SOUVENIR CHOISI
Hommage aux Victimes de l'OAS
Chaville, 7 octobre 2021.
Répondant à l'appel lancé conjointement par l'association "Les Amis de Max Marchand, de Mouloud Feraoun et de leurs Compagnons" et de l'Association nationale pour la protection de la mémoire des Victimes de l'OAS (ANPROMEVO), des élus, des présidents, dirigeants et membres d'associations mémorielles et du monde combattant, au nombre de 35 à 40, se sont réunis le 6 octobre 2021, de 11h à midi, au cimetière parisien du Père-Lachaise, afin de célébrer, dans la dignité et le recueillement, le 10e anniversaire de la stèle dédiée par la Ville de Paris à l'ensemble des victimes civiles et militaires de l'OAS en Algérie et en France.
L’émotion était palpable au rappel de la cérémonie du 6 octobre 2011 en conclusion de laquelle M. Bertrand Delanoë a dévoilé ce monument en hommage aux CIVILS, MILITAIRES, ÉLUS, MAGISTRATS, FONCTIONNAIRES, DÉFENSEURS DES INSTITUTIONS ET DES VALEURS DE LA RÉPUBLIQUE.
Puis le moment est venu des interrogations concernant l’origine de l’offense faite à la mémoire de ces morts par le chef de l’État qui, non seulement s’est refusé à en honorer le souvenir, mais a ostensiblement reçu les descendants de leurs assassins le 30 septembre.
Je sais gré à M. Pascal Joseph, conseiller du 20e arrondissement de Paris, des mots qu’il a prononcés, évoquant le contexte local dans lequel le projet de cette stèle a été porté et approuvé alors même que les sépultures les plus fleuries et les mieux entretenues du proche cimetière de Charonne sont celles du collaborationniste Robert Brasillach et du négationniste Maurice Bardèche.
Je le remercie d’avoir par ailleurs rappelé l’horreur de l’assassinat collectif de Château-Royal le 15 mars 1962 et d’avoir souligné combien la relation fraternelle de Max Marchand et de Mouloud Feraoun avaient, aujourd’hui comme hier, valeur d’exemple, en France comme en Algérie.
La cérémonie s’est conclue selon les séquences suivantes :
- dépôts de cinq gerbes ;
- Minute de silence ;
- La Marseillaise ;
- Salut au porte-drapeau départemental de la FNACA de Paris.
La Présidence de la République est destinataire du présent compte rendu.
Jean-François Gavoury
Pupille de la Nation
Orphelin de guerre
Président de l'ANPROMEVO
6-X-2021 - 10e anniversaire de la Stèle dédiée
par la Ville de Paris aux Victimes de l’OAS
Intervention de Jean-François Gavoury
président de l’Association nationale pour la protection de la mémoire des Victimes de l’OAS (ANPROMEVO)
Je me souviens de la genèse de cette stèle, dont le premier acte a consisté en la remise d’un dossier de demande le 14 février 2007 entre les mains de
Madame Odette Christienne
Adjointe au Maire de Paris chargée de la mémoire et du monde combattant, en présence de Monsieur Philippe Lamy, membre du cabinet et conseiller de Monsieur Bertrand Delanoë.
Je n’ai pas oublié l’acte II, essentiel, le 8 février 2011, avec l’approbation par le Conseil de Paris, par un vote unanime, du projet de délibération, porté par
Madame Catherine Vieu-Charier
intitulé « Apposition d’une stèle en hommage aux victimes de l’OAS dans le cimetière du Père Lachaise ».
Je me rappelle qu’il y a dix ans jour pour jour, heure pour heure, alors que se déroulaient en la Cathédrale Saint-Louis-des-Invalides les obsèques de Monsieur Wladyslas Marek, président national de la FNACA, ici même, le maire de la capitale, avant de dévoiler cette stèle, déclarait : « Pourquoi est-il si long, pourquoi est-il si dur de poser ces actes évidents? Je le dis avec émotion, gravité : je suis en même temps fier que Paris soit la première commune, la première institution française, à oser le faire, mais avec le regret que cela n’ait pas été fait plus tôt. »
Merci, merci encore et merci pour toujours, Monsieur le Maire honoraire de Paris, d’avoir su parachever le dispositif que la capitale avait progressivement déployé pour honorer les diverses catégories de victimes de la guerre d’Algérie.
Merci d’avoir, en inaugurant en ce si bel endroit, un monument sobre comme le Sidobre, apporté cette éminente contribution à la mémoire plurielle de la guerre d’Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie : cette Tunisie qui vous a vu naître et a fait de vous un pied-noir !
Ce 6 octobre 2011, évoquant une OAS « idéologiquement criminelle et, dans ses actes, barbare », vous auriez été légitime à préciser que, neuf ans plus tôt, vous aviez vous-même subi, sur le lieu d’exercice de vos fonctions électives, l’épreuve du poignard : par pudeur, vous vous êtes abstenu de le faire.
Cette première Nuit blanche parisienne, à défaut de virer au bleu de 1961-1962 en Algérie, s’est tachée du rouge de votre sang.
À l’instar des victimes des plus lâches attentats de l’OAS ayant survécu à leurs blessures, vous avez donné l’exemple du courage.
« Mourir peut attendre », avez-vous dû penser en quittant la Pitié-Salpêtrière douze jours plus tard.
Le passé interroge le présent
Que donne à penser le Président de la République, le 26 mars 2021, en honorant, à l’occasion du 59e anniversaire de ce tragique évènement, les participants à une manifestation appelée par l’OAS, tombés sous la mitraille rue d’Isly à Alger ?
Que donne à penser le Président de la République en ne répondant pas à un courrier de l’ANPROMEVO du 1er mai lui proposant de nous rejoindre le 31, à l’occasion du 60e anniversaire du premier assassinat d’un fonctionnaire de l’État par l’OAS ?
Que donne à penser le Président de la République, le 30 septembre 2021, en recevant :
les « petits-enfants » de la guerre d’Algérie
- descendants de combattants du FLN et membres de l’OAS, de militaires français et d’appelés, de harkis et de rapatriés pieds-noirs et juifs - à l’exception remarquée de nos propres enfants et petits-enfants ?
Que donne à penser le Président de la République lorsque, le 1er octobre 2021, il décline l’invitation qui lui a été adressée le 23 août de se joindre à nous, ici et maintenant, dans une perspective de rétablissement de l’équilibre mémoriel ?
Le Président de la République se sentirait-il lié par les préconisations présentées le 20 janvier par l’historien, auteur d’un rapport pour la conciliation des mémoires de la guerre d’Algérie, au point d’occulter celle de l’OAS ?
Monsieur Emmanuel Macron est par conséquent libre, heureusement, de réaliser un acte concret de vraie concorde en recevant les victimes survivantes de l’entrée en belligérance de l’OAS et les représentants des familles de victimes tombées sous les coups de cette organisation responsable de 2.700 morts tant en Algérie qu’en France métropolitaine ?
Nous ne lui demandons pas de condamner l’OAS : la justice l’a fait, sinon pour lui, du moins avant lui, non seulement à l’époque, mais aussi ces dernières années, à ma requête.
Nous ne lui demandons pas de réparation pécuniaire :
nous nous situons en dehors de ces contingences.
Nous ne sollicitons auprès de lui que l’expression de la reconnaissance due ànotre mémoire si singulière et nous le prions de bien vouloir donner instruction aux services concernés de faire apparaître le nom des victimes civiles de l’OAS sur la colonne centrale du Mémorial national du quai Branly à Paris.
Certes, l’OAS est encore active, par voie successorale, jusque au cœur de la République aux destinées de laquelle vous présidez, mais, de grâce :
n’en ayez pas peur, Monsieur Macron.
Les victimes de l'OAS "oubliées"
Le 24 janvier 2020, le Président de la République avait évoqué sa politique mémorielle en ces termes : « Les sujets mémoriels sont au cœur de la vie des nations. Qu’ils soient utilisés, refoulés ou assumés, ils disent quelque chose de ce que vous voulez faire de votre pays et de votre géopolitique...La guerre d’Algérie est sans doute le plus dramatique. Je le sais depuis ma campagne…La guerre d’Algérie c’est ce qui fait la Vè République… »
Le 20 septembre 2021, Emmanuel Macron fait ce qu’il a dit ; il rend hommage à des hommes qui ont combattu au côté de l’armée en Algérie : les harkis. C’est juste et légitime. On pourrait donc s’attendre, dans le cadre d’une politique cohérente destinée à cicatriser les blessures de la guerre d’Algérie en France même, que l’État rende aussi hommage aux 2700 victimes algériennes et françaises, tombées en Algérie et en France aux derniers mois du conflit sous les coups de l’OAS. Or il semble qu’il n’en sera rien.
Pour quelle(s) raison(s) l’État n’honore-t-il pas la mémoire des militaires restés au côté de la République lorsqu’elle fut en danger, et assassinés de ce fait par l’OAS ? Pourquoi serait-il plus difficile de rendre hommage aux appelés du contingent et aux officiers supérieurs lâchement abattus par une organisation criminelle, qu’aux membres des forces supplétives de l’armée ?
Pourquoi priver de tout témoignage officiel de gratitude, les élus, les magistrats, les fonctionnaires assassinés par les membres de l’OAS pour avoir respecté, servi la République et défendu ses valeurs au péril de leur vie ?
Ce serait pourtant suivre en cela le complément apporté par l’historien Benjamin Stora à sa recommandation n° 2 de son rapport (page 96/157) remise au service compétent de l’Élysée pour le suivi des sujets mémoriels sur la guerre d’Algérie.
Refuser de rendre hommage aux victimes civiles et militaires de l’OAS, c’est refuser de condamner clairement leurs assassins et leurs crimes. Au bout du compte, c’est leur trouver une certaine justification.
Qu’ils soient utilisés, refoulés ou assumés, ils (les sujets mémoriels) disent quelque chose de ce que vous voulez faire de votre pays.
Docteur Jean-Philippe Ould Aoudia
Président de l’association Les Amis de Max Marchand, de Mouloud Feraoun et de leurs Compagnons
En conclusion le président Macron finira par reconnaître 6 victimes de l’OAS sur 2700 :
Marcel Basset - Ali Hammoutene - Salah Ould Aoudia - Mouloud Feraoun - Max Marchand - Robert Eymard