enseignée à raison de cinq heures par semaine.
L’interdiction soudaine du programme français dans les établissements privés, s’il est un symptôme des tensions entre Paris et Alger, répond aussi à la volonté de mettre fin aux abus commis par certaines écoles, qui ont privilégié les matières françaises au détriment du programme algérien. Un enseignement parfois dispensé « de manière exclusive », reconnaît un professeur qui travaille dans le public et le privé. « Dans ces écoles, lors des inspections, il fallait cacher les manuels en français, ne pas les mettre dans les cartables des enfants car on pouvait les fouiller », confie-t-il. « Des élèves ne se présentaient pas au brevet ou au bac algérien, uniquement aux examens français, ça n’a pas plu aux autorités », ajoute une enseignante.
« Le CNED, c’était un visa pour eux »
Pour beaucoup de familles, une telle annonce représente un choc. Face à l’absence de communication officielle, les parents d’élèves pensaient au départ qu’il s’agissait d’une simple rumeur. Aujourd’hui, ils sont désemparés. C’est le cas de Khelaf. Ce quadragénaire a dû quitter Alger pour s’installer à Tizi Ouzou, à 100 kilomètres, afin d’inscrire sa fille de 6 ans dans une école privée qui dispense le programme français. « Cet été, toutes les écoles de la capitale m’ont envoyé balader. On m’a fait comprendre que de récentes instructions reçues leur interdisaient formellement de l’enseigner, raconte-t-il. A Tizi Ouzou, on m’avait assuré au moment de l’inscription que ça passerait. L’école pensait pouvoir contourner l’instruction. » Mais le jour de la rentrée, l’établissement n’a pas été en mesure de proposer le programme français.
La décision des autorités algériennes est d’autant plus mal ressentie qu’elle coïncide avec une autre réforme, française cette fois, concernant le Centre national d’enseignement à distance (CNED). Jusqu’à cette rentrée, les Algériens pouvaient s’y inscrire et passer le bac français par le CNED réglementé, ce qui leur ouvrait la possibilité de s’inscrire directement sur la plate-forme Parcoursup pour accéder à l’enseignement supérieur français. Quelque 3 000 élèves en Algérie étaient concernés, le plus important contingent au monde. « Le CNED, c’était un visa pour eux », lance un enseignant. Le nouveau système ne le permet plus.
« Au final, la victime est l’élève algérien, tonne une enseignante. Beaucoup ne maîtrisent pas l’arabe parce qu’ils n’ont suivi que le programme français. Pour les primaires, c’est récupérable. Mais les collégiens ou les lycéens ne seront pas en mesure de suivre le cursus national. » Pour continuer à étudier le programme français, des cours sont désormais organisés dans des maisons de parents ou lorsqu’il n’y a pas classe. On envoie aussi les extraits de manuels français sur les téléphones par précaution. Tout se fait en cachette. On évoque aussi « l’idéologie » et « l’hypocrisie » des dirigeants du « système » qui, chaque rentrée scolaire, multiplient les sollicitations pour inscrire leurs enfants au lycée international français Alexandre-Dumas, à Alger.
Dans cet établissement qui compte 2 183 élèves, dont 1 008 Français incluant 855 binationaux, la pression est extrême : jusqu’à 56 demandes pour une place pour certaines classes. Pour faire face à cette explosion, la France a, selon nos informations, proposé aux autorités algériennes d’ouvrir un second lycée français à Alger. Pour l’instant, les discussions n’ont pas abouti.
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