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Marie-Aimée Lebreton raconte l'absurdité de la guerre d'Algérie

 

 

Marie-Aimée Lebreton raconte l'absurdité

de la guerre d'Algérie

 

Marie-Aimée Lebreton raconte l'absurdité de la guerre d'Algérie

 

Entretien avec Marie-Aimée Lebreton, auteure de "Jacques et la corvée de bois" 

Le nouveau roman de Marie-Aimée Lebreton, "Jacques et la corvée de bois", nous plonge dans l'Algérie de la fin du colonialisme avec Jacques, un jeune soldat français, qui fait face à l'absurdité de sa condition et de cette guerre finissante.

"Quelqu'un de bien". Ce sont les premiers mots du roman de Marie-Aimée Lebreton, écrivaine française et docteure en philosophie. Ils désignent Jacques, le personnage principal de ce livre poétique et poignant, composé de 104 brefs chapitres qui ressemblent à d'énigmatiques petits tableaux, ou aux morceaux épars d'un miroir brisé.

Jacques est un jeune Français né dans une modeste famille nîmoise, dans les années 1940, il est orphelin de mère. Son père, en proie à des épisodes dépressifs et écrasé par sa condition, encourage son fils à effectuer son service militaire en Algérie dans l'espoir d'une vie meilleure pour lui.

Une mission "simple"

Ces mots-là - "quelqu'un de bien" - sont signés de la main du chef militaire Mangano et sont destinés à la commission hiérarchie de l'Armée française d'Algérie. Grâce à cette appréciation écrite par un haut gradé, Jacques fera partie des jeunes appelés du 35e régiment qui embarqueront un soir, du port de Marseille vers cette Algérie qui endure un "colonialisme finissant". Leur mission sera "simple", selon les mots de l'adjudant Rolles: puisque là-bas "les événements" touchent à leur fin, il s'agira tout bonnement d'"accompagner la transition". Bien évidemment, une fois sur place, la réalité du jeune soldat sera tout autre, et bien plus cruelle.

Aucune parole ne viendrait donner du sens, aucune grâce pour accompagner, rien qui puisse le sauver, sauf à trouver un endroit où ne pas penser.

Sur le sol algérien, l'absurdité de la guerre et des incessants contrôles d'identité des habitants que l'on ne désigne que par le terme "bicots", l'aberration de la vie en garnison et du décorum militaire peinant à masquer les abus, ajoutés au bruit des camions qui explosent sur des mines, finissent d'écraser le jeune Jacques. Il résiste pourtant, parce qu'il a, pour lui, une sorte d'indifférence innée face à la vie qui lui a toujours permis - jusqu'ici - de faire face.

Jacques le fataliste

Marie-Aimée Lebreton raconte l'absurdité de la guerre d'Algérie

La couverture du livre "Jacques et la corvée de bois" de Marie-Aimée Lebreton. [DR]"

Ne pas penser. Être au milieu des autres sans trop craindre pour son déséquilibre", se répète-t-il. Il arrive à s'échapper par la pensée, à s'extraire de sa situation et à faire, de temps à autre, remonter le passé heureux partagé avec son meilleur ami François et avec la belle Jeanne qu'il n'a plus revus depuis son départ. "En apparence il faisait les choses, mais en réalité il s'échappait dans une étendue sans fin, comme une vérité, où il pouvait penser aux baignades avec François ou à la nuque de Jeanne".

Avec son ami François, le lien avait été immédiat, dès l'enfance. Une évidence, bien que tout, dès l'origine, les sépare: la classe sociale, le caractère, l'aptitude aux études. Alors que Jacques s'enfonce dans la guerre comme simple recrue, François entre à Polytechnique et en sort major et gradé. Les deux jeunes hommes ne se voient plus. Puis un jour, à Alger, alors que la guerre semble enfin s'achever et qu'une cérémonie officielle est organisée par les autorités, ils se croisent. Ils ne sont plus les mêmes. Leur amitié aura-t-elle résisté aux événements ?

Jacques et la corvée de bois

Marie-Aimée Lebreton raconte l'absurdité de la guerre d'Algérie

« La corvée de bois était le nom donné aux exécutions sommaires. On emmenait en pleine campagne un groupe de prisonniers ou de simples suspects pour effectuer une corvée de bois, et là, on faisait mine de leur rendre leur liberté et on les abattait comme des lapins. Et comme on ne pouvait pas obliger les appelés à commettre des assassinats, Rolles choisissait parmi eux des volontaires. Il arrivait souvent que ceux-là se rétractent au dernier moment. »

Jacques est un jeune appelé du 35e régiment, un de ces hommes envoyés en Algérie dans les années 1959-1960 pour accompagner la transition après les années de guerre, se faire les dents et devenir des hommes, leur dit-on. Il laisse derrière lui son père, et surtout celle qu’il aime, Jeanne, qui reste tout près, en pensée, tout au long de son exil. Là-bas, en Algérie, Jacques retrouve son ami d’enfance, François, un jeune officier plein d’assurance, qui viendra, juste après la proclamation de l’indépendance, rappeler lors d’une cérémonie officielle le sens de l’engagement militaire et les valeurs patriotiques, comme pour mieux organiser l’occultation de l’horreur qui vient de se dérouler. Jacques ne reconnaît plus son ami, devenu un étranger pour lui. Que fera-t-il de son sentiment de trahison ?

Marie-Aimée Lebreton, après Cent sept ans (Prix Alain-Fournier), revient une fois encore sur la guerre d’Algérie, explorant cette fois le sort de ces jeunes Français engagés dans un conflit qui leur est étranger. Une œuvre lumineuse qui emprunte au conte.

ILS EN PARLENT…

« Dans une langue magnifique, l’Algérie et la traversée d’une guerre encore inavouée. »

Benjamin Stora

 

Cliquez sur ce lien pour écouter Marie-Aimée Lebreton raconter l'absurdité de la guerre d'Algérie dans son intégralité :

https://www.rts.ch/info/culture/livres/11407500-marie-aimee-lebreton-raconte-l-absurdite-de-la-guerre-d-algerie.html 

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C
J'ai quelques points communes avec ce Jacques de la corvée de bois : le même prénom bien sûr ! La même année de naissance, 1940, la même période d'arrivée en Algérie. Pour moi ce fut le 4 mars 1960 que j'ai débarqué à Oran.<br /> Eh oui, c'était la fin de la guerre d'Algérie mais ça n'avait pas réduit les exactions. Enfin, fort heureusement je n'ai jamais été sollicité pour une corvée de bois !<br /> Je ne sais pas si j'étais un type bien. Un excellent deuxième canonnier sans doute, à conserver dans ce grade  En fait j'ai souffert de l'institution militaire plus que de la guerre elle-même.<br /> -Avant le confinement, mon ami Pierre de Murviel-les-Béziers m'avait chargé de lui procurer le livre "Jacques et la corvée de bois". Les circonstances ont fait que l'affaire a été reportée.<br /> Je ne sais pas si l'ouvrage correspondra à son attente. Pour ce qui me concerne je crains que ce soit un peu trop intellectuel pour moi.  
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