• Analyse rédigée par Françoise Nordmann du livre "L’énigme algérienne". Chroniques d’une ambassade à Alger écrit par Xavier Driencourt.

     

    Dans la revue Le Lien, n° 73, décembre 2022, on peut lire en pages 66 à 68, une analyse rédigée par Françoise Nordmann du livre L’énigme algérienne. Chroniques d’une ambassade à Alger écrit par Xavier Driencourt.

    Analyse rédigée par Françoise Nordmann du livre "L’énigme algérienne". Chroniques d’une ambassade à Alger écrit par Xavier Driencourt.

    Françoise Nordmann


    Le Lien, revue publiée par l’association Les Amis de Max Marchand, de Mouloud Feraoun et de leurs Compagnons, est inscrite au catalogue international des Périodiques. On peut la consulter à la Bibliothèque Nationale de France et à La Contemporaine, bibliothèque à Nanterre. On peut également la consulter sur le site de l’association : https://max-marchand-mouloud-feraoun.fr

    Analyse rédigée par Françoise Nordmann du livre "L’énigme algérienne". Chroniques d’une ambassade à Alger écrit par Xavier Driencourt.

    Xavier Driencourt, mars 2022 L’énigme

    algérienne Chroniques d’une ambassade

    à Alger 2008-2012 ; 2017-2020.

    Éditions de l’Observatoire

    Pour être ambassadeur on n’en est pas moins homme.

    Le chroniqueur se montre particulièrement sensible au respect vis-à-vis des hôtes algériens et à la délicatesse des visiteurs officiels français de passage en Algérie, observateur souvent critique, parfois agréablement surpris, comme devant le comportement « libre, franc et ferme », du jeune Président français en visite le 6 décembre 2017, celui-ci manifestant même, selon lui, de la « gentillesse » à l’égard du président Bouteflika. Il notait, lors de sa première mission, l’intérêt qu’avait présenté la « rondeur » plaisante d’un Jean-Pierre Raffarin accordée à celle de son interlocuteur, Mohamed Benmeradi, ministre de l’Industrie. Le tout est apprécié d’abord en tant que servant (ou risquant de desservir) l’apaisement des relations et la sérénité des échanges et des négociations à l’ordre du jour : précisément sa seconde mission commandée par le Président Macron. Mais on sent chez Xavier Driencourt une qualité humaine personnelle qui le porte à ce genre d’observation critique.

    Cependant de curieuses formulations et généralisations pourraient bien troubler le lecteur et faire penser à de certains retours de refoulé (refoulé d’amertume ? refoulé de Français mal aimé ou accommodé à une sauce trop particulière ?) : des gouvernants qui « n’entendent que le rapport de force » ? La corruption dans la société d’accueil, présentée comme endémique mais surtout contrastant ici avec le silence sur les fonctionnaires français implicitement exempts de ces maux : même de ceux que favoriserait le contexte ? On serait donc, côté français, dépourvu de motivation d’intérêt ? Et par ailleurs seul le personnel français échapperait aux changements de cap et d’attitude décidés en haut lieu, tandis que leurs homologues algériens seraient manipulés ? Cette dissymétrie ne peut être, se dit le lecteur, qu’un improbable reflet de la réalité. Mais le même lecteur admet que le livre est censé se focaliser sur « l’énigme algérienne ».

    Reste donc le mot « énigme ». Lisant avec intérêt et attention cette chronique fort instructive, précise, concrète, qui donne au lecteur le plaisir de se croire invité en ces lieux rarement ouverts et dans le secret des dieux, on ne sera pas forcément porté à le trouver pertinent, ce mot d’énigme : il est somme toute question d’une complexité liée à des forces constamment en tension, à des alliances à géométrie variable, à une labilité propre au système puissamment armé de longue date pour défendre sa survie. Sans états d’âme. Avec les mêmes problèmes de fluctuation mondiale, d’alliances, la même nécessité de mentir, d’afficher, de se contredire que les autres, de faire avec les personnalités émergentes du moment. Mais peut-être quelque malignité ou nocivité spécifique. Du reste, comment s’y retrouver tout à fait quand on croit « parler la même langue » dans une société polyglotte et qui maîtrise la vôtre ?

    N’est-ce pas plutôt la discipline diplomatique et la défense des intérêts français, politiques et économiques si constamment liés à la politique algérienne qui impriment à la chronique une grande discrétion et des ambiguïtés ou de ‘discrètes’ contradictions sur la question de la démocratie ou de la dictature en Algérie ? L’ambassadeur en poste « découvre »-t-il vraiment par exemple, en cours de mission, « la montée en puissance de l’armée » au prétexte qu’elle passerait alors de « derrière » au « devant » de la scène à la mort du président Bouteflika ? Naïveté qu’on peine à croire entière étant donné que les deux missions algériennes se sont accomplies en des temps où tout déplacement d’étranger en Algérie se faisait obligatoirement sous escorte militaire et qu’on suppose à un High Missionner un minimum de connaissance historique de l’Algérie indépendante. Pour le présent, d’ailleurs, Xavier Driencourt fait plusieurs fois état d’une fréquentation de la société civile certes circonscrite à certains milieux mais tout de même étendue. Il y compte bien des amis et son expérience globale du terrain aura compté dans sa désignation pour un second mandat. Kamel Daoud, Boualem Sansal ou Ali Dilem ne sont-ils pas de la réception réservée à la résidence des Oliviers pour l’accueil du Président Macron en 2017 ?

    Finalement le seul chapitre où la sensibilité propre de l’ambassadeur s’émeuve littéralement et tout à fait librement, est celui où il peut évoquer les figures de religieux dévoués à ce pays, son propre attachement à des êtres et des lieux et paysages avec lesquels il se sent en accord profond. Certainement délivré de la solitude de sa fonction et peut-être même libre de dire son véritable attachement à ce beau pays. Il s’intitule Église algérienne, Église d’Algérie. Quant à ses convictions, elles sont clairement celles que lui insuffle son ordre de mission, auquel il paraît loyalement et sincèrement dévoué.

    On apprend beaucoup ici sur le métier d’ambassadeur et Xavier Driencourt nous offre le plaisir d’un voyage en Algérie dans des sphères éloignées de la plupart d’entre nous, avec la petite satisfaction d’observer que la vie n’y est pas si facile, et – plus sérieusement dit - tout le loisir de réfléchir aux graves et vraies questions que nous posent nos destins liés de façon encore inextricable.

    Françoise Savarin Nordmann 

     

    MON ALGERIE A MOI... FRANCOISE SAVARIN NORDMANN

     

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