• L’émir Abd El Kader a résisté pendant

    17 ans à l’armée coloniale française

    Visionnaire, l’Emir Abdelkader a su par son génie militaire faire trembler l’une des plus grandes armée du monde, la France. Fin stratège, il réussi en peu de temps à convaincre le peuple de le suivre et de le soutenir. L’émir Abdelkader est, aujourd’hui, considéré comme le premier chef d’Etat algérien. Il consacra sa vie à l’organisation et à la fondation d’une Algérie moderne. Il avait même créé une armée régulière et un corps diplomatique fait d’envoyés et de consuls. Les responsables politiques français de l’époque étaient subjugués par l’audace, la présence et le charisme de ce penseur. Mais derrière ce résistant militaire se cache aussi un humaniste et un fascinant homme de paix. Pour lui, l’homme est au-dessus de tout. Ni frontière, ni origine et encore moins religion ne doivent séparer les hommes. Il était aux côtés des siens pour défendre leur liberté contre les colons mais aussi aux côtés des druzes à Damas en 1860. Son parcours impressionne aujourd’hui, encore. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si son nom raisonne toujours à travers le monde. Tour à tour héros de la résistance algérienne, précurseur de l’Etat algérien et guide spirituel, plusieurs pays ont appelé de son nom divers bâtiments, rues, avenues, places, universités et mosquées. Il existe même une grande stèle à son effigie au Mexique pour ne citer que celle-ci. Il était donc primordial de lui rendre hommage et faire connaitre ainsi son parcours. Un héritage chargé de valeurs de respect, d’amour et de paix.

    Pour une statue à la gloire de l’émir Abd El-Kader à Paris

    Statue de l’Emir Abdelkader à Mexico... Nous en voulons une aussi à Paris... mais Amboise nous a devancé...

    Notre histoire commence en 2008

     avec la création de l’association

    « France Algérie Centre »

    Pour une statue à la gloire de l’émir Abd El-Kader à Paris

    1 - Il est fondé entre les adhérents aux présents statuts une association régie par la loi du 1er juillet 1901 et le décret du 16 août 1901, ayant pour titre : FRANCE ALGERIE CENTRE
    2- Cette association a pour but :
    * De promouvoir la destination Algérie pour un tourisme équitable, solidaire et durable.
    * D'organiser des rencontres et toutes autres manifestations susceptible de promouvoir la culture Franco-algérienne ici et là-bas : spectacles, films, expositions, publications etc.
    * De développer un partenariat entre les collectivités locales Française et Algérienne.
    * De développer des actions de formation, d'aides et d'échanges entre les communes de la Région Centre, les wilayas et les communes Algériennes.
    * D'œuvrer à la consolidation de l'amitié franco-algérienne et de mener des actions humanitaires en France, en Algérie et dans le reste du monde.
    * De favoriser le développement de la coopération économique entre les différents acteurs de la région Centre et les wilayas d'Algérie.

    Pour une statue à la gloire de l’émir Abd El-Kader à Paris


    Bicentenaire de l'émir Abd-El-Kader en Touraine 

    C'est depuis le mois de mars 2008 que l'association France Algérie Centre prépare la célébration du bicentenaire de la naissance de l'emir Abd-El-Kader, avec pour marraine Madame Martine Le Coz, écrivain, Prix Renaudot 2001.
    Et c'est le 31 Janvier 2009 que commence les festivitées à la Maison Pour Tous de Joué-Lès-Tours (Place Des Droits De L'Homme).

    Avec la participation de l'ecrivain Mme Martine Le Coz et son livre "Le Jardin d'Orient" dédié au cimetière où sont enterrés la famille de l'émir dans le parc du château d'Amboise.
    Du sculpteur Michel Audiard qui a fait une grande statue de 3m50 de l'émir et qui se trouve dans le parc du château d'Amboise.
    De Fernand Martin Dumagny (Sculpteur), Imad Saleh (Chanteur Palestinien pour la paix), La Chorale des enfants de l'association Solidarité Culturelle Musulmane et une exposition mise à disposition par l'association Aisa et Terre D'Europe intitulée Emir Abd-El-Kader, Un Homme, Un Message, Un Destin.


     Statue Emir Abdelkader Château Amboise

     par Michel Audiard

    http://francealgeriecentre.skyrock.com 


    LA PETITE HISTOIRE...

    ... DE L'EMIR ABD EL KADER

    L'Emir abd el Kader par Ange TissierOn le sait peu, mais pour certains pensionnaires du château d’Amboise, mener la vie de château a rimé avec luxe, calme et captivité. Hôte inattendu dans l’histoire des princes qui avaient élu domicile en bords de Loire, l’émir Abd-el-Kader y a en effet été retenu prisonnier de 1848 à 1852. Le prix à payer pour son combat pour la souveraineté algérienne et une promesse française non tenue. On a connu cachot plus  désagréable, d’autant que l’émir recevait des visiteurs... mais il était bel et bien privé de sa liberté.

    Adversaire respecté, Abd-el-Kader n’est pas qu’un militaire : élevé dans une famille lettrée, il découvre tôt les joies des sciences et de l’astronomie, dévore littérature et philosophie et est versé dans l´étude du Coran. Un intellectuel complet, comme on n’en fait déjà plus beaucoup à l’époque ! Et un habile politicien…

    ABd-el-Kader, aidé par un père qui construit la réputation du fiston avec prophéties et grandes déclarations : dans un pays morcelé entre tribus et beys, il est bientôt proclamé émir et commandeur des croyants.
    Face à la France lorgne sur l’Algérie dès le début du XIXème siècle, il sera en effet l’homme emblématique de la résistance à la colonisation, qui débute dès 1830 sous prétexte de conflit diplomatique. Les Français débarquent à Alger..

    Les batailles s’enchaînent, puis un premier traité de paix en 1834 lui donne le pouvoir sur l’Oranie. Pour les Français, voilà un allié idéal qui va s’occuper de mater à leur place les tribus de la côte et de l’intérieur !

    Pour l’émir, c’est l’arrivée au pouvoir et l’occasion d’unifier des populations et un territoire qui s’agrandit à nouveau avec le décret de la Tafna (1837) après deux nouvelles années de conflit. En vrai chef d’Etat, il édicte décrets et lois, tout en renforçant l’armée régulière pour faire face à l’envahisseur.

    Attaque de la SmalaIl repasse ainsi à l’attaque en 1839 pour libérer l’Algérie, mais après de violents combats et de cuisantes défaites dont la prise de la Smala, sa capitale errante, il est contraint de rendre les armes en 1847 et obtient la promesse qu’il pourra quitter l’Algérie pour le Moyen-Orient.

    Il atterrit à Marseille, Pau puis Amboise. Parole donnée n’est pas toujours respectée…

    Il ne quittera la France qu’en 1852 en laissant à Amboise des proches décédés durant sa captivité, pour aller s’établir à Damas, loin de la fureur des combats, défenseur des Chrétiens d’Orient dans les massacres de 1860, avant de mourir en 1883, laissant en Algérie l’image d’un héros précoce d’une indépendance qui surviendra plus d’un siècle plus tard !

    Le jardin d'Orient (Amboise) par JF Le ScourLe Jardin d'Orient au château d'Amboise, sépultures des proches d'Abd el Kader (photographie JF Le Scour).

    Pour une statue à la gloire

     de l’émir Abd El-Kader à Paris

    À l’origine des incidents graves de Charlottesville aux États-Unis, une mobilisation contre la statue d’un général sudiste défenseur de l’esclavage. En France aussi, des dizaines de statues ont été érigées à la gloire de colonisateurs. Et si on rendait pour une fois hommage à un héros de la résistance anticoloniale, l’émir Abdelkader ? L’hommage rendu au héros national algérien avait déjà ses partisans dès le début du XXe siècle. L’historien Alain Ruscio lance un appel à concrétiser leur vœu en installant une statue de l’émir à Paris.

    Pour une statue à la gloire de l’émir Abd El-Kader à Paris

    Plaque inaugurée en 2006 par le maire de Paris Bertrand Delanoë.

    Wikimedia Commons/Mu, 2010.

     

    La IIIe République (1870-1940), qui vit l’apogée de l’empire colonial français, a voulu honorer ses héros. Quelle est la ville, parfois le village de France, qui n’a pas sa statue d’une personnalité locale ? La même pratique s’imposa outre-mer. On pourrait même dire : s’amplifia. Car chaque colonie comptait, selon les critères des Français de l’époque, non pas une, mais plusieurs gloires : militaires, hommes politiques de la métropole, gouverneurs, savants, prélats… La seule ville de Saïgon comptait dix statues, Bamako, bien plus petite, honorant pour sa part quatre héros français.

    Le colonisé, à tous les moments de sa vie, croisait dans les rues des villes et villages les statues des généraux qui avaient vaincu ses ancêtres ou des « techniciens de la colonisation » qui avaient édifié l’ordre français. Frantz Fanon s’insurgeait contre ce « monde sûr de lui, écrasant de ses pierres les échines écorchées par le fouet ». (1)

    On peut évidemment s’interroger sur cette insistance : qui les vainqueurs voulaient-ils convaincre ? Les « indigènes » du peuple, dont la plupart étaient illettrés ou rebelles à l’art monumental occidental ? Les intellectuels colonisés, souvent hostiles quoiqu’il en fût ? Peu, d’ailleurs, devaient regarder positivement ces monuments, érigés la plupart du temps… avec l’argent de leurs impôts, quand ce n’était pas grâce à des souscriptions plus ou moins imposées.

    En réalité, c’était eux-mêmes que les colonisateurs exaltaient.

    Mais trop, ce fut trop. Et pourquoi diable ne pas ériger des statues à ceux qui, vaillamment, loyalement, avaient résisté ? Question iconoclaste, saugrenue qui, à vrai dire, ne pouvait surgir que chez des marginaux ; pour tout dire, selon un joli mot né lors de l’ère coloniale, des « indigénophiles ».

    Le journal Al-Akhbar, dirigé par Victor Barrucand, ami d’Isabelle Eberhardt, porte-parole de la tendance indigénophile en Algérie, lança une campagne pour l’érection d’une statue à la gloire d’Abd El-Kader, devenu le symbole d’une réconciliation possible entre dominants et dominés :

    Pour la statue d’Abd-el-Kader.

    On vient d’inaugurer à Constantine une statue monumentale du général Lamoricière et, dans un impressionnant discours, le général Gillet a rappelé les luttes héroïques de la prise de Constantine, non seulement en rendant hommage aux troupes françaises, mais encore en donnant quelques mots à la bravoure des défenseurs de la ville. Il nous semble que l’esprit français, engagé dans cette voie, pourrait aller plus loin encore. Il vient une heure où le vainqueur s’honore en reconnaissant la valeur de son adversaire. On sait qu’Abd-el-Kader, après avoir combattu contre nous, devint l’ami de la France et son protégé en Orient, jusqu’au jour où l’influence du grand chef arabe, sa noble conduite personnelle et sa poitrine mise en avant empêchèrent en Syrie le massacre des Européens, ce qui lui valut une haute distinction dans notre Légion d’Honneur. Ces choses sont dans l’histoire et dans l’esprit des hommes qui savent saluer le courage et la hauteur des caractères. Un peuple peut et doit les comprendre.

    Pour consacrer l’idée du rapprochement franco-arabe, pour effacer, dans un grand geste de nation forte, les dernières rancunes, il serait beau que la France eût un mouvement d’impartialité héroïque. Elle devrait penser à réconcilier les adversaires du passé dans l’atmosphère des idées éternelles.

    Après les statues de Bugeaud, du duc d’Aumale et de Lamoricière, nous demandons celle d’Abd-el-Kader pour orner une place publique et donner à tous les peuples une grande leçon de noblesse française.

    Al-Akhbar, avril 1909.

    L’idée fut soutenue, en métropole, par Paul Bourdarie et l’équipe de la Revue Indigène dans son éditorial de mai 1909, mais n’eut jamais de suite. Le projet fut ensuite ressorti en 1928 — avec autant d’insuccès — par la franc-maçonnerie à l’approche des cérémonies dites du « centenaire de l’Algérie » :

    Considérant que la fête solennelle que le gouvernement de la République compte donner à Alger, pour fêter l’anniversaire du centenaire de l’occupation de l’Algérie par la force armée, ne manquerait pas de blesser, dans leur amour-propre et ne servirait qu’à ranimer la haine et semer la discorde, la R. L. Veritas de Tunis émet le vœu suivant : suppression de cette manifestation anti-démocratique et érection sur l’une des places de la capitale algérienne de la statue d’Abdelkader, d’abord héros de l’indépendance algérienne et puis ami fidèle et dévoué de la France ; dans le cas où l’érection d’une statue serait incompatible avec les lois de la religion musulmane, l’élévation d’un monument sur lequel on apposerait une plaque commémorative en l’honneur de l’émir Abdelkader (2)

    Ve Congrès des loges du Grand Orient d’Afrique du Nord, Bône, 1928 (3).

    Henry de Montherlant, qui vivait alors en Algérie, eut-il vent de ce type de projets ? Il ne l’évoque pas, mais prend à son compte une proposition comparable :

    Sous l’impulsion remarquable de son maire, M. Brunel, la ville d’Alger est embellie chaque jour. Pendant longtemps, vis-à-vis la statue du Maréchal Bugeaud, à l’endroit le plus central et le plus animé de la ville, un terre-plein vide a attendu une statue. J’ai pensé : pourquoi n’y élèverait-on pas une statue aux indigènes de l’Afrique du Nord morts en défendant leur sol contre nous ? (…) Ne serait-il pas du style de la France d’élever une statue à ceux qu’elle a soumis, dans une lutte où à coup sûr ce n’étaient pas eux qui étaient venus nous chercher et où, s’ils nous ont causé quelque mal, il faut bien dire que c’était de bonne guerre ?

    On me dira : “Nul peuple colonisateur n’a fait cela pour les colonisés“.

    Je répondrai : “Et si — pour une fois — nous n’imitions pas les autres ?“

    On me dira : “Ils se sont défendus. Cela mérite-t-il une statue ? Et dressée par nous ? Est-ce logique ? Et puis, nous leur avons donné, déjà, ce qui leur était dû“.

    Je répondrai : “Je ne parle pas logique, je parle générosité“ (4) 

    Écrit en 1933, le texte fut finalement publié deux ans plus tard. Mais l’auteur connaissait trop bien le climat politique de son temps pour s’illusionner sur un éventuel bon écho de sa proposition. Il écrit alors :

    Si j’ai renoncé, en 1933, à publier l’article qu’on vient de lire, c’est dans le pressentiment que les réactions du public seraient les suivantes :

    Réaction des indigènes. Chez les simples, incompréhension totale. Chez les “évolués“, malveillance : “Nous demandons l’instruction, la justice, le bulletin de vote, et ils croient en être quittes avec une statue !“

    Des Français de France. À droite : “Il dit que nous avons vaincu les Arabes ! Nous ne les avons pas vaincus, nous leur avons apporté la civilisation française, l’ordre français, l’idéalisme français, l’honneur de participer à nos côtés aux guerres françaises. Ce sont eux qui devraient élever aux Français une statue“. À gauche : “Il a raison, mais il n’est pas des nôtres. Étouffons cela“.

    Des Français de l’Afrique du Nord : fureur noire. Convulsions et écume.

    Des étrangers : “Démagogie, niaiserie et cabotinage français“ (5)

    Ce qui était finalement assez bien vu…

    Un siècle, à quelques années près, après l’appel de Victor Barrucand, la décision du Conseil de Paris d’attribuer le nom de l’émir Abd el-Kader à une place de la ville tout près de la Mosquée, a été interprétée comme un signe de réconciliation. Le maire Bertrand Delanoë déclara à cette occasion :

    Quand j’honore l’Émir Abdelkader, je sais que j’honore un nationaliste qui s’est battu contre la France, qui n’acceptait pas la domination de son peuple par le peuple français. C’est aussi le sens de cette inauguration (…). Sachons reconnaître ces amis, prenons-les et aimons-les pour ce qu’ils sont. L’Émir est une référence, il a toujours eu le respect des personnes (…). Il protégeait ceux qui n’avaient pas la même religion que lui. Voilà les religieux que j’admire, moi qui ne le suis pas. Je veux pouvoir dire à l’autre qu’il est mon égal. Que Paris sache intégrer dans son cœur ceux qui ont fait sa richesse (…). Cette inauguration je la veux avec la gratitude d’un enfant du Maghreb, moi qui ai reçu du Maghreb des leçons de fraternité, d’égalité, maire de Paris je vous dis merci. C’est Paris qui dit merci à l’Émir Abdelkader, qui dit merci au peuple algérien, qui a subi la violence et l’injustice de la colonisation (6)

    Qui a dit que la gauche française n’avait dit (et fait), en matière coloniale, que des bêtises ? Et puis, après tout, si les partisans acharnés du « bilan positif » de la colonisation française s’acharnent à maintenir la statue du général Bugeaud sur le sol français, soyons « montherliens », reprenons l’appel de l’écrivain, lançons un appel pour l’érection d’une statue à la mémoire de l’Émir au centre de cette place parisienne.

    Alain Ruscio 

    (1) Les damnés de la terre, Paris, Maspero, Coll. Cahiers Libres, 1961. 

    (2) Lequel aurait été lui-même franc-maçon, mais cette thèse est contestée aujourd’hui par une partie de l’historiographie algérienne. Voir Dalila Hassaïn Daoudji, «  L’Émir n’a jamais fait partie de la franc-maçonnerie  », El Watan, Alger, 28 février 2012.

    (3) Cité par Khalifa Chater, «  La Franc-Maçonnerie en Tunisie à l’épreuve de la colonisation (1930-1956)  », Cahiers de la Méditerranée, vol. 72, 2006.

    (4) Henry de Montherlant, «  Un vainqueur élève-t-il une statue au vaincu  ?  », In Service inutile, Paris, Éd. Bernard Grasset, 1935.

    (5) Ibid. 

    (6) Discours du 16 novembre 2006, cité par Nadjia Bouzeghrane, «  L’Emir Abdelkader. Une place parisienne porte désormais son nom  », El Watan, Alger, 18 novembre 2006.

    Pour une statue à la gloire de l’émir Abd El-Kader à Paris

    Alain Ruscio 

    Historien. Dirige les travaux d’une Encyclopédie de la colonisation française dont le premier tome est paru en février 2017 (Les Indes savantes, coll. Asie). 

    SOURCE : http://orientxxi.info/magazine/pour-une-statue-a-la-gloire-de-l-emir-abd-el-kader-a-paris,1985 

     

     


    4 commentaires
  • Je voudrais remercier Gilles Manceron, d’abord pour la rédaction de cet hommage à François Nadiras et Gérard Tronel, le remercier aussi pour avoir mentionné un lien de mon blog que vous pourrez voir à la fin de son article, mais je tiens à rappeler que c’est Jean-François Gavoury, le premier, qui nous a signalé avoir vu sur Le Monde daté du 1er septembre les deux avis de décès, côte à côte, de François Nadiras et Gérard Tronel, comme une bien triste coïncidence… ensemble dans la presse et dans la mort. Voici le lien de l'hommage de Jean-François Gavoury pour l'ANPROMEVO :

    http://www.micheldandelot1.com/francois-nadiras-est-decede-dimanche-27-aout-a-l-hopital-de-toulon-a-l-a131375458 

    Mathématiques et vérités à dire Mathématiques et vérités à dire

     


     

    Mathématiques et vérités à dire 

    Entre François Nadiras et Gérard Tronel, morts à quelques jours l’intervalle, beaucoup de ressemblances. Ces deux mathématiciens et pédagogues étaient attachés à la connaissance du colonialisme et de ses séquelles. Leur œuvre reste à poursuivre.  

    Le hasard a voulu que le même jour, dans le Carnet du Monde daté du 2 septembre 2017, à côté de l’avis de décès de François Nadiras — l’animateur du site ldh-toulon.net connu au-delà des frontières pour être un espace d’information exceptionnel sur l’histoire coloniale et ses séquelles — est paru celui de Gérard Tronel, cofondateur du prix Maurice Audin, qui n’a cessé de se battre pour que soit enfin reconnu comment, durant la Bataille d’Alger, en 1957, ce jeune chercheur de 25 ans était mort des mains de militaires français. Gérard Tronel est décédé le 25 août, François Nadiras le 28. Entre leurs deux parcours, beaucoup de ressemblances. Tous deux étaient mathématiciens et pédagogues. Y aurait-il un rapport entre l’expertise en mathématiques et la juste mesure des discriminations coloniales et des injustices de ce monde ? Maurice Audin, précisément, est mort avant d’avoir pu soutenir sa thèse de mathématiques ; Mehdi Ben Barka, avant de s’engager pour l’émancipation de son peuple et de tous ceux d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine, a enseigné cette matière - y compris au futur roi du Maroc et grand « ami de la France », Hassan II… à l’origine de son assassinat ; ou encore le mathématicien Laurent Schwartz, l’un des maîtres d’Audin, a été aussi une conscience dans maints combats anti-impérialistes. Il se trouve, en tout cas, que ces deux vigies de toutes les atteintes aux droits de l’homme que furent François Nadiras et Gérard Tronel, qui sont arrivées en même temps au terme d’un même engagement pour la connaissance du colonialisme et de ses séquelles, étaient eux aussi mathématiciens. 

    La vigie de Toulon 

    Nadiras habitait Toulon, ville où le passé colonial est très présent. Sur une digue de la rade une plaque rappelle que c’est de Toulon que le 25 mai 1830 est partie l’expédition navale qui a conduit à la prise d’Alger et marqué le début de la conquête de l’Algérie. Elle commémore le départ, sur ordre du roi Charles X, de 103 bâtiments de guerre transportant les 35 000 hommes du corps expéditionnaire aux ordres du général de Bourmont. Devant elle, de temps en temps se rassemblent quelques-uns de ceux qui s’agrippent au mythe d’une Algérie créée par la France et d’une conquête bienfaitrice et se nomment eux-mêmes les « algérianistes ». Toulon a aussi connu en 1995 l’élection d’une municipalité du Front national. Nadiras a été de ceux qui, à ce moment, ont considéré qu’on ne pouvait pas « rester les bras ballants ». 

    http://www.lamarseillaise.fr/var/societe/58868-francois-nadiras-on-ne-pouvait-pas-rester-les-bras-ballants-face-au-front-national  

    Militant alors à Amnesty international, il a rejoint la section locale de la Ligue des droits de l’homme, et, convaincu de ce que l’idéologie héritée de la colonisation constituait l’un des soubassements essentiels de l’influence de l’extrême droite dans l’opinion, il s’est lancé dans la création d’un site internet <ldh-toulon.net>, se fixant notamment pour mission de documenter à destination d’une population française à la fois ignorante et abreuvée de mensonges, l’histoire de la colonisation. Il faut dire que, nommé à la Guadeloupe pour son premier poste de jeune agrégé, au milieu des années 1960, sa rencontre avec une société profondément imprégnée de racisme colonial avait provoqué en lui une aversion aussi profonde que durable pour cette idéologie et ses conséquences. Plus tard, quand il a du, pour raisons de santé, arrêter son enseignement de mathématiques en classes préparatoires au Lycée Dumont d’Urville de Toulon, il s’est consacré entièrement au développement du site qu’il avait créé au début des années 2000 et auquel il a décidé de se vouer désormais à plein temps. 

    En exergue, une phrase de Pierre Vidal-Naquet : « Si l’Histoire sert à quelque chose, c’est à ouvrir les yeux. » Quand deux archivistes ont été sanctionnés pour avoir témoigné avec courage, en février 1999, en faveur de Jean-Luc Einaudi lors du procès en diffamation que lui avait intenté Maurice Papon pour avoir dit sa responsabilité dans le massacre du 17 octobre 1961, il leur a apporté son soutien. Un peu plus tard, son grand combat a été celui contre la loi du 23 février 2005 qui enjoignait aux enseignants de montrer les « aspects positifs de la colonisation ». Prenant l’initiative d’une pétition nationale, publiant de nombreux articles à ce sujet, l’action de ce site internet a été, avec d’autres initiatives issues notamment des milieux universitaires, de celui des professeurs de lycée et des populations des départements d’outre-mer, l’un des facteurs qui ont conduit le président de la République d’alors, Jacques Chirac, à trouver le moyen pour revenir — fait unique dans notre histoire — sur une disposition inscrite dans une loi qu’il avait suscitée, qui avait été pourtant adoptée par le Parlement, signée par lui et publiée au Journal officiel… Plus tard, en 2011, François Nadiras, par la voix de son site, a participé avec la même force à la campagne pour exiger l’abandon de l’idée funeste du président Sarkozy et de son ministre de la Défense de transférer les cendres de Marcel Bigeard aux Invalides, une campagne, elle aussi, couronnée de succès. Plus récemment, il a fait écho à la demande de ce que des restes de résistants algériens du XIXe siècle contre la colonisation ne dorment pas au milieu des collections anthropologiques d’un musée français http://ldh-toulon.net/les-cranes-de-resistants-algeriens.html mais retrouvent, avec une sépulture dans la terre du pays dont ils avaient défendu l’indépendance, les honneurs dus à leur combat. http://ldh-toulon.net/la-France-rapatrie-la-depouille-d-un-soldat-mort-a-Oran-en-1956.html 

    Ce site est devenu une tribune et un espace d’échange pour de nombreux citoyens et chercheurs, d’ici ou d’ailleurs, intéressés par ces questions. Il a noué des liens avec des associations comme les Anciens appelés en Algérie et leurs amis contre la guerre (4ACG) ou l’Association nationale des pieds-noirs progressistes et leurs amis (ANPNPA). Le nombre et la variété des hommages qui ont été exprimés lors de son décès, dans la presse (1) comme sur internet (2), témoignent de l’influence discrète qu’il a exercée. Plutôt que de s’attarder sur les manques et les lacunes de sa propre association dans les domaines qui le préoccupaient, il s’est attaché à prendre lui-même des initiatives publiques, dans la discrétion et la modestie et à l’écart des polémiques inutiles. Patient et opiniâtre, il était réellement heureux quand telle ou telle personnalité connue du milieu des rapatriés d’Algérie entamait avec lui un débat contradictoire mais sincère. C’est le système colonial et ses conséquences sur les esprits qui étaient sa préoccupation, hors de toute animosité contre les personnes dont les idées ont été façonnées par lui. A la fois solitaire dans son combat et entouré de beaucoup d’amis, il revient à tous ceux qui ont travaillé avec lui de poursuivre son combat. 

    Nombreux ont été les visiteurs qui, venant le voir à Toulon, ont été conduits par lui au monument édifié en juin 1980, à la fin du septennat de Valéry Giscard d’Estaing, porte d’Italie, aux « martyrs de l’Algérie française ». Il leur a expliqué que le bas-relief qui y figure évoque l’un des principaux tueurs de l’OAS, auteur, en 1961 et 1962, de plusieurs tentatives d’attentats contre le président de la République — à propos de l’une desquelles, le 8 septembre 1961, le général de Gaulle avait lancé avec mépris, hochant la tête : « Quels maladroits !… ». C’est ce bas-relief qui a été reproduit ensuite sur les cénotaphes honteux à la « gloire » de ces terroristes, à Perpignan et Marignane http://ldh-toulon.net/Toulon-Marignane-histoires-de-steles-et-de-plaques.html. L’un de ses grands regrets aura été de n’être pas parvenu à convaincre les autorités d’au moins accompagner ce monument toulonnais d’un panneau expliquant son origine et son contexte et rétablissant quelques vérités sur la dérive meurtrière de ces jusqu’au-boutistes de la colonisation, qu’il prétend honorer. 

    Mais l’histoire et la mémoire coloniales n’étaient ses seuls sujets de réflexion. Ce site a consacré nombre d’articles aux « Roms et gens de voyages », à la « peine de mort », et Nadiras était particulièrement attaché à la vigilance face aux différentes formes de fichage et à leurs conséquences possibles https://www.dailymotion.com/video/x6swew_entretien-avec-francois-nadiras-ldh_news ainsi qu’à toutes les formes de racisme, dont l’antisémitisme. La LDH a justement rendu hommage à ce militant auquel aucun droit, aucune liberté n’échappait à la vigilance https://www.ldh-france.org/francois-nadiras-1941-2017-droit-liberte-nechappaient-vigilance/. 

    Pendant plus de vingt ans, il a lutté victorieusement contre une maladie dégénérative qui devait, à l’âge de 76 ans, avoir raison de lui. Quand elle a progressé, il a fallu qu’il cherche avec ceux qui l’avaient aidé à alimenter ce site une solution qui en assure la continuité. La décision fut prise de le scinder en deux parties, l’une consacrée au combat pour les droits de l’homme à Toulon et dans la région, confiée à la section locale de la LDH, l’autre vouée plus généralement à la connaissance de la colonisation et de ses séquelles, gérée par une association d’historiens et autres citoyens persuadés comme lui de l’importance de cette question. La réorganisation est en bonne voie et sera menée à terme. 

    Celui qui exigeait la vérité  

    Né en 1934, Gérard Tronel appartenait à la génération qui a été marquée profondément par la guerre d’Algérie. Avant de mourir, le 25 août, à l’hôpital d’Ussel, en Corrèze, au terme de plusieurs années de lutte contre le cancer, il a voulu que ses cendres soient dispersées là où il a passé son enfance, à Montvernier, en Savoie. Peut-être par volonté de revenir à un temps béni qui pour lui n’avait pas encore été troublé par les horreurs de cette guerre. Il a tenu à rédiger lui-même l’épitaphe de son faire-part de décès : « Il a tant aimé les mathématiques. Il s’est battu jusqu’au bout pour connaître la vérité sur la mort de Maurice Audin ». Episode emblématique : lorsqu’il enseignait les mathématiques à l’université Paris-6, l’un de ses étudiants, né en Algérie, particulièrement attentif, avait une particularité, il avait contracté à la naissance une maladie infectieuse des yeux qui, mal soignée en raison du sous-équipement de l’Algérie en ophtalmologie des nourrissons, l’avait rendu aveugle. Tronel a eu le sentiment que, dans un pays longtemps frappé par l’injustice coloniale, il avait été victime d’une injustice particulière ; et après les cours il lui avait consacré bénévolement des séances particulières. L’étudiant a brillamment réussi ses examens. Après une maîtrise de mathématiques et une belle carrière dans la banque, il s’est consacré à des activités associatives pour l’amélioration de la prise en compte des handicapés. Quelques années plus tard, Gérard Tronel l’a retrouvé maire adjoint de la ville de Paris au côté de Bertrand Delanoë en charge de la démocratie locale et de la vie associative. 

    En 1969, Gérard Tronel est entré au Laboratoire d’analyse numérique créé par Jacques-Louis Lions et où il a poursuivi sa carrière comme maître de conférences de mathématiques, assurant pendant de nombreuses années le secrétariat du séminaire hebdomadaire du laboratoire. En 2000, il a beaucoup œuvré à l’année mondiale des mathématiques. Son travail a été récompensé en 2002 par le prix d’Alembert et il a participé à l’organisation du cycle « Un texte, un mathématicien » à la Bibliothèque nationale de France. Surtout, en 2004, il a été le principal artisan de la renaissance du prix Maurice Audin de mathématiques. 

    On sait que dans la nuit du 10 au 11 juin 1957, en pleine bataille d’Alger, Maurice Audin, jeune assistant de mathématiques à l’université d’Alger, membre du parti communiste algérien et fervent militant de l’indépendance, a été arraché à son foyer par les parachutistes du général Massu, chargé du « maintien de l’ordre » dans la ville. Torturé, il est mort, probablement le 21 juin. Aussitôt alertés par Josette Audin, son épouse, des intellectuels français autour de Pierre Vidal-Naquet ont créé le Comité Audin pour rechercher la vérité sur sa disparition. En 1958, peu après la soutenance dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne de la thèse de doctorat in abstentia de Maurice Audin, qui fut en même temps une manifestation solennelle de protestation de l’université française contre les pratiques de l’armée en Algérie, Laurent Schwartz avait pris l’initiative de créer un prix de mathématiques. Entre 1958 et 1963, ce prix Audin a été décerné à de jeunes mathématiciens, dont certains sont devenus célèbres comme, précisément, Jacques-Louis Lions, futur président du Centre national d’études spatiales (CNES) et de l’Académie des sciences, ou encore Jean-Pierre Kahane, André Néron ou Marcel Berger. Au sortir de la guerre d’Algérie et au moment où la guerre américaine au Viêt Nam a commencé à accaparer les esprits, le prix ne s’est pas maintenu. Mais, au début des années 2000, lorsque la Mairie de Paris a envisagé de donner le nom de Maurice Audin à une rue ou une place à Paris — la « place Maurice-Audin » sera inaugurée le 26 mai 2004 —, Gérard Tronel a été contacté par Pierre Mansat, alors adjoint au maire. Un comité s’est mis en place dont faisait partie Laurent Schwarz, à qui Tronel a fait part de son idée de relancer ce prix. Et, peu de temps avant sa mort en juillet 2002, Laurent Schwartz a soutenu son projet de recréer un prix Audin de mathématiques. Le but était de faire reparler de l’affaire Audin tout en prenant une initiative symbolique pour œuvrer à la réconciliation entre l’Algérie et la France. 

    Ce prix a récompensé chaque année, de 2004 à 2012, deux jeunes mathématiciens, l’un en France, l’autre en Algérie, sous le patronage la Société mathématique de France et de la Société de mathématiques appliquées et industrielle. Le 21 juin 2007, pour marquer le cinquantième anniversaire de la mort de Maurice Audin, Gérard Tronel a organisé la remise des prix 2006 et 2007 à la Bibliothèque nationale de France, en présence de son président, et de Pierre-Louis Lions, président du jury, professeur au Collège de France et membre de l’Académie des sciences. Le prix 2006 est revenu notamment à la jeune mathématicienne algérienne Nadja El Saadi et celui de l’année suivante, à Dalila Azzam Laouir et Abdelfatah Bouziani. Une table ronde a réuni ensuite des acteurs de l’affaire Audin et des historiens. En  2009, c’est le Palais de la Découverte qui a accueilli, le 15 décembre, la remise, toujours par Gérard Tronel et Pierre-Louis Lions, en présence de Josette Audin, veuve de Maurice Audin, à la fois des prix 2008 — à Mouffak Benchohra, de l’Université de Sidi-Bel-Abès, et Vincent Guedj, de l’Université d’Aix-en-Provence — et 2009 — à Abdessalam Boucif, de l’Université de Mascara, et Raphaël Danchin, de l’Université de Créteil http://www.dailymotion.com/video/xcg7we. Pour l’occasion, l’un des anciens élèves de Maurice Audin, qui, en 1954, avait reçu à son domicile les leçons particulières du jeune enseignant puis était devenu son ami, Mohamed Rebah, était venu d’Algérie pour apporter son témoignage. Une cérémonie identique s’est déroulée ensuite à Alger, avec le soutien de la Direction générale de la Recherche scientifique et du développement technologique, à laquelle était présent l’un des fils du disparu, Pierre Audin, lui-même mathématicien, responsable du département de mathématiques au Palais de la Découverte. En 2010, c’est à l’Hôtel de ville de Paris que les prix ont été remis, à Boumediene Abdellaoui, maître de conférences à l’université de Tlemcen, et Emmanuel Trélat, professeur à l’Université d’Orléans, elle-même engagée dans une coopération avec celle de Tizi-Ouzou. L’année des cinquante ans de l’indépendance algérienne, le 22 juin 2012, en présence de Josette Audin, Gérard Tronel a organisé une nouvelle remise marquante de ce prix — à Tarik Touaoula, de l’Université de Tlemcen, et Djalil Chafaï, de l’Université Paris-Est Marne-la-Vallée — à la Bibliothèque nationale de France, puisqu’elle a été suivie d’un colloque où sont notamment intervenus Henri Alleg, Raphaëlle Branche, Jean-Luc Einaudi, Nathalie Funès, Mohammed Harbi, Roland Rappaport et Benjamin Stora http://www.dailymotion.com/video/xvyj87. 

    Quand, en mars 2014, après la parution en janvier d’un livre faisant état des confidences du général Aussaresses avant sa mort disant qu’un ordre d’assassinat d’Audin avait été donné par le général Massu, Gérard Tronel comme François Nadiras ont fait partie des 171 signataires d’un appel renouvelant la demande de vérité sur son sort https://blogs.mediapart.fr/edition/les-invites-de-mediapart/article/260314/nous-demandons-la-verite-sur-l-assassinat-de-maurice-audin. Et Gérard Tronel était présent à la soirée organisée sur ce thème par Mediapart et l’Humanité https://blogs.mediapart.fr/edition/complices/article/180314/pour-la-verite-sur-l-assassinat-de-maurice-audin, avec l’aide active de Michel Broué, lui aussi mathématicien et président de la Société des amis de Mediapart, le 24 mars, dans un théâtre parisien (écouter : première partie https://www.mediapart.fr/studio/podcasts/documentaire/soiree-pour-la-verite-sur-la-mort-de-maurice-audin-12 ; deuxième partie https://www.mediapart.fr/studio/podcasts/partenariat/soiree-pour-la-verite-sur-la-mort-de-maurice-audin-22). Mais, en juin, son état de santé ne lui a pas permis de participer à la remise du prix — à Kaoutar Ghomari, de l’Université d’Oran Es-Senia, et San Vu-Ngoc, de Rennes I. Elle a eu lieu cette fois à l’Institut Henri Poincaré, le jury étant présidé par Cédric Villani. Il n’a pas pu être présent non plus à la remise en février 2016, à l’Université Kasdi Merbah de Ouargla, en présence de Josette et de Pierre Audin, du prix désormais biennal, à Bakir Farhi, de l’Université de Béjaïa. Le président du jury, Cédric Villani, a prononcé à cette occasion un important discours https://www.youtube.com/watch?v=TodAiy9G2uY. 

    Le 17 juin 2014, Josette Audin avait été reçue à l’Élysée et François Hollande a publié le lendemain, le jour de la remise du prix, un communiqué totalement différent de ce que contenaient les quelques copies d’archives remises l’année précédente à la famille — dernière tentative d’« enfumage » dans une affaire qui en compte beaucoup ?… — Ce communiqué contredit la version d’une soi-disant évasion répétée depuis 1957 par les autorités françaises comme vérité officielle https://web.archive.org/web/20140813142432/http://www.elysee.fr/declarations/article/message-du-president-de-la-republique-a-l-occasion-de-la-remise-du-prix-maurice-audin-pour-les-mathematiques/. Il a déclaré cette fois que « les documents et les témoignages dont nous disposons aujourd’hui sont suffisamment nombreux et concordants pour infirmer la thèse de l’évasion qui avait été avancée à l’époque. M. Audin ne s’est pas évadé. Il est mort durant sa détention. » Mais, depuis, les documents et témoignages « nombreux et concordants » évoqués par ce communiqué et qui permettraient d’établir les faits n’ont pas été révélés. Le mensonge a été reconnu mais la vérité n’a pas été dite. François Hollande n’a pas levé durant son quinquennat le secret d’Etat sur cet assassinat. 

    Au lendemain de l’élection du président Macron, une lettre lui a été adressée, le 27 mai 2017, soixante ans après la disparition d’Audin, que Gérard Tronel a signée https://blogs.mediapart.fr/edition/les-invites-de-mediapart/article/270517/nous-demandons-la-verite-sur-l-affaire-audin-lettre-ouverte-au-president-de. Le président de la République a téléphoné le 11 juin à Josette Audin pour lui assurer qu’il y répondrait. Depuis, Emmanuel Macron n’a rien fait sur ce sujet. Ni Gérard Tronel, ni François Nadiras, ni non plus Roland Rappaport — qui avait été l’avocat pendant soixante de la famille Audin et est décédé le 26 juin 2017 https://blogs.mediapart.fr/edwy-plenel/blog/300617/roland-rappaport-avocat-de-toute-l-humanite —, n’ont pu entendre la réponse promise. 

    Une œuvre à poursuivre  

    Outre l’affaire Audin, François Nadiras comme Gérard Tronel étaient tous deux attachés à d’autres combats emblématiques comme ceux pour la reconnaissance par la France des massacres occultés du 8 mai 1945 dans le Nord-Constantinois et de la répression sanglante en plein Paris du 17 octobre 1961. Ils ont participé à plusieurs rassemblements commémoratifs du 17 octobre au Pont Saint-Michel. On reconnaît, par exemple, Gérard Tronel dans un petit film tourné lors de celui de 2010 http://www.dailymotion.com/video/xfa98l. 

    Disparus en même temps, ces deux hommes étaient discrets, modestes, mais ils n’ont pas hésité à prendre eux-mêmes, assez seuls dans un premier temps, les initiatives qu’ils jugeaient nécessaires. Leur engagement ne les a pas conduits, ni à l’époque de la guerre d’Algérie, ni par la suite, à adhérer à un parti politique. Mais, au fil de leur vie, ils ont été tous deux de plus en plus habités par une exigence de vérités à dire, par un besoin civique d’informer leur société sur son passé colonial et de demander aux autorités de faire œuvre de vérité à son sujet. Avec opiniâtreté, ils ont mis en œuvre des moyens pour aller vers ces objectifs. S’ils n’ont pas pu poursuivre plus longtemps leur combat, il revient à d’autres de le continuer. 

    (1) L’Humanité https://www.humanite.fr/francois-nadiras-militant-de-la-ldh-de-toulon-est-decede-641343, Var matin http://www.varmatin.com/vie-locale/francois-nadiras-n-est-plus-163325, Mediapart https://blogs.mediapart.fr/anne-guerin-castell/blog/290817/francois-nadiras-un-site-une-oeuvre?utm_source=twitter&utm_medium=social&utm_campaign=Sharing&xtor=CS3-67. En Algérie, le quotidien El Watan du 8 septembre 2017. 

    (2) Voir les nombreuses réactions sur Youtube, ou, par exemple, le blog de Michel Dandelot http://www.micheldandelot1.com/dans-la-derniere-semaine-d-aout-2017-deux-mathematiciens-francais-sont-a131445672  

    SOURCE : https://blogs.mediapart.fr/gilles-manceron/blog/070917/mathematiques-et-verites-dire  


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  • édito d’Henri Pouillot

    Triste coïncidence en cette fin août 2017

    Gérard Tronel et François Nadiras

     ont tiré leur révérence

     à quelques jours d’intervalle

    Tous deux ont beaucoup milité pour que les crimes commis au nom de la France, en particulier pendant la Guerre de Libération de l’Algérie, soient reconnus comme tels et condamnés, que la vérité soit connue, reconnue.

    Les obsèques de Gérard Tronel eurent lieu le 28 Aout 2017. Il avait 83 ans. Mathématicien, il avait pris la relève pour faire vivre le Comité Audin, et que vérité et justice soit rendue sur cet assassinat. Il fut l’un des acteurs ayant permis l’inauguration d’une place Maurice Audin à Paris. Depuis 2004, il était devenu l’âme de la renaissance, puis de l’organisation du Prix Maurice Audin, un combat qui lui tenait particulièrement à cœur.

    Les obsèques de François Nadiras eurent lieu le 2 septembre suivant. Il avait 76 ans, lui aussi était professeur de mathématique. Responsable de la LDH à Toulon depuis de nombreuses années il menait un combat pour les droits de l’Homme, contre le colonialisme, contre la nostalgie de l’Algérie Française. Il est à l’origine d’un site remarquable qui fait référence sur cette Guerre.

    Ces deux militants, dont la jeunesse a été marquée par la Guerre de Libération de l’Algérie, épris des réelles notions des droits de l’homme, ont effectué un remarquable travail de mémoire, mené des actions pour dénoncer les conséquences du colonialisme, les crimes qu’il a généré.

    Lorsque le candidat E. Macron, à la télévision Algérienne, s’est exprimé en déclarant que le colonialisme était un crime contre l’humanité, malgré leur maladie, ils avaient ressenti un immense espoir, (espoir qu’avant de mourir : ils étaient conscients de la gravité de leur maladie) que leur combat avait abouti, puisque le 5 mai 2017 celui qui allait être élu quelques plus tard déclarait devant la rédaction de Médiapart : "De fait, je prendrai des actes forts sur cette période de notre histoire…" Mais 4 mois plus tard, sans doute à cause des vacances (????..) le silence reste total.

    Chers Gérard et François, nous continuerons votre combat, avec la même conviction que vous y avez mise. 

    Edito d’Henri Pouillot : Gérard Tronel et François Nadiras ont tiré leur révérence

    PS : Henri Pouillot annonce que sur son site, une page leur sera consacrée à chacun dans quelques jours. 


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  • Une populaire écrivaine française annonce qu'elle est sur le point de se faire euthanasier

    Une populaire écrivaine française annonce qu'elle est sur le point de se faire euthanasier

    La populaire écrivaine Anne Bert a récemment annoncé qu'elle était sur le point de se faire euthanasier. 

    L'écrivaine est atteinte de la maladie de Charcot et elle estime que son état de santé devient de plus en plus insoutenable.

    C'est d'ailleurs dans ces mots très explicites qu'elle a expliqué aux micros de France Inter sa situation: "Je sais que dans deux mois, ça va être l’horreur, et dans quatre mois encore pire que l’horreur, et après la mort". 

    Ainsi, l'écrivaine de 59 ans devrait mourir au mois d'octobre, en Belgique.

    Aux dires d'Anne Bert, celle-ci semble être en paix avec sa décision toutefois très difficile: "Si j’ai décidé de ne pas vivre cette agonie qui m’est promise, c’est parce que j’ai en moi une souffrance incommensurable, ineffable. "

    Rappelons que la maladie de Charcot cause une lente paralysie totale des muscles, et ce, jusqu'à l'étouffement mortel.

    Anne Bert publiera un livre à titre posthume à propos de son combat, Le tout dernier été. Le livre sortira peu après sa mort annoncée, le 9 octobre.

    MERCI DE CLIQUER SUR LE LIEN CI-DESSOUS VOUS POURREZ VOIR ET ENTENDRE ANNE BERT PARLER DE SA TERRIBLE MALADIE ET DE SA MORT QU’ELLE A PROGRAMMée :

    Source : http://www.20minutes.fr/societe/2128107-20170906-maladie-charcot-atteinte-ecrivaine-anne-bert-explique-vouloir-faire-euthanasier

    Une populaire écrivaine française annonce qu'elle est sur le point de se faire euthanasier

    COMMENTAIRE

    Mourir, la belle affaire, mais vieillir...

     ô vieillir

    Mourir insignifiant au fond d'une tisane, entre un médicament, et un fruit qui se fane ou alors, mourir couvert d'honneur, et ruisselant d'argent, asphyxié sous les fleurs, mourir en monument, mourir cela n'est rien, mourir la belle affaire, mais vieillir... ô vieillir...  

    Ainsi chantait Brel, ainsi pensait Brel, La dame à la faux l'a pris au mot, il est mort jeune, trop jeune, il aurait préféré, c'est certain, partir le jour de ses cents ans.

    Une populaire écrivaine française annonce qu'elle est sur le point de se faire euthanasier

    Terminer sa course la nuit de ses cent ans, vieillard tonitruant soulevé par quelques femmes cloué à la Grande Ourse, cracher sa dernière dent, en chantant "Amsterdam". 

    La mort de Mireille Darc et le long défilé de ses amis célèbres et proches.

    Son départ dans le tumulte médiatique qui accompagne ces adieux nous pousse à nous interroger, nous, moins jeunes, sur notre propre sort. "Tiens encore un ou une qui part", il ou elle a mon âge ne peut-on s'empêcher de penser, si c'est le cas.

    Ou alors ceux qui s'en vont inconnus médiatiquement et qui partent avec un morceau de vous-mêmes. Plus on vieillit, plus ils sont nombreux à accompagner.

    Alain DELON a dit après la mort de Mireille DARC : « maintenant je peux partir ».

    Terrible aveu de désespoir pour quelqu'un sur qui toutes les fées s'étaient penchées et qui possédait tout sauf la fontaine de jouvence qui n'est pas en vente. Suprême égalité.

    Quand on regarde autour de soi, en évitant de croiser un miroir, car il vient un moment où l'on se regarde plus facilement dans ses souvenirs que dans les miroirs, quand on se repasse le défilé des vedettes de cinéma, des chanteurs, qui ont accompagné notre jeunesse, et une grande partie de notre vie, un constat évident, la plupart s'en sont allés.

    Certains sont encore là.

    Delon, Belmondo, Aznavour, Brigitte Bardot les griffures du temps les ont terriblement bléssés, mais ils sont encore présents.

    Une populaire écrivaine française annonce qu'elle est sur le point de se faire euthanasier

    Certains sont partis trop tôt : James Dean, Elvis, Jakson, Marilyn, Romy, Patrick Dewaere, Steeve McQueen et tant d'autres, en pleine gloire.

    Mais égoïstement on se dit, ils sont peut-être partis tôt, mais en nous laissant la meilleure image d'eux-mêmes. C'est mieux pour nous, peut-être pas pour eux, non ?

    Certains sont partis très tard, avec un parcours final plus ou moins difficile : Moreau, Curtis, Brando, l'irremplaçable Annie Girardot dont le talent et l'émotion nous ont bouleversés.

    Une populaire écrivaine française annonce qu'elle est sur le point de se faire euthanasier

     


     La vieillesse, un long naufrage dit-on, un long naufrage pour beaucoup, car avant de couler on aura écopé beaucoup, pas pour éviter le naufrage, il est inéluctable, mais pour le reculer, à l'aide de chirurgie esthétique pour ceux qui le peuvent, puis de plus en plus de médicaments, de soins, de plus en plus fréquents et allant jusqu'au soins palliatifs, pour les moins chanceux.

    Mais pour la majorité d'entre nous, la mort est un épouvantail. Quelles que soient nos difficultés, notre quête est "s'il vous plait, encore un peu, quelques instants encore", que l'on s'adresse à un dieu ou à l'ami qui nous tient la main.

    Nos parcourons tous un chemin commun, nous vivons deux vies dans notre existence, une vie où l'on se pense immortel, sans angoisses métaphysiques, la belle vie, et la seconde vie où l'on a pris conscience que la mort nous attend au détour du chemin. On la devine, on sent sa présence, on entend parfois son ricanement.

    Confucius disait déjà il y a 2500 ans : « On a deux vies, et la deuxième commence quand on se rend compte qu’on n’en a qu’une. »

    La période de déclenchement de cette perception est bien sur variable chez chaque individu.

    Certains, peu nombreux, ont la chance de "bien" vieillir, puis ''s'endorment un soir et dorment pour longtemps'', comme chantait encore Brel, les veinards. On en a connu, et on se disait entre nous : ''ils ont eu une belle mort'', encore un oxymore !

    Alors que faire ? Pour nous comme pour eux, ces artistes, compagnons de route, le sablier s'écoule inexorable, il faut puiser dans le quotidien le désir de continuer, continuer jusqu'à que mort s'ensuive.

    Mais la meilleure façon de ne pas mourir est de vieillir dirait la Palice.

    Certains décident de ne pas aller au-delà d'une certaine déchéance, ils programment et décident de leur départ, ils ont décidé d'un degré de tolérance face aux agressions du temps, privant la dame à la faux d'exercer ses talents, pied de nez qu'elle ne doit pas apprécier, la gueuse.

    ''Je ferai en sorte que vous mourriez en bonne santé'', me rassure mon médecin et ami. Plus ami que médecin, je pense, dans son affirmation. 

    SOURCE : https://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/mourir-la-belle-affaire-mais-196450?debut_forums=100#forum4992954 


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    « Frères et compagnons », dictionnaire biographique sur les Algériens d’origine européenne et juive, témoigne de ceux qui en Algérie ont fait leur le droit à l'insoumission.

     

    « Frères et compagnons » Ils se sont insoumis contre l’ordre colonial

     

    Ils se sont insoumis

     contre l’ordre colonial 

    Les éditeurs algériens publient de nombreux ouvrages, notamment des témoignages, sur la guerre et la lutte de libération. Si l’on se réfère à Patrick Boucheron quand il déclare  : « après un moment de crispation, qui a correspondu à ce moment où on a opposé la mémoire et l’histoire, parce qu’on a fini par croire vraie cette position idéologique qui consistait à croire qu’il fallait défendre l’histoire contre cette effervescence des mémoires concurrentes et évidemment partielles », c’est là une utile contribution. Parmi les ouvrages publiés, le livre de Rachid Khettab, Frères et compagnons, dictionnaire biographique sur les Algériens d’origine européenne et juive, qui ont participé à la guerre de libération.

    Résultat d’un travail obstiné de recherches et de compilations sur des parcours collectifs et individuels ; au-delà des principaux protagonistes, nombreux sont ceux que ce livre sort de l’oubli. Si des engagements forts et anciens aident à recueillir les informations sur certains, pour d’autres, clandestinité ou dispersion des cheminements après l’indépendance, les fils sont ténus et retrouver les sources s’avère difficile. C’est le grand mérite de Rachid Khettab, sur la base d’interviews et de témoignages, d’informations recueillies dans des livres, des journaux ou dans le Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier-Maghreb de rappeler l’engagement de plus de 250 frères et compagnons.

    Du rejet du système colonial, pour les uns à la pleine reconnaissance du droit à l’indépendance pour les autres, l’acte d’insoumission de ces militants d’origine européenne rejoint, dans ses raisons et ses motifs, celui de ceux qui en France ont refusé de faire cette guerre ou qui se sont engagés dans les réseaux de soutien, mais il s’en différencie en raison de leur insertion en Algérie : ils sont « partie prenante de ce pays » et par les risques encourus et par leur engagement au cœur de la guerre et de la violence coloniales.

    On trouve évidemment dans ce dictionnaire les noms d’Henri Alleg, Alexandre et Suzanne Chaulet, Fernand Iveton, Jean Scotto, Annie Steiner, Henri Maillot, Léon-Étienne Duval, Jacqueline Guerroudj, Alice Cherki, Daniel Timsit, Jean Senac ou celui de Frantz Fanon. On y trouve aussi celui de Maurice Audin, pour lequel un énième appel adressé au nouveau président de la République demande de (re)connaître la vérité historique sur son assassinat. Maurice Audin est mort sous la torture, comme sont mort, en application des pratiques de la « guerre révolutionnaire » couverte par le gouvernement, des milliers d’Algériens lors de la bataille d’Alger, sauf que Maurice Audin, n’est pas un bougnoule, mais un Français d’Algérie, de plus un universitaire, c’est la « bavure » à assumer.

    Ce dictionnaire rappelle et fait revivre des parcours et des engagements - la rose, le réséda et le jasmin - différents, mais indissociables dans leur refus du colonialisme, dans leur solidarité et leur adhésion, à la cause d’une Algérie indépendante. Ainsi, celui d’Éveline Lavalette, née en Algérie, formée, comme beaucoup, par le scoutisme, proche d’André Mandouze, enseignante dans la Basse-Casbah. Dès le déclenchement de la lutte de libération, elle est en contact avec Benyoucef Benkkedda, son appartement servira au Comité de Coordination et d’Exécution, la direction centrale la Révolution, elle assure l’hébergement d’Abane Ramdane, Krim Belkacem, Larbi Ben M’Hidi… Elle est de ceux qui participent à l’impression du premier numéro du Moudjahid et de la Charte de la Soummam, c’est elle qui tape l’appel à la grève décidée par l’UGEMA. Arrêtée à Alger le 13 novembre 1956, torturée, condamnée, elle connaît les prisons d’Oran, de Maison Carrée, la prison militaire d’El Asnam ; libérée en août 1959, les contrôles auxquels elle est soumise l’obligent à gagner clandestinement la France, puis, menacée par la Main rouge, à rejoindre la Suisse, où elle travaille avec le Dr Bentami pour le Croissant rouge algérien. Éveline Lavalette sera élue à l’Assemblée constituante dans l’Algérie indépendante, prendra la nationalité algérienne et vivra ses dernières années à Médéa.

    Autre figure, Maurice Laban, lui aussi né en Algérie : fondateur du PCA, il rejoint en 1936 les Brigades internationales, de retour en Algérie, il combat dans la clandestinité le régime de Vichy, arrêté, il est libéré en 1943. Membre de la direction du PCA, il est blâmé comme « nationaliste » pour avoir écrit : « Défendre exclusivement des mots d’ordre nationaux français est une erreur ». Ahmed Akkache, lui aussi militant et enseignant, écrit de Maurice Laban « C’était extraordinaire de voir un Algérien d’origine européenne vivre au milieu des Arabes, s’habiller comme eux, parler comme eux. » Après le 1er novembre 1954, Mostefa Ben Boulaïd, l’un des 22 qui ont décidé du déclenchement de la lutte de libération et qui dirige la Willaya des Aurès, fait savoir qu’il souhaite que Maurice Laban soit son adjoint militaire. La direction du parti ne l’autorise pas à gagner le maquis. Menacés en raison de leurs actions militantes, Maurice Laban et sa femme Odette, quittent Biskra, passent dans la clandestinité dans le Constantinois puis dans la Mitidja. Quand la direction du PCA crée un groupe armé dans l’Ouarsenis, elle demande à Maurice Liban de le rejoindre, ce qu’il fait aussitôt. Le 5 juin 1956, le petit groupe de maquisards est localisé par l’armée, le lendemain Le Monde peut annoncer la mort de « l’officier félon », Henri Maillot et, avec lui, celle de « l’ancien instituteur », Maurice Laban. Sa femme, Odette, venue en France avec ses enfants est licenciée ; fidèle à ses convictions, elle poursuit son action militante dans la Fédération de France du FLN. 

    Comment ne pas rappeler les noms de Louis Augor et de Gabrielle Giminez. Louis Augor, prêtre de la Mission de France, avec les abbés Kerlan et Mamet, constitua l’équipe de Souk-Ahras. Ce sont eux qui établirent les premiers dossiers sur la répression et les exactions commises, la publication des témoignages recueillis allait jouer un rôle essentiel, en France et hors de France, dans la prise de conscience de la réalité de la guerre d’Algérie. Une mesure d’expulsion d’Algérie est prise à l’encontre de Louis Augor, l’émotion suscitée dans la communauté algérienne par la décision à l’encontre des prêtres ouvriers de Souk-Ahras est si forte que la population est avertie que treize otages seraient fusillés en cas de manifestations 

    Gabrielle Giminez milite dès les années 1940 pour une Algérie indépendante ; arrêtée en 1941, elle subit le supplice de l’eau et de l’électricité au Commissariat d’Alger. Lors du procès des 61 communistes, elle est condamnée, en 1942, à la prison à perpétuité. Le fascisme vaincu, la lutte de libération engagée, membre, avec son mari Roger Bénichou, du groupe armé du PCA, les Combattants de la libération, ils sont arrêtés en 1956. À nouveau Gabrielle Giminez connait le supplice de la baignoire, cette fois dans les caves de l’ancien Trésor d’Oran. Condamnée à vingt ans de travaux forcés, ramenés à quinze, transférée à la Petite Roquette, elle est maintenue avec les droits communs, séparée de ses sœurs algériennes et françaises. Libérée bien après les Accords d’Évian, elle retourne avec son mari en Algérie, ils reprennent leurs emplois, avant de quitter l’Algérie dans les années 1990, durant la « décennie noire ».

    À une autre page on trouve le nom trop oublié d’Albert-Paul Lentin, né dans le Constantinois : il a participé dans un réseau gaulliste à la prise de contrôle d’Alger en novembre 1942. Au tribunal de Nuremberg, il est chargé de Mission auprès d’Edgar Faure, procureur général adjoint pour la France. Devenu journaliste, envoyé spécial du Libération d’Emmanuel d’Astier de la Vigerie, il affirme ses positions anticolonialistes et est expulsé d’Algérie. Inflexible sur ses convictions, il poursuit son travail de journaliste et joue un rôle dans le cours des négociations secrètes entre le FLN et le gouvernement français. En 1962, sa maison à Paris est plastiquée par l’OAS. Après l’indépendance, en 1970, il sera l’un des fondateurs de Politique Hebdo. On trouve aussi le témoignage d’Hélène Cixous qui, dans une interview donnée au Monde, rappelle qu’elle était dans la classe de Zohra Drif : « Je suis, moi, au premier rang, là où faut être, à la première place. Les yeux sur le prof ; en diagonale, en symétrie, à l’autre bout de la classe, Zohra, elle se trouve là. Chaque fois que le prof énonce quelque chose qui me renvoie à la conscience politique aiguë que j’éprouve, je me demande, elle, Zohra, dedans, qu’en pense-t-elle ? » C’est toute la richesse de ce dictionnaire de faire émerger les visages de celles et de ceux qui ont alors choisi leur camp.

    Frères et compagnons, réserve également des rubriques aux mouvements et aux organisations comme l’Association de la jeunesse algérienne pour l’action sociale, les Combattants de la libération, le Comité des juifs algériens pour l’indépendance de l’Algérie, la Fédération des libéraux d’Algérie… les revues et journaux, Consciences algériennes, Consciences Maghribines, l’Espoir-Algérie, Le Patriote - en annexe sont publiés des documents et des lettres de Jean Sénac, Henri Maillot, Franz Fanon, Joseph Sixou ou l’interview de Ferhat Abbas par Charles-Henri Favrod.

    L’ouvrage comporte certes des oublis, des biographies trop sommaires, des manques factuels, comment pourrait-il en être autrement ? Les conditions de la recherche l’expliquent, mais ce livre est une référence incontournable sur la guerre d’Algérie et la solidarité des Algériens d’origine européenne. Sa réalisation est le mérite de Rachid Khettab qui a également publié Les amis des frères, dictionnaire des soutiens français et internationaux à la lutte de libération. Que ces travaux sur ceux qui ont affirmé leur droit à l’insoumission lors de la guerre coloniale aient été effectués par un Algérien et soient édités en Algérie n’est pas indifférent.

    SOURCE : https://blogs.mediapart.fr/nils-andersson/blog/300617/ils-se-sont-insoumis-contre-l-ordre-colonial 


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  • Bugeaud : bourreau des «indigènes» algériens

    et ennemi de la République

    Ni statue, ni avenue ! Bugeaud ? Une insulte permanente à l’émancipation des peuples et aux Algériens en particulier, et à la République qu’il a toujours combattue et haïe. Si scandale il y a, il n’est pas dans le fait d’exiger que ses statues disparaissent et que son nom soit effacé de l’avenue parisienne qui l’honore encore, mais dans l’existence même de ces hommages toujours rendus au bâtisseur sanglant de la France coloniale et à l’ennemi de l’égalité, de la liberté et de la fraternité.

     

    A la mémoire de François Nadiras

    Bugeaud : bourreau des «indigènes» algériens et ennemi de la République

     

    A droite comme à gauche, certains de ceux qui prétendent défendre vaillamment les valeurs républicaines se sont émus de la proposition faite par Louis-Georges Tin, président du Conseil représentatif des associations noires (Cran), de remplacer les « statues de la honte », notamment celles de Colbert à qui l’on doit le Code noir de 1685. Celui-là même qui a organisé juridiquement la traite et l’esclavage des « nègres » jusqu’à son abolition par décret de la Convention, le 4 février 1794, presque cinq ans après la glorieuse Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (26 août 1789). Singulières lenteurs, n’est-il pas ? Passons sur les atermoiements des révolutionnaires et sur les limites de leur décision, laquelle épargne les îles Mascareignes où les Noirs ont été maintenus dans les fers. Entre la défense des intérêts des colons et l’émancipation des esclaves, la République a tranché en faveur des premiers. Immarcescibles beautés de l’universel !

    Après Colbert, le général Bugeaud ? Assurément. Elevé à la dignité de maréchal de France en juillet 1843, grâce aux “exploits” militaires qu’il a réalisés en Algérie, ce dernier est l’homme de la “pacification” de ce territoire où il fut nommé gouverneur général trois ans plutôt. Nomination saluée avec enthousiasme et emphase par Victor Hugo en personne qui écrit : « c’est la civilisation qui marche sur la barbarie (…). Nous sommes les Grecs du monde », « notre mission s’accomplit. (1) » Par des moyens singuliers, pour le moins. En effet, Bugeaud est le théoricien, et le praticien, d’une guerre qui doit être qualifiée de totale puisqu’elle débouche sur l’effondrement de deux distinctions majeures, liées entre elles et constitutive des guerres réglées, comme on les nomme alors. La distinction entre civils et militaires, destinée à préserver autant que faire se peut les premiers de la violence des combats, et celle entre sanctuaire et champ de bataille, indispensable pour permettre aux populations de trouver refuge en des lieux qui doivent être épargnés par les affrontements.

    Tenus pour des ennemis non conventionnels, dès lors qu’ils sont réputés soutenir ceux qui, à l’instar de l’émir Abd El-Kader, résistent aux offensives de l’armée d’Afrique commandée par Bugeaud, les « indigènes » d’Algérie, hommes, femmes et enfants désarmés, peuvent être anéantis en certaines circonstances. Plus précisément, de telles pratiques s’inscrivent dans une stratégie de la terreur destinée à refouler les « Arabes » des terres sur lesquelles ils vivent. C’est cela que les contemporains nomment pacification. Elle est jugée indispensable à la colonisation effective du territoire par des Français et des Européens qui ne pourront s’y installer durablement que si la sécurité de leur personne et de leurs biens est assurée. Pour ce faire, les militaires déportent les populations civiles, torturent ceux qui n’ont pas été tués et ravagent le pays de façon méthodique.

    Autre moyen de cette politique et de cette guerre totale ? Les enfumades recommandées par Bugeaud à ses officiers en des termes qui ne laissent aucun doute sur ce qu’ils doivent faire et sur le but poursuivi : la destruction physique des « indigènes » assimilés à des animaux nuisibles qu’il faut éliminer. « Si ces gredins se retirent dans leurs cavernes, fumez-les à outrance comme des renards », déclare le général aux officiers qui s’apprêtent à partir en mission. Saint-Arnaud, Montagnac et Pélissier, pour ne citer que ceux-là, se sont exécutés avec zèle en suivant le mode opératoire établi par leur chef. En particulier le colonel Pélissier qui, le 18 juin 1845, détruit une tribu entière – celle des Ouled Riah - dont les membres désarmés s’étaient réfugiés dans les grottes du Dahra, proches de Mostaganem. Bilan : sept cents morts, au moins.

    A l’attention des esprits forts qui prétendent incarner les rigueurs de l’objectivité et de la science historique, et condamnent les anachronismes supposés de ceux qui tiennent de tels actes pour des crimes de guerre et/ou des crimes contre l’humanité, rappelons les paroles de Napoléon Joseph Ney, fils du célèbre maréchal et prince de la Moskowa. Précisons qu’ils ont été tenus dans l’ambiance feutrée de la Chambre des pairs qui, jusqu’à plus ample informé, ne fut pas le refuge de la radicalité politique sous la monarchie de Juillet. « Meurtre » commis avec « préméditation » sur « un ennemi sans défense » ; tels sont les propos de celui qui exige un démenti du gouvernement ou la condamnation des actes perpétrés et de leur auteur. Démentir ? Impossible, les faits sont établis et ils sont de notoriété publique. Désapprouver Pélissier ? Inconcevable, ce serait s’en prendre à Bugeaud en personne qui se mobilise immédiatement pour défendre son subordonné et menace de démissionner. Couvertes à Alger comme à Paris, les enfumades ont continué d’être employées et Pélissier d’être promu, y compris sous la Seconde République cependant que l’Empire le fera maréchal. Admirable carrière ! Ah que la France est généreuse pour ses brillants militaires.

    Bugeaud : bourreau des « indigènes » algériens qu’il a soumis à une guerre totale, aux massacres, aux déportations, aux razzias et aux destructions parfois complètes d’oasis et de villages livrés aux flammes par ses armées ? Assurément. Ennemi de la République prêt à tout pour défendre Louis-Philippe et la monarchie de Juillet ? Pareillement. Nommé commandant des troupes de lignes et de la garde nationale aux premières heures de l’insurrection de février 1848, il déclare : « Eussé-je devant moi cinquante mille femmes et enfants, je mitraillerais. Il y aura de belles choses d’ici à demain matin. (2) » Mâles paroles prononcées par celui qui affirmait peu avant qu’il « n’avait jamais été battu » et que si on lui laissait « tirer le canon », l’ordre serait rétabli et les « factieux » vaincus.

    La suite est connue. Les insurgés triomphent et le 24 février 1848, la République est proclamée. Vaincu, le maréchal ne renonce pas à combattre la « tyrannie de l’émeute » et les « novateurs barbares » qui conspirent contre « la nation française » mais il troque le sabre pour la plume, et rédige, en 1849, ce qui est sans doute l’un des premiers traités de la guerre contre-révolutionnaire en milieu urbain : De la Guerre des rues et des maisons (3). Objectif de cet opuscule précis et circonstancié : penser à nouveaux frais, et à la lumière des dernières insurrections, la défense des villes en général et celle de Paris en particulier. Populeuse et donc dangereuse, la capitale doit être sanctuarisée et les lieux du pouvoir politique, militaire et financier protégés au plus vite. Quant à la guerre contre les ennemis intérieurs, il faut la mener sans répit pour les vaincre rapidement et éviter ainsi la propagation de l’émeute. Cela fait, des dispositions d’exception seront appliquées et « l’état de siège » proclamé afin de châtier les coupables et de tenir le reste de la population par la peur. Lumineux.

    Bugeaud ? Une insulte permanente à l’émancipation des peuples et aux Algériens en particulier, et à la République qu’il a toujours combattue et haïe. Si scandale il y a, il n’est pas dans le fait d’exiger que ses statues disparaissent et que son nom soit effacé de l’avenue parisienne qui l’honore encore, mais dans l’existence même de ces hommages toujours rendus au bâtisseur sanglant de la France coloniale et à l’ennemi de l’égalité, de la liberté et de la fraternité. Responsables politiques nationaux et locaux, encore un effort. Vous voulez être fidèles au triptyque inscrit sur les bâtiments publics ? Agissez promptement pour mettre un terme à cette situation. Et dites les raisons de cette décision pour rappeler à toutes et à tous cette histoire écrite, certes, mais trop souvent tue ou délicatement euphémisée par les adeptologues du grand roman national.

     

    Bugeaud : bourreau des «indigènes» algériens et ennemi de la République

    Le Cour Grandmaison, universitaire. Dernier ouvrage paru : L’Empire des hygiénistes. Vivre aux colonies, Fayard, 2014.

    (1). V. Hugo, Choses vues 1830-1848, Gallimard, 1997, p. 168.

    (2). V. Hugo, Choses vues, 1830-1848, op. cit. , p. 619.

    (3). Maréchal Bugeaud, La Guerre des rues et des maisons, manuscrit présenté par M. Bouyssy, Paris, J-P. Rocher, Editeur, 1997.

     

     

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    Dans la dernière semaine d’août 2017 deux mathématiciens français sont décédés à quelques jours d’intervalles, le premier nous en avons beaucoup parlé il s’agit de François Nadiras qui nous a quitté le 29 août, le second Gérard Tronel a été un grand animateur de l’Association Maurice Audin décédé le 25 aoûtCependant Pierre Mansat, le président,  a indiqué à Hubert Rouaud le réalisateur de la vidéo visionnable à la fin de cet article qu'il va s'occuper du prix de mathématiques.  Jean-François Gavoury signalant que, le hasard a voulu, tout contre l'avis de décès de François Nadiras paru dans Le Monde daté du 1er septembre, se trouve celui de Gérard Tronel, cofondateur du prix Maurice Audin, qui n'a cessé de se battre pour que soit connue la vérité sur la mort du jeune mathématicien. Beaucoup de similitudes entre les deux copains disparus, tous deux mathématiciens, tous deux relatant l'affaire Maurice Audin et tout ce qui concerne la guerre d'Algérie et le colonialisme, François Nadiras et Gérard Tronel étaient tous deux membres amis de la 4ACG : Gérard depuis 2009 et François depuis 2011.  

    Le défunt Maurice Audin était aussi mathématicien et avait préparé une thèse qu’il n’a malheureusement jamais pu soutenir, mais a été soutenue après lui par son directeur de recherche, a-t-on évoqué de même source.

    Dans la dernière semaine d’août 2017 deux mathématiciens français sont décédés à quelques jours d’intervalles

    Décès de Gérard Tronel

    1934 – 25/08/2017

    Notre collègue et ami Gérard Tronel est décédé le 25 août 2017 à l'hôpital d'Ussel (Corrèze). Suivant sa volonté, ses obsèques ont eu lieu dans l'intimité familiale et ses cendres seront dispersées à Montvernier (Savoie), où il a passé son enfance. Depuis plusieurs années, il luttait contre le cancer.

    Gérard était né en 1934. Il avait suivi Jacques-Louis Lions lors de la création, en 1969, du Laboratoire d’analyse numérique où il a fait ensuite toute sa carrière comme Maitre Assistant de mécanique puis Maitre de Conférences de mathématiques. Pendant de nombreuses années, il a été le secrétaire du séminaire hebdomadaire du laboratoire.

    Gérard a beaucoup œuvré pour la communauté mathématique. En 2002 il avait reçu le prix D’Alembert pour sa participation à l’année mondiale des mathématiques en 2000. Il avait participé à l’organisation du Cycle "Un texte, un mathématicien" à la BnF. Enfin et surtout, il avait été en 2004 l'âme de la renaissance, et depuis de l’organisation, du Prix Maurice Audin, un combat qui lui tenait à cœur.

    Nous garderons le souvenir d’un collègue entièrement dévoué aux étudiants, aux mathématiques et à leur popularisation.

    Benoît Perthame

    Année 2011 

    Un Algérien et un Français distingués

     par le prix Maurice-Audin

     de mathématiques à Paris

    Deux mathématiciens, l’Algérien Boumediene Abdellaoui et le Français Emmanuel Trélat ont été distingués par le prix Maurice-Audin de mathématiques 2010, lors d’une cérémonie organisée mardi à la mairie de Paris. Boumediene Abdellaoui, âgé de 35 ans, maître de conférences à l’université de Tlemcen et Emmanuel Trélat, 36 ans, professeur à l’Université d’Orléans qui œuvre en coopération avec l’université de Tizi-Ouzou, récompensés pour la qualité de leurs travaux, ont dans un exposé succinct présenté les grands axes de leurs recherches en mathématiques. Ils se sont déclarés « très honorés » par cette distinction qui porte le nom d’un homme « épris de liberté et de justice, qui a sacrifié sa vie pour que l’Algérie recouvre son indépendance ».

    Ce prix est décerné depuis 2004 par l’association éponyme établie en France pour honorer, une fois par an, deux mathématiciens des deux rives de la Méditerranée. L’objectif visé par l’association éponyme est de favoriser les échanges entre les universitaires des deux pays et d’offrir l’opportunité aux lauréats de présenter et faire connaître leurs travaux scientifiques. Il vise aussi à tenir en éveil la communauté mathématique sur l’affaire Audin et de créer un événement ayant un écho dans l’opinion publique.

    Sous sa nouvelle forme, le prix a été créé sous le patronage de la Société de mathématiques appliquées et industrielles (SMAI) et de la Société mathématique de France (SMF). Les fonds nécessaires au financement du prix sont couverts chaque année par une souscription privée ouverte auprès des membres de la communauté mathématique et de la société civile.

    Ce prix a été décerné pour la première fois en 1958. A l’époque, les lauréats étaient de jeunes mathématiciens qui deviendront célèbres, tels que : J.-L. Lions, J.-P. Kahane, A. Néron, et M. Lazard. En 1963, la guerre de libération ayant déjà pris fin, le prix disparaît. L’idée d’une relance est née en 2004 lors d’une réunion à la mairie de Paris, du comité de parrainage d’une rue Maurice-Audin dans la capitale française.

    Laurent Schwartz et Gérard Tronel, deux mathématiciens, lancèrent cette idée lors de la réunion qui fut favorablement accueillie. Pour Gérard Tronel, l’idée était de faire reparler de l’affaire Audin. Le 10 juin 1957, en pleine bataille d’Alger, Maurice Audin, jeune assistant de mathématiques à l’université d’Alger, fervent militant de la cause algérienne, est arraché à son foyer le 11 juin 1957, par les parachutistes du général Massu.

    Arrêté torturé, il meurt « accidentellement » sous la torture mais les autorités militaires de la France coloniale ont accrédité la thèse de l’évasion vers le 21 juin 1957. Plus tard c’est cette date qui a été retenu pour établir un acte de décès de Maurice Audin. Dès juillet 1957, alertés par Josette Audin, son épouse, des intellectuels français connus ont créé le comité Audin dont l’objectif était de rechercher la vérité sur la mort du mathématicien.

    Pour Gérard Tronel, l’animateur de l’Association Maurice-Audin, présent à la cérémonie, à laquelle ont pris part Mme Josette Audin et de nombreux historiens dont Henri Alleg et d’universitaires, cette initiative est une « action pour la mémoire et pour dire que nous ne lâcherons jamais sur cette exigence de vérité, que le temps est très long pour faire la lumière sur l’assassinat de Maurice Audin et que nous saisirons toutes les occasions pour le dire ». « Nous demandons que les autorités politiques, civils et militaires de notre pays reconnaissent que Maurice Audin est mort après avoir été torturé, que sa mort est un crime couvert par une raison d’Etat », a-t-il dit.

    « Au-delà des exécutants, les autorités civiles et militaires qui ont couvert ce forfait portent une lourde responsabilité qu’elles devraient reconnaître », a estimé M. Tronel, rappelant que la famille de Maurice Audin et l’association éponyme demandent la reconnaissance de son décès et de la responsabilité des différentes autorités impliquées. Pour poursuivre ses objectifs, l’association a besoin d’aide, a-t-il dit, et recherche des témoins présents lors de la bataille d’Alger, notamment au mois de juin 1957.

    Décembre 2012 : Affaire Audin

    Interpellation du président

     de la République

    François Hollande se rend à Alger le 19 décembre 2012 et sa voiture passera sans doute place Maurice-Audin.

    Et l’État, malgré les promesses n’a fait aucun geste concret pour que la vérité sur l’assassinat de Maurice Audin fasse l’objet de recherches officielles.

    Gérard Tronel, secrétaire de l’association Maurice Audin, a donné son aval, à une vidéo réalisée par Hubert Rouaud (hr@4acg.org) et qui interpelle le président de la République avant son voyage en Algérie, à partir des déclarations faites lors du colloque du 22 juin 2012 par un large panel d’orateurs : Raphaëlle Branche, Roland Rappaport, Henri Alleg, Mohammed Harbi, Jean-Luc Einaudi, Nathalie Funès, Gilles Manceron et Benjamin Stora, qui tous espéraient qu’une réponse satisfaisante soit apportée à l’exigence de vérité.

    Et Maurice AUDIN ?...

     Monsieur le Président Hollande !!!

    Car en 2017 malgré les promesses

    du président Macron et cette lettre-

    pétition que ce dernier a reçue

     nous attendons encore !!!

    C’est ce que demandent les signataires de cette lettre adressée le 26 mai 2017 au nouveau Président de la République : 

    Monsieur le Président, 

    Dans la nuit du 11 au 12 juin 1957, il y aura juste soixante ans dans quelques jours, Maurice Audin, jeune mathématicien membre du Parti communiste algérien, était arrêté à Alger par une unité de parachutistes. Il disparaîtra à jamais. Jusqu’en 2014, la version officielle, à laquelle personne ne portait crédit, était qu’il s’était évadé. 

    Le 18 juin 2014, M. François Hollande, votre prédécesseur, a publié un communiqué déclarant : « Mais les documents et les témoignages dont nous disposons aujourd’hui sont suffisamment nombreux et concordants pour infirmer la thèse de l’évasion qui avait été avancée à l’époque. M. Audin ne s’est pas évadé. Il est mort durant sa détention. » Depuis cette déclaration (évoquée la veille devant son épouse Josette Audin, reçue à l’Élysée), ni ces documents ni ces témoignages ainsi évoqués, pourtant concordants et nombreux selon ce communiqué, n’ont été révélés. 

    En mars 2014, un appel signé de 171 personnalités et publié par les quotidiens L’Humanité et Mediapart, que nous vous joignons, a demandé qu’il soit enfin dit la vérité sur cette affaire. 

    De nombreuses questions se posent. Un livre paru en janvier 2014 a fait état de confidences tardives du général Paul Aussaresses peu avant sa mort évoquant un ordre d’assassinat donné par le général Jacques Massu. Qu’en est-il ? Dans ce cas, y a-t-il eu des échanges à ce sujet avec le ministre résidant Robert Lacoste, le commandant en chef de l’armée en Algérie Raoul Salan et certains autres ministres ? 

    Nous pensons qu’à l’occasion de ce triste soixantième anniversaire, la vérité historique relative à cet assassinat doit enfin être connue. Le 5 mai, devant la rédaction de Mediapart, vous avez déclaré : « De fait, je prendrai des actes forts sur cette période de notre histoire… » Nous pensons donc qu’à cette occasion, en recevant Josette Audin ou en vous exprimant lors des commémorations qui auront lieu à cette occasion, vous pourriez ainsi concrétiser cet engagement. 

    Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président de la République, l’expression de notre haute considération.

     

    Dans la dernière semaine d’août 2017 deux mathématiciens français sont décédés à quelques jours d’intervalles


     

     


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    « François Nadiras vient de mourir »

    L'hommage de

    écrivain, maître de conférences et militant algérien né en 1950 à Mascara en Algérie. Professeur de sciences physiques à l'Université d'Oran durant de nombreuses années, il réside aujourd'hui en France 


    François Nadiras vient de mourir. Cette phrase tombe de ma plume et je n’y crois pas. Je le savais malade, d’une de ces maladies qu’on appelle dégénératives qui condamnent celles et ceux qu’elle affecte. Chez François, elle était visible. Il utilisait difficilement ses mains. Il était tellement frêle, tellement fragile que le fait qu’il se soit tenu si longtemps debout tenait du miracle. Comment aurait-on pu imaginer que cet homme ait été si productif, voire prolifique, durant des décennies ?

    Il habitait Toulon, ville qui constitue un haut lieu du rassemblement de ceux qu’on appelle les « algérianistes », une espèce tenace qui continue en France la guerre d’Algérie, en perturbant les réunions d’historiens ou en essayant de peser, avec un certain succès, sur le personnel politique. C’est naturellement l’un des viviers du Front National depuis sa création. François était l’antithèse de cette engeance. Il a mis la même ardeur à défendre l’indépendance de l’Algérie qu’à combattre le fascisme des inconsolables de l’Algérie française. Il l’a fait par des écrits. Mais il l’a fait aussi de façon beaucoup plus physique, en étant présent sur le parcours des nervis qui infestent les rues de Toulon, en brandissant des pancartes proclamant le rejet de l’extrême droite. Et aussi en fondant une section de la Ligue des droits de l’Homme dans cette ville quand, 1995, le FN avait remporté les élections municipales.

    Oui, lui, si frêle, si malade, avait la force de prouver par sa présence la permanence du refus de la haine et du racisme.

    Il a été aussi de celles et ceux qui ont pétitionné avec succès pour exiger l’abandon de la funeste idée de transférer les cendres de Bigeard aux Invalides. C’est vrai que l’homme aux « crevettes Bigeard » a eu quand même l’insigne honneur d’un enterrement à Fréjus, sous les auspices de l’ex président Giscard d’Estaing et de l’actuel ministre des Affaires Etrangères Jean-Yves Le Drian qui a commis en la circonstance un déplorable panégyrique…

    Il m’a apporté un soutien constant, extrêmement utile dans la popularisation de la pétition pour la restitution des crânes de nos martyrs, hélas toujours sous séquestre au Musée de l’Homme. Il avait fait sien ce combat. Nous échangions quotidiennement au téléphone. Il faisait montre d’une joie débordante quand le nombre de signataires passait les mille, les deux-milles…, jusqu’à ce qu’il tutoie les trente-mille !

    Il était professeur de mathématiques en classes préparatoires. Il en avait gardé la rigueur et le sens du détail. C’est grâce à lui que j’ai appris que les signataires de France étaient bien plus nombreux que ceux d’Algérie. Il s’interrogeait sur les raisons de ce paradoxe. Tout en le déplorant, je lui en ai proposé les explications qui me venaient à l’esprit. L’Algérie allait si mal. Les Algériens versaient pour beaucoup dans le désespoir. Il était difficile de les convaincre de s’inscrire dans une action collective. Dommage qu’ils n’aient pas connu  François. Voilà quelqu’un qui se savait marchant  vers sa fin dernière, conscient de la dégradation de son corps, mais qui s’inscrivait dans le combat éternel pour la dignité de l’humain. Il s’y inscrivait pour le « temps qui reste » et qui lui était conté.

    Sa plus belle œuvre est la construction de ce fameux site, http://ldh-toulon.net/, site à la double vocation : le combat contre l’extrême droite, contre le racisme et pour toutes les autres causes défendues par la LDH d’une part, et la constitution d’une bibliothèque de référence sur la colonisation d’autre part. Ce site contient environ cinq-mille articles, qui font le bonheur de nombreux lecteurs, en particulier des historiens. A quelques rares exceptions près, tous les articles sur la colonisation ont été mis en ligne par lui-même. C’était un travailleur hors pair. Il bénéficiait tout de même de l’aide efficace de son épouse Elizabeth qui partageait ses idées. En juillet dernier, il a fallu qu’il se rende à l’évidence et qu’il annonce à ses amis qu’il ne se sentait plus capable de faire vivre le site. Cela a été un crève-cœur inimaginable. Dans un premier temps, il a été convenu de scinder le site en deux parties : l’une qu’on pourrait qualifier de « locale », qui concernerait l’extrême droite toulonnaise et les autres questions de violation des droits et que François la section locale de la LDH continuerait d’administrer, l’autre, consacrée à la colonisation et au racisme et qui serait gérée par un comité de rédaction et une association d’historiens et de militants engagés sur cette question.
    La mort l’a saisi avant que ce partage définitif se fasse, mais il est en bonne voie et va être poursuivi…

    Je voudrais ajouter une dernière chose, pour les lecteurs d’El Watan et pour tous mes compatriotes. Ma fréquentation de François Nadiras m’a fait prendre conscience de la « perversité » du désespoir. François aurait pu s’y abandonner et finir sa vie en se lamentant sur la terrible maladie dont il savait qu’il finirait par en mourir. Il a fait exactement le contraire. Il a agi comme un homme valide qui aurait la vie devant lui. C’est qu’il ne considérait pas sa fin comme celle du monde. Il se sentait comptable de la souffrance humaine, où qu’elle s’exprime et il mettait ses dernières forces dans le combat pour la réduire. J’ai compris que l’engagement n’est pas une option mais un devoir. Ne pas s’engager, c’est se rendre complice…


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  • Communiqué de presse

    Benjamin Stora reconduit à la présidence

    du Conseil d’orientation du Palais

     de la Porte Dorée

    Histoire : Les clefs de compréhension d'un monde "complexe"

    Benjamin Stora reconduit à la présidence du Conseil d’orientation de l’Établissement public du Palais de la Porte Dorée.

    Par décret du Premier ministre en date du 9 août 2017 (JORF n°0186 du 10 août 2017), Benjamin STORA a été reconduit à la présidence du Conseil d’orientation de l’Établissement public du Palais de la Porte Dorée qui réunit le Musée national de l’histoire de l’immigration et l’Aquarium tropical. Il avait été nommé à ce poste le 1er août 2014.

    Mercedes ERRA, Fondatrice de BETC et présidente exécutive de Havas Worldwide, est présidente du Conseil d’administration de l’Établissement.
    L’Établissement est dirigé par Hélène ORAIN, directrice générale.
    Né le 2 décembre 1950 à Constantine en Algérie, Benjamin STORA est historien, professeur des universités et inspecteur général de l’Éducation nationale.

    Ses recherches portent sur l’histoire du Maghreb contemporain (19e et 20e siècles), les guerres de décolonisations, et l’histoire de l’immigration maghrébine en Europe. Il a enseigné à l’Université Paris-XIII, à l’INALCO (Langues Orientales, Paris), et dans les Universités de New York, Berlin et Rabat.

    Son dernier interview

     Histoire : Les clefs de compréhension d'un monde "complexe"

    Connaître le passé pour comprendre le présent, c'est cette curiosité qui éclaire la cheminement de notre invité Benjamin Stora, universitaire et historien. Il enseigne l’histoire du Maghreb contemporain mais aussi les guerres de décolonisations et l’histoire de l’immigration maghrébine en Europe. Il vient d’être reconduit comme Président du Conseil d’orientation du Musée national de l'Histoire de l'immigration. Éléments d'explications des raideurs de l'Europe et de ses renouveaux populistes ou bien encore les statues déboulonnées aux États-Unis d'Amérique, dans notre "64 minutes le monde en français" sur TV5 Monde.

     

     

     

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  • Communiqué LDH

    François Nadiras (1941-2017) : Aucun droit, aucune liberté n’échappaient à sa vigilance 

    François Nadiras vient de nous quitter et, avec cette disparition, la LDH perd un grand militant.

    Ce professeur de mathématiques qui a adhéré à la LDH en 1995, au moment où le FN s’est emparé de la mairie de Toulon, n’a cessé de vouloir former et informer, agir et réagir. Avec autant de modestie que de détermination, il s’est engagé tout au long de sa vie dans la défense des droits de l’Homme.

    Dès 2001, il a mis à profit ses connaissances en informatique pour créer le site Internet de la section de Toulon. Au prix d’un travail colossal et toujours rigoureux, il a fait de ce site un outil de référence incontournable pour les adhérents de la LDH mais bien au-delà. Bon nombre de chercheurs, de journalistes, d’historiens… ont salué la richesse de cette bibliothèque à clic ouvert.

    François Nadiras n’a cessé d’œuvrer pour rétablir la vérité historique sur la colonisation de l’Algérie, et cela dans un environnement géographique souvent hostile. Mais la mémoire et l’histoire n’ont pas été ses seuls terrains de lutte. On se souvient de son inlassable énergie pour dénoncer le fichage sous toutes ses formes, la montée des extrêmes ou les discriminations qui frappent les Roms.

    Très récemment encore, et en dépit de soucis de santé récurrents, il continuait de participer aux initiatives visant à défendre les droits des migrants. Aucun droit, aucune liberté n’échappaient à sa vigilance.

    Dans une période où de nombreux repères s’effritent, où la solidarité ne semble plus être de mise, François Nadiras n’a jamais désespéré de l’action associative. Tout en sachant faire preuve de bienveillance et rester à l’écoute de l’autre, il demeurait un homme de convictions, épris de justice et de vérité.

    Il a beaucoup apporté à la LDH et sa disparition nous laisse dans une peine immense. Nous ne l’oublierons pas et saurons faire en sorte que son travail continue, au-delà même de son indéfectible engagement.

    Paris, le 1er septembre 2017

    Sur la disparition de François Nadiras

    Témoignage de Jacques Cros

    Sur la disparition de François Nadiras

    Cessenon, 1er septembre 2017

    J’avais eu la triste nouvelle par mon ami Michel Dandelot. D’autres que moi, plus au fait que je ne le suis, évoqueront son action à la Ligue des Droits de l’Homme de Toulon et l’importance du site informatique qu’il gérait en conséquence. 

    Ses obsèques étaient prévues pour ce vendredi 1er septembre. Hommage lui sera rendu par ses amis de la LDH. Je vais simplement apporter ici quelques souvenirs de mes contacts que j’ai eus avec François Nadiras. 

    Le premier doit dater de 2010. Je lui avais envoyé par Internet le récit de mes souvenirs de la guerre d’Algérie à laquelle j’ai participé de mars 1960 à avril 1962. Il m’a appelé par téléphone et nous avons eu un premier échange. 

    J’avais ainsi appris qu’il avait un an de moins que moi et qu’il était agrégé de mathématiques. Il m’avait demandé ce qui me paraissait important dans le récit que j’avais joint. Difficile à préciser. Il avait choisi quelques extraits qu’il avait mis en ligne sur son site. 

    Les contacts que nous avons eus ensuite se sont faits le plus souvent par courriels. J’ai eu des informations sur sa santé à l’occasion d’une rencontre que j’avais eue en juillet 2011 avec Jean-François Gavoury, à qui je faisais visiter ainsi qu’à son épouse et sa fille le village de Cessenon d’où je suis originaire. 

    Il m’avait demandé des précisions sur un dessin d’Effel légendé « Après tout ce que nous avons fait pour eux ». On y voit un Arabe assis sous un palmier reniflant une fleur alors que des colons et des militaires manient qui une pelle, qui une brouette, qui un rouleau compresseur, pour construire une route, 

    Une autre fois il s’agissait de donner des renseignements sur une photo qui avait illustré une photo d’un article de mon blog. Elle m’avait été prêtée par un Biterrois, un cheminot, ancien d’Algérie lui aussi,  qui montre une file de femmes maghrébines apportant de l’eau dans des jarres qu’elles tenaient sur leurs têtes, pour ravitailler une unité installée sur un piton. 

    Une autre fois il m’avait demandé de le rappeler pour lui accorder le droit d’utiliser un « gif » sur lequel on voit les Rois Mages creusant un tunnel sous le mur de la honte pour accéder à la crèche où est né Jésus Christ. 

    Le 14 mars 2015, alors que je ramenais Jean-Philippe Aoudia et Jean-François Gavoury de la contre-manifestation que nous avions organisée pour protester contre le changement de nom de la rue du 19 mars 1962, décidé par le maire de Béziers, il avait appelé sur le portable de Jean-François, pour commenter ce qu’il avait entendu à la radio. Le slogan « Algérie française » lancé par Ménard n’avait pas été repris par ses sbires. 

    Le dernier échange que j’avais eu avec François Nadiras est récent. J’avais répondu à un article dans lequel il réclamait que les têtes des Résistants algériens conservées au Musée de l’Homme soient restituées à l’Algérie comme les restes d’un soldat français inhumé à Oran avaient été rapatriés à Argelès-sur-Mer. J’avais fait part de mon sentiment qui est que l’essentiel consiste à dénoncer les souffrances qu’avaient générées le colonialisme et la guerre d’Algérie entreprise pour le maintenir. J’avais reçu de lui un courriel  laconique faisant part de son approbation. 

    Nos condoléances à tous ceux que ce deuil afflige.

    Jacques CROS

    http://cessenon.centerblog.net/6572209-sur-la-disparition-d… 

    François Nadiras, militant de la LDH

     de Toulon, est décédé

    Vendredi, 1er Septembre, 2017

    L'Humanité

    François Nadiras, militant de la Ligue des droits de l’homme (LDH) de Toulon, est décédé à l’âge de 76 ans. Militant discret, il a fait montre d’un grand courage dans un terrain parfois hostile en s’engageant dans un travail de vigie citoyenne en cette terre de forte influence de l’extrême droite. Responsable du site Internet de la LDH-Toulon, il a nourri ses pages Web sans se ménager malgré la maladie incurable dont il était atteint, en faisant par sa rigueur éditoriale un site de référence sur l’histoire coloniale et un carrefour très informé de vigilance contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie. Le professeur de mathématique agrégé a mené de nombreux combats pour la reconnaissance des victimes de l’OAS, initiant ainsi la création de l’association Anpromevo, et pour la dénonciation de ses sbires de l’Algérie française. L’Humanité présente ses condoléances à sa famille et à ses proches. 

     

    Un homme magnifique nous a quitté

    François Nadiras 

    Militant depuis toujours pour les droits humains et contre toutes les formes d’exclusion, François nous a rejoint, comme ami, dès la création de l’ANPNPA. Homme de culture, homme engagé, de conviction, sa modestie ne trompait personne quant à la rigueur, la pertinence et la clairvoyance de ce qu’il nous a apporté.

    Le site internet sur l’histoire coloniale et post-coloniale (de l’Algérie en premier ressort), site qu’il a crée au sein de la section de la Ligue des Droits de l‘Homme de Toulon et qu’il a alimenté jusqu’au bout, est une bibliothèque de référence, tant pour les historiens que pour les militants anticolonialistes. Hommage à ce travail, un collectif d’historiens s’est mis en place pour poursuivre son œuvre.

    Deux articles sur F. Nadiras : un interview au journal La Marseillaise,

    http://m.lamarseillaise.fr/var/societe/58868-francois-nadiras-on-ne-pouvait-pas-rester-les-bras-ballants-face-au-front-national

    Un billet de Anne Guerin dans Mediapart,

    https://blogs.mediapart.fr/anne-guerin-castell/blog/290817/francois-nadiras-un-site-une-oeuvre 

    Association Nationale

    des Pieds Noirs Progressistes

    et leur Amis

    Les hommages à François Nadiras

    François Nadiras, militant de la LDH

    nous a quitté

    Nous apprenons avec tristesse et émotion la mort de François Nadiras, militant de la Ligue des droits de l’homme, animateur du site internet de la LDH-Toulon.

    François nous a aidé dans le combat pour la reconnaissance de la responsabilité de la France dans le drame vécu par les anciens harkis et leurs famille. Pour cela et pour son soutien militant, nous lui en sommes très reconnaissant.

    L’association harkis et droits de l’Homme présente ses sincères condoléances à Elisabeth, son épouse, et à toute sa famille.

     


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