• Michel Rocard, l’anticolonialiste qui a révélé l’atrocité des camps de regroupement pendant la sale guerre d’Algérie

    Macron relance le débat en France

    sur la Guerre d’Algérie en la comparant

    à la Shoah

    (Suite du 1er article)

    Michel Rocard, l’anticolonialiste  qui a révélé l’atrocité des camps  de regroupement pendant la sale guerre  d’Algérie

     

    Shoah, guerre d’Algérie… L’Élysée récuse toute comparaison

    Conscient de la « singularité la plus extrême » de l’Holocauste, Emmanuel Macron affirme qu’il s’agit d’un « crime absolu qui ne peut être comparé à aucun autre ».

    Couper court. Face à la polémique naissante sur les propos d’Emmanuel Macron - tenus dans l’avion présidentiel qui le ramenait d’Israël, où il a reçu Le Figaro -, l’Élysée a récusé toute comparaison entre la Shoah et la guerre d’Algérie. En s’appuyant notamment sur ce que le président avait déclaré dès jeudi soir. « C’est le crime absolu qui ne peut être comparé à aucun autre », avait-il tranché, relevant la « singularité la plus extrême » de l’Holocauste. «Le président a réaffirmé l’unicité de la Shoah : elle est indiscutable », complète l’un de ses conseillers, pour ne laisser aucune place au doute.

    Dans l’esprit du chef de l’État, le seul lien qui existe se joue entre « les sujets mémoriels » dans leur ensemble, qui « sont au cœur de la vie des nations ». « Qu’ils soient utilisés par certains, refoulés par d’autres, assumés… Ils disent quelque chose de ce que vous voulez faire de votre pays et de votre géopolitique », juge-t-il.

    Selon lui, un même processus en trois étapes est chaque fois nécessaire avant de pouvoir «regarder son histoire en face». « Il y a le travail de l’historien. Il y a le travail du juge. Et quand on préside ou qu’on participe à la vie politique d’une nation, on a ce matériau à saisir », détaille-t-il. Entre les lignes, c’est bien à la guerre d’Algérie que pense le président. «Je suis très lucide sur les défis que j’ai devant moi d’un point de vue mémoriel et qui sont politiques. La guerre d’Algérie, sans doute, est le plus dramatique d’entre eux », confirme-t-il. « On en a plein, comme ça. Mais la guerre d’Algérie est le plus problématique. Je le sais depuis ma campagne », ajoute-t-il.

    À l’époque, le candidat d’En marche ! avait cru bon, lors d’un déplacement de l’autre côté de la Méditerranée, de qualifier la colonisation de « crime contre l’humanité ». Une expression qu’il « ne regrette pas » aujourd’hui, même s’il se garde bien de la réemployer. « J’ai crispé des gens. (Mais) je pense que je les ai ramenés, maintenant, dans une capacité à dialoguer », estime-t-il, citant tour à tour l’ensemble des parties prenantes. Désormais, il souhaite mettre fin au « conflit mémoriel » qui demeure sur cette question. « Je n’ai pas la réponse (pour y parvenir) », reconnaît-il toutefois « avec beaucoup d’humilité », admettant « tourner autour du sujet ».

    En attendant de trouver la bonne formule, Emmanuel Macron s’inspire de son défunt prédécesseur, Jacques Chirac. « Quand (il) fait le discours du Vél d’Hiv, ça a un impact politique ! C’est quelque chose qu’il fait à dessein, aussi, politiquement. Et pas simplement historiquement », se souvient-il. En 1995, l’ancien président avait été le premier à reconnaître officiellement, depuis le square des Martyrs, la responsabilité de l’État français dans la déportation de plusieurs dizaines de milliers de Français juifs. Aujourd’hui, son lointain successeur considère que la charge mémorielle qui lui incombe avec la guerre d’Algérie est équivalente. C’est tout le sens de ce qu’il a confié dans l’avion.

    À ses yeux, s’il réussit le travail qu’il compte entreprendre sur ce sujet, la guerre d’Algérie aura « à peu près le même statut que ce qu’avait la Shoah pour Chirac en 1995 ».

    Ce rapprochement, qui ne porte que sur l’aspect purement mémoriel, a immédiatement fait bondir l’opposition. Notamment Les Républicains et le Rassemblement national. « C’est de l’indécence », a tancé le patron de la droite sénatoriale Bruno Retailleau, dans les colonnes du Figaro. «Comparer la Shoah à la guerre d’Algérie est obscène. Emmanuel Macron est en pleine dérive», a abondé Marine Le Pen.

    Soucieux de ne laisser aucun malentendu s’installer, Emmanuel Macron a précisé samedi, au Figaro, le sens exact de sa pensée. « La guerre d’Algérie est aujourd’hui un impensé de notre politique mémorielle et l’objet d’un conflit de mémoires comme l’étaient la Shoah et la collaboration de l’État français lorsque Jacques Chirac avait prononcé son discours du Vél d’Hiv », a-t-il expliqué.

    Élu sur la promesse de « réconcilier les Français », le chef de l’État semble donc se fixer un objectif pour sa présidence : celui de trouver la bonne approche pour refermer, enfin, ce chapitre qu’il a lui-même ouvert durant la campagne. Il faut dire que le sujet lui tient particulièrement à cœur, au point qu’il considère que « la guerre d’Algérie, c’est ce qui fait la Ve (République) ». « Dans la tradition de ce début de Ve, on n’en a pas parlé, on a écrasé. Et on a laissé des historiens travailler. Donc il y a de l’historiographie. Mais il n’y a pas eu un travail politique mémoriel. Et d’ailleurs, ça explique une partie des clivages : sociaux, socio-économiques, politiques, du pays ». D’où son explosivité. Et l’urgence qu’il y a, selon lui, à le traiter.

    SOURCE : https://www.lefigaro.fr/politique/shoah-guerre-d-algerie-l-elysee-recuse-toute-comparaison-20200125 

    Et pourtant si l'on considère la période de l'occupation de l'Algérie par la France soit 132 ans, les exactions subis par les algériens durant la conquête nous pouvons affirmer qu'une tentative de génocide a été entreprise en vue d’éradiquer la population autochtone. Pour la période de la Guerre d'Algérie contemporaine, ce qui est énoncé est une réalité à laquelle la France doit y faire face (Exécutions, camps de concentration, (famine, épidémies, provoquées sciemment). Une reconnaissance de la France de ses méfaits la rendrait plus grande et plus humaine, et rendrait justices à toutes les victimes de ces massacres. 

    2ème guerre mondiale- Guerre d'Algérie. Mêmes crimes - mêmes sorts.
    Les camps de concentration.
    Un épisode historique peu connu
    de la guerre de libération nationale.

    La France appelait cela « des villages de regroupement », en fait, il s’agissait de camps de concentration de population civile », confie, pour sa part, Marc Garanger, photographe, qui a servi en tant qu’appelé au 2e régiment d’infanterie à Aumale (Sour El Ghozlane actuellement).

    L’existence des ces camps de regroupements ne sera révélée en France qu’en mars 1959 par le quotidien Le Monde, après une fuite « organisée » d’un rapport établi par Michel Rocard, après enquête en 1958

    La presse a pris ensuite le relais en mettant en avant « les conditions inhumaines » dans les camps. En juillet 1959, la France a été condamnée à l’ONU à cause de ces camps.
    « Enfermer la population de cette manière, cela s’appelle un crime contre l’humanité », déclare l’avocat Jacques Vergès

    Selon Malika Korso, historienne, l’enfermement et la déshumanisation sont des critères pour désigner « un camp de concentration
    « J’ai fait des recherches et j’ai choisi des intervenants qui ont travaillé sur le sujet. En Algérie, il n’y a pratiquement aucun document sur cet épisode de l’Histoire mis à part le livre du professeur Mustapha Khiati. C’est un sujet encore inconnu en Algérie et à l’étranger. .. », a proposé Said Oulmi.

    « La plupart des femmes me fusillaient du regard. C’était une protestation violente et muette. J’ai fait ces photos à la gloire de ces femmes. Je voulais crier à la face du monde toute l’horreur de cette guerre », témoigne Marc Garanger sans retenir ses larmes.
    Ses photos ont été publiées dans un livre, « Femmes algériennes 1960 » (1982).
    Mustapha Khiati est l’auteur du seul ouvrage algérien consacré aux camps d’internement.
    Il a parlé, lors du débat, d’une page « particulièrement noire » de la présence coloniale française en Algérie. « La génération de Novembre n’a pas su transmettre l’information. Si l’on se base sur le rapport de Michel Rocard, il y a eu pratiquement 500.000 morts tous les ans sur les 3 millions de personnes qui ont été déplacées dans les camps de concentration entre 1957 et 1961 », précise-t-il.

     La brulure (les enfumades de la Dahra)

     

    Tout commença par ce premier crime contre l’humanité : cliquez sur ce lien : Algérie: les «Enfumades du Dahra», un crime contre l’humanité!  

     

    Michel Rocard, l’anticolonialiste

     qui a révélé l’atrocité des camps

     de regroupement pendant la sale guerre

    d’Algérie

    Michel Rocard, l’anticolonialiste  qui a révélé l’atrocité des camps  de regroupement pendant la sale guerre  d’Algérie

    Michel Rocard était le père de la « deuxième gauche ». C’était aussi un fervent anticolonialiste, à l’instar de Pierre Mendès France, l’inspirateur de cette gauche réformiste et réaliste dont il voulait prolonger l’héritage.

    Pourtant, au-delà de ses déclarations et prises de positions publiques, contre la guerre d’Algérie, contre la guerre du Viet-Nam, pour le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, Michel Rocard a concrètement oeuvré contre la colonisation. En février 1959, alors jeune inspecteur des finances, Michel Rocard remet une note administrative, technique, à Paul Delouvrier, délégué général en Algérie, sur le problème des camps de regroupement. Ce rapport serait resté dans les placards de la République, ignoré de tous, si une fuite dans Le Monde, le 12 mars 1959, n’en avait pas révélé l’existence.

    Michel Rocard y évoquait, pour la première fois, le problème des déplacements de population effectués par l’armée française en Algérie « sans aucune espèce de précaution », si bien qu’ils occasionnaient pour la population algérienne, rurale surtout, des bouleversements terribles, dont la famine. Selon Michel Rocard, 200 000 personnes seraient mortes de faim à cause des camps de regroupement.

    Michel Rocard, l’anticolonialiste  qui a révélé l’atrocité des camps  de regroupement pendant la sale guerre  d’Algérie

    C’est à partir de 1957 que dans les zones rurales l’armée française a commencé à regrouper des personnes, principalement des paysans, afin qu’ils « échappent » à l’influence du FLN. Au total, c’est un cinquième de la population paysanne qui a ainsi fait l’objet d’un « regroupement ». Même si, à grand renfort de propagande et de photographies truquées, l’armée française a parfois voulu donner l’image de villages idylliques, la réalité fut bien différente. Dans nombre de ces camps, c’est l’enfer. Les conditions de vie y étaient misérables. Les « fellah » regroupés étaient en vérité isolés de la population par des fils barbelés et des miradors. Les camps de regroupement étaient de véritables prison à ciel ouvert. Les Algériens étaient ainsi enfermés chez eux.

    « J’ai été déplacé de 1957 à l’indépendance, racontait par exemple au Point Ben Salama, l’auteur du documentaire « Une histoire algérienne ». Nous avons vécu à six dans une petite pièce avec ma mère, car mon père travaillait en France. Les gens agglutinaient du matériel de récupération pour se fabriquer des baraquements de fortune. »  Le journaliste Slimane Zeghidour a lui aussi raconté sa vie dans le camp d’Erraguene, en Kabylie, où vivaient 6000 personnes dans des conditions misérables.

    Dans son livre Les Camps de regroupements de la guerre d’Algérie (Éditions ouvrières, préface de Germaine Tillon) publié en 1967, Michel Cornaton prolongeait et précisait l’analyse de Michel Rocard. Selon lui, il y eut près de 2000 centres de regroupement et, selon les estimations, entre 1600000 et 2500000 regroupés, soit 15 à 25% de la population.

    C’est cette terrible réalité que Michel Rocard dissèque dans son rapport. « Atteints dans leurs revenus, les fellahs le sont aussi dans leur dignité ; ils sont placés vis-à-vis du commandement et du chef de SAS dans un état de dépendance totale », écrit-il par exemple. Analysant méthodiquement l’habitat, les conditions sanitaires à l’intérieur des camps, les conséquences dramatiques, pour les familles, de ces regroupements, Michel Rocard dresse un implacable réquisitoire contre la guerre d’Algérie. Par son étude minutieuse et rigoureuse d’un problème concret, le jeune haut fonctionnaire adresse à ses supérieurs une critique assassine des modes opératoires de l’armée et du silence coupable de l’administration.

    Grâce aux fuites de ce rapport dans Le Monde, le problème des camps de regroupement sort de l’ombre et reçoit une – relative – publicité. Dans un article publié en juin 2012, Anne Guérin-Castell en recensait quelques conséquences. « L’article du Monde fut suivi d’autres articles, écrivait-elle, notamment d’un entretien avec Mgr Rodhain, secrétaire général du Secours catholique, paru le 11 avril dans La Croix et d’une publication partielle du rapport dans France Observateur et Le Monde les 16 et 17 avril, d’un débat à l’Assemblée nationale le 9 juin 1959 et d’une mise en cause de la France à l’ONU le 14 juillet. Mais cela pouvait-il arrêter les partisans de la « guerre révolutionnaire » ? Paul Delouvrier, délégué général du gouvernement en Algérie, avait eu beau prescrire dans une circulaire datée du 31 mars qu’ « aucun regroupement ne pourra être opéré sans son accord », les responsables de l’armée, encouragés par le décret du 17 mars 1956 et l’arrêté du 7 janvier 1957 autorisant le ministre résidant (à l’époque Robert Lacoste) à « instituer des zones où le séjour des personnes est réglementé » et confiant le maintien de l’ordre à l’autorité militaire, continuèrent d’agir à leur guise, si bien que le nombre de camps de regroupement ne cessa d’augmenter jusqu’à l’aube des négociations pour un cessez-le-feu. »

    Peu connu, ce travail essentiel de Michel Rocard réalisé sans en informer ses supérieurs, participant d’une démarche volontaire et courageuse, servit à attirer l’attention sur l’un des aspects les plus terribles de la guerre d’Algérie. Il a fallu attendre 2003 pour que son rapport soit publié, sous forme de livre. Il surprit alors de nombreuses personnes, à gauche, qui n’en connaissait pas l’existence et ne soupçonnait pas cette dimension essentielle de son engagement.

    K.A.

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    Michel Rocard, l’anticolonialiste  qui a révélé l’atrocité des camps  de regroupement pendant la sale guerre  d’Algérie

    Michel Rocard, Rapport sur les camps de regroupement et autres textes sur la guerre d’Algérie (Paris, Mille et une nuits, 2003, 334 p.,16.60 euros).
    Edition critique établie sous la direction de Vincent Duclert et Pierre Encrevé, avec la collaboration de Claire Andrieu, Gilles Morin et Sylvie Thénault.

    SOURCE : http://www.chouf-chouf.com/histoire/michel-rocard-lanticolonialiste-qui-a-revele-latrocite-des-camps-de-regroupement/ 


     

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